Jurisprudence : CJCE, 19-09-2002, aff. C-101/00, Tulliasiamies

CJCE, 19-09-2002, aff. C-101/00, Tulliasiamies

A4535AZY

Référence

CJCE, 19-09-2002, aff. C-101/00, Tulliasiamies. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1102154-cjce-19092002-aff-c10100-tulliasiamies
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ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)


19 septembre 2002 (1)


"Taxation des véhicules d'occasion importés - Article 95, premier alinéa, du traité CE (devenu, après modification, article 90, premier alinéa, CE) - Sixième directive TVA"


Dans l'affaire C-101/00,


ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 234 CE, par le Korkein hallinto-oikeus (Finlande) et tendant à obtenir, dans des procédures engagées par


Tulliasiamies,


Antti Siilin,


une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'article 95, premier alinéa, du traité CE (devenu, après modification, article 90, premier alinéa, CE) et de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1), dans sa version résultant de la directive 92/111/CEE du Conseil, du 14 décembre 1992, modifiant la directive 77/388 et portant mesures de simplification en matière de taxe sur la valeur ajoutée (JO L 384, p. 47),


LA COUR (cinquième chambre),


composée de MM. P. Jann, président de chambre, S. von Bahr, A. La Pergola, M. Wathelet (rapporteur) et C. W. A. Timmermans, juges,


avocat général: Mme C. Stix-Hackl,


greffier: Mme L. Hewlett, administrateur,


considérant les observations écrites présentées:


- pour M. Siilin, par M. P. Snell, oikeustieteen kandidaatti,


- pour le gouvernement finlandais, par Mmes T. Pynnä et E. Bygglin, en qualité d'agents,


- pour la Commission des Communautés européennes, par MM. E. Traversa et I. Koskinen, en qualité d'agents,


vu le rapport d'audience,


ayant entendu les observations orales de M. Siilin, du gouvernement finlandais et de la Commission à l'audience du 12 septembre 2001,


ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 25 octobre 2001,


rend le présent


Arrêt


1.


Par ordonnance du 15 mars 2000, parvenue au greffe de la Cour le 17 mars suivant, le Korkein hallinto-oikeus (Cour administrative suprême) a posé, en vertu de l'article 234 CE, six questions préjudicielles relatives à l'interprétation de l'article 95, premier alinéa, du traité CE (devenu, après modification, article 90, premier alinéa, CE) et de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffred'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1), dans sa version résultant de la directive 92/111/CEE du Conseil, du 14 décembre 1992, modifiant la directive 77/388 et portant mesures de simplification en matière de taxe sur la valeur ajoutée (JO L 384, p. 47, ci-après la "sixième directive").


2.


Ces questions ont été soulevées dans le cadre de deux procédures engagées devant le Korkein hallinto-oikeus, l'une par M. Siilin et l'autre par le tulliasiamies (représentant de la direction générale des douanes), à l'encontre d'une décision de l'Uudenmaan lääninoikeus (tribunal administratif) rendue dans le cadre d'un litige opposant M. Siilin à l'administration des douanes finlandaise à propos de la taxation qui a frappé, lors de l'importation en république de Finlande, une voiture d'occasion qu'il avait acquise dans un autre État membre.


Le cadre juridique national


3.


Les dispositions nationales pertinentes résultent de l'autoverolaki (1482/1994) (loi relative à la taxe sur les véhicules), du 29 décembre 1994, dans sa version applicable en 1998 (ci-après la "loi relative à la taxe sur les véhicules"), et de l'arvonlisäverolaki (1501/1993) (loi relative à la taxe sur la valeur ajoutée), telle que modifiée par les lois (1483/1994), (1486/1994) et (1767/1995) (ci-après la "loi relative à la TVA").


4.


L'article 1er de la loi relative à la taxe sur les véhicules prévoit que cette taxe doit être acquittée avant l'immatriculation ou la mise en service des voitures de tourisme et de véhicules relevant d'autres catégories. Les dispositions de la tieliikennelaki (267/81) (loi sur la circulation routière) énoncent les critères permettant de considérer un véhicule à moteur comme relevant de telle ou telle de ces catégories.


5.


Aux termes de l'article 6, premier alinéa, de la loi relative à la taxe sur les véhicules:


"La taxe à acquitter équivaut à la valeur imposable du véhicule diminuée de 4 600 FIM. Le montant de la taxe est toutefois toujours égal au minimum à 50 % de la valeur imposable du véhicule".


6.


L'article 7 de la loi relative à la taxe sur les véhicules dispose:


"La taxe due sur un véhicule d'occasion importé équivaut à celle qui est prélevée sur un véhicule neuf similaire, réduite toutefois de 0,5 % par mois calendaire plein, à l'échéance des 6 premiers mois écoulés depuis l'immatriculation ou la mise en service lors de la date de la déclaration aux fins de la taxe. Si la date de la première immatriculation ou de la première mise en service ne peut être précisée de manière fiable, la durée d'utilisation est calculée à compter de la fin de l'année de fabrication. La taxe n'est réduite que pendant les 150 premiers mois.


À défaut de véhicule neuf similaire, la taxe est déterminée sur la base de la taxe afférente à un véhicule neuf quasi similaire dont les caractéristiques techniques ou autres sont proches. [...]


[...]


Les dispositions de cet article ne sont pas applicables aux véhicules si [...] 25 ans au moins se sont écoulés après la fin de l'année de leur fabrication."


7.


L'article 10 de la loi relative à la taxe sur les véhicules énonce qu'un véhicule importé est considéré comme étant d'occasion si, selon des indications dignes de foi, il a parcouru plus de 10 000 km et s'il a été immatriculé à l'étranger pendant plus de 6 mois.


8.


L'article 11 de la loi relative à la taxe sur les véhicules prévoit:


"La base de la valeur imposable du véhicule importé est sa valeur transactionnelle pour le redevable, diminuée des montants mentionnés à l'article 16.


La valeur transactionnelle d'un véhicule importé est:


1) la valeur en douane d'après le règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire ([JO L 302, p. 1,] ci-après le 'code des douanes), et le règlement (CEE) n° 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993[, fixant certaines dispositions d'application du règlement n° 2913/92 (JO L 253, p. 1,] ci-après le 'règlement d'application), quand il ne s'agit pas d'une acquisition communautaire; et


2) la valeur du véhicule importé comme marchandise communautaire, déterminée dans le respect des dispositions pertinentes du paragraphe 1.


La valeur imposable doit inclure tous les frais supportés directement ou indirectement par le redevable, avant impôts, pour le transport vers la Finlande ou vers le premier entrepôt en Finlande ainsi que, le cas échéant, les droits de douane.


La valeur imposable d'un véhicule fabriqué sur le territoire national est le prix usine du véhicule déterminé sur la base des coûts de production si le fabricant est assujetti à la taxe.


[...]"


9.


Il ressort de l'ordonnance de renvoi que le régime de taxation prévu par la loi relative à la taxe sur les véhicules, telle qu'applicable en mars 1998 et donc aux faits au principal, a fait l'objet d'une lettre de mise en demeure de la Commission. Le gouvernement finlandais a répondu le 29 juin 1998 qu'il avait l'intention d'arrêter pourl'automne 1998 les propositions nécessaires aux fins de modifier les dispositions de cette loi critiquées par la Commission.


10.


La loi portant modification de la loi relative à la taxe sur les véhicules (1160/1998) est entrée en vigueur le 15 janvier 1999 et a notamment modifié le pourcentage de réduction mensuelle de la taxe due sur un véhicule d'occasion. Le pourcentage de réduction, antérieurement fixé à 0,5 % de la taxe afférente à un véhicule neuf similaire ou quasi similaire, a ainsi été porté à 0,6 % pour les 100 premiers mois d'utilisation, puis à 0,9 % pour les 100 mois suivants et à 0,4 % au-delà, ces deux pourcentages étant calculés sur la valeur résiduelle de la taxe à la fin du mois précédent. Toutefois, cette loi modificative ne s'applique pas aux faits aux principal et est donc sans pertinence dans le cadre de la présente affaire.


11.


L'article 5 de la loi relative à la taxe sur les véhicules prévoit que le redevable de cette taxe est également tenu d'acquitter une taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules, dont le montant - qui correspond à un pourcentage de la taxe sur les véhicules - est fixé par la loi relative à la TVA.


12.


Aux termes de l'article 102, paragraphe 1, point 4, de la loi relative à la TVA:


"Le redevable peut déduire en vue d'une activité commerciale soumise à la taxation:


[...]


4) la taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules versée conformément à la loi relative à la taxe sur les véhicules".


13.


L'article 102, paragraphe 1, point 4, de la loi relative à la TVA s'est appliqué durant un an seulement. Il a été abrogé par la loi (1767/1995), du 29 décembre 1995, entrée en vigueur le 1er janvier 1996.


14.


L'article 102 ter de la loi relative à la TVA dispose:


"La condition nécessaire pour le droit de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules est la décision concernant le prélèvement de ladite taxe qui indique le montant de la taxe due."


15.


Il ressort de l'article 141, point 5, de la loi relative à la TVA que les déductions relatives à la taxe visée à l'article 102, paragraphe 1, point 4, de la même loi sont affectées au mois pendant lequel cette taxe est acquittée.


Le litige au principal et les questions préjudicielles


16.


Le 2 mars 1998, M. Siilin a acheté dans un garage en Allemagne, au prix de 7 350 DEM, une voiture de tourisme d'occasion, de marque Mercedes Benz (modèle190 2.0 Diesel). Cette voiture avait été mise en service le 13 novembre 1986 et avait parcouru 180 000 km. Elle était équipée d'une transmission automatique et d'un toit ouvrant.


17.


Le 20 avril 1998, M. Siilin a importé cette voiture en Finlande et l'a déclarée au bureau des douanes de la région d'Helsinki (ci-après le "bureau des douanes") aux fins de la taxe sur les véhicules.


18.


Par décision du 20 avril 1998 (ci-après l'"avis d'imposition"), le bureau des douanes a établi à 46 288 FIM le montant de la taxe sur les véhicules et à 10 183 FIM le montant de la taxe sur la valeur ajoutée assise sur cette taxe (perçue au taux de 22 %) à verser par M. Siilin, soit un total de 56 471 FIM.


19.


Ce montant a été calculé par le bureau des douanes sur la base d'une comparaison du véhicule d'occasion de M. Siilin avec une voiture de même marque, dont le modèle (C 220 D) était différent mais présentait des caractéristiques techniques très comparables à celles du modèle de la voiture de M. Siilin. Le prix mentionné dans les catalogues pour cette voiture de référence à l'état neuf était en Allemagne de 41 000 DEM hors taxes. Le bureau des douanes a ajouté à ce prix 2 200 DEM pour la transmission automatique ainsi que 1 680 DEM pour le toit ouvrant. La valeur imposable a ainsi été fixée à 44 980 DEM, soit après conversion 136 851 FIM. En application de la loi relative à la taxe sur les véhicules, ont été déduits de ce montant un abattement forfaitaire de 4 600 FIM ainsi qu'un montant de 85 963 FIM, correspondant à un coefficient de dépréciation de 65 %.


20.


Le 21 avril 1998, M. Siilin a versé au bureau des douanes la taxe sur les véhicules et la taxe sur la valeur ajoutée y afférente. Il a saisi par la suite l'Uudenmaan lääninoikeus compétent d'un recours dirigé contre l'avis d'imposition.


21.


Il a soutenu, d'une part, que le montant de la taxe fixé pour le véhicule qu'il avait importé était supérieur au montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur d'une voiture, déjà présente sur le marché finlandais, qui aurait été immatriculée à l'état neuf en Finlande et serait similaire par son âge, ses caractéristiques et son état. Il a prétendu, en conséquence, que la taxe perçue était discriminatoire et contraire à l'article 95 du traité. Il s'est référé à cet égard aux arrêts du 9 mars 1995, Nunes Tadeu (C-345/93, Rec. p. I-479), et du 23 octobre 1997, Commission/Grèce (C-375/95, Rec. p. I-5981), pour soutenir que la dépréciation d'une voiture ne peut être linéaire et que la valeur de celle-ci diminue de plus de 5 % par an.


22.


M. Siilin a fait valoir, d'autre part, que la perception de la taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules était contraire à la sixième directive, en sorte que cette taxe ne devait pas être appliquée.


23.


M. Siilin a donc demandé, d'une part, l'annulation de l'avis d'imposition en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules. Il a sollicité, d'autre part, le renvoi de l'affaire devant le bureau des douanes en ce qui concerne lataxe sur les véhicules, afin que cette dernière soit fixée de façon à ne pas être supérieure au montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur d'une voiture, déjà présente sur le marché finlandais, qui aurait été immatriculée à l'état neuf en Finlande et serait similaire par son âge, ses caractéristiques et son état.


24.


Le bureau des douanes a conclu au rejet du recours de M. Siilin, en soutenant que la taxe sur les véhicules et la taxe sur la valeur ajoutée assise sur cette taxe avaient été fixées conformément au droit finlandais.


25.


Dans sa décision du 3 juin 1999, l'Uudenmaan lääninoikeus a constaté qu'il était conforme à l'article 7 de la loi relative à la taxe sur les véhicules de déterminer le montant de la taxe applicable à la voiture de M. Siilin en se référant à la taxe applicable à une voiture neuve similaire par ses caractéristiques techniques et autres ainsi qu'en opérant une réduction selon les modalités prévues par cette loi.


26.


Toutefois, relevant que la voiture en cause au principal était une voiture d'occasion importée en république de Finlande à partir d'un autre État membre, l'Uudenmaan lääninoikeus a rappelé que, dans l'arrêt Nunes Tadeu, précité, la Cour avait jugé contraire à l'article 95 du traité qu'un État membre perçoive une taxe sur les voitures d'occasion en provenance d'un autre État membre lorsque le montant de la taxe, calculé sans prise en compte de la dépréciation réelle du véhicule, excède le montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur des véhicules d'occasion similaires déjà immatriculés sur le territoire national.

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