CIV. 1
COUR DE CASSATION
CF
______________________
QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________
Audience publique du 16 décembre 2021
RENVOI
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 809 FS-B
Pourvoi n° K 21-17.228
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 16 DÉCEMBRE 2021
Par mémoire spécial présenté le 27 septembre 2021,
1°/ M. [C] [W] [S], se disant [P] [Z], domicilié chez M. [H] [K], [Adresse 4],
2°/ l'Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE), dont le siège est [Adresse 2],
3°/ le Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI), dont le siège est [Adresse 3],
ont formulé une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi n° K 21-17.228 qu'ils ont formé contre l'ordonnance rendue le 27 mai 2021 par le premier président de la cour d'appel de Paris (service des étrangers, pôle 1, chambre 11), dans une instance les opposant :
1°/ au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié [… …],
2°/ au préfet de la Seine-Saint-Denis, domicilié [… …],
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Dard, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [S], de l'Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers et du Groupe d'information et de soutien des immigrés, et l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 14 décembre 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Dard, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, M. Hascher, Mme Antoine, M. Vigneau, Mmes Poinseaux, Guihal, M. Fulchiron, Mme Beauvois, conseillers, Mme Gargoullaud, M. Duval, Mme Azar, M. Buat-Ménard, Mme Feydeau-Thieffry, conseillers référendaires, Mme Marilly, avocat général référendaire, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'
article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Le 21 mars 2021, à 8 heures 02, X se disant [W] [S] ou [P] [Z], de nationalité indéterminée, s'est vu notifier un refus d'entrée sur le territoire national à la suite de son contrôle à l'aéroport de [6], à la descente d'un vol en provenance de Bamako (Mali). Immédiatement placé en zone d'attente, il a formé une demande d'entrée en France au titre du droit d'asile, laquelle a été rejetée le 22 mars.
2. Le 24 mars 2021, l'administration a saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande de prolongation de cette mesure pour une durée de huit jours, sur le fondement de l'article L. 222-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA).
Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité
3. A l'occasion du pourvoi qu'ils ont formé contre l'ordonnance rendue le 27 mars 2021 par le premier président de la cour d'appel de Paris, l'intéressé ainsi que l'Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers et le Groupe d'information et de soutien des immigrés ont, par mémoire distinct et motivé du 27 septembre 2021, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :
« En édictant les dispositions combinées des
articles L. 221-1 et L. 222-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile🏛 – dont il résulte que, avant un délai de quatre jours, l'étranger maintenu en zone d'attente est privé de toute possibilité de saisir le juge judiciaire en vue de mettre fin à sa privation de liberté et que, dans une telle situation, le juge judiciaire ne peut pas davantage intervenir de sa propre initiative, le législateur a-t-il porté atteinte à la liberté individuelle et au droit à un recours effectif, garantis respectivement par les
articles 16 de la Déclaration des droits et 66 de la Constitution, tels qu'éclairés par le droit constitutionnel d'asile issu de l'alinéa 4 du préambule de la Constitution de 1946 »
Examen de la question prioritaire de constitutionnalité
4. Les dispositions contestées, dans leur version antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020🏛, sont applicables au litige.
5. Elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
6. La question posée présente un caractère sérieux, en ce que le délai de quatre jours à compter duquel le placement d'un étranger en zone d'attente ne peut être maintenu sans autorisation du juge judiciaire, pourrait être considéré comme excessif.
7. En conséquence, il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt et un.