ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Commerciale
05 Mars 1991
Pourvoi N° 89-21.381
SARL "La Tour" et autre
contre
Buisson
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par
1°/ la société à responsabilité limitée "La Tour", dont le siège social est à Trevisa (Corse), Hôtel-Restaurant "U Castellu", société en cours de liquidation, agissant en la personne de sa gérante et liquidatrice Mme ... Toussainte, domiciliée en cette qualité audit siège,
2°/ Mme Toussainte ..., épouse Buisson, agissant en qualité de liquidatrice de la société à responsabilité limitée "La Tour", dont le siège est à Trevisa (Corse), Hôtel-Restaurant "U Castellu", domiciliée en cette qualité audit siège, en cassation d'un arrêt rendu le 27 juin 1989 par la cour d'appel de Bastia, au profit de M. Gabriel ..., demeurant à Beaufort-en-Vallée (Maine-et-Loire), défendeur à la cassation ;
Les demanderesses invoquent à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt
LA COUR, composée selon l'article L 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 29 janvier 1991, où étaient présents
M. Defontaine, président, Mme ..., rapporteur, M. Hatoux, conseiller, M. Patin, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme le conseiller Loreau, les observations de la SCP Boré et Xavier, avocat de la société "La Tour" et de Mme ..., ès qualités, de la SCP de Chaisemartin, avocat de M. Gabriel ..., les conclusions de M. Patin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches
Attendu selon l'arrêt attaqué (Bastia, 27 juin 1989) que les associés de la société à responsabilité limitée "La Tour" (la société "La Tour") ont décidé la dissolution de cette société en désignant Mme ... épouse ... comme liquidatrice ;
que M. ... titulaire d'un compte courant d'associé a assigné Mme ... ès-qualités en remboursement de sa créance ;
Attendu que la société "La Tour" fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'à défaut d'accord des parties, le paiement du solde d'un compte courant ne peut intervenir qu'après sa clôture ;
que l'arrêt a condamné la société "La Tour" à payer la somme de 286 298,41 francs qui figurait au compte courant au nom de M. ... dans les comptes de la société ;
qu'en statuant ainsi sans rechercher si, en l'absence d'accord des parties, le compte courant avait été clôturé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
et alors, d'autre part, qu'en tout état de cause seuls le règlement judiciaire, la liquidation des biens, l'incapacité ou la mort d'une des parties, peuvent entraîner la clôture du compte-courant ;
que la dissolution d'une société n'a pas cet effet ;
qu'en accueillant la demande de M. ... aux motifs que la société étant dissoute, il était en droit de poursuivre le remboursement de ses deniers, la cour d'appel a violé les articles 2003 du Code civil et 14 de la loi du 13 juillet 1967 ;
Mais attendu qu'une société est en liquidation dès l'instant de sa dissolution pour quelque cause que ce soit et que dans le cadre de cette liquidation tout créancier d'un compte-courant d'associé est en droit d'en poursuivre le remboursement ;
qu'en relevant que la dissolution de la société La Tour avait été décidée par les associés et qu'au bilan approuvé par ces derniers figurait la somme de 286 298,41 francs au compte courant de M. ... dans la société, c'est à bon droit que la cour d'appel qui n'avait pas à faire une recherche qui ne lui était pas demandée, a statué comme elle a fait ;
que le moyen n'est fondé ni en l'une ni en l'autre de ses branches ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;