AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Entreprise Chevalier, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 22 janvier 1999 par la cour d'appel de Paris (3e chambre civile, section B), au profit :
1 / de la société Baudry, dont le siège est ...,
2 / de la société Comptoir forestiers matériaux du Loiret (CFML), dont le siège est ...,
3 / de la société Cofims, dont le siège est ...,
4 / de la société Sojac, dont le siège est ...,
5 / de M. Michel X..., demeurant ..., pris en sa qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Agedec,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 8 janvier 2002, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Aubert, conseiller rapporteur, M. Tricot, conseiller, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Aubert, conseiller, les observations de la SCP Ghestin, avocat de la société Entreprise Chevalier, de la SCP Peignot et Garreau, avocat des sociétés Baudry, Comptoirs forestiers matériaux du Loiret (CFML), Cofims et Sojac, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (22 janvier 1999) que la société Entreprise Chevalier, qui a déclaré sa créance au passif de la société Agedec ouverte le 6 février 1996, a assigné les sociétés Baudry, Sojag, Cofims et Comptoirs forestiers matériaux du Loiret (CFML) aux fins d'extension à celles-ci de cette procédure collective ;
Attendu que la société Entreprise Chevalier fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le moyen :
1 / que le créancier d'une société, mise en liquidation judiciaire, est recevable à demander l'extension de la procédure collective à une autre société s'il prétend que la société contre laquelle il demande l'extension est son débiteur réel alors que son débiteur apparent n'a qu'une existence fictive ; qu'il résulte des constatations des juges du fond que, invoquant la confusion des patrimoines des sociétés en cause, la fictivité de la société Agedec en liquidation judiciaire et soutenant que les autres sociétés étaient ses débitrices réelles au regard de la fraude commise au préjudice de ses droits, la société Chevalier avait le 31 janvier 1997, avant la clôture de la liquidation judiciaire de la société Agedec par jugement du 17 mars 1998, sollicité l'extension de cette procédure aux sociétés défenderesses ; qu'en estimant néanmoins que la clôture de la liquidation judiciaire de la société Agedec intervenue postérieurement à l'action en extension de ladite procédure aux autres sociétés du groupe, faisait obstacle à cette action en extension, la cour d'appel a violé les articles 2, 7 et 167 de la loi du 25 janvier 1985 ;
2 / que la procédure de liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif peut être reprise à la demande de tout créancier intéressé s'il apparaît que des actions dans l'intérêt des créanciers n'ont pas été engagées ; qu'en s'abstenant dès lors de rechercher s'il n'y avait pas lieu de reprendre la procédure de liquidation judiciaire contre la société Agedec, clôturée avant que l'action en extension de la procédure dans l'intérêt des créanciers ait pu aboutir, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 170 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Mais attendu que l'action tendant à l'extension de la procédure collective d'une personne à une autre sur le fondement de la confusion des patrimoines ou de la fictivité d'une personne morale n'est pas ouverte aux créanciers ; que par ce motif de pur droit l'arrêt se trouve justifié ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Entreprise Chevalier aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la condamne à payer aux sociétés Baudry, Comptoirs forestiers matériaux du Loiret, Cofims et Sojac, la somme de 450 euros à chacune ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf février deux mille deux.