CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 9 décembre 2021
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 1162 F-B
Pourvois n°
H 20-14.254
V 20-15.991 Jonction
R É P U B L
I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 DÉCEMBRE 2021
I. M. [M] [Aa], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° H 20-14.254 contre l'arrêt rendu le 17 décembre 2019 par la cour d'appel de Dijon (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Monceau générale assurances, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la société Mutuelle centrale d'assurances, société d'assurance mutuelle, dont le siège est [Adresse 4], venant aux droits de la société La Comtoise, en liquidation judiciaire,
3°/ à la société HB Agri-service, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5],
4°/ à la société Mutualité sociale agricole Sud Champagne, dont le siège est [Adresse 6],
5°/ à la société Groupama Grand Est, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
II. La société HB Agri-service a formé le pourvoi n° V 20-15.991 contre le même arrêt rendu dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Monceau générale assurances,
2°/ à la société Mutuelle centrale d'assurances, venant aux droits de la société La Comtoise,
3°/ à M. [M] [Aa],
4°/ à la société Groupama Grand Est,
5°/ à la société Mutualité sociale agricole Sud Champagne,
défendeurs à la cassation.
Le demandeur au pourvoi n° H 20-14.254 invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
La demanderesse au pourvoi n° V 20-15.991 invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de M. Pradel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de M. [Aa], de la SCP Spinosi, avocat de la société HB Agri-service, de la SCP Boré, Ab de Bruneton et Mégret, avocat des sociétés Monceau générale assurances et Mutuelle centrale d'assurances, de la SCP Gatineau, Ac et Rebeyrol, avocat de la société Mutualité sociale agricole Sud Champagne, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 octobre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Pradel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° H 20-14.254 et V 20-15.991, qui attaquent le même arrêt, sont joints.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 17 décembre 2019), le 14 septembre 2010, M. [Aa], exploitant agricole, a demandé à la société HB Agri-service de moissonner un champ de tournesols lui appartenant. Alors qu'un bourrage s'était produit dans la trémie de la moissonneuse-batteuse, M. [Aa] est monté sur l'engin afin de débloquer la trémie. Au cours de cette opération, sa jambe gauche a été happée par la vis située au fond de la trémie et arrachée au-dessus du genou.
3. M. [Aa] a fait assigner la société HB Agri-service, la Mutualité sociale agricole Sud Champagne et son assureur au titre de la garantie complémentaire de santé, la société Groupama Grand Est, devant un tribunal de grande instance aux fins d'obtenir la réparation de ses préjudices. La société HB Agri-service a appelé en garantie son assureur, la société La Comtoise. La Mutuelle centrale d'assurances, venant aux droits de la société La Comtoise, en liquidation judiciaire, ainsi que la société Monceau générale assurances, assureur de la moissonneuse-batteuse, sont intervenues volontairement à l'instance.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi n° H
20-14.254 formé par M. [Aa] et le moyen du pourvoi n° V
20-15.991 formé par la société HB Agri-service, réunis
Enoncé des moyens
4. M. [Aa] fait grief à l'arrêt de déclarer la société HB Agri-service responsable à hauteur seulement de 50 % de l'ensemble des préjudices subis par M. [Aa] à l'occasion de l'accident survenu le 14 septembre 2010, de mettre hors de cause la société Monceau générale assurances et la société Mutuelle centrale d'assurances, venant aux droits de la société La Comtoise, et de rejeter la demande de M. [Aa] au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, alors :
« 1°/ que dès lors qu'un véhicule ne travaille pas en poste fixe et doit, ou peut, selon les étapes de son travail, simultanément se déplacer pour utiliser sa fonction d'outil, l'accident qu'il génère est un accident de la circulation au sens de la
loi n° 85-677 du 5 juillet 1985🏛, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon qu'il est survenu à l'occasion de la fonction d'outil ou de déplacement de l'engin, ces deux fonctions étant indissociables dans une telle hypothèse ; qu'en relevant, pour refuser de faire application de ce dispositif légal à M. [Aa], que lors de l'accident, la moissonneuse-batteuse était à l'arrêt et que seul était en cause le fonctionnement de la vis sans fin, sans lien avec la fonction de déplacement, dès lors qu'elle pouvait être mise en oeuvre à l'arrêt de la machine, quand la moissonneuse, qui au moment de l'accident avait le moteur en marche et le conducteur présent sur son siège, devait, ou pouvait, selon les étapes de son travail, simultanément se déplacer pour exercer sa fonction d'outil, ce qui la rendait indissociable de la fonction de déplacement, la
cour d'appel a violé par refus d'application l'article 1er de la loi n° 85-677🏛 du 5 juillet 1985🏛 ;
2°/ qu'en énonçant, pour écarter l'application de la
loi n° 85-677 du 5 juillet 1985🏛, qu'au moment de l'accident, la moissonneuse-batteuse, à l'arrêt, se trouvait en état de maintenance de l'un de ses outils, et non en action de fauchage, sans répondre aux conclusions de M. [Aa] faisant valoir qu'en raison du maintien de M. [R] sur son siège de conducteur et du défaut de descente au sol de l'échelle d'accès au sommet de la moissonneuse, les éléments mobiles comme la vis sans fin ne s'étaient pas coupés, le privant ainsi de sécurité et maintenant l'engin dont le moteur tournait, en état de déplacement, ce dont il déduisait que les fonctions d'outil et de déplacement étaient indissociables et que la
loi n° 85-677 du 5 juillet 1985🏛 devait s'appliquer, la cour d'appel a violé l'
article 455 du code de procédure civile🏛 ;
3°/ que, subsidiairement, en se contentant de retenir, pour écarter l'application de la loi n° 85-677, qu'au moment de l'accident, la moissonneuse-batteuse était à l'arrêt et était en situation de maintenance de l'un de ses outils, en l'occurrence la vis sans fin, sans lien avec la fonction de déplacement, sans rechercher, alors qu'elle constatait qu'au moment de l'accident, le conducteur était présent sur son siège et le moteur du véhicule en marche, si la machine n'était pas en cours d'activité de fauchage et par conséquent en déplacement lorsqu'un dysfonctionnement l'avait contrainte à s'interrompre, en sorte que M. [Aa], dont l'intervention dans la trémie s'inscrivait dans l'exercice de cette activité spécifique, devait bénéficier du dispositif protecteur légal susvisé, la
cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1er de la loi n° 85-677🏛 du 5 juillet 1985🏛. »
5. La société HB Agri-service fait grief à l'arrêt attaqué de la déclarer responsable à hauteur de 50 % de l'ensemble des préjudices subis par M. [Aa] à l'occasion de l'accident survenu le 14 septembre 2010 et de mettre hors de cause la société Monceau générale assurances et la Mutuelle centrale d'assurances, venant aux droits de la société La Comtoise, alors « que les dispositions de la
loi n° 85-677 du 5 juillet 1985🏛 s'appliquent, mêmes lorsqu'elles sont transportées en vertu d'un contrat, aux victimes d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur, ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l'exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres ; qu'en se fondant sur les circonstances, inopérantes, tirées de ce qu'au moment de l'accident dont avait été victime M. [Aa], la moissonneuse-batteuse ne circulait pas et ne procédait à aucune coupe, et que M. [Aa] intervenait, alors, dans la trémie dans le but de pallier à un dysfonctionnement de l'outil de vidange de celle-ci, pour retenir que les dispositions de cette loi n'étaient pas applicables en l'espèce, et ce tandis qu'il était établi que M. [Aa] avait été victime dudit accident dans lequel était impliqué un véhicule terrestre à moteur, dont le moteur était, alors, en marche et dont le machiniste occupait, alors, sa place de pilotage, que cet accident était, lui-même, dû à un mouvement enclenché par ledit moteur et que, quand s'était produit le sinistre, l'engin avait, à tout le moins potentiellement, vocation et à sa mouvoir et à accomplir les travaux agricoles spécifiques pour lesquels il avait été conçu, la cour d'appel a violé l'
article 1er de la loi du 5 juillet 1985🏛, précité. »
Réponse de la Cour
6. L'arrêt retient qu'il résulte des pièces produites aux débats, et particulièrement des auditions recueillies par les enquêteurs auprès de la victime, de M. [R], conducteur de la machine, ainsi que de M. [Ad], employé de M. [Aa] et témoin de l'accident, que la moissonneuse-batteuse était à l'arrêt total au moment des faits, que c'est vainement que M. [Aa] soutient dans ses dernières écritures que l'arrêt n'aurait pas été complet, en se prévalant des déclarations par lesquelles M. [Ad] a indiqué qu'il avait demandé à M. [R] de stopper totalement l'engin, qu'il résulte en effet sans aucune ambiguïté des déclarations de ce témoin que la moissonneuse-batteuse ne se déplaçait pas, et qu'il apparaît que la demande faite à M. [R] ne tendait aucunement à l'immobilisation du véhicule, mais à l'arrêt de son moteur, qui continuait d'entraîner la vis sans fin située en fond de trémie.
7. L'arrêt constate que, bien qu'entraînée par le moteur permettant par ailleurs à la machine de rouler, cette vis sans fin est totalement indépendante de la fonction de déplacement, comme pouvant être mise en oeuvre à l'arrêt de la machine, et ayant pour seul objet de vidanger les grains introduits dans la trémie de stockage après leur récolte.
8. L'arrêt énonce que c'est le fonctionnement de cette vis sans fin qui est seul à l'origine de l'accident survenu à M. [Aa], lequel est descendu dans la trémie afin de casser avec un bâton les amas de grains agglomérés par l'humidité, empêchant ainsi la vis sans fin de remplir son office, que c'est à cette occasion que, son pied ayant glissé et son lacet étant défait, M. [Aa] a vu sa jambe gauche happée et entraînée par la vis sans fin.
9. L'arrêt ajoute que, dès lors qu'au moment de l'accident la moissonneuse-batteuse ne circulait pas, ne procédait à aucune coupe, et que M. [Aa] intervenait dans la trémie dans le seul but de pallier un dysfonctionnement de l'outil de vidange de celle-ci, la machine ne se trouvait manifestement plus en action de fauchage, mais en position de maintenance de l'un de ses outils et que la fonction de déplacement de l'engin était totalement étrangère à la survenue de l'accident, peu important à cet égard que le moteur ait été en fonctionnement ou que le conducteur ait été présent sur son siège.
10. De ces constatations et énonciations, relevant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel qui a mis en évidence que l'accident était exclusivement en lien avec la fonction d'outil de la moissonneuse-batteuse et aucunement avec sa fonction de circulation, dès lors que la machine ne se trouvait plus en action de fauchage, mais en position de maintenance de la vis sans fin et à l'arrêt,en a exactement déduit qu'il ne constituait pas un accident de la circulation au sens de la
loi n° 85-677 du 5 juillet 1985🏛.
11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Condamne M. [Aa] et la société HB Agri-service aux dépens ;
En application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du 09 décembre 2021, signé par lui et Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des
articles 452 et 456 du code de procédure civile🏛.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit au pourvoi n° H
20-14.254 par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour M. [Aa]
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le
jugement rendu le 5 avril 2018 par le tribunal de grande instance de Chaumont s'agissant des responsabilités, d'avoir ainsi infirmé les chefs de jugement qui, faisant application de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, avait dit que le droit à indemnisation du dommage corporel subi par M. [Aa] à la suite de l'accident de la circulation du 14 septembre 2010 était entier, avait en conséquence condamné in solidum la société HB Agri Service et la société d'assurance Monceau générale assurances, assureur de la moissonneuse-batteuse impliquée dans l'accident, à réparer l'intégralité du dommage corporel subi par lui, avait également dit que le droit à indemnisation du dommage matériel subi par M. [Aa] à la suite de l'accident de la circulation du 14 septembre 2010 était réduit de 10 % et condamné la société HB Agri Service et la société Monceau générale assurances, assureur de la moissonneuse-batteuse impliquée dans l'accident, à réparer le dommage matériel subi par M. [Aa] dans la limite de 90 %, et, statuant à nouveau de ces chefs des responsabilités, d'avoir déclaré la société HB Agri Service responsable à hauteur seulement de 50 % de l'ensemble des préjudices subis par M. [Aa] à l'occasion de l'accident survenu le 14 septembre 2010, d'avoir mis hors de cause la société Monceau générale assurances et la société Mutuelle centrale d'assurance, venant aux droits de la société La Comtoise, et d'avoir rejeté la demande de M. [Aa] au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛 ;
Aux motifs que, sur l'applicabilité de la
loi n° 85-677 du 5 juillet 1985🏛 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accident de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, l'
article 1er de ce texte énonce que ses dispositions s'appliquent, même lorsqu'elles sont transportées en vertu d'un contrat, aux victimes d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur, ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l'exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres ; que s'il est de jurisprudence établie que ce texte s'applique à une machine agricole circulant dans un champ dans le cadre de l'exécution du travail qui lui est assigné, il n'en demeure pas moins que, pour revêtir la qualification d'accident de la circulation, le fait dommageable doit être en lien avec la fonction de déplacement de l'engin, et ne pas résulter de la seule mise en oeuvre de sa fonction d'outil ; qu'en l'espèce, il résulte clairement des pièces produites aux débats, et particulièrement des auditions recueillies par les enquêteurs auprès de la victime, de M. [R], conducteur de la machine, ainsi que de M. [Ad], employé de M. [Aa] et témoin de l'accident, que la moissonneuse-batteuse était à l'arrêt total au moment des faits ; que c'est vainement que M. [Aa] soutient dans ses dernières écritures que l'arrêt n'aurait pas été complet, en se prévalant des déclarations par lesquelles M. [Ad] a indiqué qu'il avait demandé à M. [R] de stopper totalement l'engin ; qu'il résulte en effet sans aucune ambiguïté des déclarations de ce témoin que la moissonneuse-batteuse ne se déplaçait pas, et il apparaît que la demande faite à M. [R] ne tendait aucunement à l'immobilisation du véhicule, mais à l'arrêt de son moteur, qui continuait d'entraîner la vis sans fin située en fond de trémie ; que bien qu'entraînée par le moteur permettant par ailleurs à la machine de rouler, cette vis sans fin est totalement indépendante de la fonction de déplacement, comme pouvant être mise en oeuvre à l'arrêt de la machine, et ayant pour seul objet de vidanger les grains introduits dans la trémie de stockage après leur récolte ; qu'or, c'est le fonctionnement de cette vis sans fin qui est seul à l'origine de l'accident survenu à M. [Aa], lequel est descendu dans la trémie afin de casser avec un bâton les amas de grains agglomérés par l'humidité, et qui ne s'écoulaient donc plus correctement, empêchant ainsi la vis sans fin de remplir son office ; que c'est à cette occasion que, son pied ayant glissé et son lacet étant défait, M. [Aa] a vu sa jambe gauche happée et entraînée par la vis sans fin ; que dès lors ainsi au moment de l'accident la moissonneuse-batteuse ne circulait pas, ne procédait à aucune coupe, et que M. [Aa] intervenait dans la trémie dans le seul but de pallier un dysfonctionnement de l'outil de vidange de celle-ci, la machine ne se trouvait manifestement plus en action de fauchage, mais en position de maintenance de l'un de ses outils ; que la fonction de déplacement de l'engin étant donc totalement étrangère à la survenue de l'accident, celui-ci ne saurait recevoir la qualification d'accident de la circulation au sens de la loi du 5 juillet 1985🏛, peu important à cet égard que le moteur ait été en fonctionnement ou que le conducteur ait été présent sur son siège ; que le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a fixé les responsabilités en application de ce texte, et retenu en conséquence la garantie de la société Monceau Générale Assurances, en sa qualité d'assureur de la moissonneuse-batteuse, celle-ci devant être mise hors de cause ;
1°) Alors que, dès lors qu'un véhicule ne travaille pas en poste fixe et doit, ou peut, selon les étapes de son travail, simultanément se déplacer pour utiliser sa fonction d'outil, l'accident qu'il génère est un accident de la circulation au sens de la
loi n° 85-677 du 5 juillet 1985🏛, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon qu'il est survenu à l'occasion de la fonction d'outil ou de déplacement de l'engin, ces deux fonctions étant indissociables dans une telle hypothèse ; qu'en relevant, pour refuser de faire application de ce dispositif légal à M. [Aa], que lors de l'accident, la moissonneuse-batteuse était à l'arrêt et que seul était en cause le fonctionnement de la vis sans fin, sans lien avec la fonction de déplacement, dès lors qu'elle pouvait être mise en oeuvre à l'arrêt de la machine, quand la moissonneuse, qui au moment de l'accident avait le moteur en marche et le conducteur présent sur son siège, devait, ou pouvait, selon les étapes de son travail, simultanément se déplacer pour exercer sa fonction d'outil, ce qui la rendait indissociable de la fonction de déplacement, la
cour d'appel a violé par refus d'application l'article 1er de la loi n° 85-677🏛 du 5 juillet 1985🏛 ;
2°) Alors que, en énonçant, pour écarter l'application de la
loi n° 85-677 du 5 juillet 1985🏛, qu'au moment de l'accident, la moissonneuse-batteuse, à l'arrêt, se trouvait en état de maintenance de l'un de ses outils, et non en action de fauchage, sans répondre aux conclusions de M. [Aa] (p. 5 et 6) faisant valoir qu'en raison du maintien de M. [R] sur son siège de conducteur et du défaut de descente au sol de l'échelle d'accès au sommet de la moissonneuse, les éléments mobiles comme la vis sans fin ne s'étaient pas coupés, le privant ainsi de sécurité et maintenant l'engin dont le moteur tournait, en état de déplacement, ce dont il déduisait que les fonctions d'outil et de déplacement étaient indissociables et que la
loi n° 85-677 du 5 juillet 1985🏛 devait s'appliquer, la cour d'appel a violé l'
article 455 du code de procédure civile🏛 ;
3°) Alors que, subsidiairement, en se contentant de retenir, pour écarter l'application de la loi n° 85-677, qu'au moment de l'accident, la moissonneuse-batteuse était à l'arrêt et était en situation de maintenance de l'un de ses outils, en l'occurrence la vis sans fin, sans lien avec la fonction de déplacement, sans rechercher, alors qu'elle constatait qu'au moment de l'accident, le conducteur était présent sur son siège et le moteur du véhicule en marche, si la machine n'était pas en cours d'activité de fauchage et par conséquent en déplacement lorsqu'un dysfonctionnement l'avait contrainte à s'interrompre, en sorte que M. [Aa], dont l'intervention dans la trémie s'inscrivait dans l'exercice de cette activité spécifique, devait bénéficier du dispositif protecteur légal susvisé, la
cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1er de la loi n° 85-677🏛 du 5 juillet 1985🏛. Moyen produit au pourvoi n° V
20-15.991 par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour la société HB Agri-service
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le
jugement rendu le 5 avril 2018 par le tribunal de grande instance de Chaumont s'agissant des responsabilités et, statuant à nouveau, d'avoir déclaré la société HB Agri-Service responsable à hauteur de 50 % de l'ensemble des préjudices subis par M. [M] [Aa] à l'occasion de l'accident survenu le 14 septembre 2010 et d'avoir mis hors de cause Monceau Générale Assurances (MGA) et la Mutuelle Centrale d'Assurance (MCA), venant aux droits de la société La Comtoise ;
Aux motifs que : « Sur l'applicabilité de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accident de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation
L'
article 1er de ce texte énonce que ces dispositions s'appliquent, mêmes lorsqu'elles sont transportées en vertu d'un contrat, aux victimes d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur, ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l'exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres.
S'il est de jurisprudence établie que ce texte s'applique à une machine agricole circulant dans un champ dans le cadre de l'exécution du travail qui lui est assigné, il n'en demeure pas moins que, pour revêtir la qualification d'accident de la circulation, le fait dommageable doit être en lien avec la fonction de déplacement de l'engin, et ne pas résulter de la seule mise en oeuvre de sa fonction d'outil.
En l'espèce, il résulte clairement des pièces produites aux débats, et particulièrement des auditions recueillies par les enquêteurs auprès de la victime, de M. [R], conducteur de la machine, ainsi que de M. [Ad], employé de M. [Aa] et témoin de l'accident, que la moissonneuse-batteuse était à l'arrêt total au moment des faits.
C'est vainement que M. [Aa] soutient dans ses dernières écritures que l'arrêt n'aurait pas été complet, en se prévalant des déclarations par lesquelles M. [Ad] a indiqué qu'il avait demandé à M. [R] de stopper totalement l'engin. Il résulte en effet sans ambiguïté des déclarations de ce témoin que la moissonneuse-batteuse ne se déplaçait pas, et il apparaît que la demande faite à M. [R] ne tendait aucunement à l'immobilisation du véhicule, mais à l'arrêt de son moteur, qui continuait d'entraîner la vis sans fin située en fond de trémie.
Bien qu'entraînée par le moteur permettant par ailleurs à la machine de rouler, cette vis sans fin est totalement indépendante de la fonction de déplacement, comme pouvant être mise en oeuvre à l'arrêt de la machine, et ayant pour seul objet de vidanger les grains introduits dans la trémie de stockage après leur récolte. Or, c'est le fonctionnement de cette vis sans fin qui est seul à l'origine de l'accident survenu à M. [Aa], lequel est descendu dans la trémie afin de casser avec un bâton les amas de grains agglomérés par l'humidité, et qui ne s'écoulaient donc plus correctement, empêchant ainsi la vis sans fin de remplir son office. C'est à cette occasion que, son pied ayant glissé et son lacet étant défait, M. [Aa] a vu sa jambe gauche happée et entraînée par la vis sans fin.
Dès lors, ainsi qu'au moment de l'accident la moissonneuse-batteuse ne circulait pas, ne procédait à aucune coupe, et que M. [Aa] intervenait dans la trémie dans le seul but de pallier à un dysfonctionnement de l'outil de vidange de celle-ci, la machine ne se trouvait manifestement plus en action de fauchage, mais en position de maintenance de l'un de ses outils.
La fonction de déplacement de l'engin étant donc totalement étrangère à la survenue de l'accident, celui-ci ne saurait recevoir la qualification d'accident de la circulation au sens de la loi du 5 juillet 1985🏛, peu important à cet égard que le monteur ait été en fonctionnement ou que le conducteur ait été présent sur son siège.
Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a fixé les responsabilités en application de ce texte, et retenu en conséquence la garantie de la société Monceau Générale Assurances en sa qualité d'assureur de la moissonneuse-batteuse, celle-ci devant être mise hors de cause » ;
Alors que les dispositions de la
loi n° 85-677 du 5 juillet 1985🏛 s'appliquent, mêmes lorsqu'elles sont transportées en vertu d'un contrat, aux victimes d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur, ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l'exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres ; qu'en se fondant sur les circonstances, inopérantes, tirées de ce qu'au moment de l'accident dont avait été victime M. [Aa], la moissonneuse-batteuse ne circulait pas et ne procédait à aucune coupe, et que M. [Aa] intervenait, alors, dans la trémie dans le but de pallier à un dysfonctionnement de l'outil de vidange de celle-ci, pour retenir que les dispositions de cette loi n'étaient pas applicables en l'espèce, et ce tandis qu'il était établi que M. [Aa] avait été victime dudit accident dans lequel était impliqué un véhicule terrestre à moteur, dont le moteur était, alors, en marche et dont le machiniste occupait, alors, sa place de pilotage, que cet accident était, lui-même, dû à un mouvement enclenché par ledit moteur et que, quand s'était produit le sinistre, l'engin avait, à tout le moins potentiellement, vocation et à sa mouvoir et à accomplir les travaux agricoles spécifiques pour lesquels il avait été conçu, la cour d'appel a violé l'
article 1er de la loi du 5 juillet 1985🏛, précité.