Jurisprudence : Avis, 05-09-2024, n° 24-70.003, FS-

Avis, 05-09-2024, n° 24-70.003, FS-

A53385YD

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2024:C115009

Identifiant Legifrance : JURITEXT000050221512

Référence

Avis, 05-09-2024, n° 24-70.003, FS-. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/111483426-avis-05092024-n-2470003-fs
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Abstract

► Selon l'article L. 3222-5-1, I, du Code de la santé publique, déterminant les conditions de l'isolement et de la contention, il appartient au juge de déterminer si les conditions d'un maintien de la personne en isolement sont ou non toujours réunies et d'ordonner en conséquence un tel maintien de la mesure d'isolement ou sa mainlevée ; il s'en déduit qu'il doit apprécier le bien-fondé de la mesure en cours au jour où il statue, afin de mettre un terme si besoin, à une privation de liberté injustifiée ; Si la mainlevée d'une mesure d'isolement est intervenue avant que le juge ne se prononce, il n'y a plus lieu de statuer à son égard.

Demande d'avis
n°M 24-70.003

Juridiction : le tribunal judiciaire de Quimper




VL12





Avis du 5 septembre 2024



n° 15009 D








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

COUR DE CASSATION
_________________________

Première chambre civile


Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile ;

La première chambre civile de la Cour de cassation a rendu le présent avis sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, et l'avis écrit de Mme Mallet-Bricout avocat général ;


Énoncé de la demande d'avis

1. Le 6 juin 2024, la Cour de cassation a reçu une demande d'avis formée le 29 mai 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Quimper, en application des articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile, dans une instance concernant M. [L], le directeur de l'EPSM du Finistère Sud et le Procureur de la République près le tribunal judiciaire de Quimper.

2. La demande est ainsi formulée :

«1 - Le juge saisi d'une demande de maintien d'une mesure d'isolement doit-il apprécier si les conditions de fond de la validité de la mesure sont réunies au moment de la saisine, ou bien au moment où il statue?


2 - Pour le cas où son appréciation doive se porter au moment où il statue, le juge confronté à une situation d'isolement levée antérieurement ou postérieurement à la saisine mais antérieurement à sa décision, doit-il déclarer sa saisine en prolongation sans objet, ordonner la mainlevée de la mesure ou examiner au fond si les conditions de maintien de l'isolement sont remplies?»

Examen de la demande d'avis

3. Selon l'article L. 3222-5-1, I, du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de la loi n°2022-46 du 22 janvier 2022, ayant soumis les mesures d'isolement à un contrôle obligatoire du juge judiciaire au delà d'une certaine durée, l'isolement est une pratique de dernier recours et il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d'un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. Une mesure d'isolement est prise pour une durée maximale de douze heures, et peut être renouvelée dans la limite d'une durée totale de quarante-huit heures, et fait l'objet de deux évaluations par vingt-quatre heures.
A titre exceptionnel, le médecin peut la renouveler, au-delà de ces durées totales et dans ce cas, le directeur de l'établissement saisit le juge des libertés et de la détention avant l'expiration de la soixante-douzième heure d'isolement si l'état de santé du patient rend nécessaire le renouvellement de la mesure au-delà de ces durées.
Le juge des libertés et de la détention statue dans un délai de vingt-quatre heures à compter du terme des durées prévues.
Si les conditions énoncées ne sont plus réunies, il ordonne la mainlevée de la mesure.
Si ces conditions sont toujours réunies, il autorise le maintien de la mesure. Dans ce cas, le médecin peut la renouveler dans les conditions prévues.
Lorsqu'une mesure d'isolement est prise moins de quarante-huit heures après qu'une précédente mesure d'isolement a pris fin, sa durée s'ajoute à celle des mesures d'isolement qui la précèdent.

4. Il appartient ainsi au juge de déterminer si les conditions d'un maintien de la personne en isolement sont ou non toujours réunies et d'ordonner en conséquence un tel maintien de la mesure d'isolement ou sa mainlevée.

5. Il s'en déduit qu'il doit apprécier le bien fondé de la mesure en cours au jour où il statue, afin de mettre un terme si besoin, à une privation de liberté injustifiée.



6. Dès lors, et comme l'a déjà retenu la Cour de cassation (Avis de la Cour de cassation, 8 juillet 2021, n° 21-70.010), si la mainlevée de la mesure d'isolement est intervenue avant que le juge ne se prononce, il n'y a plus lieu de statuer à son égard.

7. Le fait qu'un contrôle obligatoire du juge ait été instauré et que l'établissement de santé ait la possibilité de prendre une nouvelle mesure moins de 48 heures après la fin de la précédente, dont la durée se cumulera avec cette dernière, ne modifie pas l'objet de l'intervention du juge judiciaire, garant de la liberté individuelle.

8. Il y a donc lieu de répondre aux questions ainsi :

- Le juge saisi d'une demande de maintien d'une mesure d'isolement apprécie le bien fondé de la mesure d'isolement au moment où il statue.

- Si la mainlevée d'une mesure d'isolement est intervenue avant que le juge ne se prononce, il n'y a plus lieu de statuer à son égard.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

EST D'AVIS QUE :

- Le juge saisi d'une demande de maintien d'une mesure d'isolement apprécie le bien fondé de la mesure d'isolement au moment où il statue.

- Si la mainlevée d'une mesure d'isolement est intervenue avant que le juge ne se prononce, il n'y a plus lieu de statuer à son égard.


Fait à Paris et mis à disposition au greffe de la Cour le 5 septembre 2024, après examen de la demande d'avis lors de la séance du 3 septembre 2024 où étaient présents : Mme Champalaune, présidente, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, Mme Ben Belkacem, greffier de chambre ;

Le présent avis est signé par le conseiller rapporteur, le président et le greffier de chambre.


Le conseiller référendaire rapporteur Le président



Le greffier de chambre

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