Jurisprudence : CA Paris, 5, 8, 24-11-2015, n° 14/17322, Confirmation



Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE aux parties le AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2015 (n°, pages)
Numéro d'inscription au répertoire général 14/17322
Décision déférée à la Cour Jugement du 18 Juillet 2014 -Tribunal de Commerce de PARIS 01 - RG n° 2013076146

APPELANTE dans le RG 14/17322 et 14/17325
SARL SERGIO BOSSI prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés
en cette qualité audit siège
inscrite au RCS de Paris sous le numéro 306 591 223
69 rue ... Honoré
PARIS 01
Représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque L0044
Ayant pour avocat plaidant Me Xavier LECOMTE, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMÉE dans le RG 14/17322
SARL SB 11, prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège.
Immatriculée au RCS de Créteil sous le numéro 435 247 150

MAISONS ALFORT
Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque B0753
Ayant pour avocat plaidant Me Raphaël ARBIB, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque PC 222
INTIMÉS dans le RG 14/17325
Monsieur Bernard, Georges X né le ..... à Paris de nationalité française

VINCENNES
Madame Laurence W
née le 12 avril 1962
de nationalité française

VINCENNES
SAS HOLDING DÉVELOPPEMENT GESTION COIFFURE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
inscrite au RCS de Paris sous le numéro 402 802 375

PARIS
Représentés par Me Laurence TAZE BERNARD de la SCP IFL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque P0042
Ayant pour avocat plaidant Me Valérie DAHAN, avocat au barreau de PARIS, toque C2024

COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 06 Octobre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de
Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre
M. Laurent BEDOUET, Conseiller
Monsieur Joël BOYER, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats Mme Pervenche HALDRIC
Ministère Public L'affaire a été communiquée au ministère public.
ARRÊT
- contradictoire
- rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, présidente et par Madame ...


HALDRIC, greffière présente lors du prononcé.
La société Sergio Bossi exerce une activité de franchiseur de salons de coiffure sous l'enseigne 'Sergio Bossi'. Elle est détenue directement ou indirectement par
M. Bernard X.
Cette société est liée par contrat de prestations de services du 1er janvier 2010 à la société SB11, dirigée par M. Philippe ..., ancien directeur salarié de Sergio ....
Ce contrat a été conclu pour une durée déterminée de 5 ans, renouvelable, moyennant le versement d'honoraires mensuels à SB11 de 2 900 euros HT et stipule diverses indemnités de résiliation et de fin de contrat au profit de SB11.
Le groupe Dichamp a cédé le 13 novembre 2011 la société Sergio Bossi à la société Coiffure du Monde, spécialisée dans la même activité.
M. X, cédant, étant associé à égalité avec M. Philippe ... au sein d'une Sarl Silex qui était elle-même franchiseur de salons de coiffures sous l'enseigne 'Gina ...', les parties ont entendu régler par un acte dénommé 'protocole d'accord' du 13 novembre 2011 le conflit d'intérêts résultant des liens noués entre M. X et
M. ... dans l'animation d'un réseau de franchise possiblement concurrent du réseau 'Sergio ...' ensuite de la cession de la société Sergio Bossi à de nouveaux acquéreurs.
Ce protocole mettait essentiellement à la charge de M. X un engagement de négociations avec M. ... aux fins d'aboutir à la résiliation immédiate et sans indemnités à la charge de la société Sergio Bossi du contrat de prestations de services liant Sergio ... à SB11, à la mise en place d'une convention de co-franchise du réseau 'Gina ...' par les sociétés Silex (MM. X et ...) et Sergio Bossi (nouveaux acquéreurs), M. ... bénéficiant en outre d'un nouveau contrat commercial avec Sergio Bossi (article 8.1.1).
M. X, s'engageait, subsidiairement, si l'accord envisagé à titre principal ne pouvait aboutir, à céder ses parts dans la société Silex, franchiseur du réseau ' Gina ...' à M. ... ou à un tiers, et à faire 'son affaire personnelle de la résiliation immédiate de la convention unissant SB 11 à Sergio ... sans indemnités, ou indemnités prises en charge par le groupe Dichamp' (article 8.1.2).
Enfin, les parties se sont engagées, dans l'hypothèse où aucune des deux solutions proposées n'aurait été réalisée avant le 31 mars 2012, de constituer une société commune entre M. X et le Groupe Coiffure du Monde, aux fins de racheter au prix de 200 000 euros, payable en fonction des bénéfices dégagés par la société acquéreur et au plus tard le 30 novembre 2020, les titres de M. X dans toute société intéressée à l'exploitation de la marque ' Gina ...', la société Sergio Bossi devant résilier à effet immédiat la convention l'unissant à la société SB11, sans indemnités à la charge de Sergio ... ou des nouveaux acquéreurs (article 8.1.3).
La cession de la société Sergip Bossi a pris effet le 1er décembre 2011.
A la présentation des factures de la société SB11 le 20 février 2012, la société Sergio Bossi, à cette date entre les mains des nouveaux acquéreurs, a demandé à son prestataire de justifier de la réalité de ses services puis, au vu de réponses qu'elle a jugées insatisfaisantes, a, par courrier du 23 avril suivant, résilié le contrat avec effet immédiat en invoquant l'absence de contrepartie des prestations facturées et en se prévalant du motif grave de rupture sans indemnité.
C'est dans ces circonstances que, par acte du 18 décembre 2013, la société SB11 a fait assigner la société Sergio Bossi devant le tribunal de commerce de Paris en poursuivant sa condamnation à lui payer ses commissions (17 342 euros) augmentés des intérêts de retard ainsi que diverses indemnités de résiliation pour un total de 260 988,80 euros.
Par acte du 5 février 2014, la société Sergio Bossi a fait assigner les cédants,
M. X, Mme Laurence W et la société Holding Développement Gestion Coiffure, devant le même tribunal aux fins de les voir condamnés à la relever et garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre dans l'instance précédente.
Le tribunal qui n'a pas joint les instances a statué par deux jugements séparés du même jour. Par jugement du 18 juin 2014 dans l'instance principale, le tribunal a
- constaté la résiliation du contrat du 1er janvier 2010 à la date du 26 avril 2012 et a dit que cette résiliation unilatérale et fautive était aux torts de la Société Sergio Bossi,
- a condamné la société Sergio Bossi à payer à la Sarl SB11 la somme de
13 873,60 euros appliqué par la Banque Centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente, majoré de 10 points,
- a condamné la société Sergio Bossi à payer à la Sarl SB11 la somme de 146 133 euros (92 800 + 53 333) à titre de dommages-intérêts,
- a condamné la société Sergio Bossi à payer à la Sarl SB 11 la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire sous réserve d'une caution bancaire, s'agissant de la somme de 146 133 euros,
- a condamné la société Sergio Bossi aux dépens.
La société Sergio Bossi a relevé appel de cette décision selon déclaration en date du 11 août 2014. Cette instance a été enregistrée au rôle sous le numéro RG 14/17322.

Par jugement du 18 juin 2014, dans l'instance opposant la société Sergio Bossi aux cédants, le tribunal a condamné in solidum M. Bernard X, Mme Laurence W et la société Holding Développement Gestion Coiffure à relever et garantir indemne la société Sergio Bossi à concurrence du tiers de toute condamnation qui serait prononcée au profit de la Sarl SB11 du chef de la résiliation anticipée du contrat du 1er février 2010 et la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

La société Sergio Bossi a relevé appel de ce jugement selon déclaration en date du 11 août 2014. Cette instance a été enregistrée au rôle sous le numéro RG 14/17325.
Instance RG 14/17322
Dans ses dernières conclusions signifiées le 12 mars 2015, la société Sergio Bossi demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, vu les articles 1108 et 1184, à titre principal d'annuler la disposition contractuelle prévoyant le versement d'une indemnité forfaitaire de fin de contrat de 100 000 euros, de débouter la société SB 11 de ses demandes, subsidiairement, de juger que la société SB 11 ne peut prétendre à plus de 1 euro de dommages et intérêts en raison de la rupture du contrat ayant uni les parties, en toute hypothèse, de condamner la société SB 11 à lui payer une indemnité de 10 000,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 31 août 2015, la société SB11 demande à la cour
- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté la résiliation à la date du 26 avril 2012 du contrat de fournitures de services à durée déterminée daté du 1er janvier 2010, dit que le contrat a été résilié unilatéralement et fautivement et aux torts de la société Sergio Bossi et en ce qu'il a condamné la société Sergio Bossi à lui payer la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- de l'infirmer pour le surplus, et statuant à nouveau, de condamner la société Sergio Bossi à lui payer la somme de 17 342 euros avec intérêts au taux prévu par les dispositions de l'article L 441-6 du code de commerce, soit 1% correspondant au taux de refinancement de la Banque Centrale Européenne, augmenté de 10 points pour chaque facture non réglée parvenue à son échéance et jusqu'à parfait règlement, soit les factures des mois de décembre 2011 à avril 2012 compris, de condamner la société Sergio Bossi à lui payer la somme de 260 988,80 euros se décomposant comme suit, outre les intérêts au taux légal depuis le 25 juin 2012
- 32 x 3.468,40 euros (2.900 x 19,6 %) = 110.988,80 euros au titre des sommes qui
auraient été versées jusqu'au terme du contrat du 1er janvier 2010
- 50 000 euros au titre de l'indemnité de résiliation anticipée
- 100 000 euros au titre de l'indemnité de fin de contrat
- de débouter la société Sergio Bossi de l'intégralité de ses demandes,
- de condamner la société Sergio Bossi à lui payer la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
- de condamner la société Sergio Bossi aux entiers dépens. Instance RG 14/17325
Dans ses dernières conclusions signifiées le 13 mars 2015, la société Sergio Bossi, appelante principale, demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, de condamner in solidum M. Bernard X, Mme Laurence W et la société Holding Développement Gestion Coiffure à la relever et garantir indemne de toute condamnation qui serait prononcée au profit de la Sarl SB11 du chef de la résiliation anticipée du contrat du 1er février 2010 et la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Dans leurs dernières conclusions signifiées le 11 mai 2015, M. X, Mme Laurence W et la société Holding Développement Gestion Coiffure demandent à la cour de constater que M. J.C. Aubry, dirigeant de la société Sergio Bossi est à l'initiative de la résiliation anticipée de la convention régularisée le 1er janvier 2010 avec la société SB 11, de constater que la résiliation anticipée n'est pas intervenue dans les conditions prévues par le protocole régularisé le 13 novembre 2011, en conséquence, d'infirmer le jugement déféré, de dire et juger que la société Sergio Bossi est seule tenue à l'indemnisation liée à la rupture du contrat du 1Er janvier 2010, de débouter la société Sergio Bossi de ses demandes, de la condamner à leur payer une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

SUR CE
Le souci d'une bonne administration la justice conduira à joindre les deux instances.
Sur demande de la société SB11 en paiement de factures
La société Sergio Bossi excipe de l'exception d'inexécution pour refuser de régler les factures de la société SB11 au motif que les prestations correspondantes ne seraient pas justifiées.
Mais il sera relevé après les premiers juges que la société Sergio Bossi se trouvait liée à la société SB11 par un contrat du 1er janvier 2010 qui n'a jamais fait l'objet de réserves quant à la réalité et la qualité des prestations de la société SB11 antérieurement à la cession de la société Sergio Bossi, que les nouveaux acquéreurs de cette dernière avaient parfaitement connaissance de l'économie générale de cette convention avant la cession, comme cela résulte des termes mêmes du protocole du 13 novembre 2011 par lequel les parties sont convenues d'y mettre un terme sous diverses conditions, que ce protocole n'est pas opposable à la société SB11 qui n'y était pas partie et que la société SB11 justifie par de nombreuses pièces au débat de la réalité des prestations accomplies durant la période litigieuse dans les termes du contrat de fournitures de service lui ayant confié des missions notamment de développement, de gestion et d'animation commerciale du réseau Sergio ....
En cet état le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit que la société Sergio Bossi était mal fondée en son exception d'inexécution et que les factures présentées et justifiées des mois de décembre 2011 au mois d'avril 2012 étaient dues.
Il ne sera réformé qu'en ce qui concerne le quantum de la condamnation à paiement, lequel n'est pas de 13 873, 60 euros comme retenu par les premiers juges mais de 17 342 euros, augmenté des intérêts de retard prévu par les dispositions de l'article L 441-6 du code de commerce, soit 1% correspondant au taux de refinancement de la Banque Centrale Européenne, augmenté de 10 points pour chaque facture non réglée à son échéance et jusqu'à parfait règlement.
Sur les indemnités de fin de contrat
Il est constant que le contrat du 1er janvier 2010 a été résilié par la société Sergio Bossi le 23 avril 2012.
Le contrat prévoit en son article 5, dans l'hypothèse d'une dénonciation du contrat, une indemnité de résiliation anticipée équivalente au total de la somme qui aurait été payée jusqu'à la fin du contrat 'pour indemniser la victime de la rupture du défaut de respect des formalités de résiliation' et dans son article 6 une indemnité complémentaire dite de fin de contrat' 'pour indemniser la Sarl SB11 de ses investissements et lui permettre de rechercher une nouvelle clientèle' renvoyant le quantum de cette indemnité forfaitaire en annexe.
L'annexe fait référence à une indemnité de résiliation de 50 000 euros et à une indemnité de fin de contrat de 100 000 euros.
Les premiers juges, s'agissant de l'indemnité de résiliation, après avoir relevé la contradiction entre les termes de l'article 5 et le quantum de l'indemnité visée en annexe ont retenu, au visa de l'article 1162 du code civil, l'indemnité la plus forte soit l'équivalent de la somme qui aurait été payée jusqu'à la fin du contrat (32 mois x 2 900 euros HT), soit la somme de 92 800 euros.
Ils ont modéré l'indemnité dite de ' fin de contrat' au motif qu'elle était excessive, en la fixant, au prorata de la durée de la relation contractuelle des parties, à 53 333 euros.
En cause d'appel, la société Sergio Bossi soutient, s'agissant de l'indemnité de résiliation hors délai,
qu'en l'état de la contradiction entre les termes du contrat et son annexe, le contrat doit s'interpréter en sa faveur et demande à la cour de retenir la somme de 50 000 euros, de modérer cette pénalité compte tenu de son caractère manifestement excessif en la fixant à un euro et de tenir pour nulle l'obligation à paiement de l'indemnité automatique de fin de contrat de 100 000 euros au motif de la fausse cause ou de la cause illicite.
Tandis que la société SB 11 se prévaut des termes cumulés du contrat et de son annexe pour poursuivre la condamnation de la société Sergio Bossi à lui payer les sommes de 110 988, 80 euros (soit 32 mois restant à courir pour un honoraire mensuel exprimé TTC), 50 000 euros visée en annexe, et 100 000 euros au titre de l'indemnité de fin de contrat.
- Sur l'indemnité de fin de contrat (article 6)
La société Sergio Bossi conteste la réalité des investissements réalisés par la société SB11de nature à justifier le versement inconditionnel d'une indemnité de 100 000 euros dans tous les cas de fin de contrat et relève que ce dernier faisait suite à un contrat de travail salarié dont M. ..., depuis lors dirigeant de SB 11, bénéficiait au sein de la société Sergio Bossi pour s'interroger sur la cause véritable de l'engagement ainsi souscrit ('on peut légitimement se demander si le contrat est réellement causé au sens de l'article 1108 du code civil ou s'il ne dissimule pas [....] autre chose' écrit-elle en p. 7 de ses conclusions, avant d'ajouter en p. 10 ' une telle cause de stipulation des indemnités de fin de contrat est à la fois contraire à la cause affichée dans le contrat [ ....] et surtout illicite, puisqu'elle a manifestement pour objet et pour effet d'éviter d'assujetir les sommes en question aux cotisations sociales').
Mais cette indemnité, librement convenue entre les parties dans un contrat qui évoque à plusieurs reprises le caractère déterminant de l'intuitu personae, s'apparente tant par sa nature que par son quantum à une clause dite 'parachute'.
Indissociable de l'économie générale de la convention par laquelle la société Sergio Bossi a souhaité se garantir la collaboration de la société SB11 à laquelle étaient confiées les missions les plus larges d'animation effective du réseau de franchise (' Développement - recherche et négociation de locaux ou de fonds de commerce sur instructions de la société Sergio Bossi, -recherche de financements -relations avec les intervenants, agents d'affaires gérants et avocats/ Gestion - recrutement du personnel et entretiens d'embauche, -relations avec les comptables et avocats,-assistance à la rédaction des contrats/ Activités commerciales - assistance de la société Sergio Bossi dans ses relations avec les franchisés - animation des équipes') moyennant un montant d'honoraires qui, au regard de l'étendue des missions confiées, n'apparaît pas excessif, elle ne peut être regardée comme étant sans cause dès lors qu'elle constitue la contrepartie de l'acceptation par SB11 de telles missions ni, à défaut de démonstration probante, comme reposant sur une cause illicite.
Due dans tous les cas de fin de contrat et ne constituant pas, par conséquent, la sanction contractuelle d'une partie à ses obligations, elle n'est pas une clause pénale au sens de l'article 1152 du code civil, de sorte que les premiers juges ne pouvaient faire usage de leur pouvoir de modération sans méconnaître la loi des parties.
Le jugement sera infirmé sur ce point et la société Sergio Bossi condamnée à payer la somme de 100 000 euros de ce chef à la société SB11.
- Sur l'indemnité dite de résiliation (article 5 et annexe)
Le contrat et son annexe ne visent qu'une seule indemnité dite de résiliation de sorte que la société SB11 ne saurait se prévaloir des deux indemnités de résiliation cumulées.
La contradiction entre les termes de l'article 5 qui vise une indemnité égale au total de la somme qui aurait été payée jusqu'à la fin du contrat, soit en l'espèce, la somme de 92 800 euros, cette somme à caractère indemnitaire n'étant pas assujetie à la TVA de sorte qu'elle se calcule hors taxes, et la référence dans l'annexe à une somme forfaitaire de 50 000 euros est patente et irréconciliable.
Elle ne peut se résoudre que par application de l'article 1162 du code civil selon lequel dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation, soit dans le cas d'espèce, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, contre la société SB11 et en faveur de la société Sergio Bossi qui a contracté l'obligation à paiement.
Il en résulte que seule l'indemnité de 50 000 euros est due.
Cette indemnité qui sanctionne une résiliation intervenue avant l'échéance normale du contrat constitue une clause pénale susceptible de modération si elle apparaît manifestement excessive tant au regard des obligations contractées par son débiteur qu'au regard du préjudice subi par le créancier.
Il est constant que le contrat en cause a été conclu pour une durée de 5 ans moyennant le versement d'honoraires à hauteur de 2 900 euros HT mensuel, soit une somme de 34 800 euros par an, qu'il n'a été exécuté que sur deux ans et demi sur les cinq convenus, de sorte que la société SB11 s'est trouvée privée, du fait de la résiliation, d'une espérance de gain assurée de plus de 70 000 euros.
En cet état, une clause pénale de 50 000 euros n'apparaît pas manifestement excessive.
En définitive sur l'instance opposant la société SB11 à la société Sergio Bossi
La société Sergio Bossi sera condamnée à payer à la société SB 11
- la somme de 17 342 euros, augmentée des intérêts de retard prévus par les dispositions de l'article L 441-6 du code de commerce, soit 1% correspondant au taux de refinancement de la Banque Centrale Européenne, augmenté de 10 points pour chaque facture non réglée à son échéance et jusqu'à parfait règlement, au titre des factures impayées,
- la somme de 150 000 euros au titre des deux indemnités de fin de contrat, avec intérêts au taux légal à compter du 25 juin 2012,
Sur l'appel en garantie de la société Sergio Bossi contre les acquéreurs
La société Sergio Bossi forme un appel en garantie afin d'être relevée indemne des condamnations prononcées contre elle au profit de la société SB11 contre M. X et les autres cédants en se prévalant des dispositions du protocole d'accord du 13 novembre 2011 tandis que les intimés font valoir qu'en ayant pris unilatéralement l'initiative de résilier la convention liant la société Sergio Bossi à la société SB11, l'appelante qui a délibérément agi en dehors du champ de ladite convention doit supporter seule les conséquences de la résiliation du contrat de prestations de services du 1er janvier 2010.
L'article 8-1 du protocole de cession est ainsi rédigé
'8.1 ' Règlement du conflit d'intérêts lié à la coexistence et aux conditions d'exploitation de l'enseigne GINA GINO
Les Parties s'accordent à constater qu'il existe un réseau de franchise exploité sous enseigne GINA GINO, exerçant une activité concurrente à celles développées par les Parties, et notamment à la franchise SERGIO BOSSI.
Le fondateur et principal animateur de cette franchise est Monsieur Philippe ....
Au vu de ces constats, les parties s'accordent également sur la nécessité de prévenir un conflit d'intérêts latent tenant aux éléments suivants
- Le franchiseur de l'enseigne GINA GINO est la SARL SILEX, dans laquelle Monsieur Bernard X est propriétaire de 50% des parts ;
- Monsieur Philippe ... est gérant de la SARL SB 11, qui est liée à la société SERGIO BOSSI pour l'animation de la franchise, en qualité de responsable de l'animation réseau, dans le cadre d'une convention signée le 1er janvier 2010 pour une durée de 5 années ;
- Une large partie du développement du réseau GINA GINO est opérée au travers de diverses sociétés, et notamment de la société PRB et de ses filiales, dans lesquelles Monsieur Bernard X détient un intérêt en qualité d'associé, aux côtés de Monsieur Philippe ... notamment,
- Monsieur ... utilise depuis plusieurs années l'infrastructure et les moyens de la société SERGIO BOSSI pour développer et animer la franchise GINA GINO
Afin de régler au mieux de leurs intérêts communs ce conflit potentiel, les Parties ont convenu ce qui suit
8.1.1. Le Groupe X s'engage, dans le cadre d'une simple obligation de moyens, à négocier avec Monsieur Philippe ... les conditions d'un accord, qui devra être agréé par le Groupe COIFFURE DU MONDE, dont l'économie est la suivante
o Résiliation immédiate de la convention unissant SB 11 à SERGIO BOSSI sans indemnités, ou indemnités prises en charge par le Groupe X,
o Mise en place d'une convention par laquelle SILEX et SERGIO BOSSI deviennent " co-franchiseurs " de la marque GINA GINO, SILEX mettant à disposition la marque et assurant le développement et l'animation du réseau GINA GINO grâce aux moyens et à l'infrastructure de SERGIO BOSSI, les deux sociétés se partageant les revenus de la franchise.
Cette convention de co-franchise devra respecter les points suivants - Durée à définir
- Monsieur X demeure propriétaire de sa participation dans SILEX et reçoit à ce titre les dividendes.
o En complément ou indépendamment de ce contrat, il pourra être proposé à une société de Monsieur ... la signature d'un contrat commercial l'intéressant au développement de l'ensemble des marques de la société SERGIO BOSSI.
8.1.2. Dans l'hypothèse où l'accord envisagé au 8.1.1 ne pourrait être trouvé, Monsieur X s'engage, dans le cadre d'une simple obligation de moyens, à tenter de céder à Monsieur ... ou à toute personne désignée par lui l'intégralité des Titres qu'il détient directement ou indirectement dans toute société intéressée directement ou indirectement à l'exploitation de la marque GINA GINO et notamment dans les sociétés SILEX et PRB DÉVELOPPEMENT.
Monsieur X fixera dans cette hypothèse librement le prix de cession.
Concomitamment à ces cessions, le Groupe X fera son affaire personnelle de la résiliation immédiate de la convention unissant SB 11 à SERGIO BOSSI sans indemnités, ou indemnités prises en charge par le Groupe X.
8.1.3. Dans l'hypothèse où aucune des deux solutions proposées aux points 8.1.1 et 8.1.2 n'aurait été réalisée avant le 31 mars 2012, les Parties s'engagent à résoudre ainsi que suit le conflit d'intérêt latent
o Monsieur X et l'une des filiales du Groupe COIFFURE DU MONDE constitueront égalitairement une société sous forme de SARL, dirigée par deux cogérants, chacun étant choisi par chaque associé,
o Cette société rachètera à Monsieur X pour un prix de 200 000 (deux cent mille) euros l'intégralité des Titres qu'il détient directement ou indirectement dans toute société intéressée directement ou indirectement à l'exploitation de la marque GINA GINO et notamment dans les sociétés SILEX et PRB DÉVELOPPEMENT, après purge du droit de préférence de l'associé.
o Le prix correspondant sera inscrit en compte courant dans les livres de la société acquéreur, ledit compte courant étant bloqué tant que les bénéfices dégagés par la société n'en permettront pas le remboursement et au plus tard jusqu'au 30 novembre 2020.
o Cette société fera l'objet d'une option d'achat séparée et indépendante dans les mêmes conditions que les Titres de la société HDGC. Dans l'hypothèse où le Groupe COIFFURE DU MONDE n'exercerait pas son option d'achat, Monsieur X bénéficiera de la même option ayant la même durée ; un acte sera spécialement établi à cet effet lors de la constitution de la société.
o La société SERGIO BOSSI résiliera à effet immédiat la convention l'unissant à la société SB 11, les indemnités de rupture afférentes étant prises en charge par le Groupe X'.
Ces seules dispositions attestent l'importance que revêtait pour les parties contractantes le sort du contrat conclu par la société Sergio Bossi avec la société SB 11 de M. ..., dont il était prévu dans toutes les hypothèses qu'il devait être résilié sans indemnité à la charge de l'acquéreur.
Il est cependant constant qu'en n'ayant pas exigé que ledit contrat fût résilié avant sa décision d'acquérir, le Groupe Coiffure du Monde qui a confié à M. X une seule obligation de moyens de négocier avec M. ..., a pris le risque de voir ces négociations ne pas aboutir, de sorte que l'argument quelle développe selon lequel les indemnités de résiliation du contrat SB11 devraient en tout état de cause venir en diminution du prix de cession de la cession Sergio ... est inopérant, le prix ayant été déterminé et la cession étant intervenue, de la commune volonté des parties, sans que le sort dudit contrat ait été réglé.
M. X quant à lui ne justifie par aucune pièce avoir satisfait à son obligation de négociation avec M. ... et ne saurait soutenir, comme pourtant il le fait, qu'il en aurait été empêché par les nouveaux acquéreurs qui auraient ' pris la main' sans l'en aviser sur la relation initiée en 2010 avec la société SB 11 en renonçant 'de manière évidente à faire application du protocole', alors qu'aucun contact direct n'est établi entre la société Sergio Bossi et SB 11 antérieurement au courrier que la première a adressé à la seconde le 20 février 2012, de sorte qu'il a disposé seul d'une période de presque trois mois ayant couru de la prise d'effet de la cession, le 1er décembre 2011, à cette date pour satisfaire à ses obligations, à savoir, à défaut de la conclusion d'une convention de partenariat de co-franchise avec la société de M. ..., prévue par le paragraphe 8.1.1 du protocole, la cession de ses titres dans les sociétés exploitant la marque concurrente 'Gina ...', prévue par le paragraphe 8.1.2, qui ne dépendait que de sa propre décision. Or, il ne justifie d'aucune tentative en ce sens, alors même que ladite clause ne le contraignait pas à céder ses titres à M. ..., mais visait tout tiers intéressé, de sorte que les relations contractuelles entre Sergio ... et ce dernier étaient à cet égard indifférentes.
Il reste qu'en ayant mis unilatéralement un terme le 23 avril 2012 au contrat de prestations de service dont bénéficiait la société SB11, sans en aviser antérieurement sous quelque forme que ce soit M. X, ni l'avoir préalablement mis en demeure d'exécuter le protocole avec plus de diligence et, comme l'ont à juste titre relevé les premiers juges, en ayant jeté la suspicion dans son courrier adressé à SB11 le 20 février 2012 sur la réalité des prestations de cette dernière et la nature des arrangements ayant jusqu'alors présidé à ses relations d'affaires avec Sergio ..., dont elle avait parfaitement connaissance à la date de la cession, la société appelante a, de son propre fait, gravement compromis les chances de parvenir à un accord avec M. ... et manqué à son obligation de loyauté à l'égard de M. X dans la mise en oeuvre du protocole engageant les parties.
Il résulte de la seule chronologie des faits que M. X en dépit des termes du protocole conclu avec les acquéreurs a préféré conserver ses intérêts dans le réseau 'Gina ...' et que la société Sergio Bossi a, pour sa part, brutalement mis un terme à une convention qui l'engageait seule, sans souci d'une exécution de bonne foi du protocole qui la liait à M. X.
En cet état, il sera fait partiellement droit à l'appel en garantie de la société Sergio Bossi à hauteur de la moitié des sommes dues au titre des indemnités de résiliation, la société Sergi Bossi ne pouvant recourir contre des tiers s'agissant du paiement de factures dont elle est la seule débitrice.
Sur les autres demandes
Les dispositions du jugement déféré (RG/ 2013076146) relatives à l'indemnité de procédure allouée à la société SB11 (4 000 euros) seront confirmées sans que l'équité ne commande d'y ajouter en cause d'appel.
Les dispositions du jugement déféré ( RG/ 2014/0110267) qui ont condamné la
société Sergio Bossi à payer à M. X et autres la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, alors qu'il avait été fait partiellement droit à ses demandes seront infirmées, et l'équité ne commandera pas de faire application des dispositions de l'article 700 au profit de quiconque.
Il sera fait masse des dépens qui seront supportés par moitié par la société Sergio Bossi, d'une part, par M. X, Mme W et la Sas Holding Développement Gestion Coiffure d'autre part.

PAR CES MOTIFS
Joint les deux procédures au rôle de la cour sous les numéros RG 14/17322 et RG 14/17 325,
Sur l'appel du jugement du 18 juillet 2014 (SB11 c/ Sergio Bossi - RG 2013076146 du tribunal de commerce de Paris)
Confirme le jugement déféré sauf sur le quantum des condamnations prononcées au titre du paiement des factures (13 873,60 euros) et des indemnités de fin de contrat
(146 133 euros) et en ses dispositions sur les dépens,
Statuant à nouveau,
Condamne la société Sergio Bossi à payer à la société SB 11
- la somme de 17 342 euros, augmentée des intérêts de retard prévus par les dispositions de l'article L 441-6 du code de commerce, soit 1% correspondant au taux de refinancement de la Banque Centrale
Européenne, augmenté de 10 points de pourcentage pour chaque facture non réglée à son échéance et jusqu'à parfait règlement, au titre des factures impayées,
- la somme de 150 000 euros au titre des deux indemnités de fin de contrat, avec intérêts au taux légal à compter du 25 juin 2012,
Sur l'appel du jugement du 18 juillet 2014 (Sergio ... c/ M. X, Mme W et la société Holding Développement Gestion Coiffure- RG 2014010267 du tribunal de commerce de Paris)
Infirme le jugement déféré, Statuant à nouveau de ce chef,
Condamne in solidum M. X, Mme W et la Sas Holding Développement Gestion Coiffure à garantir la société Sergio Bossi du paiement de la somme mise à sa charge au titre des deux indemnités de fin de contrat dues à la société SB11 à hauteur de la moitié de cette somme (soit la moitié de la somme de 150 000 euros),
Déboute les parties de leurs demandes au titre des dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile,
Sur les autres demandes, Rejette toute autre demande,
Fait masse des dépens de première instance et d'appel des deux instances jointes et dit qu'ils seront supportés par moitié par la société Sergio Bossi, d'une part, in solidum par M. X, Mme W et la Sas Holding Développement Gestion Coiffure d'autre part, les dépens d'appel pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La Greffière, La Présidente,

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