Références
Cour administrative d'appel de ParisN° 11PA00169Inédit au recueil Lebon
6ème Chambrelecture du lundi 25 mars 2013REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Texte intégral
Vu la requête, enregistrée le 11 janvier 2011, et le mémoire complémentaire, enregistré le 23 février 2011, présentés pour Mme E...A..., demeurant..., par MeD... ; s'agissant de l'affaire en cause, Mme A...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0815337 du 30 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 mai 2008 par laquelle le Président du Sénat lui a indiqué la déprogrammation d'une exposition prévue à l'automne 2008 et de ce qu'elle n'était chargée de la préparation d'aucune autre exposition ;
2°) d'annuler cette décision ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance n°58-1100 du 17 novembre 1958, modifiée, relative au fonctionnement des assemblées parlementaires ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 janvier 2013 :
- le rapport de Mme Sirinelli, rapporteur,
- les conclusions de M. Dewailly, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant le Sénat ;
1. Considérant que, par une convention d'autorisation d'occupation temporaire du musée du Luxembourg, signée le 1er mars 2005, le Sénat a autorisé le société SVO Art, devenue courant 2005 société SVO Musée du Luxembourg, à occuper pour la période du 1er août 2005 au 31 décembre 2008, le Musée du Luxembourg ; que cette convention faisait suite à un premier contrat de même type, conclu entre les mêmes parties pour la période du 7 mars 2002 au
31 juillet 2005 ; qu'aux termes de l'article 3.1 de l'autorisation d'occupation temporaire conclue en 2002 : " (...) / Pour l'élaboration de sa programmation et pour la gestion du musée, SVO Art pourra nommer un administrateur général ayant autorité générale sur le musée et ses personnels et pleine responsabilité juridique et, après accord du président du Sénat, des directeurs de projet responsables de proposer la programmation et chargés de la préparation scientifique des expositions. " ; qu'aux termes de l'article 6.6 de la convention conclue en 2005 : " Pour l'élaboration de sa programmation et pour la gestion du musée, l'occupant peut nommer un administrateur général ayant autorité sur le musée et ses personnels et pleine responsabilité juridique et, après accord du président du Sénat, des directeurs de projet chargés de la préparation scientifique des expositions . " ; qu'en outre, aux termes de ces conventions, la programmation des expositions était soumise à la présidence du Sénat ;
2. Considérant que, dans ce cadre, par lettre du 20 juillet 2006, le directeur de cabinet du président du Sénat a confirmé à M.B..., directeur de la société SVO Musée du Luxembourg et administrateur général du musée, l'accord de la présidence du Sénat à la reconduction de Mme A...en tant que directeur des projets Renaissance jusqu'au terme de la convention conclue en 2005 ; que, cependant, en conséquence d'un désaccord persistant entre
M. B...et MmeA..., le président du Sénat a, par lettre du 13 mai 2008, indiqué à cette dernière que l'exposition " Trésors des Médicis ", programmée à l'automne 2008, n'aurait pas lieu et qu'elle n'était en charge d'aucun autre projet d'exposition ; que Mme A...relève régulièrement appel du jugement du 30 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision dont serait constitutive la lettre du 13 mai 2008 ; que, par la voie du recours incident, le Sénat demande également l'annulation de ce jugement, en ce qu'il a retenu la compétence de la juridiction administrative pour traiter du litige en cause ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de l'ordonnance n°58-1100 du 17 novembre 1958 susvisée : " L'Etat est responsable des dommages de toute nature causés par les services des assemblées parlementaires. / Les actions en responsabilité sont portées devant les juridictions compétentes pour en connaître. / Les agents titulaires des services des assemblées parlementaires sont des fonctionnaires de l'Etat dont le statut et le régime de retraite sont déterminés par le bureau de l'assemblée intéressée, après avis des organisations syndicales représentatives du personnel. Ils sont recrutés par concours selon des modalités déterminées par les organes compétents des assemblées. La juridiction administrative est appelée à connaître de tous litiges d'ordre individuel concernant ces agents, et se prononce au regard des principes généraux du droit et des garanties fondamentales reconnues à l'ensemble des fonctionnaires civils et militaires de l'Etat visées à l'article 34 de la Constitution. La juridiction administrative est également compétente pour se prononcer sur les litiges individuels en matière de marchés publics./ Dans les instances ci-dessus visées, qui sont les seules susceptibles d'être engagées contre une assemblée parlementaire, l'Etat est représenté par le président de l'assemblée intéressée, qui peut déléguer cette compétence aux questeurs. (...) " ;
4. Considérant que ces dispositions, qui ne prévoient pas de voie d'action directe contre les actes ne relevant pas des contentieux qui y sont expressément mentionnés, n'ont toutefois pas pour effet d'exclure toute compétence du juge administratif s'agissant de ces actes ; qu'en l'espèce, l'acte contesté présentant un caractère dissociable des fonctions parlementaires législatives et de contrôle du gouvernement, et l'indépendance du pouvoir législatif n'étant ainsi pas en cause, sa contestation relève de la compétence du juge administratif ; qu'il en résulte que le Sénat n'est pas fondé à demander, par la voie de l'appel incident, l'annulation du jugement en cause en tant qu'il a retenu la compétence de la juridiction administrative pour traiter du litige en cause ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation et sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité :
5. Considérant, en premier lieu, que Mme A...soutient que, si la décision du
13 mai 2008 devait s'analyser comme une sanction, la Cour devrait constater qu'aucune des conditions relatives à l'édiction d'un tel acte n'a été respectée ; que, toutefois, et à supposer que cette allégation doive être regardée comme un moyen soulevé à l'encontre de la décision dont serait constitutive la lettre du 13 mai 2008, il est constant que celle-ci n'est aucunement intervenue dans l'intention de sanctionner une faute commise par MmeA... ; qu'elle ne peut, dans ces conditions, être regardée comme constituant une sanction ; qu'en conséquence, ce moyen doit être écarté comme étant inopérant ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que si Mme A...soutient que le Sénat aurait pu décider de mettre fin, non à sa mission propre, mais à celle de la société SVO Musée du Luxembourg, structure interchangeable, une telle critique de l'opportunité de la décision dont serait constitutive la lettre du 13 mai 2008 est sans incidence sur sa légalité ; que ce moyen doit donc également être écarté comme inopérant ;
7. Considérant, en dernier lieu, qu'à supposer que Mme A...entende faire valoir dans la présente affaire les moyens formulés au soutien de la demande d'indemnisation qu'elle a présentée dans les écritures communes à cette affaire et aux affaires n°11PA00170 et 11PA00171, ces moyens, analysés dans un arrêt de la Cour de céans de ce jour, sont sans incidence sur la solution du présent litige ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à Mme A...la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en outre, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme A...la somme demandée par l'Etat en application de ces dispositions ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le Sénat par la voie de l'appel incident sont rejetées.
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N°11PA00169