Cour de Cassation
Chambre civile 1
Audience publique du 3 Février 1998
Rejet.
N° de pourvoi 96-12.035
Président M. Lemontey .
Demandeur MX
Défendeur procureur de la République près le tribunal de grande instance de Bordeaux et autre
Rapporteur M. ....
Avocat général Mme Le Foyer de Costil.
Avocats la SCP Piwnica et Molinié, la SCP NicolaJ et de Lanouvelle.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Bordeaux, 8 décembre 1995), que M X, notaire, déclaré coupable de s'être rendu complice d'escroqueries commises par Alain ... en donnant des renseignements fallacieux à un confrère et en adressant aux victimes une attestation certifiant comme exactes des données qu'il savait fausses sur les sociétés du groupe Y, a été condamné, par décision passée en force de chose jugée, à la peine de deux ans d'emprisonnement ; que, sur les poursuites disciplinaires qui ont été engagées contre lui en considération de ces faits, l'arrêt attaqué a prononcé sa destitution ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches
Attendu que MX fait grief à l'arrêt de s'être ainsi prononcé, alors que, d'une part, en s'abstenant de constater que c'est à la demande de MX que les débats se sont tenus en chambre du conseil, la cour d'appel aurait privé son arrêt de base légale au regard de l'article 61 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; et que, d'autre part, en prononçant son arrêt en chambre du conseil, la cour d'appel aurait violé les articles 18 et 37 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973, ensemble l'article 61 de la Convention susvisée ;
Mais attendu que, nonobstant les dispositions des articles 18 et 37 du décret du 28 décembre 1973, qui ne sont pas impératives, si l'article 61 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tel qu'il est interprété par la Cour européenne des droits de l'homme, donne à la personne poursuivie disciplinairement devant la cour d'appel le droit de voir sa cause entendue publiquement et l'arrêt rendu sur cette cause en audience publique, c'est à la condition que ce droit ait été invoqué devant cette juridiction ; que MX ne justifiant pas avoir demandé à la cour d'appel de tenir les débats publiquement et de prononcer son arrêt en audience publique, c'est à bon droit que celle-ci a statué comme elle a fait ; que le moyen est donc sans fondement ;
Et, sur le second moyen, pris en ses trois branches
Attendu que MX fait encore grief à l'arrêt d'avoir prononcé sa destitution alors que, d'une part, en se bornant à affirmer que la sanction prononcée par les premiers juges ne correspondait pas suffisamment à la gravité des faits reprochés à MX et en s'abstenant de rechercher si la peine d'interdiction temporaire de 10 ans prononcée par le Tribunal, qui avait tenu compte de son passé professionnel et de son âge qui lui interdisait de reprendre ses fonctions une fois purgée sa peine, n'était pas suffisante, la cour d'appel aurait violé l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; que, d'autre part, en infligeant à MX la peine de destitution pour des faits pour lesquels il avait d'ores et déjà été condamné à 2 ans d'emprisonnement, la cour d'appel aurait violé l'article 4 du protocole n° 7 de la Convention précitée, ensemble l'article 6 de cette Convention ; et alors que, enfin, en s'abstenant de rechercher si la peine qu'elle prononçait était strictement nécessaire au but poursuivi, la cour d'appel aurait privé sa décision de base légale au regard de l'article 15 de la même Convention, ensemble l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, dont l'arrêt détaille les différents faits reprochés au notaire, en relevant la gravité de ces faits et la contradiction qu'ils infligeaient à la confiance que le public doit avoir dans les officiers publics, la cour d'appel a légalement justifié sa décision au regard des textes visés par les première et troisième branches du moyen ; qu'ensuite, la peine prononcée par le juge pénal et les sanctions disciplinaires étant de natures différentes, leur cumul n'est pas concerné par les dispositions visées par la deuxième branche du moyen ; que celui-ci n'est donc fondé en aucune de ses branches ;
Et attendu que le pourvoi présente un caractère abusif ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi.