CIV. 2 SÉCURITÉ SOCIALE CF
COUR DE CASSATION
Audience publique du 14 mars 2013
Cassation partielle sans
renvoi
Mme FLISE, président
Arrêt no 367 F-P+B
Pourvoi no T 12-13.611
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par
1o/ la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est Paris,
2o/ M. Pascal Y, domicilié Besançon, agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société EMT 25, société par actions simplifiée,
contre l'arrêt rendu le 2 décembre 2011 par la cour d'appel de Besançon (chambre sociale), dans le litige les opposant
1o/ à Mme Arlette W,
2o/ à Mme Caroline W,
toutes deux domiciliées Grandfontaine,
3o/ à Mme Lucie W, domiciliée Grandfontaine,
toutes trois prises tant en leur nom personnel qu'en qualité d'ayants droit d'André W,
4o/ à la caisse primaire d'assurance maladie du Doubs, dont le siège est Besançon cedex,
défenderesses à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 février 2013, où étaient présents Mme Flise, président, M. Cadiot, conseiller rapporteur, M. Héderer, conseiller, Mme Gazel, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Cadiot, conseiller, les observations de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société Allianz IARD et de M. Y, ès qualités, l'avis de Mme de Beaupuis, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à la société Allianz IARD et à M. ..., ès qualités, du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mmes ..., ... et W W, toutes trois prises tant en leur nom personnel qu'en qualité d'ayants droit d'André W ;
Sur le moyen unique
Vu les articles L. 622-24, L. 622-26 du code de commerce, L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'André W a été victime d'un accident mortel du travail le 14 septembre 2006 alors qu'il était salarié de la société EMT 25 ; que cette société, assurée par la société Allianz IARD, a été placée en liquidation judiciaire le 5 mai 2008, M. ... étant désigné en qualité de mandataire-liquidateur ; que les ayants droit d'André W ont saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande d'indemnisation complémentaire à raison de la faute inexcusable de l'employeur ; que la cour d'appel a accueilli cette demande ;
Attendu que, pour fixer à une certaine somme la créance de la caisse primaire d'assurance maladie du Doubs (la caisse) au passif de la société EMT 25, l'arrêt énonce qu'il résulte des dispositions de l'article L. 622-24, alinéa 6 du code de commerce, que, pour les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture, les délais de déclaration courent à compter de la date d'exigibilité de celles-ci, laquelle, s'agissant du recours de la caisse contre l'employeur, ne peut être antérieure à la date à laquelle les réparations complémentaires dues à la victime ou à ses ayants droit ont été définitivement fixées ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la créance invoquée, ayant pour origine la faute de l'employeur et non la demande de fixation d'indemnités complémentaires, était antérieure au jugement d'ouverture et que la caisse, dès lors soumise à la procédure de déclaration et de vérification des créances, n'établissait pas avoir procédé à une déclaration ni bénéficier d'un relevé de forclusion, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé le montant de la créance de la caisse primaire d'assurance maladie du Doubs au passif de la société EMT 25, l'arrêt rendu le 2 décembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare la caisse primaire d'assurance maladie du Doubs irrecevable en sa demande de fixation de créance au passif de la société EMT 25 ;
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie du Doubs aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Allianz IARD et M. Y
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les demandeurs au pourvoi de leur demande tendant à ce que l'action en remboursement exercée par la CPAM du DOUBS soit déclarée irrecevable et d'avoir fixé la créance de la CPAM du DOUBS à l'égard de la liquidation judiciaire de la société EMT 25 aux arrérages échus et capital représentatif de la majoration de rente (159.692,24 euros) et aux indemnités versées au titre du préjudice moral des ayants droit de la victime (80.000 euros) ;
AUX MOTIFS QUE " Sur le recours de la caisse primaire d'assurance maladie. Ainsi qu'il a été évoqué plus haut, le tribunal des affaires de sécurité sociale s'est déclaré à juste titre incompétent pour statuer sur le recours de celle-ci à l'encontre de la société Allianz. En l'état du litige et des conclusions des parties, la cour n'estime pas opportun d'user de la faculté d'évocation qui lui est ouverte par l'article 568 du code de procédure civile, en vue de statuer sur ce point. S'agissant du recours de la caisse à l'encontre de la société EMT 25, la liquidation judiciaire de celle-ci fait obstacle au prononcé d'une condamnation au remboursement de la majoration de rente et des indemnités dues aux ayants-droit de Monsieur André W dont il incombe à la caisse de faire l'avance. La cour ne peut que fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire, sans que la société EMT 25 ne puisse se prévaloir de l'absence de déclaration de sa créance par ladite caisse pour conclure à l'irrecevabilité de sa demande. Il résulte en effet des dispositions de l'article L 622-24 alinéa 6 du code de commerce, que pour les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture, les délais de déclaration courent à compter de la date d'exigibilité de celles-ci, laquelle s'agissant du recours de la caisse contre l'employeur ne peut être antérieure à la date à laquelle les réparations complémentaires dues à la victime ou à ses ayants-droit ont été définitivement fixées. " ;
ALORS QU'il résulte des articles L. 622-24 et L. 622-26 du Code de commerce qu'à partir de la publication, tous les créanciers dont la créance trouve son origine antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, doivent, à peine de forclusion, adresser la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans des délais fixés par décret en Conseil d'Etat ; que la créance de la CPAM relative remboursement des conséquences financières d'un accident du travail reconnu imputable à une faute inexcusable de l'employeur trouve son origine dans la faute de l'employeur et non dans le jugement déterminant les droits à réparation de la victime ; qu'au cas présent, il résulte des constatations de l'arrêt que l'accident du travail pris en charge par la CPAM du DOUBS est survenu 14 septembre 2006 et que les consorts W ont intenté une action en reconnaissance de faute inexcusable, après avoir saisi la CPAM en vue d'une conciliation, le 13 mars 2008 (Arrêt p. 2) ; qu'il résulte de ces constatations que la créance en remboursement de la CPAM était antérieure à l'ouverture de la liquidation judiciaire prononcée par jugement du Tribunal de commerce de Besançon du 5 mai 2008 (Arrêt p. 2 dernier alinéa) ; qu'en considérant néanmoins que la CPAM n'était pas tenue au motif que la créance de la CPAM de DOUBS étaient née après le jugement d'ouverture et ne pouvaient être antérieure à la date à laquelle les réparations complémentaires dues à la victime ou à ses ayants droit ont été définitivement fixées, la Cour d'appel a violé les articles L. 622-24 et L. 622-26 du Code de commerce, ensemble les articles L. 452-2 et L. 452-3 du Code de la sécurité sociale.