CIV. 2 SÉCURITÉ SOCIALE CB
COUR DE CASSATION
Audience publique du 13 octobre 2011
Cassation
M. LORIFERNE, président
Arrêt no 1678 FS-P+B
Pourvoi no E 10-23.826
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Centre, anciennement dénommée CRAM du Centre, dont le siège est Orléans cedex 1,
contre le jugement rendu le 28 juin 2010 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Lô, dans le litige l'opposant à Mme Marie Le Z, domiciliée Saint-Vaast-la-Hougue,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 14 septembre 2011, où étaient présents M. Loriferne, président, M. Barthélemy, conseiller rapporteur, M. Mazars, conseiller doyen, MM. Laurans, Héderer, Feydeau, Prétot, Cadiot, Buisson, conseillers, Mmes Coutou, Fouchard-Tessier, M. Salomon, Mme Chauchis, conseillers référendaires, Mme Genevey, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Barthélemy, conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Centre, de la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, avocat de Mme Le Z, l'avis de Mme de Beaupuis, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Vu les articles L. 353-1 et R. 353-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort, que Mme Le Z a demandé le 15 février 2008 à la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Centre (la caisse) une pension de réversion du chef de Charles Le Z, décédé le 28 novembre 2007, et dont elle était divorcée depuis 1984 ; qu'elle bénéficiait d'une pension alimentaire pour conjoint dont le service a cessé à la suite du décès ; que pour calculer le plafond au-delà duquel la pension n'est pas accordée, la caisse a tenu compte, sur les trois mois précédant le 1er janvier 2008, des arrérages servis par Charles Le Z, et a rejeté la demande ; que contestant le bien-fondé de ce rejet, Mme Le Z a saisi une juridiction de sécurité sociale ; que, sur nouvelle demande, la pension a été accordée à effet du 1er janvier 2009 ;
Attendu que pour dire que la pension alimentaire servie par Charles Le Z ne devait pas être incluse dans l'assiette permettant de déterminer le plafond sur les trois mois précédant le 1er janvier 2008, le tribunal retient que l'assuré était le débiteur de la pension, et qu'une telle pension cesse nécessairement au décès du débiteur et ne peut plus constituer une ressource personnelle à l'avenir ;
Qu'en statuant ainsi, alors que cette ressource personnelle n'est pas exclue des prévisions de l'article R. 353-1 du code de la sécurité sociale, le tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 28 juin 2010, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Lô ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Caen ;
Condamne Mme Le Z aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Centre
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR infirmé la décision de la CAISSE RÉGIONALE D'ASSURANCE MALADIE DU CENTRE en date du 17 novembre 2005 et celle prise par sa commission de recours amiable le 26 avril 2006 et d'AVOIR condamné la CRAM du CENTRE à verser à madame Z Z la pension de réversion due suite au décès de monsieur Charles Z Z pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2008 ;
AUX MOTIFS QU' " aux termes de l'article R 353-1 du Code de la sécurité sociale, la pension de réversion est attribuée lorsque le conjoint de l'assuré décédé ou disparu ne dispose pas de ressources dépassant un montant fixé par décret ; ces ressources sont appréciées selon les modalités et dans les conditions fixées par les articles R. 815-18 à R. 815-20, R. 815-22 à R. 815-25, R. 815-27 et au deuxième alinéa de l'article R. 815-29 ; toutefois, elles ne comprennent pas
1o les revenus d'activité et de remplacement de l'assuré décédé ;
2o les avantages de réversion servis par les régimes légalement obligatoires complémentaires aux régimes de base mentionnés aux articles L. 200-2 et L. 621-3 du présent code et à l'article L. 722-20 du Code rural et de la pêche maritime ;
3o) les revenus des biens mobiliers et immobiliers acquis du chef du conjoint décédé ou disparu ou en raison de ce décès ou de cette disparition ;
les revenus d'activité du conjoint survivant font l'objet d'un abattement de 30 % s'il est âgé de 55 ans ou plus ;
les ressources à prendre en compte lors de la demande sont celles afférentes aux trois mois civils précédant la date d'effet de la pension de réversion ; lorsqu'elles excèdent le quart du plafond applicable en vertu du premier alinéa de l'article L. 353-1, il leur est substitué celles afférentes aux douze mois civils précédant cette date, qui sont alors comparées au montant annuel de ce plafond ;
aux termes de l'article R. 815-22 du Code de la sécurité sociale, il est tenu compte, pour l'appréciation des ressources, de tous les avantages d'invalidité et de vieillesse dont bénéficie l'intéressé, des revenus professionnels et autres y compris ceux des biens mobiliers et immobiliers et des biens dont il a fait donation au cours des dix années qui ont précédé la demande ; toutefois, et indépendamment des ressources exclues par des dispositions particulières, il n'est pas tenu compte, le cas échéant, dans l'estimation des ressources, des éléments suivants
1o la valeur des locaux d'habitation occupés à titre de résidence principale par l'intéressé et les membres de sa famille vivant à son foyer ;
2o la valeur des bâtiments de l'exploitation agricole ;
3o les prestations familiales ;
4o l'indemnité de soins aux tuberculeux prévue par l'article L. 41 du Code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
5o la majoration spéciale prévue par l'article L. 52-2 du même code ; 6o les majorations accordées aux personnes dont l'état de santé nécessité l'aide constante d'une tierce personne, lorsqu'elles sont allouées à ce titre en application de l'article L. 18 du même Code ou en application des législations des accidents du travail, des assurances sociales et de l'aide sociale ; 7o l'allocation de compensation accordée aux aveugles et grands infirmes travailleurs et généralement les avantages en espèces dont les intéressés bénéficient au titre de l'aide sociale ;
8o la retraite du combattant ;
9o les pensions attachées aux distinctions honorifiques ;
10o l'allocation de logement prévue à l'article L. 831-1 du présent code ; 11o les allocations de reconnaissance mentionnées au I et au I bis de l'article 47 de la loi de finances rectificative pour 1999 no 99-1173 du 30 décembre 1999 ;
12o la mesure de réparation prévue par le décret no 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ;
il résulte des dispositions précitées que les pensions alimentaires ne font pas partie de la liste des éléments ne devant pas être pris en compte pour l'appréciation des ressources ;
dès lors, les pensions alimentaires doivent en principe être prises en compte ;
toutefois, il convient de souligner qu'en l'espèce, la pension alimentaire est une pension alimentaire dont le débiteur était l'assuré lui-même ; ainsi, le versement d'une telle pension alimentaire cesse nécessairement au décès du débiteur et ne peut plus constituer une ressource à l'avenir ; la pension de réversion a été instituée pour permettre, au décès de l'assuré, de donner au bénéficiaire des moyens d'existence ; inclure une pension alimentaire versée par l'assuré décédé dans l'appréciation des ressources du bénéficiaire revient à augmenter fictivement ses ressources et à dénaturer l'esprit de la loi ; il serait inéquitable de priver le demander de pension de réversion au motif qu'une pension alimentaire, dont le débiteur est l'assuré décédé, doit être prise en compte pour l'appréciation des ressources du bénéficiaire, alors que c'est le décès de cet assuré qui ouvre droit à la pension de réversion" ;
ALORS QUE les ressources à prendre en considération pour déterminer le droit à pension de réversion sont celles afférentes aux trois mois civils précédant la date d'effet de la pension de réversion ; qu'elles comprennent les pensions alimentaires perçues de l'assuré décédé ; qu'en jugeant le contraire, le Tribunal a violé par refus d'application les articles L. 353-1, R. 353-1 et R. 815-22 du Code de la sécurité sociale.