COMM.
FM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 15 mai 2024
Cassation partielle sans renvoi
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 269 F-B
Pourvoi n° S 22-17.813
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 15 MAI 2024
La société Schneebichler Driving Innovation GmbH, société de droit autrichien, dont le siège est [Adresse 2] (Autriche), a formé le pourvoi n° S 22-17.813 contre l'arrêt rendu le 14 janvier 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 2), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Lohr immobilier, société par actions simplifiée à associé unique,
2°/ à la société Lohr industrie, société par actions simplifiée à associé unique,
3°/ à la société Lohr service, société par actions simplifiée à associé unique,
toutes trois ayant leur siège [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
Les sociétés Lohr immobilier, Lohr industrie et Lohr service ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
Les demanderesses au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bessaud, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de la société Schneebichler Driving Innovation GmbH, de la SCP Gatineau, Aa et Rebeyrol, avocat des sociétés Lohr immobilier, Lohr industrie, et Lohr service, les plaidoiries de Me Le Guerer, de Me Dianoux, et l'avis oral de Mme Texier, avocat général, après débats en l'audience publique du 19 mars 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, Mme Texier, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 janvier 2022) et les productions, la société Lohr industrie, titulaire de dessins et modèles mis en uvre dans les produits qu'elle conçoit, fabrique et commercialise, la société Lohr service, qui assure le service après-vente et fournit les pièces de rechange et de maintenance afférentes à ces produits, ainsi que la société Lohr immobilier, qui est titulaire des marques verbales et semi-figuratives françaises et de l'Union européenne « Lohr », utilisées pour l'exploitation des activités du groupe (les sociétés Lohr), ont assigné, devant le tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire, de Paris, la société de droit autrichien Schneebichler Driving Innovation Gmbh (la société Schneebichler), spécialisée dans la fabrication et la fourniture de composants et de pièces détachées à destination des transporteurs de véhicules automobiles, en contrefaçon de marques, contrefaçon de dessins et modèles, contrefaçon de droits d'auteur, concurrence déloyale et parasitaire, allocation de dommages et intérêts ainsi qu'aux fins d'obtenir diverses mesures d'interdiction, de destruction et de publication et, le cas échéant, d'enjoindre à la société Schneebichler de communiquer des documents attestant du chiffre d'affaires, des bénéfices et des marges brutes réalisés sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne, les chiffres des quantités produites, livrées et commercialisées sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne et les prix des marchandises visées.
Examen des moyens
Sur le moyen, pris en ses première, deuxième, troisième, quatrième et cinquième branches, du pourvoi principal et sur les premier moyen, deuxième moyen et troisième moyen, pris en sa quatrième branche, du pourvoi incident
2. En application de l'
article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa sixième branche, du pourvoi principal
Enoncé du moyen
3. La société Schneebichler fait grief à l'arrêt attaqué de dire qu'en distribuant et commercialisant des pièces détachées sous le signe verbal Lohr, elle s'est rendue coupable de contrefaçon par reproduction des marques n° 3757121 et n° 2751014 et de contrefaçon par imitation des marques n° 1263278, n° 4255266 au préjudice de la société Lohr immobilier, de dire qu'elle a commis des actes de concurrence déloyale et de concurrence parasitaire au préjudice de la société Lohr service, de lui faire interdiction, sous astreinte, d'utiliser le terme « Lohr » à titre de marque pour désigner, promouvoir et commercialiser, exporter, importer et détenir des pièces de rechange pour des porte-voitures, y compris sur les sites internet détenus par elle ou des membres de son réseau de distribution, de la condamner à verser à la société Lohr service, la somme de 100 000 euros en réparation pour les faits de concurrence déloyale et parasitaire dont elle s'est rendue coupable à son préjudice et, infirmant le jugement et y ajoutant, de la condamner à payer à la société Lohr immobilier au titre de la contrefaçon de ses marques n° 3757121, n° 2751014, n° 1263278 et n° 4255266, les sommes de 300 000 euros au titre des conséquences économiques négatives de la contrefaçon, 60 000 euros au titre de l'atteinte portée à la valeur patrimoniale des marques, 30 000 euros au titre du préjudice moral, alors, « que selon le paragraphe 1 de l'article 125 du règlement (UE) n° 2017/1001 du 14 juin 2017 sur la marque de l'Union européenne, les actions en contrefaçon d'une marque de l'Union européenne sont portées devant les tribunaux de l'Etat membre sur le territoire duquel le défendeur a son domicile ; que selon le paragraphe 4 du même article, lorsque le défendeur comparait devant un tribunal des marques de l'Union autre que celui de son domicile, l'article 26 du
règlement (UE) n° 1215/2012⚖️, qui reconnaît compétence à la juridiction d'un Etat membre devant laquelle le défendeur comparaît, si cette comparution n'a pas pour objet de contester la compétence, est applicable ; que selon le paragraphe 5 du même article 125, les actions en contrefaçon d'une marque de l'Union européenne peuvent également être portées devant les tribunaux de l'Etat membre sur le territoire duquel le fait de contrefaçon a été commis ou menace de l'être ; que selon l'article 126 du
règlement (UE) n° 2017/1001⚖️, un tribunal des marques de l'Union européenne, dont la compétence est fondée sur l'article 125, paragraphes 1 à 4, est compétent pour statuer sur les faits de contrefaçon commis ou menaçant d'être commis sur le territoire de tout Etat membre tandis qu'un tribunal des marques de l'Union européenne dont la compétence est fondée sur l'article 125, paragraphe 5, est compétent uniquement pour statuer sur les faits commis ou menaçant d'être commis sur le territoire de l'Etat membre dans lequel est situé ce tribunal ; qu'en l'espèce la société Schneebichler faisait valoir que les sociétés Lohr ne pouvaient prétendre, pour la première fois devant la cour d'appel, que les mesures de réparation sollicitées et notamment la mesure d'interdiction devaient concerner et s'étendre à l'ensemble de l'Union européenne, dès lors que les sociétés Lohr ayant invoqué en première instance des actes de contrefaçon commis sur le territoire français, elles fondaient ainsi la compétence du tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire, de Paris sur l'article 125, paragraphe 5, du règlement (UE) n° 2017/1001, en sorte qu'il ne pouvait être déduit de sa comparution devant le tribunal que celui-ci se trouvait compétent en application du paragraphe 4 de l'article 125 du règlement (UE) n° 2017/1001 pour statuer sur des faits de contrefaçon commis ou susceptibles d'être commis sur le territoire de tout Etat membre et non pas uniquement sur ceux commis ou susceptibles d'être commis sur le territoire français ; qu'en relevant, pour considérer que le tribunal judiciaire de Paris était compétent, s'agissant de la marque de l'Union européenne, pour statuer sur les actes de contrefaçon commis sur l'ensemble de l'Union européenne, que "les actes de contrefaçon commis par la société Schneebichler portent, en particulier sur la marque verbale de l'Union européenne Lohr n° 2751014 dont la protection s'étend à l'ensemble du territoire de l'Union européenne" et que "la société Schneebichler a comparu devant le tribunal judiciaire de Paris, tribunal des marques de l'Union européenne dont elle n'a aucunement discuté la compétence", sans rechercher, comme elle y était invitée, si la compétence du tribunal judiciaire de Paris pour connaître de l'action en contrefaçon de cette marque ne résultait pas de l'article 125, paragraphe 5, du règlement (UE) n° 2017/1001, ce qui ne pouvait permettre de faire application des dispositions du paragraphe 4 de cet article et d'opposer à la société Schneebichler sa comparution pour étendre la compétence du tribunal aux faits argués de contrefaçon commis sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 125 et 126 du règlement (UE) n° 2017/1001. »
Réponse de la Cour
4. Il résulte de la combinaison des articles 125, paragraphe 4, sous b), du règlement (UE) n° 2017/1001, et 26, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 que tout tribunal des marques de l'Union dont la compétence ne résulte pas des paragraphes 1 à 3 du premier de ces textes, est néanmoins compétent pour connaître de l'action en contrefaçon portée devant lui lorsque le défendeur comparaît sans contester sa compétence.
5. L'article 126, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) n° 2017/1001 dispose qu'un tribunal des marques de l'Union européenne dont la compétence est fondée sur l'article 125, paragraphe 4, du même règlement est compétent pour statuer sur les faits de contrefaçon commis ou menaçant d'être commis sur le territoire de tout État membre.
6. L'arrêt rappelle que le jugement a dit que la société Schneebichler s'était notamment rendue coupable de contrefaçon de la marque de l'Union européenne « Lohr » n° 2751014 au préjudice de la société Lohr immobilier et, en conséquence, a prononcé des mesures d'interdiction, l'a condamnée à verser diverses sommes en réparation des préjudices résultant des actes de contrefaçon et a ordonné qu'elle communique un état des ventes des produits référencés « Lohr » sur sa documentation commerciale ainsi qu'un document attestant du chiffre d'affaires et de la marge brute réalisée sur chacun de ces produits. L'arrêt relève que la société Schneebichler a comparu devant le tribunal judiciaire de Paris, tribunal des marques de l'Union européenne, sans discuter sa compétence et qu'elle soutient, pour la première fois en appel, que la juridiction française doit se limiter à réparer le préjudice résultant des actes de contrefaçon commis sur le seul territoire français.
7. En l'état de ces énonciations, constatations et appréciations, dont il ressort que les sociétés Lohr avaient, dès la première instance, sollicité la réparation du préjudice que leur avaient causé les faits de contrefaçon commis par la société Schneebichler sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne, sans que cette dernière ne conteste la compétence du tribunal judiciaire de Paris, la cour d'appel a exactement retenu la compétence de la juridiction française.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
9. Et en l'absence de doute raisonnable sur l'interprétation de l'article 125 du règlement (UE) n° 2017/1001, il n'y a pas lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de la question préjudicielle suggérée par la société Schneebichler.
Sur le troisième moyen du pourvoi incident, pris en ses première et deuxième branches
Enoncé du moyen
10. Les sociétés Lohr font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes au titre du droit d'auteur sur le boîtier de commande et la rampe de chargement pour porte-voiture, alors :
« 1°/ que le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties ; que, plus particulièrement, le juge ne peut refuser de statuer au prétexte que le demandeur, qui étaye ses prétentions par une offre de preuve produite aux débats, ne précise pas quelle page de cette preuve doit être consultée ; qu'en l'espèce, les sociétés Lohr soutenaient dans leurs conclusions d'appel que la société Schneebichler avait commis des actes de contrefaçon de droits d'auteur, en faisant valoir en particulier que "le boîtier de commande vendu par Schneebichler reprend exactement le design du boîtier Lohr" et que "la rampe vendue par Schneebichler copie l'esthétique futuriste voulue par Lohr", et étayaient leurs demandes en visant leurs pièces d'appel n° 5 à 8, désignant des procès-verbaux de constats d'huissier relatifs au site internet et au catalogue de la société Schneebichler, ainsi qu'à des produits commandés auprès de cette société ; qu'en écartant les demandes au titre de la contrefaçon de droits d'auteur sur le boîtier et la rampe de chargement litigieux, au motif que la société Lohr industrie n'identifiait pas précisément les produits incriminés en se contentant de renvoyer au catalogue de la société Schneebichler sans indiquer, pour chacun des produits incriminés, la page du catalogue où il était exposé et la référence sous laquelle il était identifié, la cour d'appel a méconnu son office et violé l'
article 4 du code civil🏛 ;
2°/ que tout jugement devant être motivé, le juge est tenu d'examiner les pièces régulièrement produites par les parties ; qu'en l'espèce, en refusant d'examiner les procès-verbaux de constats d'huissier et le catalogue auxquels la société Lohr industrie renvoyait dans ses conclusions d'appel pour apprécier la contrefaçon de droits d'auteur sur le boîtier et la rampe de chargement, au motif que la société Lohr n'indiquait pas pour chacun des produits incriminés la page du catalogue où il était exposé et la référence sous laquelle il était identifié, la cour d'appel a violé l'
article 455 du code de procédure civile🏛. »
Réponse de la Cour
11. Après avoir relevé que la société Lohr industrie alléguait une contrefaçon de ses droits d'auteur sur un boîtier et une rampe de chargement qui auraient été servilement reproduits par la société Schneebichler dans son catalogue, l'arrêt retient que la société Lohr industrie se borne à renvoyer indifféremment audit catalogue et aux procès-verbaux d'huissier de justice, sans toutefois identifier précisément les produits incriminés ni la référence sous laquelle ils sont identifiés et offerts à la vente, ni même la page des documents produits où ils seraient exposés.
12. En cet état, la cour d'appel, qui a fait ressortir que la seule lecture des pièces ne permettait pas d'identifier précisément les articles incriminés et n'avait pas à se substituer au demandeur pour déterminer l'objet du litige, a pu retenir que le bien-fondé de la demande n'était pas établi et que la société Lohr industrie avait failli dans l'exposé des moyens relatifs aux agissements qu'elle incriminait.
13. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le troisième moyen du pourvoi incident, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
14. Les sociétés Lohr font le même grief à l'arrêt, alors « que la cour d'appel est tenue de statuer sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ; qu'en l'espèce, dans le dispositif de leurs conclusions d'appel, les sociétés Lohr demandaient de constater que la société Lohr industrie était titulaire de droits d'auteur sur la rampe de chargement pour porte-voiture, de juger que la société Schneebichler, en distribuant et commercialisant des copies des pièces protégées au titre du droit d'auteur et en particulier de la rampe pour chargement de porte-voitures, s'était rendue coupable du délit d'imitation par contrefaçon d'uvre protégée au titre du droit d'auteur au préjudice de la société Lohr industrie et de condamner la société Schneebichler à payer à la société Lohr industrie la somme de 10 000 euros en réparation au titre du préjudice relatif aux actes de contrefaçon de la rampe pour chargement de porte-voitures ; qu'en confirmant le jugement, qui avait déclaré irrecevables les demandes au titre de la contrefaçon de droit d'auteur sur la rampe de chargement au motif que ces demandes n'étaient pas mentionnées au dispositif des conclusions, quand les conclusions d'appel, quant à elles, comportaient bien des demandes relatives à la rampe de chargement dans leur dispositif, la cour d'appel a violé les
articles 4 et 954 du code de procédure civile🏛🏛. »
Réponse de la Cour
15. Les vices allégués par le moyen procèdent d'une erreur matérielle dont la rectification sera ci-après ordonnée en application de l'
article 462 du code de procédure civile🏛.
16. Le moyen ne peut donc être accueilli.
Mais sur le moyen, pris en sa septième branche, du pourvoi principal
Enoncé du moyen
17. La société Schneebichler fait grief à l'arrêt attaqué de dire qu'en distribuant et commercialisant des pièces détachées sous le signe verbal Lohr, elle s'est rendue coupable de contrefaçon par reproduction des marques n° 3757121 et n° 2751014 et de contrefaçon par imitation des marques n° 1263278, n° 4255266 au préjudice de la société Lohr immobilier, de dire qu'elle a commis des actes de concurrence déloyale et de concurrence parasitaire au préjudice de la société Lohr service, de lui faire interdiction, sous astreinte, d'utiliser le terme « Lohr » à titre de marque pour désigner, promouvoir et commercialiser, exporter, importer et détenir des pièces de rechange pour des porte-voitures, y compris sur les sites internet détenus par elle ou des membres de son réseau de distribution, de la condamner à verser à la société Lohr service, la somme de 100 000 euros en réparation pour les faits de concurrence déloyale et parasitaire dont elle s'est rendue coupable à son préjudice et, infirmant le jugement et y ajoutant, de la condamner à payer à la société Lohr immobilier au titre de la contrefaçon de ses marques n° 3757121, n° 2751014, n° 1263278 et n° 4255266, les sommes de 300 000 euros au titre des conséquences économiques négatives de la contrefaçon, 60 000 euros au titre de l'atteinte portée à la valeur patrimoniale des marques, 30 000 euros au titre du préjudice moral, alors « qu'une marque ne permet pas à son titulaire d'interdire à un tiers l'usage, dans la vie des affaires, de la marque pour désigner ou mentionner des produits comme étant ceux du titulaire de cette marque, en particulier lorsque l'usage de cette marque est nécessaire pour indiquer la destination d'un produit ou d'un service, notamment en tant qu'accessoire ou pièce détachée dès lors que l'usage ainsi fait par le tiers de la marque l'est conformément aux usages honnêtes en matière industrielle et commerciale et donc notamment sans risque de confusion sur l'origine des produits ou services ; qu'en l'espèce, en interdisant sous astreinte de façon générale à la société Schneebichler "d'utiliser le terme « Lohr » à titre de marque pour désigner, promouvoir et commercialiser, exporter, importer et détenir des pièces de rechange pour des porte-voitures, y compris sur les sites internet détenus par la défenderesse ou des membres de son réseau de distribution" sans réserver, comme le lui demandait la société Schneebichler au cas où elle viendrait à prononcer une mesure d'interdiction, le droit pour elle de faire usage du signe "Lohr" en tant que référence nécessaire, en particulier pour indiquer la destination de ses produits en tant notamment qu'accessoires ou pièces détachées dans des conditions conformes aux usages loyaux de commerce, excluant tout risque de confusion, la cour d'appel a violé ensemble l'article L.713-6 du code la propriété intellectuelle et l'article 14 du règlement (UE) n° 2017/1001 sur la marque de l'Union européenne. »
Réponse de la Cour
18. Vu les articles 14 du règlement (UE) n° 2017/1001 et L. 713-6, I, 3°, du code de la propriété intellectuelle :
19. Il ressort de ces textes que le titulaire d'une marque européenne ou française ne peut interdire à un tiers d'en faire usage, dans la vie des affaires, pour désigner ou mentionner des produits ou des services comme étant ceux du titulaire de cette marque, lorsque l'usage de cette marque est conforme aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale et nécessaire pour indiquer la destination d'un produit ou d'un service, notamment en tant qu'accessoire ou pièce détachée.
20. L'arrêt interdit à la société Schneebichler d'utiliser le terme « Lohr » à titre de marque pour désigner, promouvoir et commercialiser, exporter, importer et détenir des pièces de rechange pour des porte-voitures, y compris sur les sites internet qu'elle détient ou détenus par des membres de son réseau.
21. En statuant ainsi, sans réserver l'usage, dans la vie des affaires, conformément aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale, du signe « Lohr » pour désigner ou mentionner des produits ou des services comme étant ceux du titulaire des marques « Lohr », en particulier lorsque l'usage de ces marques est nécessaire pour indiquer la destination d'un produit ou d'un service, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
22. Et en l'absence de doute raisonnable sur l'interprétation du droit de l'Union, il n'y a pas lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de la question préjudicielle suggérée par la société Schneebichler.
Portée et conséquences de la cassation
23. Après avis donné aux parties, conformément à l'
article 1015 du code de procédure civile🏛, il est fait application des
articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire🏛 et 627 du code de procédure civile.
24. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que peuvent être retranchés du chef de dispositif faisant interdiction à la société Schneebichler d'utiliser le terme « Lohr » à titre de marque pour désigner, promouvoir et commercialiser, exporter, importer et détenir des pièces de rechange pour des porte-voitures, y compris sur les sites internet détenus par elle ou des membres de son réseau de distribution, les usages conformes aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale pour désigner ou mentionner des produits ou des services comme étant ceux du titulaire de cette marque, en particulier lorsque l'usage de cette marque est nécessaire pour indiquer la destination d'un produit ou d'un service, notamment en tant qu'accessoire ou pièce détachée.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi incident ;
Réparant l'erreur matérielle affectant l'arrêt attaqué, ajoute dans son dispositif, en page 23 :
– après la mention « - se prononçant sur la contrefaçon de la marque internationale n° 1320946 au titre de laquelle le tribunal s'est déclaré incompétent », la mention « - déclarant irrecevables les demandes de la société Lohr industrie au titre du droit d'auteur sur la rampe de chargement pour porte-voiture » ;
– après la mention « Statuant à nouveau de ces chefs et ajoutant, » la mention « Rejette la demande de la société Lohr industrie en contrefaçon de droits d'auteur sur la rampe de chargement pour porte-voiture » ;
Dit que le présent arrêt sera transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt rectifié ;
CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'il interdit à la société Schneebichler Driving Innovation Gmbh de faire usage, dans la vie des affaires, conformément aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale, du signe « Lohr » pour désigner ou mentionner des produits ou des services comme étant ceux du titulaire des marques « Lohr », en particulier lorsque l'usage de ces marques est nécessaire pour indiquer la destination d'un produit ou d'un service, notamment en tant qu'accessoire ou pièce détachée, l'arrêt rendu le 14 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Condamne la société Schneebichler aux dépens ;
En application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par la société Schneebichler et la condamne à payer aux sociétés Lohr industrie, Lohr service et Lohr immobilier la somme de 1 000 euros à chacune ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille vingt-quatre.