N° U 21-83.729 F-D
N° 01591
7 DÉCEMBRE 2021
MAS2
RENVOI
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 7 DÉCEMBRE 2021
M. [N] [E] a présenté, par mémoire spécial reçu le 14 octobre 2021, une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt n°4 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 7e section, en date du 27 mai 2021, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de meurtre et tentative de meurtre, destruction, recel, en bande organisée, et association de malfaiteurs, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure.
Sur le rapport de Mme Ménotti, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [N] [E], et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 décembre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Ménotti, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'
article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« L'
article L. 34-1, II et III, du code des postes et des communications électroniques🏛, dans sa version en vigueur du 20 décembre 2013 au 31 juillet 2021, qui autorise pour les besoins de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions pénales, la conservation généralisée et indifférenciée pendant un an des données à caractère personnel prévues à l'
article R.10-13 du même code, sans réserver une telle conservation aux infractions les plus graves ni la soumettre à l'autorisation et au contrôle d'une autorité ou juridiction indépendante, contrevient-il au droit au respect de la vie privée garanti par l'
article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et à l'article 34 de la Constitution ? ».
2. La disposition législative contestée est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
3. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.
4. La question posée présente un caractère sérieux. En effet, l'article L. 34-1, III, du code des postes et des télécommunications électroniques, dans sa version en vigueur du 20 décembre 2013 au 31 juillet 2021, permet de différer, pour une durée maximale d'un an, les opérations tendant à l'effacement ou à l'anonymisation de certaines catégories de données de connexion, pour les besoins de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions pénales, dans le but de permettre la mise à disposition de l'autorité judiciaire.
5. Or, ces dispositions sont susceptibles de constituer une atteinte excessive aux droits et libertés protégés par l'
article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen🏛, du fait que la conservation des données de connexion et leur accès ne sont pas réservés aux infractions les plus graves et ne sont pas soumises à l'autorisation ou au contrôle d'une juridiction ou d'une autorité administrative indépendante dont les décisions présentent un caractère contraignant.
6. En conséquence, il y a lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en audience publique du sept décembre deux mille vingt et un.