COUR DE CASSATION
Chambre commerciale
Audience publique du 21 Octobre 1997
Pourvoi n° 95-16.231
Mme Françoise ..., épouse ... et autres
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société Grande pharmacie régionale, société en nom collectif
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par
1°/ Mme Françoise ..., épouse ..., demeurant Montpellier,
2°/ Mme Alice ..., veuve ... ..., demeurant Bugeat,
3°/ M. Pierre ..., demeurant Ussel, en cassation d'un arrêt rendu le 18 avril 1995 par la cour d'appel de Limoges (1re chambre civile), au profit de la société Grande pharmacie régionale, société en nom collectif, dont le siège est Bugeat, prise en la personne de son gérant en exercice, M. ..., domicilié en cette qualité audit siège, défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 24 juin 1997, où étaient présents M. Bézard, président, M. Métivet, conseiller rapporteur, MM ..., ..., ..., ..., ..., ..., ..., conseillers, Mme ..., M. ..., Mme ..., M. ..., conseillers référendaires, Mme Piniot, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Métivet, conseiller, les observations de Me Le ..., avocat des consorts ..., de la SCP Urtin-Petit et Rousseau Van-Troeyen, avocat de la société Grande pharmacie régionale, les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Vu l'article 1153 du Code civil, ensemble l'article 21 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 ;
Attendu que dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution consistent dans la condamnation aux intérêts au taux légal, à compter de la sommation de payer ou d'un autre acte équivalent ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ensuite du décès de M. Jean ..., associé de la société en nom collectif Grande pharmacie régionale (la société), ses héritiers, les consorts ..., ont, le 13 mai 1992, fait sommation à l'associé survivant, M. ..., pris en qualité de gérant unique de la société, de leur payer une certaine somme représentant la valeur des parts de leur auteur; que M. ... a saisi le président du tribunal de commerce, statuant en référé, pour faire déterminer par expert la valeur des parts de la société; qu'au vu du rapport de l'expert, les consorts ... ont assigné M. ... en paiement devant le tribunal de commerce de Tulle, qui, par jugement du 22 juillet 1993, a donné acte aux parties de leur accord sur la valeur des parts sociales fixée par l'expert et de leurs offres de contracter à ce prix et a condamné la société à payer aux consorts ... une certaine somme assortie des intérêts au taux légal à compter du jour du jugement ;
Attendu que pour confirmer cette décision en ce qui concerne le point de départ des intérêts, l'arrêt retient qu'il ne peut être considéré que M. ... ait pris un retard excessif dans l'exécution de ses obligations, de sorte que c'est à bon droit que le Tribunal a assorti sa condamnation des intérêts à compter du jour où il a statué ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi, alors que, lorsqu'à la suite du décès d'un associé d'une société en nom collectif, la société continue avec les associés survivants, les héritiers qui ne deviennent pas associés, soit que les statuts ne l'aient pas prévu, soit qu'ils n'aient pas été agréés par les associés ou qu'ils n'aient pas pu l'être, sont créanciers de la société pour la valeur des droits sociaux de leur auteur et alors que les intérêts afférents à cette dette déjà déterminée, que le juge ne fait que constater, sont dus de plein droit depuis la sommation de payer, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 avril 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Fixe au jour de la sommation du 13 mai 1992 le point de départ des intérêts légaux de la somme de 3 013 146 francs que la société Grande pharmacie régionale a été condamnée à payer aux consorts ... ;
Condamne la société Grande pharmacie régionale aux dépens ;
Met en outre à sa charge ceux afférents aux instances devant les juges du fond ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.