Jurisprudence : CA Lyon, 16-10-2024, n° 21/01838, Infirmation partielle

CA Lyon, 16-10-2024, n° 21/01838, Infirmation partielle

A43266BT

Référence

CA Lyon, 16-10-2024, n° 21/01838, Infirmation partielle. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/112184646-ca-lyon-16102024-n-2101838-infirmation-partielle
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AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE


N° RG 21/01838 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NOSE


[F]


C/

S.A.S. QCS SERVICES


APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 11 Février 2021

RG : 19/01554


COUR D'APPEL DE LYON


CHAMBRE SOCIALE A


ARRÊT DU 16 OCTOBRE 2024



APPELANTE :


[N] [F]

née le … … … à COTE D'IVOIRE

[Adresse 2]

[Localité 3]


représentée par Me Delphine MONNIER de la SELARL CVS, avocat au barreau de LYON


INTIMÉE :


Société QCS SERVICES

[Adresse 1]

[Localité 4]


représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON, et ayant pour avocat plaidant Me Sarah USUNIER de la SELARL RACINE, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Aude BONNARD, avocat au barreau de PARIS


DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 18 Juin 2024



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :


Catherine MAILHES,Présidente

Nathalie ROCCI, Conseillère

Anne BRUNNER, Conseillère


Assistés pendant les débats de Morgane GARCES, Greffier.


ARRÊT : CONTRADICTOIRE


Prononcé publiquement le 16 Octobre 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile🏛 ;


Signé par Catherine MAILHES,Présidente et par Malika CHINOUNE, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


*************



FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES


Mme [F] (la salariée) a été engagée le 13 novembre 2017 par la société QCS services (la société) par contrat à durée indéterminée en qualité d'architecte chef de projet et ATMO, statut cadre, position 2.2, coefficient 130 de la convention collective nationale du personnel des bureaux d'études techniques et cabinets d'ingénieurs conseil (SYNTEC).


Le 7 février 2019, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour le 12 février 2019, par courrier remis en main propre daté du 30 janvier 2019.


Par courrier du 26 février 2019, la société lui a notifié son licenciement pour faute grave.


Le 11 juin 2019, contestant son licenciement, Mme [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon afin qu'il fixe son salaire moyen mensuel brut à la somme de 3.280 euros, afin qu'il dise sa convention de forfait nulle et qu'il condamne la société QCS services à lui verser une somme à titre de rappels d'heures supplémentaires, et congés payés afférents, une indemnité pour travail dissimulé (19.680 euros), une somme à titre d'indemnisation des repos compensateurs non pris, une indemnité pour harcèlement moral (5.000 euros), une indemnité pour exécution déloyale du contrat de travail (5.000 euros), l'indemnité légale de licenciement (1.411,50 euros), une indemnité compensatrice de préavis (9.840 euros), et congés payés afférents (984 euros), des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, procédure irrégulière et circonstances vexatoires (6.560 euros), outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛 (2.500 euros), à lui remettre les bulletins de salaire et documents de fin de contrat rectifiés avec astreinte, au paiement des intérêts au taux légal.


La salariée a modifié ses demandes, sollicitant la fixation de son salaire mensuel brut à la somme de 3.200 euros, ramenant à 1.000 euros le montant de l'indemnité de licenciement, à 9.600 euros l'indemnité compensatrice de préavis, à 6.400 euros le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, procédure irrégulière et circonstances vexatoires, fixant, à titre principal, à 23.993,12 euros le rappel d'heures supplémentaires, à 12.205,83 euros l'indemnisation des repos compensateurs non pris, ramenant à 19.200 euros l'indemnité pour travail dissimulé et sollicitant le remboursement de frais professionnels à hauteur de 1.000,21 euros.


La société QCS services a été convoquée devant le bureau de conciliation et d'orientation par courrier recommandé avec accusé de réception signé le 13 juin 2018.


La société QCS services s'est opposée aux demandes de la salariée et a sollicité à titre reconventionnel la condamnation de celle-ci au versement de la somme de 2.500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



Par jugement du 11 février 2021, le conseil de prud'hommes de Lyon a :


dit que le licenciement de Mme [F] repose sur une cause réelle et sérieuse justifiant la rupture du contrat de travail de la salariée ;

requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse;

débouté Mme [F] de sa demande de condamnation au titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;


condamné la société QCS services à verser à Mme [F] la somme de 1.000 euros nets (mille euros) à titre d'indemnité légale de licenciement ;

condamné la société QCS services à verser à Mme [F] la somme de 9.600 euros bruts (neuf mille six cents euros) à titre d'indemnité compensatrice de préavis ainsi que la somme de 960 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

ordonné la rectification des bulletins de salaire et des documents de fin de contrat de travail (certificat de travail, attestation Pôle emploi) de Mme [F] sans astreinte ;

dit conforme et opposable la convention de forfait en heures stipulée dans le contrat de travail de Mme [F] ;

débouté Mme [F] de sa demande de condamnation au titre des heures supplémentaires et de la contrepartie en repos ;

débouté Mme [F] de sa demande de condamnation au titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

débouté Mme [F] de sa demande de condamnation au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale ;

condamné la société QCS services à rembourser à Mme [F] la somme de 1.000,21 euros nets (mille euros et vingt et un centime) au titre des frais professionnels ;

ordonné l'exécution provisoire de la décision à intervenir uniquement sur les éléments de droit ;

rappelé qu'aux termes des dispositions de l'article R.1454-28 du code du travail🏛, sont exécutoires de droit à titre provisoire, les jugements ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités visées à l'article R.1454-14 du code du travail🏛 dans la limite de neuf mensualités, étant précisé que la moyenne brute des salaires des trois derniers mois est fixée à la somme de 3200 euros ;

rappelé que les intérêts courent de plein droit au taux légal à compter de la mise en demeure de la partie défenderesse devant le bureau de conciliation en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées ;

condamné la société QCS services à verser la somme de 1.800 euros (mille huit cents euros) à Mme [F] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

débouté la société QCS services de sa demande de condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société QCS services à assumer la charge de tous les dépens de l'instance;

débouté les parties de toutes leurs autres demandes plus amples et contraires.



Selon déclaration électronique de son avocat remise au greffe de la cour le 11 mars 2021, Mme [F] a interjeté appel dans les formes et délais prescrits de ce jugement en ce qu'il a : - DIT ET JUGE le licenciement de Mme [F] repose sur une cause réelle et sérieuse justifiant la rupture du contrat de travail de la salariée ; - REQUALIFIE le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse ; - DÉBOUTE Mme [F] de sa demande de condamnation au titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ; - DIT et JUGE conforme et opposable la convention de forfait en heures stipulée dans le contrat de travail de Mme [F] ; - DÉBOUTE Mme [F] de sa demande de condamnation au titre des heures supplémentaires et de la contrepartie en repos ; - DÉBOUTE Mme [F] de sa demande de condamnation au titre de l'indemnité travail dissimulé ; - DÉBOUTE Mme [F] de sa demande de condamnation au titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ; - DÉBOUTE Mme [F] de sa demande de condamnation au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale.


****


Aux termes des dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 11 juin 2021, avant la clôture des débats, Mme [F] demande à la cour de :


'confirmer le jugement rendu le 11 février 2021 par la section encadrement du conseil de prud'hommes de Lyon en ce qu'il a :

condamné la société QCS services à lui verser la somme de 1.000 euros nets à titre d'indemnité légale de licenciement ;

condamné la société QCS services à lui verser la somme de 9.600 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis ainsi que la somme de 960 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

ordonné la rectification des bulletins de salaire et de ses documents de fin de contrat de travail (certificat de travail, attestation Pôle Emploi) sans astreinte ;

condamné la société QCS services à lui rembourser la somme de 1 000,21 euros nets au titre des frais professionnels ;

infirmer le jugement rendu le 11 février 2021 par la section encadrement du conseil de prud'hommes de Lyon en ce qu'il l'a déboutée des demandes suivantes :

« DIT ET JUGE le licenciement de Mme [F] repose sur une cause réelle et sérieuse justifiant la rupture du contrat de travail de la salariée ;

REQUALIFIE le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse ;

DÉBOUTE Mme [F] de sa demande de condamnation au titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

DIT et JUGE conforme et opposable la convention de forfait en heures stipulée dans le contrat de travail de Mme [F] ;

DÉBOUTE Mme [F] de sa demande de condamnation au titre des heures supplémentaires et de la contrepartie en repos ;

DÉBOUTE Mme [F] de sa demande de condamnation au titre de l'indemnité travail dissimulé ;

DÉBOUTE Mme [F] de sa demande de condamnation au titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

DÉBOUTE Mme [F] de sa demande de condamnation au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale » ;


par conséquent, statuant à nouveau, il est demandé à la cour d'appel de Lyon de :

I. Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail :

à titre principal :


juger que le licenciement notifié est sans cause réelle et sérieuse ;

constater que le salaire de Mme [F] s'élève à la somme de 3.200 euros bruts ;


en conséquence,


condamner la société QCS services à lui payer les sommes suivantes :

1.000 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

9.600 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

960 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

6.400 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de procédure irrégulière et de circonstances vexatoires ;


à titre subsidiaire :


juger que la procédure de licenciement initiée par la société QCS service est irrégulière;


en conséquence,


condamner la société QCS services à lui payer la somme de 3.200 euros de dommages et intérêts pour procédure irrégulière ;


II. Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat de travail :


juger nulle la convention de forfait stipulée dans son contrat de travail ;


en conséquence,


condamner la société QCS services à lui verser les sommes de :


à titre principal,


23.993,12 euros bruts à titre de rappels d'heures supplémentaires outre la somme de 2.399,31 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

19.200 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

12.205,83 euros bruts au titre de l'indemnisation des repos compensateurs non pris outre la somme de 1.220,58 euros bruts au titre des congés payés afférents ;


à titre subsidiaire,


3.285,29 euros bruts à titre de rappels d'heures supplémentaires ;

328,52 euros bruts au titre des congés payés afférents ;


19.200 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;


en tout état de cause,


condamner la société QCS services à lui verser la somme de 5.000 euros à titre d'indemnité pour harcèlement moral ;

condamner la société QCS services à lui verser la somme de 5.000 euros à titre d'indemnité pour exécution déloyale du contrat de travail ;

condamner la société QCS services à lui verser la somme de 1.000,21 euros à titre de remboursement de frais ;

juger que les sommes de nature salariale porteront intérêts à compter de la saisine du conseil de prud'hommes ;

juger que les demandes de nature indemnitaire porteront intérêts à compter de la notification de la décision à intervenir ;

ordonner à la société QCS services à lui remettre les documents de fin de contrat rectifiés en fonction des condamnations à intervenir et notamment un exemplaire original de l'attestation Pôle emploi sous astreinte de 80 euros par jour de retard à compter du trentième jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

se réserver le droit de liquider l'astreinte ;

condamner la société QCS services à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société QCS services aux entiers dépens d'instance.'


Elle a déposé des conclusions le 16 mai 2024 le jour de la clôture.


Selon les dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 3 janvier 2024, ayant fait appel incident en ce que le jugement a dit que le licenciement de Mme [F] repose sur une cause réelle et sérieuse, en ce qu'il a requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse, en ce qu'il l'a condamnée à verser à la salariée une somme à titre d'indemnité légale de licenciement, à titre d'indemnité compensatrice de préavis et au titre des frais professionnels, la société QCS services demande à la cour d'infirmer partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau de :

à titre principal,


juger que le licenciement de Mme [F] est bien fondé et repose sur une faute grave ;


à titre subsidiaire, sur le licenciement,


juger que le licenciement de Mme [F] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

juger qu'il n'y a pas lieu à la condamner au remboursement de frais professionnels à hauteur de 1.000,21 euros nets ;

juger que la convention de forfait en heures de Mme [F] est valide ;


à titre subsidiaire, en cas de nullité de la convention de forfait en heures,


juger que Mme [F] ne rapporte pas la preuve de l'accomplissement d'heures supplémentaires ;

juger qu'elle n'a pas commis l'infraction de travail dissimulé ;

juger qu'elle a respecté les dispositions relatives au repos quotidien et hebdomadaire ;


à titre infiniment subsidiaire, en cas de nullité de la convention de forfait en heures, si la cour d'appel faisait droit à la demande d'heures supplémentaires de Mme [F],


réduire le quantum de la demande d'heures supplémentaires, en déduisant les sommes indûment perçues au titre des jours de repos/RTT représentant un total de 1.402,10 euros bruts ;


en tout état de cause,


débouter Mme [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;


à titre reconventionnel,


condamner Mme [F] à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner Mme [F] aux entiers dépens de la présente instance.


La clôture des débats a été ordonnée le 16 mai 2024 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 18 juin 2024.


Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.



MOTIFS DE LA DECISION


A titre liminaire, la cour précise que les conclusions déposées le jour de l'ordonnance de clôture des débats sont nécessairement postérieures à celle-ci, qui est tenue pour être rendue le jour dit à 00 heure, en sorte qu'elles sont d'office irrecevables.


Par ailleurs, seules des conclusions de révocation de l'ordonnance de clôture saisissent la juridiction d'une telle demande en application des dispositions de l'article 802 du code de procédure civile🏛, et tel n'a pas été le cas en l'espèce. La cour statue donc sur les dernières conclusions du 11 juin 2024.


Sur l'exécution du contrat de travail


1- Sur la convention de forfait et les heures supplémentaires


La salariée fait grief au jugement de la débouter de sa demande de nullité de la convention de forfait et d'un rappel d'heures supplémentaires subséquent, en faisant valoir que :

- seuls les ingénieurs et cadres percevant une rémunération annuelle au moins égale au plafond de la sécurité sociale peuvent être assujettis à la 'modalité 2" définie à l'article 3 de l'accord du 22 juin 1999 attaché à la SYNTEC, de sorte que tout salarié dont la rémunération serait inférieure à ce plafond peut prétendre à un rappel de salaire pour les heures supplémentaires effectuées au-delà de 35 heures ; cette condition doit être respectée et vérifiée non seulement lors de la conclusion de la convention mais également tout au long de son exécution ; sa rémunération étant inférieure au montant du plafond de la sécurité sociale, elle ne pouvait être soumise à la modalité 2 prévue par la SYNTEC ; la convention de forfait à laquelle elle était soumise en vertu du contrat est donc nulle et elle peut de ce fait prétendre au paiement des rappels de salaires correspondant aux heures effectuées au-delà de 35 heures ;

- le conseil de prud'hommes n'a pas tenu compte de la jurisprudence récente relative au régime probatoire en matière d'heures supplémentaires en vertu de laquelle elle doit non plus étayer sa demande, mais présenter au juge des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétend avoir accompli ; elle a produit en ce sens un décompte précis des heures supplémentaires accomplies faisant mention des heures de pause, et le relevé intégral de l'ensemble de sa boîte mail sur la période concernée dont il ressort qu'elle envoyait régulièrement des mails avant 8h, après 19h, parfois même la nuit et les jours fériés ;

- la société à l'inverse n'apporte aucun élément permettant de justifier des heures accomplies, et celle-ci ne pouvait feindre ignorer qu'elle faisait des heures supplémentaires dans la mesure où elle l'a informée de sa charge de travail et de la nécessité de travailler bien plus que ses heures contractuelles.


La société dénie l'accomplissement par la salariée d'heures supplémentaires et fait valoir que:

- il ressort du contrat de travail de la salariée que non seulement elles avaient conclue une convention de forfait en heures mais également qu'il n'était pas demandé à la salariée d'effectuer des heures supplémentaires au-delà des 36,86 heures hebdomadaires prévues; il était par ailleurs demandé à la salariée, compte tenu de l'autonomie dont elle disposait, de veiller au respect de la durée du travail, la société ne souhaitant pas que ses salariés effectuent des heures supplémentaires, principe notamment rappelé dans l'accord relatif à la réduction du temps de travail en vigueur au sein de la société depuis le 17 janvier 2002 ;

- la salariée ne rapporte pas la preuve, ni qu'elle lui aurait demandé d'effectuer des heures supplémentaires, ni des 823,75 heures supplémentaires qu'elle prétend avoir effectuées pendant sa période d'emploi au sein de la société ;

- les pièces fournies par la salariée pour étayer sa demande sont non probantes : ainsi, le tableau récapitulatif d'heures supplémentaires produit par la salariée pour étayer sa demande a été réalisé pour les seuls besoins de l'instance et présente de nombreuses incohérences; aucun des courriels cités par la salariée dans son 'tableau de courriels', qui constitue une preuve à elle-même prohibée, n'est produit par la salariée ; de nombreuses incohérences apparaissent en opérant la comparaison entre les copies d'écran de la liste des mails de la messagerie électronique de la salariée et le tableau des prétendues heures supplémentaires;

- à titre subsidiaire, il était contractuellement prévu que sa rémunération mensuelle incluait un nombre d'heures supplémentaires défini (1,86 heures) ; par ailleurs, le calcul des heures supplémentaires réalisé par la salariée est erroné en ce qu'elle a omis de déduire les périodes de congés payés ainsi que les périodes d'absence pour maladie.


****


1-1- Sur la convention de forfait


La durée du travail de tout salarié peut être fixée par une convention individuelle de forfait en heures sur la semaine ou le mois.

Il n'est pas nécessaire en ce qui concerne le forfait en heures sur la semaine qu'il s'appuie sur une convention collective ou un accord d'entreprise.

En revanche dès lors que le forfait en heures est fixé sur une période annuelle il est nécessaire outre la convention individuelle de forfait manifestant l'accord du salarié par écrit, qu'un accord collectif d'entreprise, conventionnel ou un accord de branche le prévoit expressément.


Le contrat de travail stipule une convention de forfait de 36,86 heures par semaine ainsi rédigée :

Article 4- Horaire de travail

En application des dispositions de la convention collective nationale du personnel des bureaux d'études techniques et cabinets d'ingénieurs-conseils- Syntec, accord du 22 juin 1999 relatif à la réduction du temps de travail et plus particulièrement les dispositions du chapitre II, article 3, précisées par les dispositions du Protocole d'accord d'entreprise relatif à la réduction du temps de travail, en date du 17 janvier 2002, convention collective et protocole d'accord d'entreprise, dont Mme [F] déclare avoir eu connaissance au préalable, l'horaire hebdomadaire est fixé à 36,86 heures par semaine.

Les modalités, conditions et définitions ainsi posées, expressément acceptées par le salarié, devront être respectées avec soins par celui-ci qui gérera son temps de travail sur l'année. En contrepartie, Mme [F] bénéficiera de dix jours de réduction du temps de travail par an.

Il est convenu que la rémunération versée à Mme [F] est forfaitaire et rémunère l'exercice de sa mission dans la limite des modalités fixées ci-dessus.


Selon l'accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail attaché à la convention collective nationale Syntec, il est prévu que :


Conformément aux dispositions légales, les entreprises conservent la faculté de modifier ou de maintenir l'horaire collectif en vigueur dans l'entreprise avant la date de signature du présent accord.

Trois types de modalités de gestion des horaires sont a priori distingués à l'initiative de l'entreprise :

- modalités standard ;

- modalités de réalisation de missions ;

- modalités de réalisation de missions avec autonomie complète.

Les définitions de ces différentes modalités sont précisées dans les articles ci-après.

Pour relever des modalités de réalisation de missions, les personnels doivent tout d'abord répondre aux conditions d'autonomie définies à l'article 3 ou à l'article 4.


Réalisation de missions

Article 3

Ces modalités s'appliquent aux salariés non concernés par les modalités standard ou les réalisations de missions avec autonomie complète. Tous les ingénieurs et cadres sont a priori concernés, à condition que leur rémunération soit au moins égale au plafond de la sécurité sociale. De plus, en fonction de l'activité de l'entreprise, un accord d'entreprise doit préciser les conditions dans lesquelles d'autres catégories de personnel peuvent disposer de ces modalités de gestion.


Compte tenu de la nature des tâches accomplies (responsabilités particulières d'expertise technique ou de gestion qui ne peuvent s'arrêter à heure fixe, utilisation d'outils de haute technologie mis en commun, coordination de travaux effectués par des collaborateurs travaillant aux mêmes tâches...), le personnel concerné, tout en disposant d'une autonomie moindre par rapport aux collaborateurs définis à l'article 3, ne peut suivre strictement un horaire pré-défini. La comptabilisation du temps de travail de ces collaborateurs dans le respect des dispositions légales se fera également en jours, avec un contrôle du temps de travail opéré annuellement (chapitre III).


Les appointements de ces salariés englobent les variations horaires éventuellement accomplies dans une limite dont la valeur est au maximum de 10 % pour un horaire hebdomadaire de 35 heures.


La rémunération mensuelle du salarié n'est pas affectée par ces variations.


Les dépassements significatifs du temps de travail, commandés par l'employeur, au-delà de cette limite, représentant des tranches exceptionnelles d'activité de 3,5 heures, sont enregistrés en suractivité. Le compte de temps disponible peut être utilisé pour enregistrer ces suractivités qui ont vocation à être compensées par des sous-activités (récupérations, intercontrats...) par demi-journée dans le cadre de la gestion annuelle retenue.

Ces salariés ne peuvent travailler plus de 219 jours pour l'entreprise, compte non tenu des éventuels jours d'ancienneté conventionnels. Le compte de temps disponible peut être utilisé pour enregistrer les jours accordés aux salariés concernés par ces modalités. Toutefois, ce chiffre de 219 jours pourra être abaissé par accord d'entreprise ou d'établissement, négocié dans le cadre de l'article L. 132-19 du code du travail🏛.

Le personnel ainsi autorisé à dépasser l'horaire habituel dans la limite de 10 % doit bénéficier d'une rémunération annuelle au moins égale à 115 % du minimum conventionnel de sa catégorie.

L'adoption de ces modalités de gestion du temps de travail ne peut entraîner une baisse du salaire brut de base en vigueur à la date de ce choix.


(1) Article étendu sous réserve que les cadres bénéficient d'une réduction effective de leur durée de travail en application du paragraphe I de l'article L. 212-15-3 du code du travail🏛 (arrêté du 10 novembre 2000, art. 1


Il est de jurisprudence établie que l'article 3 du chapitre II de l'accord de 1999 instaure une modalité de gestion du temps de travail s'analysant en une convention de forfait en heures assortie d'une garantie d'un nombre maximal annuel de jours de travail et que le bénéfice d'une rémunération au moins égale au plafond de la sécurité sociale prévu par l'article 3 du chapitre II de l'accord du 22 juin 1999 constitue une condition d'éligibilité du salarié au forfait en heures prévu par l'accord collectif


Il n'est pas contesté que la rémunération de la salariée est de 3 200 euros par mois.


Le plafond de la sécurité sociale est fixé à :

- 3 269 euros par mois pour l'année 2017,

- 3311 euros par mois en 2018.


Ce faisant, percevant une rémunération moindre que le plafond de la sécurité sociale, elle n'était pas éligible à la convention de forfait de l'article 3 de l'accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail attaché à la convention collective nationale Syntec.

La convention de forfait est par conséquent nulle.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a dit conforme et opposable la convention de forfait en heures stipulée au contrat de travail.


1-2- Sur les demandes au titre des heures supplémentaires


En conséquence de la nullité de la convention de forfait en heures, la salariée est fondée à demander un décompte de son temps de travail sur la base de 35 heures hebdomadaires et un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires accomplies à compter de la 36ème heure.


Les heures effectuées au-delà sont des heures supplémentaires et sont payées conformément aux majorations prévues par la loi : elles donnent lieu à une majoration de salaire de 25% pour chacune des 8 premières heures (de la 36ème à la 43ème incluse) et de 50% à partir de la 44ème heure.


La durée du travail hebdomadaire s'entend des heures de travail effectif et des temps assimilés, étant précisé que selon les dispositions de l'article L.3121-1 du code du travail🏛, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles.


Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail🏛, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.


Selon l'article L. 3171-4 du code du travail🏛, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.


Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.


Il est rappelé que la règle selon laquelle nul ne peut se constituer de preuve à soi-même n'est pas applicable aux faits juridiques mais aux seuls aux actes juridiques.


En l'espèce, la durée légale du travail s'applique.


La salariée affirme avoir accompli 873,75 heures supplémentaires au cours de la période d'emploi dont 389,75 heures supplémentaires majorées à 25% et 434 majorées à 50%.


Elle verse aux débats :


- un décompte des heures supplémentaires accomplies précisant à compter du 13 novembre 2017 jusqu'au 13 février 2019, pour chacun des jours de travail, la plage horaire avec l'horaire d'embauche et celui de débauche, le temps de pause et le nombre d'heures de travail accomplies par jour, par semaine en mentionnant les heures majorées de 25% et celles de 50%, le temps de travail annuel pour chacune des années 2017, 2018 et 2019 ;

- un relevé intégral de sa boîte mail sur la période concernée, mentionnant les dates et horaires d'envoi ainsi que le destinataire, permettant de constater qu'elle pouvait envoyer des courriels avant 8h (ex : 5 janvier 2018...) et après 19h (ex : 2 janvier 2018...) ;

- divers courriels :


pour celui du 1er mars 2018 à 3h42 adressé à M. [Aa] et copie à M. [C] son, appartenant tous les deux à l'entreprise, indiquant qu'elle travaillait depuis des jours sur le diag de la ville de [Localité 8], et qu'elle finissait à des heures très tardives, qu'elle y passait au moins 12 heures par jour depuis 10 jours et que malgré tous ses efforts, elle ne pourrait pas finir la totalité des sites ;

pour celui du 1er mars 2018 à 9h05 à [B] [G] de la société QCS services sur le dossier VDL : 'Celui là, je ne savais pas trop comment le traiter puisque c'est un IOP... Vu que j'ai travaillé dessus cette nuit je ne pouvais pas d'appeler (...)'

pour celui du 8 octobre 2018 à [U] [X] et [A] [Z], leur indiquant concernant le dossier d'[Localité 5] qu'elle avait bossé tout le week-end avec les économistes, qu'on avait beaucoup avancé mais qu'ils n'auront pas fini avant mercredi alors que le rendu était prévu pour mardi ;

pour celui du 4 septembre 2018 aux mêmes interlocuteurs : 'J'ai travaillé sur ce projet pratiquement toutes mes vacances. Je ne peux plus travailler sans que ce soit décompté sur mon objectif mensuel.


J'ai travaillé tous mes soirs et week-end avant mes vacances et pendant mes vacances aussi.

Déjà au mois de juillet, ce projet m'a pris plus de la moitié du mois en visites et malgré ça j'avais encore d'autres affaires à rentrer qui m'ont pris toutes mes soirées et week-end (j'ai fait un chiffre de 23000 euros malgré tout au dépend de ma santé). Je suis au bout de l'épuisement, ça fait des mois que ça dure et je ne peux plus continuer comme cela :

- pour des affaires à perpete pour un montant d'honoraire ridicule,

- en intervenant sur tout ou presque tous les appels d'offre ou des demandes de devis à tout venant,

- avec des affaires chronophages qui sont facturées sans mon accord des mois à l'avance (en affaire cachée je ne sais trop pourquoi d'ailleurs) du coup je dois faire d'autres projets en plus de ces derniers sinon j'ai zéro au compteur alors que j'ai travaillé comme une folle';


pour celui du 14 décembre 2018 aux mêmes interlocuteurs qui mentionne notamment qu'elle avait eu Mme [J] au téléphone la veille et lui avait indiqué qu'elle ne pouvait pas lui donner de délai vu (s)ma charge actuelle, qu'elle avait traité trois établissements sur son temps libre au fur et à mesure, que le souhait de Mme [J] était d'avoir les éléments avant les vacances mais qu'elle lui avait dit que cela semblait compromis ; elle précise son emploi du temps en indiquant : 'aujourd'hui je suis sur [Localité 7]. Au début de la semaine prochaine, je travaille sur [Localité 5] pour finaliser la DAT (demande d'autorisation de travaux), sachant qu'il ne me restera plus que trois jours avant les vacances, il me restera


- à partir de mercredi j'attaque [Localité 9] (j'ai 6 bâtiments à traiter),

- je suis aussi supposée finir les 25 établissements ICF.

Je ne vois pas où je peux caser les ding VDL'.


Ces éléments sont suffisamment précis quant aux heures non rémunérées que le salarié prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur d'y répondre.


A ces éléments, la société oppose essentiellement l'absence de demande préalable de sa part pour effectuer des heures supplémentaires en dehors des 36,86 heures prévues à l'horaire représentant 1,86 heures supplémentaires hebdomadaires et qu'en application du contrat, elle doit gérer son temps de travail sur l'année, que l'accord d'entreprise du 17 janvier 2002 prévoit expressément le souhait d'éviter tout recours aux heures supplémentaires et qu'elles ne peuvent être accomplies qu'à la demande préalable de l'employeur, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce. Elle met en avant des incohérences dans les tableaux.


Il est de principe que le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l'accord au moins implicite de l'employeur, soit s'il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.


En l'occurrence les divers courriers de la salariée versés aux débats démontrent qu'elle avait une charge de travail d'une telle intensité qu'elle était dans la nécessité de déborder du cadre des heures supplémentaires autorisées de 1,86 heures par semaine. L'employeur avait connaissance d'une part des dépassements horaires, sans qu'il ait réagi en lui rappelant la règle d'interdiction des heures supplémentaires en dehors de celles autorisées et d'autre part de ce que ces heures étaient nécessitées par les tâches qui lui étaient confiées. En effet, il ressort d'un SMS du 5 septembre 2018 de M. [X] qu'il était arrivé à la même conclusion avec [A], que sa charge de travail qui est trop importante et pas forcément axée sur son métier d'architecte, qu'ils avaient réfléchi à des solutions qu'ils évoqueraient vendredi matin lors du point à 3 (...). Or si le responsable M. [X] a, le 14 septembre 2018, rationalisé l'organisation de l'équipe en donnant des consignes à ses six coéquipiers sur la relecture des rapports et des offres commerciales, sur l'archivage des rapports, sur l'envoi des rapports et des propositions, il n'est aucunement justifié de ce que l'employeur a réellement déchargé la salariée, notamment de missions techniques sur 'l'affaire du restaurant à [Localité 10]' par '[P] et [L]' pour lesquels une formation devait être assurée ou qu'elle a bénéficié d'une assistance par les chargés de développements pour la rédaction des offres, postérieurement à la réunion du 9 novembre 2018.


Par ailleurs, la salariée était itinérante et se déplaçait sur les divers sites d'intervention de l'entreprise, en sorte qu'à défaut de tout contrôle du temps de travail par l'employeur que ce soit en application des dispositions légales ou en application de l'accord d'entreprise selon lequel il devait conserver les documents de relevés d'heures quotidiens des salariés et qu'il ne fournit pas, l'absence d'envoi de mail en journée n'est pas démonstratif de l'absence de travail accompli.


Les éléments avancés par la salariée ne sont pas utilement contredits par l'employeur pour la période de novembre et décembre 2017, lesquels ne mentionnent aucune heure pendant la période de congés fin décembre et desquels il ressort qu'elle a effectué 40 heures par semaine à l'exception de celle du 18 au 24 décembre 2017, soit 25 heures supplémentaires non rémunérées et majorées à 25%.


Les décomptes de la salariée ne font pas apparaître d'heures supplémentaires en 2019.


Au cours de l'année 2018, il ressort des pièces versées aux débats que :

- la salariée a intégré dans ses décomptes des horaires travaillés une journée pendant laquelle elle était absente pour enfant malade ;

- elle a noté des heures de travail alors qu'elle était en réduction du temps de travail (pour 2 jours en mai 2018, pour 5 jours en octobre 2018), alors qu'elle était en congés payés (19 au 23 août et 31 août 2018), alors qu'elle était absente pour maladie (septembre 2018).

Cependant, la salariée ne prouve qu'elle a été pendant cette période à la disposition de son employeur et qu'elle n'a pas pu vaquer librement à des occupations personnelles, en sorte que ces heures ne seront pas prises en considération.


De même, elle intègre des temps de déplacement qui ne sont pas des temps de travail effectif et qu'il y a lieu d'ôter de ses décomptes.


En définitif, il ressort de l'ensemble des éléments versés aux débats que la salariée a effectué des heures supplémentaires pour un total de :

- 25 heures supplémentaires non rémunérées en 2017 et majorée à 25%,

- 494,75 heures supplémentaires non rémunérées en 2018 dont 313,75 heurs majorées à 25% et 181 heures majorées à 50%.

Ainsi en considération du salaire horaire de 21,09 euros et des majorations, l'employeur est débiteur d'un rappel d'heures supplémentaires d'un montant de 14.656,90 euros outre 1.465,69 euros à titre d'indemnité de congés payés afférente.


Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté la salariée de toute demande à ce titre.


IL sera également fait droit à la demande de la société tendant à déduire de cette créance le montant perçu au titre de réduction du temps de travail pour la somme non contestée de 1.402,10 euros.


2- Sur l'indemnité de la contrepartie obligatoire en repos


La salariée sollicite le versement de cette indemnité sur la base de l'article L. 3121-30 du code du travail🏛 et de la SYNTEC qui fixe à 130 heures le contingent annuel d'heures supplémentaires pour les cadres dont le temps de travail est annualisé.


La société fait valoir que seules les heures de travail effectif et réellement accomplies par le salarié sont susceptibles d'ouvrir droit à une contrepartie obligatoire en repos, mais que la requérante n'est pas en mesure de démontrer que les heures indiquées dans son tableau, lequel est dépourvu de valeur probante dès lors qu'il contient des informations irréalistes et incohérentes, correspondent à du travail effectif.


***


Selon les dispositions des articles L.3121-30 et suivants du code du travail dans leur rédaction issue des dispositions de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016🏛 sus-visée, il est prévu que :

Des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel. Les heures effectuées au-delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos.

Les heures prises en compte pour le calcul du contingent annuel d'heures supplémentaires sont celles accomplies au-delà de la durée légale.

Les heures supplémentaires ouvrant droit au repos compensateur équivalent mentionné à l'article L. 3121-28 et celles accomplies dans les cas de travaux urgents énumérés à l'article L. 3132-4 ne s'imputent pas sur le contingent annuel d'heures supplémentaires.


I.-Une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche :

1° Prévoit le ou les taux de majoration des heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale ou de la durée considérée comme équivalente. Ce taux ne peut être inférieur à 10 %;

2° Définit le contingent annuel prévu à l'article L. 3121-30 ;

3° Fixe l'ensemble des conditions d'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà du contingent annuel ainsi que la durée, les caractéristiques et les conditions de prise de la contrepartie obligatoire sous forme de repos prévue au même article L. 3121-30. Cette contrepartie obligatoire ne peut être inférieure à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel mentionné audit article L. 3121-30 pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de vingt salariés.

Les heures supplémentaires sont accomplies, dans la limite du contingent annuel applicable dans l'entreprise, après information du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s'ils existent.

Les heures supplémentaires sont accomplies, au-delà du contingent annuel applicable dans l'entreprise, après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s'ils existent.


II.-Une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut également :

1° Prévoir qu'une contrepartie sous forme de repos est accordée au titre des heures supplémentaires accomplies dans la limite du contingent ;

2° Prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires, ainsi que des majorations, par un repos compensateur équivalent.

III.-Une convention ou un accord d'entreprise peut adapter les conditions et les modalités d'attribution et de prise du repos compensateur de remplacement.


Selon la convention collective nationale applicable le contingent annuel d'heures supplémentaires est fixé à 130.


Le repos obligatoire donne lieu à compensation selon les dispositions légales de l'article L.3121-38 du code du travail🏛.


Ainsi, compte tenu de l'accomplissement de 494,75 heures supplémentaires en 2018, la salariée salarié a droit à un repos compensateur pour les 364,75 heures effectuées au-delà du contingent annuel.


Tout salarié dont le contrat est rompu avant qu'il ait pu bénéficier d'un repos compensateur reçoit une indemnité en espèce correspondant à ses droits acquis comprenant l'indemnité de congés payés.


En considération des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel pour 364,75 heures, du droit à repos compensateur équivalent à 100% de ces heures compte tenu de l'effectif dont il n'est pas contesté qu'il est supérieur à 20 salariés, et du salaire horaire de base de 21,09 euros, la salariée est en droit de bénéficier d'une indemnité de 8.461,82 euros ainsi calculée : 364,75 heures x 21,09 + 10% de ce montant.


Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté la salariée de toute demande à ce titre.


3- Sur le travail dissimulé


La salariée expose que la société ne pouvait ignorer qu'elle réalisait de très nombreuses heures supplémentaires compte tenu de son volume d'activité et de la charge de travail colossale qui lui incombait et reconnue par sa hiérarchie ; la société ayant sciemment dissimulé une partie de son emploi en ne lui payant pas ses salaires conformément à la durée effective de son travail elle peut prétendre à l'indemnité prévue par l'article L. 8223-1 du code du travail🏛 et définie par l'article L. 8221-5 du code du travail🏛.


La société, qui conclut à la confirmation du jugement selon lequel aucun des éléments de preuve apportés par la salariée ne permet d'attester qu'elle a effectué des heures supplémentaires et que la société a sciemment tenté de dissimuler des heures de travail, fait valoir que la salariée ne rapporte pas la preuve qu'elle a dissimulé son emploi de manière intentionnelle.


***


Il résulte de l'article L. 8221-5 du code du travail que la dissimulation d'emploi salarié n'est caractérisée que si l'employeur, de manière intentionnelle, soit s'est soustrait à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10 relatif à la déclaration préalable à l'embauche, soit s'est soustrait à la formalité prévue à l'article L. 3243-2 relatif à la délivrance d'un bulletin de paie ou a mentionné sur le bulletin de paye un nombre d'heure de travail inférieur à celui réellement effectué.


En l'occurrence, malgré l'importance du nombre d'heures supplémentaires accomplies, la preuve du caractère intentionnel de la dissimulation d'emploi ne résulte par des faits de la cause et la salariée sera déboutée de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article L.8223-1 du code du travail.


Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.


4- Sur le harcèlement moral


La salariée affirme avoir été victime de harcèlement moral et soutient pour le démontrer que:

- elle n'a jamais été associée aux réunions d'agence où tous les autres ingénieurs étaient conviés et subissait une véritable mise à l'écart ;

- son responsable la dénigrait et la rabaissait devant les techniciens lorsqu'elle faisait remonter à sa hiérarchie les dysfonctionnements dus à ces derniers.


La société conteste les accusations de la salariée et fait valoir que :

- eu égard aux fonctions d'architecte et chef de projet occupées par la salariée, il n'y avait pas lieu de l'inviter aux réunions avec les ingénieurs, lesquelles concernaient des points du pôle structure dont elle ne faisait pas partie, et elle ne participait aux réunions que sur les domaines multi-métiers, ce que confirme l'attestation produite par cette dernière ;

- l'accrochage auquel fait référence la salariée avec un autre salarié constitue un incident unique et isolé, au cours duquel la requérante s'est également emporté, et si son collègue a pu tenir des propos contrariants, il ne s'agit ni d'insultes ni de propos diffamatoires ;

- M. [X] a pris toutes les mesures adéquates pour alléger la charge de travail de la salariée, qui ne la concernait par ailleurs pas elle seule mais toute son équipe de manière générale ; ce seul motif est insuffisant à constituer des faits de harcèlement moral.


Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail🏛, aucun salarié ne doit subir les agissements de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.


Selon l'article L. 1154-1 du code du travail🏛, lorsque survient un litige relatif à l'application de ce texte, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement ; il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.


Si effectivement, la salariée s'est plainte auprès de son employeur le 13 décembre 2018 et le 21 décembre 2018 d'avoir fait l'objet d'injures ou d'insultes et de propos diffamatoires de la part de son collègue M. [Ab] [S], elle ne précise aucunement les propos tenus et n'apporte aucun élément sur ceux-ci. Ainsi, s'il est constant qu'un incident a eu lieu le 13 décembre 2018 entre Mme [F] et M. [S], la preuve de propos insultant ou injurieux et diffamatoires n'est pas rapportée, ni même de propos dénigrant et rabaissant devant les techniciens.


Il est constant que la salariée n'a pas été conviée aux réunions dites d'agence où les ingénieurs étaient conviés, à l'exception de celle où elle a présenté ses missions, peu de temps après son arrivée dans l'entreprise.


La salariée a été en arrêt de travail à compter du 14 décembre 2018 jusqu'au 21 décembre 2018 et du 7 janvier au 7 février 2019.


Pris dans leur ensemble, les faits tenant à l'absence d'invitation aux réunions dites d'agence, ne sont pas malgré l'arrêt de travail, de nature à laisser supposer de harcèlement moral, dès lors qu'il s'agissait des réunions avec les ingénieurs portant sur les questions ressortissant au seul pôle structure et non pas sur sa sphère d'intervention multi-métiers et qu'elles n'intéressaient pas l'intégralité des membres de l'agence. Ainsi ces éléments ne laissent pas supposer d'une mise à l'écart ayant dégradé les conditions de travail.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral.


5- Sur les frais professionnels


L'employeur conteste le jugement entrepris en ce qu'il l'a condamné au paiement d'une somme de 1000,21 euros au titre de frais professionnel alors que cette somme correspond à la note de frais de janvier 2019 qui a été validée et payée.


***


Il est de principe que les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être supportés par ce dernier.

Ces frais professionnels qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle doivent lui être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition d'une part, que cette somme forfaitaire ne soit pas manifestement disproportionnée au regard du montant réel des frais engagés et, d'autre part que la rémunération proprement dite du travail reste chaque mois au mois égale au Smic.


En l'occurrence, comme l'a exactement considéré le conseil de prud'homme par des motifs pertinents qui ne sont pas utilement remis en cause en appel, en l'absence de toute pièce justificative de l'employeur sur ce point, que la société n'apporte aucun élément de preuve permettant de constater le parfait règlement de ces frais professionnels qu'elle ne conteste pas. Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné la société au paiement de la dite somme.


6- Sur l'exécution déloyale du contrat de travail


La salariée fait valoir qu'au cours de la relation de travail la société a manqué à son obligation d'exécuter loyalement son contrat de travail et soutient ainsi que :

- la société n'a pas respecté les préconisations du médecin du travail émises à l'occasion de sa visite de pré-reprise du 4 février 2019 ;

- comme il a été précédemment démontré, la société ne lui a pas rémunéré la moindre heure supplémentaire malgré une durée de travail déraisonnable ;

- la société n'a pas respecté son droit au repos et a méconnu les limites énumérées aux articles L. 3131-1 et L. 3121-31 à -36 du code du travail🏛🏛🏛 ; son employeur n'a pris aucune mesure en vue de comptabiliser la durée du travail de ses salariés, de faire respecter les prescriptions légales relatives à la durée du travail et d'ainsi satisfaire à son obligation de sécurité de résultat ;

- le préjudice qu'elle a d'ores et déjà démontré avoir subi s'est trouvé aggravé par la totale inertie de la société qui n'a rien fait pour lui venir en aide malgré une charge de travail confiée bien trop importante ;

- la société ne lui a pas remboursé des frais professionnels.


La société réplique que :

- le montant sollicité par salariée au titre des frais professionnels correspond à la note de frais de janvier 2019, qui a été validée et payée ;

- elle a répondu à l'ensemble des arguments opposés par la salariée à l'appui de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ; les précédentes demandes ont pour objet la réparation de ces chefs de préjudices et la salariée ne rapporte pas la preuve d'un préjudice distinct, se contentant de reprendre les arguments précédemment exposés.


***


Il résulte des dispositions de l'article L.1222-1 du code du travail🏛 que le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

La charge de la preuve de l'exécution déloyale incombe à celui qui l'invoque.


La salariée intègre au sein de sa demande dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, des manquements de l'employeur à son obligation de sécurité alors même qu'il ne s'agit pas du même fondement juridique et que le régime de la preuve est distinct.

Ainsi, la cour analysera les faits invoqués au seul prisme de l'obligation d'exécution loyale du contrat de travail telle qu'invoquée dans le dispositif des conclusions.


Le dépassement des seuils et plafonds de durée du travail ne ressort pas d'un manquement de l'employeur à son exécution loyale du contrat de travail mais d'obligations légales confinant à l'obligation de sécurité.


Il est établi comme il a été ci-dessus motivé, que l'employeur avait connaissance de la charge de travail très importante confiée à la salariée dès le mois de septembre 2018. Il a alors donné des consignes portant sur la rationalisation de l'organisation des tâches au sein de l'équipe (relecture des rapports et des offres commerciales, archivage des rapports, envoi des rapports et des propositions) en faisant état de ce que la charge de travail était importante pour l'ensemble des membres de l'équipe. Cette mesure de rationalisation devait aider chacun dans la gestion de son temps de travail notamment au regard de l'archivage des rapports.

Puis il a, lors de la réunion du 9 novembre 2018, indiqué que la salariée serait déchargée des missions techniques sur 'l'affaire du restaurant à [Localité 10]' par '[P] et [L]' pour lesquels une formation devait être assurée et qu'elle bénéficierait d'une assistance par les chargés de développements pour la rédaction des offres. S'il ne justifie pas de la mise en oeuvre de ces propositions, la salariée a été en arrêt de travail dans le mois qui a suivi, en sorte qu'il n'a matériellement pas eu le temps de mettre en oeuvre ses propositions et qu'aucune mauvaise foi de ressort de ces éléments.


Par ailleurs, la salariée ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui qui est réparé par l'intérêt moratoire en ce qui concerne le défaut de paiement des frais professionnels.


En définitive, la salariée sera déboutée de sa demande dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail et le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.


Sur la rupture du contrat de travail


La salariée fait grief au jugement de dire son licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse et soutient que :

- les prétendues fautes qui lui sont reprochées, pour la majorité antérieures au 7 décembre 2018, étaient prescrites et inopposables lorsqu'elle a été convoquée à l'entretien préalable le 7 février 2019 et ne pouvaient donner lieu à une sanction disciplinaire ; même si certains griefs ne sont pas prescrits, ils ne peuvent être considérés comme suffisamment graves dès lors que la société a tardé à engager la procédure disciplinaire, et son employeur ne peut se prévaloir d'une faute grave en cas de répétition de faits qu'il a tolérés sans y puiser un motif de licenciement ;

- en tout état de cause, les griefs qui lui sont reprochés ne sont pas établis : concernant les prétendus mécontentement et retours négatifs de la part des clients, non seulement sa charge de travail était colossale et insoutenable, ce dont sa hiérarchie était pleinement consciente et constituait un problème récurrent dans l'entreprise, mais elle n'a pas bénéficié du moindre soutien ou accompagnement de la part de la part de cette dernière, l'obligeant à de nombreuses reprises à décaler les délais annoncés aux clients ; la société a fait preuve de négligence en ne la mettant pas dans des conditions lui permettant d'exercer ses fonctions dans de bonnes conditions, notamment au regard des désagréments informatiques auxquels elle a fait face et qui l'ont ralentit considérablement dans le traitement des dossiers, et il est évident qu'elle ne pouvait exécuter correctement ses missions dans de telles conditions ;

- concernant sa prétendue attitude manifestement incompatible avec le travail d'équipe, ce grief vague n'est corroboré par aucun élément de preuve concret ; concernant les prétendues carences dans son rôle de chef de projet, la société se sert de ses propres carences pour justifier diverses erreurs reprochées ;

- les griefs énumérés dans la lettre de licenciement ne relèvent pas du terrain disciplinaire, elle n'a nullement intentionnellement commis des erreurs et accumulé du retard dans la gestion de ses dossiers, cette circonstance étant liée à sa charge colossale de travail ;

- elle n'a jamais été alertée sur des prétendues insuffisances et n'a jamais bénéficié d'un plan de formation et d'accompagnement à son retour d'arrêt maladie, rendant impossible un licenciement pour insuffisance.


La société réplique que :

- le travail de la salariée a suscité des vifs mécontentements et retours négatifs de la part des clients, liés aux multiples incohérences, retards ou erreurs commises par cette dernière dans la réalisation de ses missions, dont elle n'a eu connaissance qu'à compter de décembre 2018;

- les erreurs de la requérante ont entraîné chez la plupart des clients de graves difficultés s'agissant de l'adoption de leur budget ou de l'attribution de subventions ;

- la salariée a adopté une attitude manifestement incompatible avec le travail d'équipe, et son comportement conflictuel et ses critiques n'étaient pas des faits isolés ;

- sont reprochées à la requérante des carences dans son rôle de chef de projet, notamment une absence de maîtrise de calage des affaires sur le T11 ;

- les manquements de la salariée relèvent d'une abstention volontaire et sont constitutifs d'une faute disciplinaire, et la gravité des fautes commises par cette dernière et leurs conséquences préjudiciables pour la société rendaient impossible son maintien impossible en son sein ;

- le fait que la salariée n'ait jamais fait l'objet d'une sanction disciplinaire n'est pas de nature à remettre en cause le bien-fondé du licenciement ;

- contrairement à ce qu'affirme la salariée elle a toujours été soucieuse de la charge de travail de ses salariés dès qu'elle en était alertée et elle a toujours pris les mesures nécessaires afin d'adapter la charge de travail à chaque salarié ;

- à la date d'engagement de la procédure de licenciement, soit le 7 février 2019, les faits fautifs reprochés à la salariée, dont elle a eu connaissance aux mois de décembre 2018 et janvier 2019 ou qui constituaient des faits répétés dans le temps, n'étaient pas prescrits ;

- non seulement l'employeur est libre de la qualification des faits reprochés au salariés, mais elle a rapporté la preuve de la réalité de la faute grave et du bien-fondé de la mesure de licenciement, de sorte que l'argumentation de la salariée selon laquelle les griefs relèveraient de l'insuffisance professionnelle, est mal fondée ;

- le dysfonctionnement du logiciel interne auquel fait référence la salariée est survenu sur une période très courte de 3 jours et ne peuvent remettre en cause le caractère fautif des erreurs, négligences et retards commis.


***


Aux termes de la lettre de licenciement pour faute grave qui fixe les limites du litige il est reproché à la salarié :


« Vous avez été recrutée au sein de notre entreprise à compter du 13 novembre 2017 par contrat à durée indéterminée. Vous occupez au sein de notre entreprise la fonction d'architecte, chef de projet et ATMO.


Vous étiez chargé des missions suivantes :

- Assurer le développement commercial des activités QCS services au sein de l'agence Rhône Alpes Auvergne, avec pour objectif le développement au sein des régions des prestations spécifiques d'ATMO, d'audit de faisabilité et programmation et ATMOE ;

- Assurer le suivi technique, financier, et commercial de ses missions ;

- Réaliser les missions d'assistance à maîtrise d'ouvrage, maîtrise d'œuvre, entreprises dans

le cadre de la construction ou rénovation de bâtiments, ou de gestion patrimoniale ;

- Réaliser des missions d'audit et diagnostic de bâtiments et patrimoine existant ;

- Exécuter en tant que de besoin des travaux administratifs, commerciaux et de gestion économiques connexe.


Or, nous sommes contraints de constater de multiples et importants manquements de votre part à l'ensemble des missions qui vous sont attribuées.


Les informations portées à notre connaissance empêchent la poursuite de votre contrat de travail, y compris pendant une période de préavis. Celles-ci tiennent essentiellement à l'accumulation de mécontentements et de retours négatifs de la part de nos clients, à une attitude incompatible avec le travail en équipe et une carence dans vos fonctions de chef de projet.


Ces manquements témoignent de votre volonté de ne plus remplir vos obligations contractuelles et nous contraignent à la rupture de votre contrat de travail.

Principalement, nous déplorons depuis plusieurs mois de trop nombreux mécontentements de la part de vos clients du fait d'incohérence, de retards ou d'erreurs dans la réalisation de vos missions.


Ces manquements à vos missions contractuelles ont entraîné chez la plupart de vos clients

de graves préjudice ou difficultés s'agissant par exemple de l'adoption de leur budget ou de

l'attribution de subvention.


Dès lors, de nombreux clients n'ont légitimement, pas honoré leurs factures, mais également sollicité des pénalités financières à l'encontre de la société QUALICONSULT en raison de retards qui vous sont imputables.


A titre d'exemple


Récemment, le 11 janvier 2019, nous avons reçu de la part de notre client la ville d'[Localité 5] un courrier faisant état d'un vif mécontentement.


La ville d'[Localité 5] déplore le retard dans la remise de l'APD, initialement prévu le 10 septembre 2018, ainsi qu'un contenu insatisfaisant des éléments qui leur ont été fournis.


Afin d'apporter une réponse satisfaisante au client, nous avons souhaité récupérer le dossier. Pourtant, et contrairement aux consignes qui vous sont données, celui-ci n'était pas enregistré sur le serveur.


Nous nous sommes alors rendus à une réunion sur site le 13 février 2019, il s'est avéré que le travail fourni jusqu'alors présentait de très nombreuses incohérences. A titre d'exemple, de nombreux éléments relevés dans la phase de diagnostic n'ont pas été traités dans la phase APD. Un tel travail relève pourtant de vos missions contractuelles.


Précédemment, au mois de janvier 2019, notre client historique le Crédit Agricole Alsace Vosges, nous a contacté pour se plaindre du retard dans la remise de vos rapports et de trop nombreuses erreurs dans ceux-ci.


Dans ce contexte, nous avons été contraints d'étudier de nouveau les dossiers concernés. Il

est alors apparu que seuls 3 dossiers pouvaient être déposés en l'état sur les 25 demandés par le client.


De la même manière, au mois de décembre 2018, notre client a constaté des retards dans l'avancement du projet de prison de [Localité 9].

Alors que vous étiez volontaire pour traiter le dossier et que vous étiez tenue de fournir un

premier rendu en décembre, nous avons constaté qu'aucune suite n'a été enregistrée dans le

serveur, et encore moins communiquée au client.


Au mois de décembre 2018, la ville de [Localité 7] déplorait votre absence de travail, plusieurs incohérences, mais surtout un manque de communication.


Enfin, s'agissant du dossier de la Ville de [Localité 8], confié au mois de mars 2018, vous n'avez fait

qu'accumuler les retards.


Alors qu'un rendu était prévu le 12 juillet 2018, et malgré plusieurs relances de la part du client, de votre directeur d'agence et du directeur régional, vous n'avez cessé de décaler la date, rendre des documents incomplets, ou inappropriés.


Le 13 février 2019, aucun élément complet n'apparaissait dans notre serveur.


Votre attitude sur ce dossier a été particulièrement fautive puisque, dès réception de celui-ci, vous vous êtes permis de critiquer face à l'ensemble de l'équipe, la méthodologie appliquée par vos prédécesseurs. Un tel comportement de votre part n'a fait que créer des tensions et n'a pas permis un travail efficace sur ce dossier.


Ce comportement conflictuel et vos critiques ne sont malheureusement pas des faits isolés puisque de nombreux collaborateurs nous ont confié ne plus vouloir travailler en équipe avec

vous.


Dans ces conditions, il ne vous est plus possible de travailler en équipe et de remplir une

partie de vos fonctions.


Enfin, vous ne remplissez pas votre rôle de chef de projet


En effet, nous avons constaté une absence de maîtrise de calage des affaires sur votre T11.


A titre d'exemple, s'agissant de la Ville d'[Localité 5], aucun échéancier n'avait été recalé suite

aux retards accumulés.


De plus, de manière générale, vous n'assurez pas le suivi de la facturation. En effet, nous avons constaté que vous n'adressez pas les factures au fur et à mesure de la réalisation de vos missions, contrairement aux consignes données, ainsi de nombreuses factures ne sont pas établies (ex : Ville d'[Localité 10], Ville d'[Localité 6]). L'ensemble de ces manquements, retards et erreurs met en péril l'activité de notre agence.

De plus, dans un domaine aussi concurrentiel que celui dans lequel intervient notre société, une telle attitude de votre part a d'importantes conséquences vis-à-vis de notre activité mais aussi de nos clients.


Un tel comportement reflète un manque de professionnalisme, non conforme et en décalage avec les autres professionnels du secteur, et porte indéniablement atteinte à la compétitivité et à la crédibilité de la Société QUALICONSULT.


L'ensemble de ces faits rend impossible votre maintien dans l'entreprise. La rupture de nos relations prend, par conséquent, effet ce jour, sans préavis, ni indemnité de rupture. »


Selon les dispositions de l'article L. 1235-1 du code du travail🏛, il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des griefs invoqués et de former sa conviction au vu des éléments fournis pas les parties, le doute profitant au salarié.

Toutefois, la charge de la preuve de la gravité de la faute privative des indemnités de préavis et de licenciement incombe à l'employeur et tel est le cas d'espèce.

La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.


Si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif.


La faute disciplinaire correspond à tout manquement du salarié aux règles de discipline et d'organisation collective du travail énoncées dans le règlement intérieur ainsi qu'aux obligations qui découlent du contrat de travail, à savoir du lien de subordination et de l'appartenance du salarié à une communauté de travail outre à l'obligation générale de loyauté.


L'insuffisance professionnelle ne relève pas d'un licenciement disciplinaire, à moins que qu'elle ne résulte de la mauvaise volonté délibérée du salarié dans l'accomplissement de ses tâches.


Aux termes de l'article L.1332-4 du code du travail🏛, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu, dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.

Lorsque les faits ont été commis plus de deux mois avant l'engagement des poursuites disciplinaires, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve qu'il n'a eu la connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits reprochés que dans les deux mois ayant précédé l'engagement des poursuites.

L'employeur est néanmoins fondé à prendre en compte un fait antérieur de plus de deux mois si le comportement fautif du salarié s'est poursuivi ou a été réitéré dans ce délai et s'il s'agit de faits de même nature, peu important que les premiers faits aient été ou non d'ores et déjà sanctionnés.


Aux termes de son contrat de travail, la salariée assurait en sa qualité d'architecte chef de projet et ATMO les tâches suivantes :

- le développement commercial des activités de l'entreprise au sein de l'agence Rhône Alpes Auvergne, avec pour objectif le développement au sein des régions des prestations spécifiques d'ATMO, d'audit de faisabilité et programmation et ATOME,

- le suivi technique, financier et commercial de ses missions,

- la réalisation de missions d'assistance à maîtrise d'ouvrage, maîtrise d'oeuvre, entreprises dans le cadre de la construction, rénovation de bâtiments, ou de gestion patrimoniale,

- la réalisation des missions d'audit et diagnostic de bâtiments et patrimoine existant,

- l'exécution en tant que de besoin des travaux administratifs, commerciaux et de gestion économiques connexes ;

étant précisé que la direction se réservait la possibilité de compléter ou modifier ses attributions dans une mesure compatible avec sa qualification dans le cadre de l'organisation et du fonctionnement du service, ce qui était accepté par la salariée.


1- Sur les retards, erreurs, mécontentements de clients, inexécutions de missions et non-respects de consignes


1-1- sur le dossier de la ville d'[Localité 5]


Il ressort du courrier de l'adjoint à l'éducation de la ville d'[Localité 5] concernant le marché de MOE pour la rénovation des écoles du 11 janvier 2019 (et non du 11 janvier 2018) par la seule lecture des faits et dates qui y sont énoncés, que ce client se plaignait du non-respect des délais convenus dans l'opération visée et de son insatisfaction portant sur le contenu des éléments rendus qui comportaient des oublis comme le lot 'amiante' ainsi que des erreurs de correspondance entre plans, CCTP et DPGF qui pouvaient avoir une incidence financière. Ces faits, portés à la connaissance de l'employeur à cette date, soit dans les deux mois précédant l'engagement de la procédure de licenciement le 7 février 2019, ne sont pas prescrits.


Il n'est pas justifié que ces retards et erreurs résultent d'un manquement de la salariée à son contrat de travail ni même d'une volonté délibérée de cette dernière de mal exécuter son travail, ce d'autant, qu'il est établi qu'elle était surchargée de travail et qu'elle avait dû subir quelques avanies informatiques sur le réseau Autocar qui avaient ralenti sa production.


En outre, si effectivement l'employeur avait dû désigner un autre salarié pour s'occuper de ce dossier puisque Mme [F] était en arrêt de travail lors de la réception du courrier de mécontentement de la ville d'[Localité 5], il n'en demeure pas mois, que l'envoi des pièces du dossier par M. [X] à ce dernier ne permet pas, sans doute possible, de considérer que la salariée n'avait pas procédé à l'archivage de ses rapports sur le serveur en violation de la consigne sur ce point. Ainsi, les faits portant sur le dossier de la ville d'[Localité 5] ne seront pas retenus comme constitutifs d'une faute disciplinaire de la salariée.


1-2- Sur le dossier du Crédit agricole Ac Ad


Il est établi que le 11 janvier 2019, la chef de projets du Crédit Agricole Alsace Vosges contactait la société pour lui indiquer que sur les 5 dossiers relus, 4 comportaient des erreurs et précisait qu'elle souhaitait être en mesure d'envoyer tous les dossiers en mairie pour la fin du mois.


Si ce dossier devait être rendu fin novembre 2018 et que le 3 décembre 2018, l'employeur s'enquérait auprès de la salariée du respect des délais, il n'en demeure pas moins qu'il n'a eu connaissance des erreurs au plus tôt le 11 janvier 2019 et réellement à compter du 14 janvier 2019, comme il ressort du courriel de l'architecte Mme [K] qui a repris le dossier.

Néanmoins, l'employeur ne justifie ni caractérise le caractère délibéré des erreurs commises par Mme [F].

Les faits reprochés sur ce dossier ne relèvent pas d'une faute disciplinaire.


1-3- Sur le dossier de la prison de [Localité 9]


Aucun élément n'est apporté par l'employeur pour étayer les manquements reprochés à la salariée sur ce dossier. Aucun fait fautif ne saurait donc être retenu à son encontre sur celui-ci.


1-4- Sur le dossier de la ville de [Localité 7]


Il est exact que par courriel du 11 décembre 2018, le correspondant pour la ville de [Localité 7] lui faisait part de son étonnement concernant l'objet de l'envoi qu'elle lui avait fait et lui demandait de répondre aux questions portées sur le document de suivi et de faire les modifications des plans. Mme [F] n'y a pas répondu mais a été en arrêt de travail dès le 14 décembre. Ainsi, à défaut de preuve d'un refus d'exécution exprimé par cette dernière, le caractère délibéré de l'omission tant au regard de l'état de santé de la salariée que de la surcharge de travail n'est pas établi et les faits ne sauraient donc constituer une faute disciplinaire


1-5- Sur le dossier de la ville de [Localité 8]


L'employeur ne justifie aucunement de la plainte de la ville de [Localité 8] auprès du directeur régional le 14 décembre 2018, alors même qu'il savait depuis le mois de septembre 2018 que les délais impartis pour remettre les 'livrables du marché' n'étaient pas respectés.

Il s'ensuit, qu'en l'absence de faits de même nature retenus comme constitutifs d'une faute par la cour postérieurs à cette date et non prescrits, les faits reprochés liés au non-respect des délais dans le dossier de la ville de [Localité 8] sont prescrits et ne sauraient donc être retenus par la cour au soutien du licenciement.


La société lui reproche également qu'au 13 février 2019, aucun élément complet n'apparaissait sur le serveur. Or, ce reproche est insuffisant pour établir qu'elle n'a pas respecté la consigne d'archivage des rapports.


2- Sur le comportement critique de l'équipe et de la méthodologie des prédécesseurs


La matérialité des faits reprochés sur le comportement critique de l'équipe et sur la méthodologie appliquée par ses prédécesseurs n'est pas prouvée par les éléments produits aux débats.


3- Sur le rôle de chef de projet non rempli


De même la société n'établit pas le caractère fautif de l'absence de maîtrise de calage des affaires sur T11, ni du défaut de suivi de la facturation, aucune volonté délibérée de la salariée de mal exécuter ses tâches ne résultant des éléments du dossier.


Il s'ensuit que le licenciement pour faute grave est dépourvu de cause réelle et sérieuse et que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse.


Sur les conséquences de la rupture


A titre principal, la salariée fait valoir que :

- les répercussions de son licenciement sur sa santé, dont la forte dégradation a été constatée par le médecin du travail, ont été extrêmement importantes ; elle n'a toujours pas retrouvé un emploi stable, enchaîne les contrats précaires et a vu son pouvoir d'achat diminuer fortement ; compte tenu de son ancienneté (1 an et 3 mois) dans une entreprise de plus de 11 salariés elle peut prétendre à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse conformément au barème fixé à l'article L. 1235-3 du code du travail🏛 ;

- elle est bien fondée à solliciter le versement de l'indemnité compensatrice de préavis au titre de l'article 15 de la SYNTEC, et de l'indemnité de licenciement de l'article L. 1234-9 du code du travail🏛, définit dans son montant par les articles R. 1234-2 et -3 du code du travail🏛🏛 ;

- à titre subsidiaire, la société n'a pas respecté le délai de 5 jours ouvrables entre la convocation à l'entretien préalable et l'entretien spécifié à l'article L. 1232-2 du code du travail🏛 de sorte qu'elle n'a pas été en mesure d'organiser sa défense, ni de prendre attache avec un salarié pour l'assister.


La société fait valoir que :

- le licenciement est parfaitement justifié et la salariée n'est pas fondée à demander une quelconque indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- subsidiairement, le montant de cette indemnité devra être réduit à de plus justes proportions, et le seul élément produit par la salariée n'est pas de nature à démontrer le préjudice subi et qui justifierait l'octroi de l'indemnité maximale prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail ; elle ne justifie par ailleurs pas de sa situation personnelle et ne verse aux débats aucun élément probant ou sérieux susceptible de démontrer la réalité des faits qu'elle invoque;

- la salariée ne peut dès lors prétendre ni au versement de l'indemnité légale de licenciement, ni de l'indemnité compensatrice de préavis.


***


1- Sur l'indemnité pou licenciement sans cause réelle et sérieuse


En vertu des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail, dans leur rédaction issue de la loi n°2018-217 du 29 mars 2018🏛, version en vigueur depuis le 1er avril 2018, le salarié, qui était employée dans une entreprise occupant habituellement au moins onze salariés, a droit, en l'absence de réintégration, à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse mise à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux.


En considération de l'effectif de la société dont il n'est pas contesté qu'elle employait au moins 11 salariés au moment de la rupture et de l'ancienneté d'une année complète au moment de la rupture, la salariée est en droit de bénéficier d'une indemnité comprise entre un et deux mois de salaire.


Compte tenu de ces éléments outre des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à la salariée (un salaire mensuel brut de 3200 euros non contesté), de son âge au jour de son licenciement (près de 40 ans), de son ancienneté à cette même date (une année complète), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels que ces éléments résultent des pièces et des explications fournies, il convient d'indemniser la salariée en lui allouant la somme de 5.000 euros au titre de la perte injustifiée de son emploi.


Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.


2- Sur les indemnités de rupture


La salariée dont le licenciement ne repose pas sur une faute grave justifiée et qui est dépourvu de cause réelle et sérieuse est en droit de percevoir une indemnité compensatrice de préavis outre, compte tenu de son ancienneté d'au moins 8 mois, une indemnité légale de licenciement.


En considération du salaire mensuel de 3200 euros non contesté que la salariée aurait perçu pendant la période de préavis, et ce que le montant n'est pas remis en cause par les parties dans ses modalités de calcul, c'est à bon droit que les premiers juges lui ont alloué une indemnité compensatrice de préavis correspondant à trois mois, en application des dispositions conventionnelles. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la société à lui verser les sommes de 9.600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 960 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférente.


Le montant alloué au titre l'indemnité légale de licenciement n'est pas plus remis en cause par les parties dans ses modalités de calcul, étant précisé que les premiers juges ont retenu le montant sollicité par la salariée et repris dans ses conclusions devant la cour est conforme aux dispositions légales. Ce faisant, la cour confirmera le montant alloué de 1.000 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement.


Sur les demandes accessoires


Il convient de rappeler que les créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le devant le bureau de conciliation et d'orientation soit le 13 juin 2018.


Les créances de nature indemnitaires porteront intérêt au taux légal à compte de ce jour, s'agissant de dispositions infirmatives.


Il sera également ordonné à la société QCS services de remettre à Mme [F] les documents de fin de contrat rectifiés, dans un délai de deux mois à compter de ce jour, sans qu'il y ait lieu à astreinte.


Sur le remboursement des indemnités chômages


Il convient en application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail🏛 dans sa rédaction applicable au litige, d'ordonner d'office le remboursement par la société QCS services à Pôle Emploi devenu France Travail des indemnités de chômages versées à Mme [F] du jour de son licenciement dans la limite de 4 mois d'indemnités de chômage.


Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile


La société succombant sera condamnée aux entiers dépens de l'appel. En conséquence la société sera déboutée de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.


L'équité commande de faire bénéficier la salariée d'une indemnité complémentaire de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS,


La cour,


Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile;


Dans la limite de la dévolution,


INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement de Mme [F] reposait sur une cause réelle et sérieuse et requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse, en ce qu'il a dit conforme et opposable la convention de forfait en heures stipulée dans le contrat de travail, en ce qu'il a débouté Mme [F] de ses demandes d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de salaire et indemnité de congés payés afférente au titre des heures supplémentaires, d'indemnité de contrepartie obligatoire en repos ;


Statuant à nouveau dans cette limite,


DÉCLARE sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute grave de Mme [F] ;


DÉCLARE nulle la convention de forfait en heures prévue au contrat de travail ;


CONDAMNE la société QCS services à verser à Mme [F] les sommes suivantes:


5.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

14.656,90 euros à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires impayées outre 1.465,69 euros à titre d'indemnité de congés payés afférente,

8.461,82 euros à titre d'indemnité de contrepartie obligatoire en repos ;


Dit qu'il y a lieu de déduire de la créance de rappel de salaire, la somme de 1.402,10 euros perçue au titre de la réduction du temps de travail ;


Rappelle que les sommes allouées par la cour sont exprimées en brut ;


DIT que les intérêts au taux légal sur les créances de nature salariale courent à compter de la demande, soit à compter de la notification à la société QCS services de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes le 13 juin 2018 ;


DIT que les intérêts au taux légal sur les créances de nature indemnitaires courent à compter de ce jour ;


ORDONNE la remise par la société QCS services à Mme [F] des documents de fin de contrat et d'un bulletin de salaire rectifié dans un délai de deux mois à compter de ce jour, sans qu'il y ait lieu à astreinte ;


CONFIRME le jugement entrepris sur le surplus ;


Y ajoutant,


ORDONNE le remboursement par la société QCS services à Pôle Emploi devenu France Travail des indemnités de chômages versées à Mme [F] du jour de son licenciement dans la limite de 4 mois d'indemnités de chômage ;


DIT qu'en application des dispositions de l'article R.1235-2 du code du travail🏛, lorsque le remboursement des allocations chômages est ordonné d'office par la cour d'appel, le greffier de cette juridiction adresse une copie certifiée conforme de l'arrêt à Pôle Emploi devenu France Travail ;


CONDAMNE la société QCS services à verser à Mme [F] la somme complémentaire de 1.800 au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;


CONDAMNE la société QCS services aux dépens de l'appel.


LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

Loi, 2016-1088, 08-08-2016 Article, 802, CPC Loi, 2018-217, 29-03-2018 Article, 3, accord, chapitre II, 22-06-1999 Ordonnance de clôture Convention de forfait Rémunération annuelle Heures supplémentaires Travaux Nullité du contrat Rappel de salaire Conseil des prud'hommes Heures rémunérées Jours fériés Charge de travail Preuve Rémunération mensuelle Congés Absence Temps de travail Accord collectif Accord de branche Travail hebdomadaire Horaire fixe Paiement d'une rémunération Rémunération forfaitaire Convention collective nationale Date de signature Expertise Accord d'entreprise Dépassement du temps de travail Horaire habituel Salaire brut Salaire de base Plafond fixé Heures payées Temps de travail hebdomadaire Occupation personnelle Justification des horaires Détermination d'une créance Durée légale Temps de pause Honoraire Appels d'offres Autorisation Autorisation des travaux Contrat de travail Architecte Mission technique Chargé de développement Enfant malade Salaire horaire Valeur probante Contingent annuel Taux de majoration Comité d'entreprise Modalités d'attribution Repos compensateur Rupture du contrat Travail dissimulé Dissimulation d'emploi Bulletin de paie Caractère intentionnel Harcèlement moral Altération des facultés mentales ou corporelles Santé mentale Agissements constitutifs d'un harcèlement Preuve rapportée Injure Arrêt de travail Dommages-intérêts Frais professionnels Besoin d'activité professionnelle Intérêt d'un employeur Smic/smig Préconisations du médecin du travail Droit au repos Prescriptions légales Obligation de résultat Preuve d'un préjudice Préjudice distinct Travail exécuté Charge de la preuve Preuve de l'exécution Manquement à l'obligation de sécurité Mauvaise foi du débiteur Intérêts moratoires Défaut de paiement Rupture du contrat de travail Sanction disciplinaire Procédure disciplinaire Motif du licenciement Exécution d'une fonction Lettre de licenciement Gestion de dossiers Plan de formation Arrêt maladie Abstention volontaire Faute disciplinaire Procédure de licenciement Preuve de la réalité Réalité des fautes Insuffisance professionnelle Courte durée Salarié recruté Mission d'assistance Rénovation d'un bâtiment Gestion patrimoniale Travail administratif Préavis Pénalité financière Activité d'agence Rupture des relations Caractère sérieux Gravité d'une faute Lien de subordination Obligation de loyauté Licenciement disciplinaire Poursuite disciplinaire Exercice des poursuites Comportement fautif Terme d'un contrat Incidence financière Exécution de prestations Faute grave Emploi stable Respect d'un délai Cause sérieuse Indemnité de préavis Indemnité Indemnité légale Indemnité de licenciement Salaire mensuel Expérience professionnelle Perte d'emploi Indemnité de rupture Congé payé Créance salariale Taux légal Indemnités de chômage

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