ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Commerciale
26 Novembre 1996
Pourvoi N° 94-15.661
Société Econocom Location et autres
contre
M. ....
Sur le moyen unique Vu l'article 110 de la loi du 24 juillet 1966 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Econocom Location a signé avec M. ... une convention d'acquisition du capital de la société anonyme Info 7 qui était son agent commercial exclusif ; que M. ..., qui avait été maintenu dans ses fonctions de président du conseil d'administration et de directeur général de cette société, en a été révoqué le 13 décembre 1991 ; que, prétendant cette révocation abusive, il a assigné cette société et ses actionnaires majoritaires, les sociétés Econocom Location et Econocom, en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que, pour accueillir cette demande, la cour d'appel relève qu'il résulte d'un document, diffusé dès le 13 décembre 1991, sous la signature de M. ..., nouveau président du conseil d'administration de la société Info 7, que la révocation de M. ... de ses fonctions a été motivée par la perte de confiance résultant de la décision de celui-ci d'assigner en justice son actionnaire majoritaire, la société Econocom Location ; que l'ordre du jour du conseil du 13 décembre 1991 ne comportait que ce seul point, que le procès-verbal fait état de ce motif ; qu'une assemblée générale a été convoquée pour le 8 janvier 1992, avec notamment à son ordre du jour la révocation d'un administrateur qui n'a pu se tenir ; que la révocation de M. ... de ses fonctions d'administrateur a été votée par une assemblée du 12 février 1992 ; qu'il est manifeste que les motifs des deux révocations de M. ... sont identiques, les intimés ne pouvant donc être admis à prétendre que la révocation du président serait aussi motivée par une baisse de résultats, aucune mise en garde n'étant établie à ce sujet avant la lettre du 22 juillet 1992, celle-ci concernant seulement la conséquence des pertes de l'exercice de 1991, sur la part du prix des actions restant à payer ; que la circonstance que M. ... ait pris l'initiative de demander en référé la désignation d'un expert pour chiffrer le préjudice, que la société qu'il dirigeait aurait subi du fait d'une violation de son droit d'agent commercial exclusif, ne peut caractériser, sans abus, une perte de confiance justifiant sa révocation ; qu'il n'avait pas à entretenir les autres membres du conseil de son projet, en raison de la circonstance que son assignation les visaient personnellement ou ès qualités de représentants des administrateurs personnes morales ; que cette circonstance établit au contraire que la révocation n'est pas intervenue dans l'intérêt social ; que la circonstance que les administrateurs majoritaires ont provoqué même la révocation de M. ... de ses fonctions d'administrateur tend à établir que c'est un intérêt personnel qui était poursuivi ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, par une appréciation des griefs faits par la société au président de son conseil d'administration, alors qu'elle ne pouvait qu'examiner si les circonstances dans lesquelles sa révocation était intervenue avaient porté atteinte à l'honneur de celui-ci ou si elle avait été décidée brutalement, sans respecter le principe de la contradiction, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 avril 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims.