LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°/ M. Bernard X...,
2°/ Mme Gabrielle Y..., épouse X...,
agissant tous deux ès qualités d'actionnaires de la société anonyme Les Grands Moulins d'Aizenay, demeurant ensemble ... à Saint-Maur-des-Fossés (Val-de-Marne),
en cassation d'un arrêt rendu le 6 septembre 1989 par la cour d'appel de Poitiers (Chambre civile, 1re section), au profit de la société anonyme Les Grands Moulins d'Aizenay, dont le siège est à Aizenay (Vendée),
défenderesse à la cassation ; Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 6 mai 1991, où étaient présents :
M. Hatoux, conseiller doyen faisant fonctions de président, Mme Loreau, conseiller rapporteur, M. Vigneron, conseiller, M. Curti, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme le conseiller Loreau, les observations de la SCP Le Bret et Laugier, avocat des époux X..., de la SCP Tiffreau et Thouin-Palat, avocat de la société Les Grands Moulins d'Aizenay, les conclusions de M. Curti, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; ! - Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 6 septembre 1989), que les époux X..., suspectant la régularité d'opérations de gestion de la société anonyme Les Grands Moulins d'Aizenay, dont ils étaient actionnaires, ont demandé la désignation d'un expert ; qu'à la suite du dépôt du rapport, ils ont sollicité un complément d'expertise ; Attendu qu'ils font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'expertise de gestion organisée par l'article 226 de la loi du 24 juillet 1966, modifiée par celle du 1er mars 1984, qui institue une procédure distincte de celle établie pour le contrôle des conventions réglementées, n'est pas subordonnée à une réclamation préalable de l'actionnaire minoritaire auprès du commissaire aux comptes, dont la mission définie par l'article 228 de la même loi, modifié par celle du 30 avril 1983, est générale et distincte ; qu'au surplus, la cour d'appel ne saurait se faire juge des opérations de gestion critiquées ou de l'évolution financière de la société et doit se borner à apprécier s'il y a lieu ou non de faire
droit à la demande d'expertise de gestion ; qu'en subordonnant le bien-fondé de la demande des époux X..., ayant de justes motifs de contester les achats de gluten comportant des anomalies inexpliquées et coïncidant avec une prise de contrôle du groupe Laraison sur Les Grands Moulins d'Aizenay, pourtant plus prospères, au préalable de démarches auprès du commissaire aux comptes et en prenant parti, pour l'approuver, sur la gestion critiquée, l'arrêt attaqué a violé les articles 226 et 228 modifiés de la loi du 24 juillet 1966 ; et alors, d'autre part, que l'expertise de gestion, dont le caractère est spécifique, a pour objet d'informer les actionnaires minoritaires et non pas le tribunal ; qu'en refusant d'ordonner le complément d'expertise de gestion sollicitée par les époux X... sur l'affirmation, au demeurant hypothétique, que les observations des Grands Moulins d'Aizenay, partie défenderesse intéressée au rejet de la mesure, "semblent pertinentes", l'arrêt n'a pas motivé sa décision, qui ne précise aucunement quelles seraient les difficultés ou limites d'investigations susceptibles de faire obstacle à l'application de l'article 226 modifié de la loi du 24 juillet 1966, violant ainsi l'article 455 du nouveau Code de procédure civile et les droits de la défense des époux X..., dont les conclusions soulignaient que la recherche de la vérité pour l'expert de gestion n'impliquait pas un travail démesuré ni un temps excessif ; Mais attendu qu'après avoir énoncé qu'une expertise de gestion n'était pas de droit pour l'actionnaire ayant qualité pour la demander et qu'il y avait lieu de vérifier si elle apparaissait justifiée au vu des éléments fournis, la cour d'appel a retenu que les opérations commerciales réalisées entre les sociétés Les Grands Moulins d'Aizenay, Laraison et Floripan étaient des opérations courantes conclues à des conditions normales, qu'il y avait compatibilité des achats d'améliorants avec les besoins de la société des Grands Moulins d'Aizenay, et que celle-ci avait continué à acheter la plus grosse partie du gluten utilisé par elle à la société Amylum qui, compte tenu de la quantité en jeu, lui avait consenti des conditions intéressantes, la société Floripan, filiale de la société Laraison, ne venant qu'en complément et parce qu'il était prudent de ne pas dépendre que d'un seul fournisseur ; qu'en l'état de ces seules appréciations, faisant ressortir que les griefs présentés à l'appui de la nouvelle demande d'expertise des époux X... n'étaient pas sérieux, la cour d'appel en a exactement déduit qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner une expertise complémentaire ; que le moyen ne peut être accueilli ni en l'une ni en l'autre de ses branches ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;