Jurisprudence : Cass. civ. 3, 24-04-2013, n° 12-14.579, FS-P+B, Rejet

Cass. civ. 3, 24-04-2013, n° 12-14.579, FS-P+B, Rejet

A6963KCU

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2013:C300500

Identifiant Legifrance : JURITEXT000027367114

Référence

Cass. civ. 3, 24-04-2013, n° 12-14.579, FS-P+B, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8200961-cass-civ-3-24042013-n-1214579-fsp-b-rejet
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Abstract

Le temps qui passe ne suffit pas toujours pour entériner certaines situations de fait et conditions de droit. La continuation du bail au profit de l'ayant droit du preneur décédé ne peut intervenir que si celui-ci présente une situation régulière au regard du contrôle des structures des exploitations agricoles.



CIV.3 LM
COUR DE CASSATION
Audience publique du 24 avril 2013
Rejet
M. TERRIER, président
Arrêt no 500 FS-P+B
Pourvoi no V 12-14.579
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par
1o/ Mme Marie-Josée Z veuve Z, domiciliée 4 rue du
Parnes,
2o/ M. Benoît Z, domicilié Saint-Gervais,
contre l'arrêt rendu le 29 novembre 2011 par la cour d'appel d'Amiens (chambre économique), dans le litige les opposant
1o/ à Mme Denise Y,
2o/ à Mme Solange Y,
domiciliées Puteaux,
défenderesses à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 19 mars 2013, où étaient présents M. Terrier, président, M. Crevel, conseiller référendaire rapporteur, Mmes Fossaert, Feydeau, MM. Echappé, Parneix, Roche, Bureau, conseillers, Mmes Pic, Meano, conseillers référendaires, M. Laurent-Atthalin, avocat général, Mme Bordeaux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Crevel, conseiller référendaire, les observations de Me Georges, avocat des consorts ..., ... ... SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, avocat des consorts Y, l'avis de M. Laurent-Atthalin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 29 novembre 2011), que Mmes ... ... et Y Y (les consorts Y) ont donné à bail à ferme à M. Michel Z et Mme Marie-Josée X, son épouse, une parcelle de terre agricole ; que les consorts Y ont fait délivrer congé aux preneurs au motif qu'ils avaient tous deux atteint l'âge de la retraite retenu en matière d'assurance vieillesse des exploitants agricoles ; que les époux ... ont contesté ce congé et sollicité l'autorisation de céder leur bail à leur fils M. Benoît Z ; que postérieurement au décès de M. Michel Z au cours de cette instance, M. Benoît Z a demandé le bénéfice de la cession de bail pour cause de mort ;

Attendu que Mme X et M. Benoît Z font grief à l'arrêt de rejeter la demande de cession pour cause de mort et de déclarer valide le congé, alors, selon le moyen
1o/ qu'il résulte des articles 1742 du code civil et L. 411-34 du code rural et de la pêche maritime qu'en l'absence de résiliation du bail rural de la part du bailleur dans le délai de six mois à compter du décès du preneur, le droit au bail passe, sans restriction ni condition, aux héritiers de ce dernier, l'absence de résiliation poursuivie par le bailleur dans les six mois du décès du preneur étant sanctionnée par une forclusion entraînant pour le bailleur la déchéance du droit non exercé en temps utile ; qu'en l'espèce, les consorts Z avaient en appel fait valoir qu'à la suite du décès de Michel Z, cotitulaire du bail avec son épouse, son fils Benoît, participant à l'exploitation, était fondé à invoquer les dispositions de l'article L. 411-34 du code rural comme lui ouvrant, en tant qu'héritier, un droit personnel à la continuation du bail à défaut par les bailleresses de s'être opposées à l'acquisition de ce droit dans le délai légalement imparti de six mois à compter du décès ; que la cour d'appel, tout en relevant qu'à son décès, le père de M. Benoît Z était demeuré titulaire du bail et que ses droits sur celui-ci ont été, lors de son décès, transmis à son fils en vertu de l'article L. 411-34 du code rural, a, pour dénier à celui-ci le bénéfice de la poursuite du bail, énoncé que la continuation du bail au profit de l'ayant droit ne peut effectivement intervenir que si celui-ci présente une situation régulière au regard de la réglementation du contrôle des structures des exploitations agricoles, et qu'en l'occurrence, M. Benoît Z ne démontrait pas que l'EARL dont il est associé-exploitant était titulaire d'une autorisation administrative d'exploiter la parcelle objet du bail, et il n'était pas lui-même personnellement titulaire d'une telle autorisation, qui lui était nécessaire ; qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions d'appel des consorts Z faisant valoir que le droit de M. Benoît Z à la continuation du bail s'était trouvé acquis à son profit par le seul effet de l'absence de toute action des bailleresses pour s'y opposer dans les six mois du décès du preneur, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2o/ qu'à supposer qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel soit regardée comme ayant implicitement mais nécessairement écarté le moyen sus-évoqué des conclusions d'appel des consorts Z en considérant que la forclusion atteignant le droit du bailleur de demander la résiliation du bail à défaut d'exercice de ce droit dans le délai de six mois à compter du décès du titulaire du bail ne suffisait pas à faire passer à l'héritier le droit au bail parce que cette transmission était en outre subordonnée à une condition tenant à la soumission de cet héritier aux exigences du contrôle des structures, la cour d'appel a alors violé les dispositions des articles 1742 du code civil et L. 411-34 du code rural et de la pêche maritime, dont il résulte que la seule condition mise par le législateur à la dévolution aux héritiers du preneur décédé du droit au bail dont celui-ci était titulaire est l'absence de résiliation du bail demandée par le bailleur dans les six mois du décès du preneur ;

Mais attendu qu'ayant exactement retenu, l'absence d'exercice par le bailleur de son droit légal de résiliation étant à cet égard indifférente, que la continuation du bail au profit de l'ayant droit du preneur décédé ne pouvait intervenir que si celui-ci présentait une situation régulière au regard du contrôle des structures des exploitations agricoles et relevé que M. Benoît Z ne justifiait pas de l'autorisation d'exploiter requise, la cour d'appel a pu, répondant aux conclusions prétendument délaissées, débouter M. Benoît Z de sa demande de continuation du bail et déclarer le congé valable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts ... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les consorts ... à payer aux consorts Y la somme de 2 500 euros ; rejette la demande des consorts ... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre avril deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Georges, avocat aux Conseils, pour les consorts ....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. Benoît Z de sa demande de continuation du bail consenti à son père, Michel Z, et d'avoir, en conséquence, validé le congé délivré par Mlles ... et Solange Y, le 25 juin 2008, aux époux Z Z, et ordonné, à défaut de départ volontaire, l'expulsion de Mme ZX veuve ZX et de tous occupants de son chef,
AUX MOTIFS QUE, par acte notarié du 20 mars 1993, Mlles ... et Solange Y ont donné à bail à ferme pour une durée de 18 années à compter rétroactivement du 11 novembre 1992 à M. Michel Z et son épouse, Mme Marie-Josée X, co-preneurs solidaires, une parcelle de terre d'une contenance de 14 ha 7 a 30 ca ; que par acte du 25 juin 2008, les bailleresses ont fait délivrer congé aux époux ... pour le 11 novembre 2010, au motif qu'ils avaient tous deux atteint l'âge de la retraite retenu en matière d'assurance vieillesse des exploitants agricoles ; que, le 28 août 2008, les époux ... ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux d'une contestation du congé et sollicité l'autorisation de céder leur bail à leur fils, M. Benoît Z ; que M. Michel Z étant décédé en cours de procédure, le 15 juillet 2009, son fils, M. Benoît Z, est intervenu à l'instance ; qu'outre le maintien par Mme ZX veuve ZX de sa demande d'autorisation de cession de bail au profit de son fils, celui-ci, invoquant les dispositions de l'article L. 411-34 du code rural, a demandé au tribunal de dire que, faute par les bailleresses de lui avoir fait délivrer congé dans les six mois du décès de son père, le bail se renouvellerait à son profit (arrêt attaqué, p. 4) ; que, sur la demande de continuation du bail au profit de M. Benoît Z, l'article L. 411-34 du code rural dispose qu'au décès du preneur, le bail continue au profit de son conjoint, du partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité, de ses ascendants et de ses descendants participant à l'exploitation ou y ayant participé effectivement au cours de cinq années antérieures au décès ; qu'en cas de décès de l'un de co-preneurs, l'attribution prévue par ce texte ne peut porter que sur les droits dont le défunt était titulaire ; que M. Michel Z, co-preneur solidaire au bail du 20 mars 1993, n'ayant pas, lors de son départ en retraite le 13 janvier 2005, usé de la faculté que lui offraient les dispositions de l'article L. 411-65, alinéa 3, du code rural (figurant depuis l'abrogation par l'ordonnance no 2006-870 du 13 juillet 2006 à l'article
L. 411-33) de procéder à la résiliation du bail, est demeuré titulaire de ce bail et ses droits sur celui-ci ont été, lors de son décès survenu le 15 juillet 2009, transmis dans les conditions de l'article L. 411-34 du code rural - sa veuve ne revendiquant pas pour elle-même les dispositions de ce texte - à
M. Benoît Z, son fils, participant à l'exploitation depuis son intégration le 25 janvier 2007, en qualité d'associé-exploitant, au sein de l'EARL mettant en valeur, dans le cadre d'une mise à disposition, la parcelle objet du bail litigieux ; que, toutefois, la continuation du bail au profit de l'ayant droit du preneur décédé ne peut effectivement intervenir que si celui-ci présente une situation régulière au regard de la réglementation du contrôle des structures des exploitations agricoles ; qu'en l'occurrence, il n'est pas démontré que l'EARL mettant en valeur la parcelle objet du bail est titulaire d'une autorisation administrative d'exploiter cette parcelle, dont l'existence seule dispenserait M. Benoît Z de justifier d'une autorisation administrative d'exploiter personnelle pour la parcelle concernée ; qu'il apparaît que ce dernier n'est pas titulaire d'une telle autorisation bien que sa situation la lui rende nécessaire en application de l'article L. 331-2 I 3o, dernier alinéa, du code rural ; qu'ainsi, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. Benoît Z de sa demande de continuation à son profit du bail dont son père était titulaire ; qu'en conséquence du rejet de la demande en continuation du bail au profit de M. Benoît Z, la validation du congé délivré le 25 juin 2008 et l'expulsion de Mme ZX veuve ZX, ainsi que celle de tous occupants de son chef, sont justifiées (arrêt attaqué, pp. 9 et 10) ;
1) ALORS QU'il résulte des articles 1742 du code civil et L. 411-34 du code rural et de la pêche maritime qu'en l'absence de résiliation du bail rural de la part du bailleur dans le délai de six mois à compter du décès du preneur, le droit au bail passe, sans restriction ni condition, aux héritiers de ce dernier, l'absence de résiliation poursuivie par le bailleur dans les six mois du décès du preneur étant sanctionnée par une forclusion entraînant pour le bailleur la déchéance du droit non exercé en temps utile ; qu'en l'espèce, les consorts Z avaient en appel fait valoir qu'à la suite du décès de Michel Z, co-titulaire du bail avec son épouse, son fils Benoît, participant à l'exploitation, était fondé à invoquer les dispositions de l'article L. 411-34 du code rural comme lui ouvrant, en tant qu'héritier, un droit personnel à la continuation du bail à défaut par les bailleresses de s'être opposées à l'acquisition de ce droit dans le délai légalement imparti de six mois à compter du décès (cf. conclusions d'appel des consorts Z, pp. 5, 6, 7 et 8) ; que la cour d'appel, tout en relevant qu'à son décès, le père de M. Benoît Z était demeuré titulaire du bail et que ses droits sur celui-ci ont été lors de son décès transmis à son fils en vertu de l'article L. 411-34 du code rural, a, pour dénier à celui-ci le bénéfice de la poursuite du bail, énoncé que la continuation du bail au profit de l'ayant droit ne peut effectivement intervenir que si celui-ci présente une situation régulière au regard de la réglementation du contrôle des structures des exploitations agricoles, et qu'en l'occurrence, M. Benoît Z ne démontrait pas que l'EARL dont il est associé-exploitant était titulaire d'une autorisation administrative d'exploiter la parcelle objet du bail, et il n'était pas lui-même personnellement titulaire d'une telle autorisation, qui lui était nécessaire ; qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions d'appel des consorts Z faisant valoir que le droit de M. Benoît Z à la continuation du bail s'était trouvé acquis à son profit par le seul effet de l'absence de toute action des bailleresses pour s'y opposer dans les six mois du décès du preneur, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2) ALORS QU'à supposer qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel soit regardée comme ayant implicitement mais nécessairement écarté le moyen sus-évoqué des conclusions d'appel des consorts Z en considérant que la forclusion atteignant le droit du bailleur de demander la résiliation du bail à défaut d'exercice de ce droit dans le délai de six mois à compter du décès du titulaire du bail ne suffisait pas à faire passer à l'héritier le droit au bail parce que cette transmission était en outre subordonnée à une condition tenant à la soumission de cet héritier aux exigences du contrôle des structures, la cour d'appel a alors violé les dispositions des articles 1742 du code civil et L. 411-34 du code rural et de la pêche maritime, dont il résulte que la seule condition mise par le législateur à la dévolution aux héritiers du preneur décédé du droit au bail dont celui-ci était titulaire est l'absence de résiliation du bail demandée par le bailleur dans les six mois du décès du preneur.

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