COMM. AM
COUR DE CASSATION
Audience publique du 25 octobre 2011
Rejet
Mme FAVRE, président
Arrêt no 1054 FS-P+B
Pourvoi no Z 10-21.383
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE,
FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par M. Daniel Z, domicilié Neuilly-sur-Seine,
contre l'arrêt rendu le 10 juin 2010 par la cour d'appel de Paris (pôle 5 chambre 6), dans le litige l'opposant à la société Lyonnaise de banque, dont le siège est Lyon,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 27 septembre 2011, où étaient présents Mme Favre, président, Mme Levon-Guérin, conseiller rapporteur, M. Gérard, conseiller doyen, M. Potocki, Mme Riffault-Silk, M. Espel, Mme Jacques, M. Laborde, Mme Wallon, conseillers, Mme ..., MM. ..., ..., Mmes
Robert-Nicoud, Schmidt, Texier, conseillers référendaires, M. Le Mesle, premier avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Levon-Guérin, conseiller, les observations de la SCP Blanc et Rousseau, avocat de M. Z, de Me Le Prado, avocat de la société Lyonnaise de banque, l'avis de M. Le Mesle, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 juin 2010), que le 2 avril 1992, M. Z (la caution) s'est rendu caution envers la société Lyonnaise de Banque (la banque) des concours consentis à la SCI du 23-27 ter rue Louis ... (la SCI) ; que la SCI étant défaillante, le 27 juin 1994, la banque a assigné la caution en exécution de son engagement ; que la SCI ayant été mise en redressement judiciaire, la banque a déclaré sa créance, qui a été admise par un arrêt irrévocable du 11 juin 1998 ; que sur renvoi après cassation, un arrêt irrévocable du 11 février 2005 a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la banque, a condamné la caution à payer une certaine somme en principal ; que cette décision étant mise à exécution, la caution, se prévalant de la faute commise par la banque dans la déclaration des intérêts postérieurs à l'ouverture de la procédure collective la privant de son recours subrogatoire contre la SCI, l'a assignée le 13 janvier 2006, en paiement de dommages-intérêts et en compensation des créances réciproques des parties ;
Attendu que la caution fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en paiement de dommages-intérêts, alors, selon le moyen
1o/ que l'arrêt qui a accueilli la demande en paiement d'une banque contre la caution en prononçant la déchéance de son droit aux intérêts conventionnels échus depuis la date où l'information de la caution aurait dû être fournie n'a pas autorité de chose jugée sur une action en responsabilité contre la banque fondée sur la perte du recours subrogatoire de la caution pour le montant des intérêts échus postérieurement à l'ouverture de la procédure collective du débiteur principal ; qu'en ayant refusé de se prononcer sur l'action en responsabilité formée par la caution, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;
2o/ que faute d'avoir recherché, comme elle y était invitée, si la caution pouvait savoir lors de la première instance que la banque avait omis de faire figurer les intérêts dans sa déclaration de créance au passif du débiteur principal, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1351 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, qu'il appartenait à la caution, défenderesse à l'action en paiement, de présenter, dès l'instance initiale, l'ensemble des moyens qu'elle estimait de nature à justifier le rejet total ou partiel de la demande ; qu'ayant relevé que l'arrêt du 11 février 2005 avait retenu le principe de la condamnation de la caution, prononcé la déchéance des intérêts conventionnels et condamné la caution à payer à la banque la somme de 1 142 883,22 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 27 juin 1994, puis retenu que la question du paiement des intérêts tant conventionnels qu'au taux légal avait été définitivement tranchée par l'arrêt du 11 février 2005 et que, sous le couvert d'une demande en paiement de dommages-intérêts et en compensation, l'action de la caution ne tendait qu'à remettre en cause, par un moyen nouveau, la condamnation irrévocablement prononcée, la cour d'appel en a exactement déduit que la demande se heurtait à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt irrévocable du 11 février 2005 ;
Attendu, d'autre part, que par motifs adoptés, l'arrêt relève que la caution a eu la possibilité de faire valoir ses droits auprès du juge-commissaire, statuant sur l'admission de la créance, qu'elle a été reçue par le juge-commissaire et qu'elle n'a pas exercé de recours, faisant ainsi ressortir que celle-ci pouvait, dès la première instance, présenter le moyen invoqué à l'appui de son action ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Blanc et Rousseau, avocat aux Conseils pour M. Z.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Z, caution des engagements de la SCI 23-27 ter rue Louis ..., de sa demande en paiement de dommages et intérêts contre la Société Lyonnaise de Banque, prêteuse, pour avoir omis de déclarer les intérêts dans sa déclaration de créance,
Aux motifs que devant la cour d'appel de renvoi, M. Z avait demandé que soit prononcée la déchéance de la banque aux intérêts contractuels faute par elle d'avoir respecté son obligation d'information ; que par arrêt du 11 février 2005, la cour d'appel d'Orléans avait retenu le principe de la condamnation de la caution, prononcé la déchéance des intérêts conventionnels, condamné M. Z à payer à la Société Lyonnaise de Banque la somme de 1.142.883,22 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 27 juin 1994, dit que les paiements effectués par la débitrice principale s'imputeraient sur les intérêts au taux légal dus par la caution pour la période antérieure au 1er juillet 1999 et prioritairement sur le capital restant dû à compter de cette date ; que la question du paiement des intérêts conventionnels et au taux légal avait été tranchée définitivement par la cour d'appel d'Orléans ; que sous couvert d'une demande en paiement de dommages et intérêts, M. Z excipait de ce qu'il ne serait pas redevable du paiement des intérêts à raison d'une faute commise par la banque pour lui avoir fait perdre le bénéfice de son action subrogatoire ; que la cour ne pouvait pas examiner ce moyen en raison de l'autorité de chose jugée attachée à la décision de la cour d'appel d'Orléans puisqu'il incombait à M. Z de présenter dès l'instance relative à la première demande formée entre les mêmes parties et portant sur les intérêts réclamés l'ensemble des moyens qu'il estimait de nature à fonder celle-ci ;
Alors que 1o) l'arrêt qui a accueilli la demande en paiement d'une banque contre la caution en prononçant la déchéance de son droit aux intérêts conventionnels échus depuis la date où l'information de la caution aurait dû être fournie n'a pas autorité de chose jugée sur une action en responsabilité contre la banque fondée sur la perte du recours subrogatoire de la caution pour le montant des intérêts échus postérieurement à l'ouverture de la procédure collective du débiteur principal ; qu'en ayant refusé de se prononcer sur l'action en responsabilité formée par M. Z, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;
Alors que 2o) faute d'avoir recherché, comme elle y était invitée, si la caution pouvait savoir lors de la première instance que la banque avait omis de faire figurer les intérêts dans sa déclaration de créance au passif du débiteur principal, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1351 du code civil.