Jurisprudence : Cass. soc., 12-12-2001, n° 99-45.921, inédit au bulletin, Cassation partielle sans renvoi

Cass. soc., 12-12-2001, n° 99-45.921, inédit au bulletin, Cassation partielle sans renvoi

A6583AX4

Référence

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M. Gilles Pellegrini Z.
PRUD'HOMMES I.K
COUR DE CASSATION
Audience publique du 12 décembre 2001
Cassation partielle sans renvoi
M. ..., conseiller le plus ancien faisant fonctions de président
Pourvoi n° J 99-45.921
Arrêt n° 5200 F D RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Sur le pourvoi formé par M. Gilles Z, mandataire judiciaire, agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Prevo, société anonyme, demeurant Saint-Maur des Fossés Cedex,
en cassation d'un arrêt rendu le 14 octobre 1999 par la cour d'appel de Paris (22e chambre, section C), au profit

1°/ de l'AGS CGEA Ile-de-France Est, dont le siège est Levallois-Perret Cedex,

2°/ de M. Alain W, demeurant chez Mizy-sur-Yonne,
défendeurs à la cassation ;
EN PRÉSENCE DE M. Christian V, demeurant Charenton le Pont ;

LA COUR, en l'audience publique du 30 octobre 2001, où étaient présents M. Chagny, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Lanquetin, Bailly, conseillers, Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Chagny, conseiller, les observations de Me Bertrand, avocat de M. Z, ès qualités, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. W a été engagé le 27 mai 1991 en qualité de chef d'équipe par la société Losfeld industries, laquelle société a été mise en redressement judiciaire le 18 novembre 1994, puis en liquidation judiciaire le 22 décembre 1994 ; que, soutenant que son contrat de travail avait été transféré à compter du 1er décembre 1994 à la société Prevo et que cette société ne l'avait pas rémunéré, M. W a saisi la juridiction prud'homale pour avoir paiement de salaires, de congés payés, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, de licenciement et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que de dommages-intérêts pour licenciement abusif ; qu'à son tour, la société Prevo a été mise en redressement judiciaire le 23 avril 1998, puis en liquidation judiciaire le 4 août 1998 ;
Sur le premier moyen
Attendu que M. Z, ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire de la société Prevo, reproche à l'arrêt d'avoir jugé que la société Prevo avait repris le contrat de travail conclu entre la société Losfeld industries et M. W et d'avoir fixé au passif de la procédure collective de la première société les sommes allouées à l'intéressé à titre de rappel de salaire et d'indemnité de congés payés, alors, selon le moyen
1°/ que le transfert d'un contrat de travail par application volontaire de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail est subordonné à l'acceptation expresse, par le salarié, d'une offre formelle que lui fait en ce sens l'entreprise qui entend succéder à l'employeur initial ; qu'à défaut, la relation contractuelle se poursuit avec l'employeur d'origine ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand, dans ses propres conclusions d'appel, M. W indiquait lui-même avoir été tenu dans l'ignorance du transfert de son contrat de travail à la société Prevo, d'où il résultait que celle-ci ne lui avait pas proposé de le prendre à son service et qu'il n'avait pas manifesté d'accord exprès au transfert de son contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail ;
2°/ que le contrat de travail se caractérise par le versement d'une rémunération en contrepartie d'une prestation exécutée sous les ordres et les directives de l'employeur ; que les documents auxquels elle s'est référée ne permettaient pas à la cour d'appel de déterminer le véritable employeur de M. W avant le 1er octobre 1995, date de son embauche officielle par la société Prevo ; qu'en refusant toute investigation supplémentaire, notamment par la mise en cause du mandataire à la liquidation judiciaire de la société Losfeld industries sollicitée par le mandataire à la liquidation judiciaire de la société Prevo, ès qualités, pour vérifier si le contrat de travail de M. W avec la société Losfeld industries avait été rompu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail ;
Mais attendu, d'une part, que le principe selon lequel, lorsque les conditions d'application de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail ne sont pas réunies, le transfert du contrat de travail du salarié ne peut s'opérer qu'avec son accord exprès, ayant été édicté dans le seul intérêt du salarié, sa méconnaissance ne peut être invoquée que par celui-ci ;
Attendu, d'autre part, qu'après avoir relevé que le dirigeant unique des sociétés Losfeld industries et Prevo avait déclaré aux conseillers rapporteurs du conseil de prud'hommes que le contrat de travail de M. W avait été transmis à la seconde société au mois de décembre 1994, que cette société avait établi des bulletins de paye à l'intéressé et déclaré son embauche à l'URSSAF à partir de la même date et que les documents produits devant elle établissaient que la société Losfeld industries n'avait plus eu de salariés à partir de cette époque, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'ordonner la mise en cause d'un tiers que la partie qui la demandait s'était abstenue de provoquer, a considéré souverainement que le contrat de travail de M. W avait été transmis à la société Prevo qui avait été son employeur pendant toute la période en litige ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le deuxième moyen
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que la société Prevo avait abusivement rompu le contrat de travail de M. W et d'avoir fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société les sommes allouées à l'intéressé à titre d'indemnités de congés payés, de préavis, de congés payés sur préavis, de licenciement et pour licenciement abusif, alors, selon le moyen
1°/ qu'en considérant qu'il n'était pas établi que le salarié a démissionné, la cour d'appel a, en violation de l'article 1134 du Code civil, dénaturé une lettre du 10 novembre 1995 dans laquelle M. W demandait à la société Prevo de lui remettre ses bulletins de salaire "de janvier 1995 jusqu'à ce jour", d'où il résultait qu'il avait manifesté une volonté claire et non équivoque de démissionner ;
2°/ qu'en jugeant que l'employeur n'avait invoqué que l'absence injustifiée du salarié pour rompre le contrat de travail par sa lettre du 24 novembre 1995, la cour d'appel a dénaturé ce document dans lequel l'employeur reprochait également au salarié de n'avoir pas terminé des travaux en cours sur le chantier où il travaillait et qui étaient essentiels à la sécurité des acheteurs potentiels de lots dans l'immeuble en construction ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
3°/ que l'absence injustifiée du salarié constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'il ressortait en l'espèce des éléments de la cause que, placé en arrêt de travail pour maladie le 13 novembre 1995, M. W n'avait avisé la société Prevo que le 28 novembre 1995 ; que le salarié était absent depuis le 2 novembre 1995 sans motif valable lorsqu'il a été procédé à son licenciement ; qu'en jugeant pourtant que le salarié avait dûment justifié de son absence par des arrêts de travail pour maladie, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;
4°/ que les dispositions de l'article L. 122-14-4 du Code du travail relatives au montant de l'indemnité de licenciement ne sont pas applicables au licenciement du salarié opéré par l'employeur qui occupe moins de onze salariés ; que, dans ce cas, le salarié licencié sans cause réelle et sérieuse a droit, non pas à l'indemnité minimum de six mois prévue par ce texte, mais à une indemnité calculée en fonction du préjudice ; que la cour d'appel, qui a elle-même relevé que l'entreprise employait moins de dix salariés lors du licenciement, ne pouvait pas accorder à M. W l'indemnité minimum de six mois sans violer, par fausse application, l'article L. 122-14-4 du Code du travail et, par refus d'application, l'article L. 122-14-5 du même Code ;
Mais attendu, d'abord, que, sans dénaturation et exerçant le pouvoir d'appréciation qu'elle tient de l'article L. 122-14-3 du Code du travail, la cour d'appel, après avoir constaté que l'absence de l'intéressé avait été justifiée par des arrêts maladie, a décidé que le licenciement ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse ;
Attendu, ensuite, qu'il résulte de l'article L. 122-14-5 du Code du travail que les dispositions de l'article L. 122-14-4 sont, par exception, applicables à l'employeur en cas d'inobservation des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 122-14 relatives à l'assistance du salarié par un conseiller, lorsque le salarié a moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise et lorsque l'employeur occupe habituellement moins de onze salariés ; que la cour d'appel, qui a constaté que l'intéressé n'avait pas été convoqué à un entretien préalable à son licenciement, d'où il résultait que les dispositions de l'article L. 122-14 du Code du travail, selon lequel la lettre de convocation à l'entretien préalable doit mentionner l'adresse des services où la liste des conseillers est tenue à la disposition des salariés, n'avaient pas été observées à son égard, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen
Vu l'article 127 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-129 du Code de commerce ;
Attendu que, pour condamner M. Z, ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire de la société Prevo, à payer à M. W la somme de 6 000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt énonce qu'il est équitable d'accorder l'indemnité sollicitée à ce titre ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle ne pouvait porter condamnation du mandataire-liquidateur à payer la somme due au salarié dont les créances principales avaient leur origine antérieurement à l'ouverture de la procédure collective de l'employeur et alors qu'elle devait se borner à déterminer le montant de la somme à inscrire sur l'état des créances déposé au greffe du tribunal, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du Code de procédure civile, la Cour est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. Z, ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire de la société Prevo, à payer à M. W la somme de 6 000 francs en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt de la cour d'appel de Paris rendu le 14 octobre 1999 ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Fixe à 6 000 francs le montant de la créance due à M. W sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au titre de la procédure d'appel, à inscrire sur l'état des créances de la liquidation judiciaire de la société Prevo déposé au greffe du tribunal de la procédure collective ;
Laisse à chaque partie la charge respective de ses dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille un.

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