Jurisprudence : CAA Bordeaux, 2e ch., 11-12-1995, n° 93BX00719

Cour administrative d'appel de Bordeaux

Statuant au contentieux
S.A. FOMAT


M. TRIOULAIRE, Rapporteur
M. CIPRIANI, Commissaire du gouvernement


Lecture du 11 décembre 1995



R E P U B L I Q U E   F R A N C A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


    
Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 24 juin 1993, présentée pour la SOCIETE ANONYME FOMAT ayant son siège social 18, boulevard Drouot à Paris ;
    La S.A. FOMAT demande à la cour :
    - d'annuler le jugement en date du 19 avril 1993 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande en décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été assigné au titre de la période du 1er janvier 1981 au 30 mars 1984 ;
    - de prononcer la décharge dudit rappel de taxe sur la valeur ajoutée ressortissant à la somme de 393.022 F ;
    Vu les autres pièces du dossier ;
    Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
    Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
    Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
    Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
    Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 1995 :
    - le rapport de M. TRIOULAIRE, conseiller ;
    - les observations de M. COURREGE, président-directeur-général de la S.A. FOMAT ;
    - et les conclusions de M. CIPRIANI, commissaire du gouvernement ;


    Sur la régularité de la procédure d'imposition :
    En ce qui concerne la notification de redressements :
    
Considérant qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales alors en vigueur : 'l'administration adresse au contribuable une notification de redressements qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler des observations ou de faire connaître son acceptation' ;
    Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par une notification du 17 juin 1985, la S.A. FOMAT a été informée des redressements que l'administration entendait apporter en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1981 au 30 avril 1984 ; que cette notification qui comportait la nature, les motifs et le montant des rappels envisagés était suffisamment motivée au regard des dispositions précitées de l'article L.57 du livre des procédures fiscales ;
    En ce qui concerne la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires :
    Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que la S.A. FOMAT a seulement contesté au cours de la procédure d'imposition le principe de l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée de l'opération de mise à disposition de personnel à la société Cofater à l'exclusion de toute question de fait relative aux bases retenues par l'administration ; que la question de droit ainsi soulevée par la S.A. FOMAT échappait à la compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qui s'est, par suite, déclarée à bon droit incompétente pour en connaître ;
    En ce qui concerne l'abus de droit :
    Considérant qu'aux termes de l'article L.64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable en l'espèce : 'Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : c) Ou qui permettent d'éviter, en totalité ou en partie, le paiement des taxes sur le chiffre d'affaires correspondant aux opérations effectuées en exécution d'un contrat ou d'une convention - L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse - Si elle s'est abstenue de prendre l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit ou ne s'est pas rangée à l'avis de ce comité, il lui appartient d'apporter la preuve du bien-fondé du redressement' ;
    Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration n'a pas écarté comme ne lui étant pas opposables les contrats liant la S.A. FOMAT à la société Cofater et se rapportant à des prestations de personnel mais s'est bornée, comme elle était en droit de le faire, à vérifier dans quelle mesure les conditions auxquelles est subordonné le bénéfice de l'article 259 B du code général des impôts étaient remplies ; que l'examen de la qualification juridique de fait auquel s'est livrée l'administration ne peut s'analyser en la mise en oeuvre de la procédure de répression des abus de droit ;
    Sur le bien-fondé de l'imposition :


    Considérant qu'aux termes de l'article 259 du code général des impôts : 'Les prestations de services sont imposables en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut son domicile ou sa résidence habituelle' et qu'aux termes de l'article 259 B dont les dispositions sont compatibles avec le paragraphe 2 de l'article 6 de la deuxième directive du 11 avril 1967 et le 7 de son annexe B : ' ... par dérogation aux dispositions de l'article 259, les prestations suivantes : ... mise à disposition de personnel ... sont imposables en France ... lorsque le bénéficiaire est un assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée qui a en France le siège de son activité ou un établissement stable pour lequel le service est rendu ... elles ne sont pas imposables en France, même si le prestataire est établi en France, lorsque le bénéficiaire est établi hors de la communauté économique européenne' ;
    Considérant que la S.A. FOMAT, dont l'activité consiste en la location de personnel temporaire dans les secteurs de l'industrie, du bâtiment et des travaux publics, a mis du personnel à la disposition de la compagnie française d'assistance technique, d'études et de réalisations (Cofater) ; que cette dernière société est établie en France et n'est pas assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée dans un autre Etat membre de la communauté ; que la SOCIETE FOMAT ne conteste pas que les prestations ainsi fournies étaient imposables en France à la taxe sur la valeur ajoutée en application des dispositions précitées du code général des impôts ;
    Considérant il est vrai que la société requérante peut être regardée comme se prévalant, sur le fondement de l'article L.80-A du livre des procédures fiscales de l'instruction ministérielle 3-A-17-79 du 13 novembre 1979 publiée au bulletin officiel de la direction générale des impôts dès lors qu'elle soutient que la société Cofater a utilisé le personnel mis à sa disposition pour l'exécution d'un contrat passé le 8 mai 1982 avec la société Degrémont et ayant pour objet le contrôle des analyses chimiques d'une station d'eaux résiduaires située en Irak et la formation du personnel local ; qu'en effet, l'instruction précitée qui traite en son 2) de la mise à disposition de personnel utilisé à l'étranger prévoit que la fourniture de personnel à une entreprise n'est pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée lorsque cette entreprise utilise le personnel exclusivement hors de France pour la réalisation d'une opération non imposable en application des règles de territorialité ; que ladite instruction dispose cependant que, par exception au principe ainsi posé, si le personnel fourni par le sous-traitant est lui-même mis à disposition de celui-ci par une autre entreprise française, la prestation réalisée par cette dernière est imposable en France ;


    Considérant qu'il résulte de l'instruction que si la SOCIETE FOMAT a mis à la disposition de la société Cofater du personnel qui a effectué des travaux à l'étranger, ces travaux ont été réalisés, en vertu du contrat précité du 8 mai 1982, pour le compte de la société Degrémont dont le siège social est en France, et ont donné lieu à facturation à l'ordre de cette dernière société ; qu'il s'ensuit que les sommes versées par la société Cofater, sous-traitante de la société Degrémont, à la SOCIETE FOMAT en rétribution de la prestation de mise à disposition de personnel fournie par cette dernière se rapportent à une opération qui, par référence à l'instruction dont se prévaut la société requérante, doit être soumise à la taxe sur la valeur ajoutée ;

    Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE FOMAT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;


Article 1er : La requête de la S.A. FOMAT est rejetée.

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