Cour administrative d'appel de Bordeaux
Statuant au contentieux
M. Mieczyslaw LECH
M. CHEMIN, Rapporteur
M. REY, Commissaire du gouvernement
Lecture du 11 octobre 1999
R E P U B L I Q U E F R A N C A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 24 juillet 1996, présentée pour M. Mieczyslaw LECH, demeurant 25, rue Georges Guynemer à Poitiers (Vienne), par Me Giroire Revalier ;
M. Mieczyslaw LECH demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement en date du 23 mai 1996 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 avril 1994 du préfet de la Vienne refusant de rapporter l'arrêté du 18 octobre 1993 de suspension provisoire de son permis de conduire et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 6 000 F en réparation du préjudice subi ;
2 ) d'annuler l'arrêté du 18 octobre 1993 et la décision du 5 avril 1994 précités et de condamner l'Etat à lui payer la somme de 6 000 F demandée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 septembre 1999 :
- le rapport de M. CHEMIN, rapporteur ;
- et les conclusions de M. REY, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.18-1 du code de la route, le préfet peut, dans les soixante-douze heures de la rétention du permis de conduire opérée par les officiers et agents de police judiciaire sur le fondement du même article, prononcer la suspension du permis pour une durée qui ne peut excéder six mois, lorsque le conducteur a refusé de se soumettre aux épreuves et vérifications destinées à établir la preuve de l'état alcoolique ; qu'aux termes de l'article L.18, alinéa 5 du même code : 'Les mesures administratives prévues au présent article ou à l'article L.18-1 seront comme non avenues en cas d'ordonnance de non-lieu ou de jugement de relaxe ou si la juridiction ne prononce pas effectivement de mesure restrictive au droit de conduire.' ;
Considérant qu'à la suite d'un procès-verbal d'infraction à l'article L.1er du code de la route, dressé le 16 octobre 1993 à l'encontre de M. LECH pour avoir refusé de se soumettre aux épreuves de dépistage et aux vérifications destinées à établir son état alcoolique, le préfet de la Vienne a, par un arrêté du 18 octobre 1993, prononcé la suspension pour une durée de six mois de la validité du permis de conduire de l'intéressé, et, par une décision du 5 avril 1994, refusé de rapporter son précédent arrêté ; que, toutefois, M. LECH a été relaxé, par un jugement du tribunal correctionnel de Poitiers du 30 juin 1994, des fins de la poursuite engagée contre lui en raison des mêmes faits ; que dans ces conditions, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le délai du recours contentieux était expiré lorsque M. LECH a demandé le retrait de l'arrêté de suspension, ce dernier doit être regardé comme dépourvu de base légale et devait être annulé ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. LECH est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de la décision refusant de retirer cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'indemnités :
Considérant que l'illégalité dont sont entachés l'arrêté du 18 octobre 1993 et la décision du 5 avril 1994 constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation des troubles de toute nature dans les conditions d'existence subis par M. LECH du fait de la suspension de son permis de conduire pendant six mois en lui allouant une indemnité de 5 000 F ; que, dès lors, le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;
Article 1er : Le jugement en date du 23 mai 1996 du tribunal administratif de Poitiers, l'arrêté du 18 octobre 1993 du préfet de la vienne et sa décision du 5 avril 1994 sont annulés.
Article 2 : L'Etat (ministère de l'intérieur) est condamné à payer à M. Mieczyslaw LECH la somme de 5 000 F (cinq mille francs).
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Mieczyslaw LECH est rejeté.