ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Sociale
01 Decembre 1998
Pourvoi N° 98-40.104
Caisse d'allocations familiales de l'Essonne
contre
Mme ... et autres.
Reçoit le ministre de l'Emploi et de la Solidarité ainsi que l'UCANSS en leurs interventions ;
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches
Vu l'avenant du 14 mai 1993 interprétatif du protocole d'accord du 14 mai 1992 relatif à la classification des emplois des organismes de sécurité sociale et de leurs établissements, les articles L 132-2 et L 132-10 du Code du travail ;
Attendu que, le 14 mai 1992, l'Union des caisses nationales de sécurité sociale, d'une part, la Fédération des employés et cadres CGT-FO, la Fédération de la protection sociale du Travail et de l'Emploi CFDT, le Syndicat national des cadres des organismes sociaux CGT-FO, le Syndicat national du personnel de direction des organismes sociaux CFDT, la Fédération nationale des cadres des caisses de sécurité sociale, d'allocations familiales et des organismes assimilés CGC, la Fédération française des syndicats d'agents des institutions de sécurité sociale et des organismes sociaux CFTC, le Syndicat national des agents de direction et d'encadrement des organismes sociaux CFTC, d'autre part, ont conclu un protocole d'accord relatif à la classification des emplois des organismes de sécurité sociale et de leurs établissements ; qu'au titre des dispositions transitoires et particulières pour le passage de l'ancienne à la nouvelle classification des agents en place à la date de l'entrée en vigueur du protocole, l'article 6-1 de ce texte prévoit que des échelons de 2 % sont attribués de façon à ce que le produit du nouveau coefficient par x fois 2 % soit égal au produit de l'ancien coefficient par le pourcentage d'avancement (augmenté le cas échéant d'une majoration d'employé principal), acquis par l'agent à la date de l'entrée en vigueur de la nouvelle classification ; que cet accord a été agréé par le ministre compétent avec effet au 1er janvier 1993 ; que suite à des contestations sur l'application de ce texte, tous les signataires du protocole auxquels s'est joint le Syndicat national du personnel de direction des organismes de sécurité sociale CGC sont, par un avenant du 14 mai 1993, convenus que l'article 6-1 du protocole d'accord du 14 mai 1992 devait se lire de la façon suivante " Des échelons de 2 % sont attribués de façon à ce que le total du nouveau coefficient (Kn) et du produit de ce nouveau coefficient par x fois 2 % soit égal au total de l'ancien coefficient (Ka) et du produit de cet ancien coefficient par le pourcentage (p %) d'avancement (augmenté le cas échéant d'une majoration d'employé principal) acquis par l'agent à la date d'entrée en vigueur de la nouvelle classification " ; que cet avenant a fait l'objet d'un agrément ministériel le 28 mai 1993 ; que Mme ... et 96 autres salariés de la Caisse d'allocations familiales de l'Essonne ont saisi la juridiction prud'homale de demandes de rappel de salaires et de congés payés afférents en se prévalant de l'article 6-1 du protocole dans sa rédaction initiale ;
Attendu que, pour condamner la caisse d'allocations familiales à payer aux salariés des rappels de salaires et de congés payés afférents, le conseil de prud'hommes énonce qu'il est de jurisprudence constante, plus particulièrement en matière de droit social, que l'interprétation donnée par les parties signataires d'une convention ou d'un accord collectif, à supposer même que l'acte interprétatif ait été passé dans les formes admises légalement ou conventionnellement, ne saurait en aucun cas retirer au juge son pouvoir d'appréciation, voire le limiter ;
Attendu, cependant, que l'avenant interprétatif d'un accord collectif signé par l'ensemble des parties à l'accord initial s'impose avec effet rétroactif à la date d'entrée en vigueur de ce dernier accord aussi bien à l'employeur et aux salariés qu'au juge qui ne peut en écarter l'application ;
Qu'en statuant comme il l'a fait, le conseil de prud'hommes a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 27 novembre 1997, entre les parties, par le conseil de prud'hommes d'Evry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Paris.