SOC.PRUD'HOMMESC.M.
COUR DE CASSATION
Audience publique du 5 mai 2004
Cassation
M. SARGOS, président
Arrêt n° 880 FS P+B
Pourvoi n° K 01-47.071
Aide juridictionnelle totale en demande au profit de M. Z.
Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de Cassation en date du 17 octobre 2002.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par M. Thierry Z, demeurant Bavilliers,
en cassation d'un arrêt rendu le 11 septembre 2001 par la cour d'appel de Besançon (chambre sociale), au profit de la société Compagnie des transports de la région de Belfort (CTRB), dont le siège est Danjoutin, défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 9 mars 2004, où étaient présents M. Sargos, président, M. Liffran, conseiller référendaire rapporteur, M. Le Roux ..., Finance, Texier, Mmes Mazars, Quenson, MM. Trédez, Blatman, Barthélemy, conseillers, Mmes Bourgeot, Nicolétis, Auroy, Grivel, Leprieur, Martinel, Bouvier, M. Rovinsky, conseillers référendaires, M. Maynial, avocat général, Mlle Piquot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Liffran, conseiller référendaire, les observations de Me Rouvière, avocat de M. Z, de la SCP Bachellier et Potier de la Varde, avocat de la société Compagnie des transports de la région de Belfort, les conclusions de M. Maynial, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que M. Z a été embauché en qualité d'agent de médiation, le 5 octobre 1998, par la compagnie des Transports de la région de Belfort ; que le contrat de travail prévoyait une période de stage d'une durée de douze mois au terme de laquelle l'intéressé serait titularisé dès lors qu'il aurait donné satisfaction ; que le 4 mai 1999, l'employeur a rompu le contrat par une lettre ainsi rédigée "Vous avez eu en date du 11 mars 1999 avec votre responsable hiérarchique et votre chef d'exploitation un long entretien où nous avons fait part de nos vives inquiétudes quant à la poursuite d'une collaboration ; à ce jour je suis amené à constater que nous sommes toujours confrontés aux mêmes attitudes de votre part" ; qu'estimant cette rupture abusive, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de dommages-intérêts ;
Sur la fin de non-recevoir soulevée par la défense
Attendu que l'employeur soutient essentiellement que le pourvoi ne tend pas à faire censurer par la Cour de Cassation la non-conformité de la décision attaquée aux règles de droit ;
Mais attendu que le pourvoi invoque la violation de la loi en se fondant sur des textes précis ; qu'il est donc recevable ;
Sur l'irrecevabilité du second mémoire en demande
Attendu que M. Z, après avoir reçu notification du récépissé de sa déclaration de pourvoi, le 21 décembre 2001, et avoir déposé un premier mémoire en demande, le 12 mars 2002, a saisi le bureau d'aide juridictionnelle, le 29 mars 2002 ; que le délai imparti par l'article 989 du nouveau Code de procédure civile pour déposer un mémoire en demande étant expiré le 21 mars 2002, son second mémoire, déposé le 15 novembre 2002, est irrecevable ;
Sur le moyen unique du premier mémoire
Vu l'article 16 de la Convention collective nationale des réseaux de transports urbains du 11 avril 1986 ;
Attendu, selon ce texte, que tout salarié doit, avant d'être admis d'une façon définitive dans l'entreprise, effectuer un stage d'une durée de douze mois correspondant à une prestation effective dans l'entreprise ; qu'au cours de cette période, l'employeur a la possibilité de mettre fin au contrat de travail des stagiaires qui ne donnent pas satisfaction ou dont les aptitudes physiques sont insuffisantes après un préavis de huit jours pour ceux dont la présence dans l'entreprise est inférieure à six mois et après un préavis d'un mois pour ceux dont la présence dans l'entreprise est supérieure à six mois ; qu'à l'issue de cette période, tout agent doit être titularisé ou congédié ; qu'il en résulte que l'employeur, qui ne peut rompre le contrat de travail que pour l'une des causes prévues par cet article, doit faire connaître le motif de la rupture au salarié ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande, l'arrêt énonce que la période de douze mois pendant laquelle il était stagiaire devant être assimilée à une période d'essai pendant laquelle les dispositions de l'article L. 122-4 du Code du travail ne sont pas applicables, la motivation de la lettre de rupture est suffisamment explicite et conforme aux exigences de l'article 16 de la convention collective nationale des réseaux de transports urbains du 11 avril 1986 ;
Attendu, cependant, qu'il ne peut être mis fin au stage prévu par la convention collective que pour l'un des motifs limitativement énumérés à l'article 16 de la convention collective nationale susvisée ;
D'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il ressortait de ses propres constatations que la lettre du 4 mai 1999 ne faisait état d'aucun des motifs visés à l'article 16 de la convention collective, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 septembre 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne la société Compagnie des transports de la région de Belfort aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mai deux mille quatre.