Jurisprudence : CA Agen, 10-01-2024, n° 22/00844, Infirmation partielle

CA Agen, 10-01-2024, n° 22/00844, Infirmation partielle

A51582HI

Référence

CA Agen, 10-01-2024, n° 22/00844, Infirmation partielle. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/104344189-ca-agen-10012024-n-2200844-infirmation-partielle
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ARRÊT DU

10 Janvier 2024


ALR / NC


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N° RG 22/00844

N° Portalis DBVO-V-B7G -DBN6

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SASU GARNICA SAMAZAN


C/


GROUPEMENT FORESTIER [R]


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GROSSES le

aux avocats


ARRÊT n° 02-24


COUR D'APPEL D'AGEN


Chambre Civile

Section commerciale


LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,



ENTRE :


SASU GARNICA SAMAZAN pris en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège

RCS AGEN 501 583 355

[Adresse 1]

[Adresse 1]


représentée par Me David LLAMAS, avocat postulant au barreau d'AGEN

et Me Fabien BLONDELOT, SELAS FIDAL, substitué à l'audience par Me Pierre-Antoine JOUDELAT, avocat plaidant au barreau de l'AUBE


APPELANTE d'un jugement du tribunal de commerce d'Agen en date du 28 septembre 2022, RG 2020 002984


D'une part,


ET :


GROUPEMENT FORESTIER [R] pris en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège

RCS BOURGES 410 789 655

[Adresse 5]

[Adresse 5]


représentée par Me Vincent DUPOUY, avocat postulant au barreau d'AGEN

et Me Paola LUGNANI, SCP GUIEN LUGNANI & Associés, avocate plaidante au barreau de PARIS


INTIMÉ

D'autre part,


COMPOSITION DE LA COUR :


l'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 13 novembre 2023 devant la cour composée de :


Président : André BEAUCLAIR, Président de chambre

Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller

Anne Laure RIGAULT, Conseiller qui a fait un rapport oral à l'audience


Greffière : Nathalie CAILHETON


ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛


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RAPPEL DES FAITS :


Par contrat en date du 3 avril 2016, la société GARNICA SAMAZAN (SAS) a acheté des peupliers sur pied au Groupement Forestier [R], arbres situés dans le Bois de la Grande Prairie sur les communes de [Localité 3] et de [Localité 7].


Le contrat portait sur 7758 arbres à couper, pour moitié le 31 octobre 2016 et le reste le 31 août 2017, et comprenait le ramassage de la papeterie jusqu'à 8 cm de diamètre, pour le prix de 210 000 € HT, soit 252 000 € TTC versé sous forme d'un chèque à la signature et de 5 virements tous les 45 jours.


Les délais contractuels n'ont pas été respectés, et les zones d'abattage et les accès ont été endommagés et non remis en état.


Le Groupement Forestier [R] a sollicité de la société Garnica Samazan le paiement de la somme de 50 000 € à titre de réparation du préjudice subi, somme ramenée à un forfait de 35 000 € après négociation.


La somme de 35000 € n'a pas été virée sur le compte habituel du Groupement Forestier [R], à savoir le Crédit Agricole Centre Loire.


La société Garnica Samazan affirme avoir versé lesdits fonds sur un compte en Irlande, Bank of Ireland, tel qu'indiqué par le Groupement Forestier [R] en son courriel du 4 octobre 2018.


Le Groupement Forestier [R] conteste avoir donné de telles instructions, puisque non détenteur d'un compte à l'étranger.


Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 7 novembre 2018, le conseil du Groupement Forestier [R] a mis en demeure la société Garnica Samazan de régler la somme de 35 000 €.


Le 9 novembre 2018, la société Garnica Samazan a porté plainte pénale pour abus de confiance.


Par acte en date du 18 juin 2020, le Groupement Forestier [R] a fait assigner en paiement la société Garnica Samazan par devant le tribunal de commerce d'Agen.


L'enquête a été classée sans suite.


Par jugement en date du 28 septembre 2022, le tribunal de commerce d'Agen a :


condamné la société Garnica Samazan au paiement de la somme de 35 000 € au Groupement Forestier [R],

condamné la société Garnica Samazan sas au paiement des intérêts moratoires au taux légal, à partir du 7 novembre 2018,

confirmé l'exécution provisoire des présentes dispositions,

condamné la société Garnica Samazan aux dépens,

débouté les parties de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions,

liquidé les dépens dont frais de greffe pour le présent jugement à la somme de 72.22 €.



Par acte du 24 octobre 2022, la société Garnica Samazan a déclaré former appel du jugement en désignant le Groupement Forestier [R] en qualité de partie intimée. Tous les chefs du jugement ont été expressément critiqués dans la déclaration d'appel.


La clôture a été prononcée le 25 octobre 2023 et l'affaire fixée à l'audience de la Cour du 13 novembre 2023.



PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES


I. Moyens et prétentions de la société Garnica Samazan appelante


Par conclusions récapitulatives enregistrées au greffe le 23 octobre 2023, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés conformément à l'article 455 du code de procédure civile🏛, la société Garnica Samazan demande à la cour de :

vu l'article 1342-3 du code civil🏛, l'article 542 du code de procédure civile🏛, les jurisprudences citées,


infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Agen du 28 septembre 2022 en ce qu'il a :

débouté la société GARNICA de ses demandes, fins et conclusions,

condamné la société GARNICA SAMAZAN SAS au paiement de la somme de 35 000 € au Groupement Forestier [R].

condamné la société GARNICA SAMAZAN SAS au paiement des intérêts moratoires au taux légal, £1 partir du 7 novembre 2018.

confirmé l'exécution provisoire des présentes dispositions.

condamné la société GARNICA SAMAZAN SAS aux dépens,

statuant de nouveau,

à titre principal,

juger que la société Groupement Forestier [R] a bien été destinataire du règlement de 35.000 euros effectué le 11 octobre 2018 par la société GARNICA,

débouter le Groupement Forestier [R] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

à titre subsidiaire,

juger que le paiement effectué par la société GARNICA le 11 octobre 2018 est valable et libératoire puisque effectué auprès d'un créancier apparent,

débouter le Groupement Forestier [R] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

en tout état de cause, débouter le Groupement Forestier [R] de son appel incident,

rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions du Groupement Forestier [R],

condamner la société Groupement Forestier [R] à verser à la société GARNICA une somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

condamner le Groupement Forestier [R] aux entiers dépens.


A l'appui de ses prétentions, la société Garnica Samazan fait valoir que :


le tribunal de commerce d'Agen n'a pas tenu compte de ce que l'intimé a bien réceptionné ce courriel du 9 octobre 2018 à 11 heures 25 dans lequel était joint le document renvoyé signé le même jour à 13 heures 30 à GARNICA.

les éléments de l'enquête de police démontrent que la totalité des courriels reçus par GARNICA via l'adresse courriel [Courriel 8] émanaient du Groupement Forestier [R],

en cause d'appel, la société GARNICA communique une attestation de sa banque qui confirme le règlement de la somme de 35.000 € sur le compte bénéficiaire irlandais indiqué sur les pièces n°9 et 24 (Pièce n°25), mentionnant l'IBAN : [XXXXXXXXXX06], " Référence Remise : VIR BOIS 11/10/2018 " (celui indiqué sur la Pièce n°12) ainsi qu'une " Référence - Libellé : 3 - CONTRAT CF3842/1412 REMISE EN ETAT ".

en l'enquête pénale, des investigations n'ont pas été réalisées auprès de la BANK OF IRELAND afin de vérifier si le versement de la somme de 35.000 € a été effectué sur un compte irlandais,

le Groupement Forestier [R] veut se faire payer deux fois ou se trouve victime d'une manipulation établie par une personne travaillant en son sein,

subsidiairement, le paiement a été fait de bonne foi à un créancier apparent.

le solvens doit avoir commis une erreur de fait, c'est-à-dire avoir légitimement cru en la qualité de créancier de la personne qu'il a payée,

en retenant le critère de l'imprudence, le tribunal de commerce d'Agen a commis une erreur de droit en allant au-delà du texte légal et n'a pas constaté l'existence d'une mauvaise foi de la part de GARNICA dans le paiement de la somme de 35.000 €,

l' 'imprudence" relevée n'est pas caractérisée puisqu'elle n'était pas contractuellement tenue de procéder aux virements sur un compte spécifiquement indiqué, et pouvait légitimement penser que le Groupement Forestier [R] était titulaire de ce compte bancaire.

Sur l'existence d'un créancier apparent : les emails des 4 et 11 octobre 2028 envoyés à la société GARNICA étaient personnalisés puisque l'objet portait sur un sujet précis à savoir l'existence d'un accord transactionnel conclu entre les parties à hauteur de 35.000 euros, et le contenu était en lien avec la réalité. Elle n'était pas tenue de vérifier si les instructions reçues émanaient du Groupement forestier,

sur la bonne foi de GARNICA : elle n'avait pas à vérifier les pouvoirs du créancier apparent et l'origine des emails, ne pouvait se douter que les emails litigieux émanaient d'un fraudeur alors même qu'était jointe la lettre d'engagement signée par chaque partie et que l'adresse [Courriel 8] utilisée état celle du groupement forestier. Elle n'était pas contractuellement tenue de procéder aux virements sur un compte spécifiquement indiqué, et pouvait légitimement penser que le Groupement Forestier [R] était titulaire du compte bancaire irlandais.

le contrat ne prévoyait pas d'obligation contractuelle de confirmation par télécopie,

elle n'avait jamais été informée que le Groupement ne disposait d'aucun compte à l'étranger, et l'envoi de coordonnées de comptes bancaires étrangers n'était pas suspect, compte tenu des relations internationales des parties, les communications s'effectuaient en français ou en italien, de quatrième part, la société GARNICA fait partie d'un groupe espagnol habitué à travailler à l'international,

les fautes de grammaire dans le mail rédigé en italien n'étaient pas de nature à rendre suspects les mail envoyés.

sur l'appel incident du Groupement Forestier [R], la capitalisation des intérêts n'était pas contractuellement prévue.


Par conclusions récapitulatives enregistrées au greffe le 12 octobre 2023, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés conformément à l'article 455 du code de procédure civile, le Groupement Forestier [R] demande à la cour de :

vu les articles 1134 anc., 1147 anc., 1342-2, 1343-4, 1353, 1231-6 et 1343-2 du Code civil🏛, 700 du Code de procédure civile,

À titre principal :


rejeter l'ensemble des demandes, moyens et prétentions de la société GARNICA SAMAZAN et, par conséquent, confirmer le jugement du Tribunal de commerce d'Agen du 28 septembre 2022 en ce qu'il l'a condamnée à verser au Groupement Forestier [R] la somme principale de 35.000 € avec les intérêts moratoires au taux de l'intérêt légal à compter du 7 novembre 2018, après avoir ordonné, le cas échéant :

une expertise graphologique sur la signature apposée sur le courrier de la société GARNICA du 9 octobre 2018 sous le nom "Groupement Forestier [R]" et désigné un expert ayant pour mission de déterminer si elle correspond à la signature du gérant du Groupement Forestier [R],

l'audition de Monsieur [B] [R] concernant son attestation du 24 septembre 2021 et les faits qui y sont relatés ;


À titre d'appel incident :


infirmer le jugement du Tribunal de commerce d'Agen du 28 septembre 2022 en ce qu'il a rejeté la demande de capitalisation des intérêts échus dus par la société GARNICA SAMAZAN SAS au moins pour une année entière,

infirmer le jugement du Tribunal de commerce d'Agen du 28 septembre 2022 en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation de la société GARNICA SAMAZAN SAS au paiement d'une somme de 4.000 € au titre des frais irrépétibles de première instance sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Et, statuant à nouveau :

ordonner la capitalisation des intérêts échus dus par la société GARNICA SAMAZAN SAS pour une année entière,

condamner la société GARNICA SAMAZAN SAS au paiement d'une somme de 4.000 € au titre des frais irrépétibles de première instance sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

En tout état de cause :

condamner la société GARNICA SAMAZAN SAS à verser au Groupement Forestier [R] une somme de 4.000 € au titre des frais irrépétibles de la procédure d'appel sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

condamner la société GARNICA SAMAZAN SAS aux entiers dépens.


A l'appui de ses prétentions, le Groupement Forestier [R] fait valoir que :


la société GARNICA n'a jamais justifié de la réalité du versement sur un compte irlandais qu'elle affirme avoir effectué, produisant aux débats, cinq ans après les faits, une attestation de la BANQUE POPULAIRE OCCITANE indiquant qu'un virement de 35.000 € a été débité du compte de l'appelante le 11 octobre 2018 au profit d'un compte irlandais (Cf. Pièce adverse n°25),

la société GARNICA soutient avoir subi une fraude selon la technique dite du "man in the middle", par laquelle un fraudeur se fait passer pour un fournisseur afin d'obtenir un paiement sur un faux compte étranger,

mais la prétendue fraude au virement ne saurait en aucun cas avoir un effet libératoire puisque Groupement Forestier [R] n'est pas responsable de cette prétendue fraude, dont il n'est pas à l'origine et qui ne lui a pas profitée,

De surcroît, si la fraude était avérée, la société GARNICA aurait manifestement agi avec une grande légèreté, voire avec négligence et imprudence, procédant à un virement à l'étranger sans la moindre vérification et alors qu'elle avait reçu en l'espace de quelques jours seulement plusieurs -fausses- indications totalement contradictoires entre elles et en contradiction manifeste avec les cinq paiements déjà effectués par virement au profit du Groupement Forestier [R] sur son compte du CRÉDIT AGRICOLE CENTRE LOIRE,

l'appelante ne démontre pas avoir entrepris des démarches auprès de sa banque aux fins d'annulation, ou révocation du virement litigieux, alors que, lors de la rencontre du 29 octobre 2018 au siège de la société GARNICA, elle a demandé au Groupement Forestier [R] de lui remettre une attestation déclarant n'être pas titulaire du compte irlandais et n'avoir jamais perçu la somme de 35.000 €,

sur l'appel incident du Groupement Forestier [R] : il aurait dû percevoir la somme de 35.000 € au début du mois d'octobre 2018, et ne l'a reçue qu'au début du mois de mars 2023, soit avec un retard de 4 ans et demi, alors que cette somme correspond à l'indemnisation des préjudices subis pour non-respect par la société GARNICA de ses obligations contractuelles.



MOTIFS DE LA DÉCISION


Il est acquis qu'au terme d'une transaction intervenue, la société GARNICA se trouve débitrice de la somme de 35 000 € au titre des dommages et intérêts pour inexécution du contrat en date du 3 avril 2016 de vente de peupliers sur pied par le Groupement Forestier [R] à la société Garnica Samazan.


L'article 1353 du code civil🏛, relatif à la charge de la preuve, prévoit en son alinéa 2, comme l'ancien article 1315 alinéa 2, que celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. Ainsi s'il appartient au créancier de prouver l'engagement d'où résulte sa créance, il revient au débiteur de prouver qu'il a effectivement payé.


L'article 1342-2 du Code civil🏛 dispose que : "Le paiement doit être fait au créancier où à la personne désignée pour le recevoir. Le paiement fait à une personne qui n'avait pas qualité pour le recevoir est néanmoins valable si le créancier le ratifie ou s'il en a profité. Le paiement fait à un créancier dans l'incapacité de contracter n'est pas valable, s'il n'en a tiré profit ".


L'article 1342-3 du même code stipule que le paiement fait de bonne foi à un créancier apparent est valable.


Il appartient à la société Garnica Samazan, qui se prétend libérée, de justifier du paiement revendiqué à la date du 11 octobre 2018.


La société Garnica Samazan communique les même pièces que celles par elle produites devant le premier juge, outre une pièce supplémentaire N°25, intitulée "Attestation de la Banque Populaire Occitane du 14 juin 2023".


La cour relève qu'il n'est pas discuté que le prix du contrat de vente des peupliers à couper de 252 000 € TTC a été réglé par la société Garnica Samazan au Groupement Forestier [R] dans les termes contractuels à savoir un chèque à la signature, le 3 avril 2016, et 5 virements tous les 45 jours, soit antérieurement au mois d'octobre 2018, période du litige lié au paiement des dommages et intérêts de 35 000 €.


La pièce n° 25 communiquée en cause d'appel par l'appelante, intitulée "ATTESTATION" émane de la BANQUE POPULAIRE OCCITANE, banque de la société Garnica Samazan, et indique "qu'en date du 11/10/2018 l'écriture suivante a été débitée sur le compte de notre client SAS GARNICA SAMAZAN N°05321403878.... Montant de 35000 € ... libellé : contrat CF3842/1412 remise en état, BIC bénéficiaire [XXXXXXXXXX02] Banque bénéficiaire : Bank of Ireland IBAN Bénéficiaire : [XXXXXXXXXX04] Bénéficiaire : GF [R]".


L'intimée ne communique aucun élément pertinent de nature à établir que l'attestation susvisée, qu'elle qualifie de "douteuse", serait entachée d'irrégularité.


Si cette pièce démontre que le compte de la société Garnica Samazan a été débité de la somme de 35 000 € le 11 octobre 2018, l'attestation du conseiller clientèle professionnelle en date du 13 novembre 2018 justifie que le compte bancaire crédit agricole CENTRE LOIRE du Groupement Forestier Ricci n'a "pas été crédité de la somme de 35 000 €".


Il est acquis que le compte Bank of Ireland IBAN Bénéficiaire : [XXXXXXXXXX04] n'est pas le compte bancaire de la Société Groupement Forestier [R], la totalité des 5 virements (en paiement de la prestation contractuelle d'achat des peupliers sur pied) ayant été réalisés par la société Garnica Samazan sur le compte du crédit agricole CENTRE LOIRE, compte bancaire du Groupement Forestier [R].


La société Garnica Samazan, qui invoque sa croyance légitime et avoir agi de bonne foi, prétend que la consigne de créditer un compte irlandais, distinct du compte habituel connu d'elle, lui aurait été transmise par mail du 4 octobre 2018 à 14 heures 28, mail émanant de la société Groupement Forestier [R] puisqu'issu de l'adresse " [Courriel 8]".


La cour retient des éléments communiqués que :


les parties ont transigé sur les dommages et intérêts le 4 octobre 2018, le Groupement ayant retranscrit les termes de cet accord par courriel envoyé le 4 octobre 2018 à 8 heures 50, confirmé par télécopie envoyée à 9 heures 26, selon sa pratique habituelle, sans que le Groupement Forestier ne sollicite une modification de la domiciliation bancaire à utiliser pour le paiement.

la société Garnica Samazan a reçu deux mails les 4 octobre 2018 à 14H28 et 9 octobre 2018 à 13H30, émanant de l'adresse IP du Groupement Forestier [R], lui donnant deux instructions contradictoires, l'une de créditer un compte irlandais et l'autre de créditer un compte espagnol de la somme de 35 000 €, ce mail étant entâché de faute de syntaxe,

la société Garnica Samazan a crédité le compte irlandais de la somme de 35 000 € et non le compte espagnol, alors même qu'il ne s'agissait pas de la dernière instruction par elle reçue, sans qu'elle ne s'explique sur ce virement sur le compte irlandais et non sur le compte espagnol,

les mails litigieux ont été révélés et remis le 29 octobre 2018 par M. [Aa], technicien forestier, représentant la société Garnica Samazan, à M. [N] [R], dirigeant du Groupement Forestier lors de la réunion du 29 octobre 2018 relative au défaut de paiement,

l'enquête pénale ouverte suite à la plainte pour abus de confiance de la société Garnica Samazan a été classée sans suite.


Les développements sur la nécessité pour le Groupement Forestier [R] de porter plainte sont sans emport.


Il s'évince de ces éléments que la société Garnica Samazan a procédé à un virement sur un compte étranger, après avoir reçu par mails successifs deux ordres de paiement contradictoires sur deux comptes étrangers, sans lien avec la domiciliation des contractants, en l'absence de confirmation de l'ordre donné par télécopie, conformément à l'usage de leurs relations commerciales, et alors même que les relations commerciales habituelles l'avaient conduite à procéder à cinq reprises à un virement sur le même et unique compte du créancier, à savoir le crédit agricole CENTRE LOIRE.


Le déroulement des faits était ainsi de nature à exclure toute croyance légitime pour la société Garnica Samazan sur la provenance et l'authenticité des indications de paiement contradictoires reçues.


Le virement de 35 000 € effectué par la société Garnica Samazan sur un compte bancaire irlandais ne revêt donc aucun caractère libératoire.


Le jugement sera confirmé.


La cour relève que bien qu'interpellée par l'intimée, la société GARNICA ne communique aucun élément de nature à justifier de l'absence d'annulation de l'opération financière, ni de contrepassation de l'écriture à son profit, alors que, lors de la rencontre entre les parties en date du 29 octobre 2018, elle avait demandé au Groupement Forestier [R] la remise d'une attestation justifiant de sa non titularité du compte irlandais et de l'absence de remise de la somme de 3 5000 € aux fins d'annulation du virement. L'attestation établie se trouve en pièce n°9 de l'intimée.


Il convient d'accueillir la demande du Groupement Forestier [R] et d'ordonner la capitalisation des intérêts aux taux légal par application de l'article 1343-2 du code civil🏛 depuis la mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 7 novembre 2018.


Le jugement sera infirmé sur ce chef.


Sur les demandes accessoires :


Le jugement frappé d'appel sera également confirmé en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.


La société Garnica Samazan succombant, elle supportera les dépens d'appel, augmentés d'une somme de 2000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS :


La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,


Confirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf sur la capitalisation des intérêts depuis la mise en demeure du 7 novembre 2018,


Infirme le jugement de ce chef,


Statuant à nouveau,


Ordonne la capitalisation des intérêts pour une année entière depuis la mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 7 novembre 2018,


Y ajoutant


Condamne la société Garnica Samazan à payer au Groupement Forestier [R] la somme de 2000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,


Condamne la société Garnica Samazan aux dépens d'appel.


Le présent arrêt a été signé par André BEAUCLAIR, président, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


La Greffière, Le Président,

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