Vu leur connexité, joint les pourvois n°s 96-40.219 et 96-40.557 ;
Sur le moyen unique :
Attendu que Mme X..., engagée le 1er août 1973 par le Crédit agricole, a fait l'objet, le 28 août 1992, d'une mise à pied ; que, le 4 septembre 1992, elle fut convoquée devant le conseil de discipline qui se réunit le 14 septembre 1992 ; qu'à cette même date, le paiement de son salaire fut rétabli ; qu'elle fut convoquée le 21 septembre 1992 à un entretien préalable et licenciée le 29 septembre 1992 pour faute grave ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Pau, 29 novembre 1995) d'avoir dit que le licenciement était dépourvu de fondement juridique, alors, selon le moyen, d'une part, que l'article 12 de la Convention collective nationale du Crédit agricole mutuel prévoit la possibilité d'une mise à pied conservatoire en ces termes : " si la direction estime qu'il y a faute grave, elle peut suspendre l'intéressé en attendant qu'une décision soit prise à son égard... ", sans prévoir aucune autre forme de mise à pied, et que la lettre du 28 août 1992 de la société exposante à Mme X... la mettant à pied visait expressément l'application de cette disposition conventionnelle (" la gravité des faits qui viennent d'être exposés ce jour me conduisent à vous notifier votre mise à pied en application de l'article 12 de la convention collective ") ; qu'il s'ensuit que dénature ces termes clairs et précis de ladite lettre de l'employeur et viole ledit article 12 de ladite Convention collective nationale et l'article 1134 du Code civil l'arrêt attaqué qui retient que la mise à pied imposée à Mme X... aurait constitué une sanction disciplinaire distincte et non une mesure conservatoire dans l'attente d'une sanction disciplinaire ; alors, d'autre part, que ni la Convention collective nationale du Crédit agricole mutuel, ni le règlement intérieur de la société exposante ne prévoit la possibilité d'une mise à pied parmi les sanctions disciplinaires autorisées ; qu'il s'ensuit que c'est en violation de ces deux textes et de l'article 1134 du Code civil que l'arrêt attaqué a retenu que la mise à pied imposée à Mme X... par lettre du 28 août 1992 aurait constitué une sanction disciplinaire proprement dite et non une mesure conservatoire dans l'attente d'une sanction disciplinaire ; alors, de plus, que la société ayant infligé à Mme X..., par lettre du 28 août 1992, une mise à pied en application de l'article 12 de la Convention collective nationale du Crédit agricole mutuel qui n'autorise une mise à pied conservatoire que pour une durée maximale de 15 jours, et la procédure disciplinaire n'étant pas achevée, ladite société ayant, par lettre du 14 septembre 1992, indiqué à la salariée qu'elle demeurait dispensée de travail, mais que son salaire serait rétabli à compter du 13 septembre 1992, ne justifie pas légalement sa décision au regard du texte conventionnel précité l'arrêt attaqué qui retient que la société aurait reconnu le caractère disciplinaire de la mise à pied initiale puisqu'elle a indiqué à la salariée, par ladite lettre du 14 septembre 1992, que son salaire était rétabli, faute d'avoir tenu compte de la durée maximale de mise à pied admise par la convention collective nationale et de la circonstance que l'intéressée n'avait pas été autorisée à reprendre son poste après le rétablissement de son salaire ;
alors, en outre, que l'article 12 de la convention collective nationale du Crédit agricole mutuel autorisant une mise à pied d'une durée maximale de 15 jours, lorsque la direction estime qu'une faute grave a été commise, et l'article 13 de ladite Convention collective nationale prévoyant une procédure préalable devant un conseil de discipline en cas de licenciement, ne justifie pas légalement sa décision au regard de ces textes l'arrêt attaqué qui considère que la mise à pied infligée à Mme X... aurait eu un caractère disciplinaire et non pas seulement conservatoire, faute d'avoir tenu compte du fait que la société exposante avait intégralement respecté la procédure prévue par la convention collective nationale à l'égard de l'intéressée en lui imposant une mise à pied et en observant la procédure devant le conseil de discipline avant de procéder à son licenciement pour faute grave ; et alors, enfin, que si l'article 12 de la Convention collective nationale du Crédit agricole mutuel énonce que " si la direction estime qu'il y a faute grave, elle peut suspendre l'intéressé en attendant qu'une décision soit prise à son égard, celle-ci devant intervenir dans un délai maximal de 15 jours ", viole ce texte l'arrêt attaqué qui considère que ledit délai maximal de quinze jours ne viserait pas seulement le délai maximal pendant lequel le salarié concerné peut se voir priver de son salaire et que l'employeur ne serait pas autorisé à prendre la mesure disciplinaire plus de quinze jours après la décision de mise à pied conservatoire au cas où ce délai s'avérerait insuffisant pour procéder à l'enquête nécessaire et effectuer la procédure devant le conseil de discipline ; que, de surcroît, en admettant que le texte précité ait impliqué l'obligation de prendre la mesure disciplinaire dans les quinze jours de la décision de mise à pied conservatoire, la Convention collective nationale du Crédit agricole mutuel n'a nullement prévu de sanction en cas de méconnaissance de cette règle, et notamment pas en cas de dépassement de ce délai la mise à pied devrait prendre le caractère d'une mesure disciplinaire distincte, de sorte que c'est en violation dudit article 12 de la convention collective nationale du Crédit agricole mutuel que l'arrêt attaqué a retenu cette solution, au motif qu'il s'était écoulé plus de quinze jours entre la mise à pied du 28 août 1992 et la notification du licenciement en date du 29 septembre 1992 ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que la mise à pied n'avait pas été suivie immédiatement de l'ouverture d'une procédure de licenciement et qu'au surplus, le licenciement n'était pas intervenu dans le délai de 15 jours prévu par la convention collective en cas de mise à pied conservatoire, a pu décider que cette mesure présentait le caractère d'une sanction disciplinaire et a exactement décidé, sans encourir les griefs du moyen, que la salariée ne pouvait être sanctionnée deux fois pour les mêmes faits ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.