ARRÊT DU CONSEIL D'ETAT
CONSEIL D'ETAT
Statuant au contentieux
N° 235800
Elections municipales du Perray-en-Yvelines (Yvelines)
M. Bereyziat, Rapporteur
M. Bachelier, Commissaire du gouvernement
Séance du 21 novembre 2001
Lecture du 21 décembre 2001
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 8ème et 3ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 8ème sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête enregistrée le 9 juillet 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jacques REVELUT, demeurant 8, rue de l'Eglise au Perray-en-Yvelines (78610) ; M. REVELUT demande au Conseil d'Etat
1°) d'annuler le jugement du 8 juin 2001 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa protestation tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées le 11 mars 2001 en vue de l'élection des conseillers municipaux de la commune du Perray-en-Yvelines ;
2°) de prononcer l'annulation de ces opérations électorales ;
Vu les autres pièces du dossier;
Vu le code électoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique:
- le rapport de M. Bereyziat, Auditeur,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué
Considérant, en premier lieu, que la protestation de M. REVELUT devant le tribunal administratif de Versailles tendait à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées le 11 mars 2001 pour la désignation des conseillers municipaux de la commune du Perray-en-Yvelines ; que M. Jean-Louis Baron a été élu conseiller municipal de cette commune le 11 mars 2001 et qu'il avait dès lors, en application des dispositions de l'article R. 119 du code électoral, le droit de présenter des observations orales à l'audience ; que, par suite, M. REVELUT n'est pas fondé à soutenir que l'audition de M. Baron à l'audience publique au cours de laquelle sa protestation a été appelée a été constitutive d'une irrégularité ;
Considérant, en deuxième lieu, que contrairement à ce que soutenait M. REVELUT devant les premiers juges, l'enregistrement au greffe du tribunal administratif du mémoire en défense de Mme Deschamps après l'expiration du délai de cinq jours que l'article 8.119 imparti au défendeur pour produire mais avant la clôture de l'instruction, n'entachait pas d'irrecevabilité cette production ; que c'est dès lors sans irrégularité que le jugement attaqué a tenu compte de ce mémoire et implicitement rejeté la fin de non-recevoir de M. REVELUT ;
Considérant, en troisième lieu, que selon le deuxième alinéa de l'article L. 52-1 du code électoral, dans sa rédaction résultant des dispositions du I de l'article 23 de la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001, auxquelles le II du même article a conféré un caractère interprétatif: "A compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin. Sans préjudice des dispositions du présent chapitre, cette disposition ne s'applique pas à la présentation, par un candidat ou pour son compte, dans le cadre de l'organisation de sa campagne, du bilan de la gestion des mandats qu'il détient ou qu'il a détenus. Les dépenses afférentes sont soumises aux dispositions relatives au financement et au plafonnement des dépenses électorales contenues au chapitre V bis du présent titre" ; qu'aux termes de l'article L. 240 du même code : "L'impression et l'utilisation, sous quelque forme que ce soit, de circulaires, tracts, affiches et bulletins de vote pour la propagande électorale en dehors des conditions fixées par les dispositions en vigueur est interdite" ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que ne constitue pas un acte de propagande prohibé par l'article L. 240 la diffusion d'un bilan de gestion au sens des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 52-1 du même code, dans les conditions prescrites à cet article ; que, dès lors, en jugeant que les tracts diffusés de janvier à mars 2001 par l'association "Le Perray notre commune", dont le président est Mme Deschamps, maire sortant du Perray-en-Yvelines, retraçaient le bilan de sa gestion et entraient dans les prévisions du deuxième alinéa de l'article L. 52-1 du code dans sa rédaction issue de la loi précitée du 3 janvier 2001, le tribunal administratif a implicitement mais nécessairement jugé qu'était inopérant le moyen tiré de ce que la diffusion de ces tracts constituait une violation de l'article L. 240 ;
Considérant enfin que, contrairement à ce que soutient M. REVELUT, le jugement attaqué a statué sur le moyen tiré de ce qu'en omettant de divulguer son investiture par le parti socialiste, Mme Deschamps se serait livrée à une manoeuvre de nature à tromper les électeurs ;
Sur les griefs présentés par M. REVELUT
Considérant, en premier lieu, que c'est par un motif surabondant, qui n'était pas le support nécessaire de sa décision dès lors qu'il ne jugeait fondé aucun des griefs de la protestation qui lui était soumise, que pour écarter le moyen tiré de ce que le rapprochement de ces griefs était de nature à justifier l'annulation de l'élection, le jugement attaqué a relevé que l'écart de voix entre les trois listes en présence était "consistant" ; que, par suite, M. REVELUT ne peut utilement se prévaloir de ce que l'élection n'aurait été en fait acquise dès le premier tour qu'avec une avance de six voix sur la majorité absolue des suffrages exprimés ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des termes mêmes des dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article L. 52-1 du code électoral que le bilan de gestion qu'un candidat est autorisé à présenter dans le cadre de l'organisation de sa campagne électorale s'applique à tous les mandats qu'il détient ou a détenus, et notamment au mandat qu'il détient ou a détenu au conseil municipal de la commune où ont lieu les élections contestées ; que les tracts que M. REVELUT fait grief à Mme Deschamps d'avoir fait diffuser par l'association "Le Perray notre commune" dont elle est le président, au cours des mois de janvier à mars 2001, mais avant le jour du scrutin, retracent sans polémique ni imputations injurieuses ou diffamatoires le bilan de la gestion de son mandat municipal et entrent ainsi dans les prévisions des dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article L. 52-1 ; que, dès lors, et ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. REVELUT ne peut utilement soutenir que les diffusions en cause ont méconnu la prohibition de l'article L. 240 ;
Considérant, en troisième lieu, que la cérémonie du 6 janvier 2001 au cours de laquelle Mme Deschamps, maire du Perray-en-Yvelines, a présenté ses voeux pour l'année 2001, prononcé un discours retraçant les réalisations de l'année précédente et les perspectives pour l'année suivante, et distribué aux personnes présentes des cadeaux de faible valeur, s'est déroulée dans les mêmes conditions que les cérémonies de voeux des années précédentes et n'a pas constitué une campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité prohibée par les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 52-1 ; que n'a pas davantage constitué une campagne de cette nature la diffusion au début du mois de mars 2001, soit quinze jours avant les élections mais à la même période que les années antérieures, du n° 8 du bulletin 'Terray Info" qui rendait compte de l'activité des associations de la commune ;
Considérant enfin que la circonstance que Mme Deschamps, qui conduisait une liste dénommée "Le Perray, notre commune" s'est abstenue de mentionner, sur sa profession de foi et sur ses affiches, son investiture par un parti politique n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment au fait que son appartenance à ce parti était notoirement connue, constitué une manoeuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. REVELUT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa protestation contre les opérations électorales qui se sont déroulées le 11 mars 2001 dans la commune du Perray-en-Yvelines ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. REVELUT est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera. notifié à M. Jacques REVELUT, à Mme Paulette Deschamps, à M. Robert Eclimont, à Mme Michèle Lemaître, à M. Bernard Bebot, à Mme Anne-Marie Nadaud, à M. Michel Keryfen, à Mme Mathilde Tasciotti, à M. Alain Granjou, à Mme Martine Renard, à M. Charles Viette, à Mme Pascale Domenech, à M. Jacques Provot, à M. Gérard Karm, à Mme Marie-Hélène Boguet, à M. Robert Coudun, à M. Claude Cheron, à Mme Sylvie Balland, à Mme Isabelle Doré, à M. Robert Dubreuil, à M. Francis Rodier, à M. Christian Herse, à Mme Jacqueline Chemouni, à M. Baron, à M. Poleni, à Mme Cavaglieri, à Mme Gabiou, à M. Journet, à M. Léon, à M. Grassart et au ministre de l'intérieur.