Jurisprudence : CA Lyon, 13-12-2023, n° 22/07740


N° RG 22/07740 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OT3L


décision du

TJ hors JAF, JEX, JLD, Aa A, … … …

Au fond

du 03 novembre 2022


RG :21/0Ab483


[S]

[F]


C/


[X]


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D'APPEL DE LYON


2ème chambre A


ARRET DU 13 Décembre 2023



APPELANTES :


Mme [Ac] [S] épouse [F]

née le [Date naissance 6] 1980 à [Localité 9]

[Adresse 1]

[Localité 8]


représentée par Me Gilles AUBERT de la SELARL AUBERT GILLES - AVOCAT, avocat au barreau de LYON


Mme [A] [F] épouse [S]

née le [Date naissance 3] 1981 à [Localité 13]

[Adresse 1]

[Localité 8]


représentée par Me Gilles AUBERT de la SELARL AUBERT GILLES - AVOCAT, avocat au barreau de LYON


INTIME :


M. [Ab] [X]

né le [Date naissance 5] 1982 à [Localité 12]

[Adresse 7]

[Localité 8]


représenté par Me Sylvain THOURET de la SCP THOURET AVOCATS, avocat au barreau de LYON


* * * * * *


Date de clôture de l'instruction : 19 Octobre 2023


Date des plaidoiries tenues en Chambre du Conseil: 15 Novembre 2023


Date de mise à disposition : 13 Décembre 2023



Composition de la Cour lors des débats et du délibéré:

- Isabelle BORDENAVE, présidente

- Georges PÉGEON, conseiller

- Françoise BARRIER, conseillère


En présence de Ad B, substitute générale


assistée pendant les débats de Sophie PENEAUD, greffière


A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile🏛.


Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile🏛,


Signé par Isabelle BORDENAVE, présidente, et par Sophie PENEAUD, greffière, à laquelle la minute a été remise par la magistrate signataire.


* * * * *



EXPOSÉ DU LITIGE


Mme [Ac] [S] et Mme [A] [F] se sont mariées le [Date mariage 4] 2018, et Mme [A] [F] a donné naissance, le [Date naissance 2] 2020, à l'enfant [C]Ab[F] [X].


Par requête du 10 juin 2021, Mme [Ac] [S] et Mme [A] [F] ont saisi le tribunal judiciaire, aux fins de voir prononcer l'adoption, par Mme [Ac] [S], de l'enfant [C] [F] [Ab], né le [Date naissance 2] 2020 à [Localité 10], de Mme [A] [F] épouse [S], et de M.[I] [Ab], de voir ordonner la transcription du jugement d'adoption en marge des actes d'état civil de l'adopté, de voir confirmer l'accord parental de partage de l'autorité parentale entre Mme [A] [F],Mme [Ac] [S] et M. [I] [Ab], et de voir dire que l'adoption simple emportera modification du nom de famille de l'enfant, à savoir [F] [S].


Elles rappelaient, au soutien de leur requête, avoir, dans le cadre d'un projet de parentalité,convenu avec M.[I] [Ab], qui avait accepté d'être le père biologique de l'enfant, des modalités d'une co-parentalité à trois, comprenant notamment une délégation partage de l'autorité parentale, et une adoption de l'enfant par la mère d'intention.



Par jugement du 3 novembre 2022, auquel il est référé, le tribunal judiciaire de Lyon a rejeté la requête en adoption simple de l'enfant [C] [F] [Ab], présentée par Mme [Ac] [S], et l'ensemble des demandes qui en découlent, et a laissé les dépens à la charge du Trésor Public.


Par déclaration enregistrée le 21 novembre 2022, Mme [Ac] [S] épouse [F] et Mme [A] [F] épouse [S] ont relevé appel de cette décision, l'appel portant sur le rejet de la demande d'adoption simple.


MOYENS ET PRETENTIONS


Aux termes de leurs conclusions, notifiées le 20 février 2023, Mme [S] et Mme [F] demandent à la cour de les déclarer recevables et bien fondées en leur appel, de débouter M. [Ab] de l'ensemble de ses demandes, comme non fondées en fait et en droit, de le débouter de tout appel incident éventuel, d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions.


Statuant à nouveau, elles demandent que soit prononcée l'adoption simple de l'enfant [C], né le [Date naissance 2] 2020 à [Localité 10], par Mme [Ac] [S], que soit ordonnée la transcription du jugement d'adoption en marge des actes d'état civil de l'adopté et de l'adoptante, et que soit confirmé l'accord parental de partage de l'autorité parentale entre Mme [F], Mme [S] et M. [Ab], sollicitant qu'il soit dit que l'adoption simple emportera modification du nom de famille de l'enfant, à savoir [F] [S], et que chaque partie supporte ses frais et dépens.


Elles rappellent le contexte du projet parental convenu avec M. [Ab], ce dernier s'étant proposé pour être le père biologique de l'enfant, précisent qu'il était convenu avec lui des modalités futures de l'organisation, et notamment de l'adoption par la mère d'intention.


Elles rappellent les dispositions des articles 360 à 370 code civil🏛🏛, et précisent en l'espèce que M. [Ab] a donné son consentement à l'adoption devant notaire, sans jamais remettre en cause cet acte authentique, qu'aucune rétractation n'est intervenue dans les deux mois qui ont suivi ces actes, que cette adoption est conforme à l'intérêt de l'enfant, pour lui permettre d'avoir une situation juridique conforme à sa vie quotidienne, à savoir trois parents, indiquant que Mme [Ac] [S] est fortement impliquée dans la vie de l'enfant, avec lequel elle a noué des liens étroits, comme toute mère.


Elles précisent que le jugement du 19 novembre 2021, rendu par le juge aux affaires familiales, avait retenu une autorité parentale partagée sur l'enfant entre Mme [F], M. [Ab] et la mère d'intention, Mme [S] , ce jugement fixant la résidence de l'enfant au domicile de Mme [F] et de Mme [S], et organisant le droit de visite et d'hébergement du père.


Elles concluent que c'est à tort que le premier juge a refusé de prononcer l'adoption, au motif que cela remettrait en cause l'exercice de l'autorité parentale par le père, alors qu'une délégation d'autorité parentale a d'ores et déjà été prononcée, soutenant que le refus de prononcer l'adoption simple prive l'enfant de la chance d'avoir Mme [S] comme mère.


Par conclusions en réponse notifiées le 17 mai 2023, M. [Ab] demande de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, de débouter Mme [F] et Mme [S] de leurs demandes, et de juger que chaque partie conservera la charge de ses dépens.


ll rappelle que le père et la mère n'ont jamais vécu ensemble, que l'enfant est issu d'un projet de co-parentalité, mené conjointement par lui-même, Mme [F] et la compagne de cette dernière, Mme [S], entre-temps devenue son épouse, précisant que ce projet a donné lieu à l'établissement d'une charte de co-parentalité et qu'il était prévu que chacun des parents aurait sa place dans la vie de l'enfant, lequel porterait le nom de sa mère biologique et de son père accolés, avec partage de l'autorité parentale entre les parents biologiques et Mme [S], résidence de l'enfant, à compter de la scolarisation, en alternance, au domicile de chacun des parents.


Il indique que c'est dans ce contexte que diverses actions ont été menées, une déclaration conjointe, le 16 novembre 2020, par laquelle Mme [F] et lui-même ont donné comme nom de famille à l'enfant le nom de [F] [Ab], et la saisine du juge aux affaires familiales pour voir déléguer l'autorité parentale à Mme [S].


Il précise avoir pris attache avec son conseil, qui a modifié sa demande, de sorte que la délégation de l'autorité parentale ne concerne qu'une délégation partage, sur le fondement de l'article 377-1du code civil🏛.


Il indique que, par acte du 10 décembre 2020, lui-même et Mme [F] ont consenti à l'adoption de l'enfant par Mme [S], précisant ne pas avoir compris la portée de son consentement, en ce qui concerne l'exercice de l'autorité parentale, situation justifiant l'absence de rétractation de ce consentement dans le délai de deux mois.


Il soutient sa détermination à vouloir jouer un rôle au quotidien dans la vie de l'enfant, précisant avoir saisi le juge aux affaires familiales à cette fin, ayant demandé, à compter de septembre 2023, l'organisation d'une résidence en alternance, et rappelle qu'un jugement a été prononcé le 18 novembre 2021, par lequel le juge aux affaires familiales a organisé à son profit un droit de visite et d'hébergement élargi, considérant qu'il était prématuré d'organiser une résidence en alternance.


Il explique avoir compris que le projet d'adoption de l'enfant, auquel il a consenti le 10 décembre 2020,entraînait pour lui la perte de l'autorité parentale, situation incompatible avec la mise en œuvre d'une résidence alternée, indiquant alors avoir avisé Mme [F] et Mme [S] de ce qu'il ne consentait plus à l'adoption, ayant demandé à intervenir volontairement à la procédure engagée par ces dernières, pour s'opposer à celle-ci.


Il reprend les divers textes applicables pour étayer la demande d'adoption, soutenant que son consentement devant le notaire a été vicié, alors qu'il n'a jamais voulu être privé de ses droits d'autorité parentale, l'acte de consentement ne comportant aucune mention à ce titre; il conclut dès lors qu'aucune conséquence ne peut être tirée de ce consentement, et de l'erreur commise par lui quant à la portée de son engagement.


Il expose que le projet d'adoption n'est pas conforme à l'intérêt de l'enfant, alors qu'il remettrait en cause sa propre autorité parentale sur ce dernier, et qu'il serait privé de tout pouvoir de décision, cette conséquence allant à l'encontre de tous les projets noués dans le cas d'une véritable co-parentalité.


Il soutient que c'est à tort que les appelantes cherchent à faire croire que le problème pourrait être réglé dans le cadre d'une délégation d'autorité parentale, et que c'est précisément parce que l'adoption de l'enfant par Mme [S] n'est pas possible que la délégation partage de l'autorité parentale a été mise en place par le jugement du 19 novembre 2021, aujourd'hui définitif, lequel permet d'intégrer cette dernière dans la vie de l'enfant, à égalité avec Mme [F], et lui-même ; il précise qu'accueillir la demande d'adoption reviendrait à rendre sans objet et sans effet le jugement de délégation de l'autorité parentale du 19 novembre 2021, et que la conséquence serait qu'il deviendrait totalement absent de la vie de l'enfant, sans autorité parentale et sans délégation, et totalement dépendant du bon vouloir de Mme [F] et de Mme [S].


Il précise enfin que le tribunal ne peut confirmer l'accord de délégation partage de l'autorité parentale comme cela est sollicité.


Par avis du 10 novembre 2023, porté à la connaissance des parties,avec possibilité d'observations en cours de délibéré précisée à l'audience. Mme la procureure générale a conclu à la confirmation du jugement, rappelant les dispositions de l'article 353 du code civil🏛, et l'intérêt de l'enfant.


Le ministère public fait valoir que M. [Ab] a donné son consentement à l'adoption sans avoir été informé des conséquences de celle-ci sur son autorité parentale, que dans le cadre de l'accord trouvé, les parties s'étaient accordées pour que ce dernier participe non seulement la conception de l'enfant, mais s'engage de manière égalitaire à s'investir dans sa vie et son éducation.


Au visa des dispositions de l'article 365 du code civil🏛, le ministère public indique que l'adoption simple réalise transfert de l'autorité parentale au profit de l'adoptant, soutenant que le fait qu'une délégation d'autorité parentale ait été ordonnée par jugement du 19 novembre 2021 est indifférent.


En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile🏛, il est expressément renvoyé aux conclusions récapitulatives visées ci-dessus pour un exposé plus précis des faits, prétentions, moyens et arguments des parties.


Les parties ont été avisées des dispositions de l'article 388-1 du code civil🏛 relatives à l'audition de l'enfant mineur ; aucune demande d'audition n'a été présentée.


La clôture a été prononcée le 19 octobre 2023, l'affaire a été plaidée le 15 novembre 2023, et mise en délibéré ce jour.



MOTIFS DE LA DÉCISION


Il convient de rappeler que, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, la cour est saisie de l' appel portant sur le jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Lyon le 3 novembre 2022, qui a rejeté la requête en adoption simple de l'enfant [C] [F] [Ab] par Mme [S].


La demande visant à voir confirmer l 'accord parental ne rentre pas, en conséquence, dans la saisine de la cour.


Il ressort des éléments du dossier que l'enfant [C] [F] [Ab], né le [Date naissance 2] 2020, est issu d'un projet de co-parentalité, mené, dès janvier 2018, conjointement par M. [Ab], Mme [F], et celle qui était alors sa compagne, Mme [S] , et qui est devenue son épouse, le [Date mariage 4] 2018.


Il est ainsi justifié qu'avant même la naissance de cet enfant, après plusieurs échanges de mails, une charte de co-parentalité a été établie, aux termes de laquelle chacune des parties devait trouver sa place, avec les précisions que l'enfant porterait le nom de famille de sa mère biologique et de son père accolés, que l' autorité parentale serait partagée entre ses parents biologiques et Mme [S], que la résidence de l'enfant, à compter de sa scolarisation, serait fixée en alternance.


Cette charte prévoyait par ailleurs que Mme [S] s'engageait à adopter l'enfant dans le cadre d'une adoption simple, et que les parents biologiques s'engageaient à effectuer une délégation d'autorité parentale à son profit, lors de la naissance de l'enfant.


Ainsi, dès le 16 novembre 2020, soit quelques jours après la naissance d'[C], Mme [F] et M. [Ab], par déclaration conjointe, ont donné à l'enfant le nom de [FAb [X] , et, dès le 20 novembre 2020, une requête a été établie par Mme [F] seule, aux fins de délégation totale de l'autorité parentale à Mme [S], cette requête étant le même jour régularisée au double nom de M [Ab] et Mme [F].


Dans le cadre de cette procédure, M. [Ab] a notifié, le 23 septembre 2021, des conclusions pour voir juger que lui-même et Mme [F], délégants, partageront la totalité de l'exercice de l'autorité parentale sur l'enfant avec Mme [S], délégataire, et pour voir juger que cette délégation d'autorité parentale permettra à la délégataire d'effectuer tous les actes d'autorité parentale, avec la présomption de l'article 372-2 du code civil🏛, conformément aux dispositions de l'article 377-1 alinéa 2 du code civil.


Par jugement du 19 novembre 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Lyon, a dit que l 'exercice de l'autorité parentale sur l'enfant serait partagé entre Mme [F], M. [Ab] et la délégataire, Mme [S].


Dans le même temps, le juge aux affaires familiales, saisi par M. [Ab], a rejeté la demande de résidence alternée, fixé la résidence habituelle de l'enfant chez Mme [F] et Mme [S], et organisé au profit de M. [Ab] un droit de visite et d'hébergement progressif et élargi.


Préalablement à ces décisions, par acte du 10 décembre 2020, reçu par maître [M] [K], notaire à [Localité 11], Mme [F] et M. [Ab] ont consenti à l'adoption simple de l'enfant par Mme [S].


C'est dans ce contexte que Mme [F] et Mme [S] ont saisi les premiers juges le 10 juin 2021, aux fins de voir prononcer l'adoption simple par cette dernière de l'enfant, sollicitant que soit ordonné un partage de l'autorité parentale, qu'il soit dit que l'adoption simple modifiera le nom de famille de l'enfant, à savoir [F] [S].


M.[Ab] est intervenu volontairement à la procédure, pour s'opposer à la demande d'adoption.


Aux termes de l'article 365 alinéa 1er du code civil, dans sa version applicable aux faits de l'espèce, l'adoptant est seul investi, à l'égard de l'adopté, de tous les droits d'autorité parentale, inclus celui de consentir au mariage de l'adopté, à moins qu'il ne soit le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l'un des parents de l'adopté; dans ce cas, l'adoptant a l'autorité parentale, concurremment avec son conjoint, son partenaire ou son concubin, lequel en conserve seul l'exercice, sous réserve d'une déclaration conjointe avec l'adoptant, adressée au directeur des services de greffe judiciaire du tribunal judiciaire, aux fins d'un exercice en commun de cette autorité parentale.


Il ressort de la lecture de ce texte que l'adoption simple confère à l'adoptant seul l'autorité parentale, sauf si ce dernier est, notamment, marié avec l'un des parents de l'adopté, situation dans laquelle l'adoptant et le parent de l'adopté doivent faire une déclaration conjointe, pour exercer en commun l'autorité parentale.


Appliqué au cas d'espèce, le texte a pour conséquence que M.[Ab], qui n'est pas le conjoint de l'adoptante, Mme [S], serait privé de toute autorité parentale sur l'enfant, laquelle serait partagée entre Mme [F] et Mme [S] ; c'est en vain dès lors que Mme [F] et Mme [S] concluent que l'adoption simple n'altère en rien l'exercice de l'autorité parentale sur l'enfant.


C'est également en vain que Mme [F] et Mme [S] soutiennent que la délégation d'autorité parentale a été prononcée par jugement du 19 novembre 2021, alors que la perte par M. [Ab] de l'autorité parentale, par le jugement d'adoption, ne saurait faire survivre les droits qu'il a pu antérieurement déléguer.


Si, comme le fait observer M. [Ab] dans ses conclusions, une nouvelle délégation partage pourrait être envisagée, pour autant celle-ci serait soumise à la seule volonté de Mme [F] et de Mme [S] de lui maintenir une place auprès de l'enfant, situation pour le moins incertaine, alors que dans la requête aux fins d'adoption, elles proposent d'ores et déjà de supprimer le nom du père, de sorte que l'enfant porte désormais le double nom [F] [S].


Il n'apparaît pas cependant, au regard des mails entre les parties précédant la charte dressée par elles, du contenu de cette charte, des différents échanges qui ont suivi, au regard également de la teneur des deux décisions de justice prononcées, que l'objectif poursuivi était de priver M. [Ab] de l' autorité parentale.


S'il est effectif que ce dernier a donné son consentement à l'adoption devant notaire le 10 décembre 2020, soit dès après la naissance de l'enfant, et qu'il n'a pas rétracté ce consentement dans le délai de deux mois qui lui était imparti, pour autant il n'apparaît pas qu'il ait donné un consentement éclairé sur les conséquences de ce consentement, et notamment sur le fait que, ce faisant, il se privait de toute autorité parentale sur [C].


En effet, l'acte notarié, s'il vise les dispositions de l'article 365 alinéa 1er du code civil, ne vise pas expréssément le fait que l'application de ce texte aura pour conséquence que M. [Ab] ne disposera plus de l'autorité parentale sur l'enfant, et ce dernier, dans un mail du 25 mars 2021, indique que le notaire lui a notamment précisé, lors du recueil du consentement, que l'adoption n'aurait pas d'effet sur ses droits parentaux.


Il ressort par ailleurs des éléments du dossier, notamment des échanges de mails dans la période précédant l'adoption, que ce dernier se souciait de l'impact de l'adoption sur son autorité parentale ; ce n'est qu'après avoir pris attache avec l'avocat qui est ensuite devenu son conseil qu'il a, dès le 1er avril 2021, adressé un mail à Mme [F] et à Mme [S], pour les aviser qu'il avait compris que l'adoption entrainerait pour lui la perte de l'autorité parentale, contrairement à ce qui lui avait été dit avant la signature du consentement.


Au regard de ces éléments, il convient de retenir que le consentement à l'adoption donné par M. [Ab] a été vicié, ce dernier n'ayant pas été mis en mesure d'apprécier l'impact de celui-ci sur l'autorité parentale qu'il exerçait.


Outre que le texte susvisé aurait nécessairement pour effet de priver M. [Ab] de toute autorité parentale, il convient de rappeler que l'adoption est prononcée par le tribunal au regard des dispositions de l'article 353 du code civil, si les conditions de la loi sont remplies, et si elle est conforme à l'intérêt de l'enfant, ce dernier critère devant guider toute décision judiciaire.


Au cas d'espèce, il n'apparaît pas que l'intérêt d'[C] soit le prononcé de l'adoption simple par Mme [S], alors que, comme indiqué ci-avant, cette adoption aurait pour effet de priver M. [Ab] de l'autorité parentale, ne pouvant de ce fait intervenir au quotidien dans la vie de l'enfant.


Cet effet serait contraire à la volonté exprimée par chacune des parties dans la charte de co-parentalité, avec la situation effective de la place prise par le père auprès de l'enfant depuis sa naissance, attestée par les divers éléments produits au dossier, et avec un projet de résidence alternée, qui était convenu entre les parties à compter de la scolarisation.


Il apparaît en revanche que la délégation de l'autorité parentale par les deux parents biologiques à Mme [S], dont la place auprès de l'enfant est également attestée par les éléments produits au débat et d'ailleurs nullement contestée, répond à l'objectif de la charte, dans laquelle chacune des trois parties doit trouver sa place, et permet d'intégrer cette dernière dans la vie de l'enfant, répondant ainsi à l'intérêt d'[C].


En conséquence, il convient de confirmer la décision déférée, en ce qu'elle a rejeté la demande d'adoption.


Il sera par ailleurs dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens.



PAR CES MOTIFS


La cour,


Statuant par arrêt contradictoire, après débats en chambre du conseil et après en avoir délibéré,


Statuant dans les limites de sa saisine,


Confirme le jugement déféré,


Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens.


Signé par Isabelle Bordenave, présidente de chambre, et par Sophie Peneaud, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.


LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

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