COMM.
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 30 août 2023
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 609 F-B
Pourvoi n° F 22-10.466
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 30 AOÛT 2023
1°/ M. [Aa] [Ab],
2°/ Mme [X] [Y], épouse [Ab],
domiciliés tous deux [Adresse 3],
3°/ Mme [N] [Ab], épouse [C], domiciliée [Adresse 2],
4°/ la société Geve, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° F 22-10.466 contre l'arrêt rendu le 16 novembre 2021 par la cour d'appel de Bordeaux (4e chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à M. [Ac] [S],
2°/ à Mme [Ad] [S],
domiciliés tous deux [Adresse 6],
3°/ à la société SN agences, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],
4°/ à la société Cabinet Kermel, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 5],
défendeurs à la cassation.
M. et Mme [S] ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen de cassation.
Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Guerlot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. et Mme [Ab], de Mme [C] et de la société Geve, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. et Mme [S], de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société SN agences, de la SARL Boré, Ae de Bruneton et Mégret, avocat de la société Cabinet Kermel, après débats en l'audience publique du 20 juin 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Guerlot, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1.Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 16 novembre 2021), le 19 janvier 2017, la société Geve, M. et Mme [Ab], Mme [C] et M. et Mme [S], qui détenaient ensemble la totalité des trois mille parts de la société B diffusion, les ont cédées à la société SN agences moyennant un prix de 380 000 euros, sur lequel la société SN agences a payé un acompte de 300 000 euros.
2. Il était stipulé que, défini sur la base du bilan de la société B diffusion clos au 29 février 2016, le prix pourrait faire l'objet d'une variation à la baisse, en fonction de la situation comptable intermédiaire de cette société arrêtée au 31 décembre 2016.
3. La situation comptable établie par la société d'expertise comptable Cabinet Kermel ayant fait apparaître des capitaux propres négatifs de 963 999 euros, la société SN agences a soumis aux cédants un projet de prix définitif à hauteur de 1 euro et a sollicité le remboursement de la somme de 299 999 euros.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi principal et sur le second moyen du pourvoi incident
4. En application de l'
article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches, du pourvoi incident
Enoncé du moyen
5. M. et Mme [S] font grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il les a condamnés solidairement avec la société Geve, M. et Mme [Ab] et Mme [C] à payer à la société SN agences la somme de 299 999 euros assortie de l'intérêt au taux légal à compter du 9 septembre 2017 jusqu'à parfait paiement, alors :
« 1°/ que la solidarité ne se présume pas ; qu'en jugeant que M. et Mme [S], qui ont chacun cédé une seule action, étaient tenus solidairement avec la société Geve, M. et Mme [Ab] ainsi que Mme [C] à la dette de restitution du prix des actions de la société B diffusion à la société SN agences à hauteur de 299 999 euros, sans constater que la solidarité entre les actionnaires résultait de l'existence d'une disposition légale ou d'une stipulation contractuelle dans l'acte de cession du 19 janvier 2017, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des
articles 1309 et 1310 du code civil🏛🏛 ;
2°/ que [le fait que] les cédants ont consenti une garantie conventionnelle à l'occasion d'une cession de contrôle d'une société n'emporte pas solidarité passive entre eux ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1309 et 1310 du code civil, ensemble l'
article L. 233-3 du code de commerce🏛. »
Réponse de la Cour
6. Les conventions qui emportent cession de contrôle d'une société commerciale présentant un caractère commercial, encore qu'elles ne soient pas conclues entres commerçants, les obligations contractées par les vendeurs s'exécutent solidairement.
7. Ayant relevé que la cession litigieuse avait porté sur l'intégralité des parts de la société B diffusion, la cour d'appel en a exactement déduit que l'acte de cession du 19 janvier 2017 était un acte de commerce et que, par conséquent, les obligations des cédants, y compris l'obligation de restitution résultant de la clause de prix contenu dans l'acte de cession, s'exécutaient solidairement, faute d'insertion dans cet acte d'une clause écartant expressément la solidarité.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur ce moyen, pris en ses troisième et quatrième branches
9. M. et Mme [S] font le même grief à l'arrêt, alors :
« 3°/ que [le fait que] les cédants minoritaires ont consenti une garantie conventionnelle à l'occasion d'une cession de contrôle d'une société n'emporte pas solidarité passive entre eux lorsque les parts ou actions cédées ne sont pas nécessaires pour que la majorité des titres soit cédée ; qu'en ne recherchant pas, comme cela lui était demandé dans les conclusions d'appel de M. et Mme [S], si le fait qu'ils ne cédaient chacun qu'une part et que ces deux parts n'avaient aucun effet sur le contrôle de la société n'était pas de nature à écarter toute présomption de solidarité passive avec les autres cédants, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1309 et 1310 du code civil, ensemble l'article L. 233-3 du code de commerce ;
4°/ qu'une cession de parts sociales ou d'actions d'une société est un acte de nature civile qui n'est susceptible d'être qualifié d'acte de commerce qu'à la condition que les non-commerçants y trouvent un intérêt personnel ; qu'en jugeant que M. et Mme [S] avaient trouvé un intérêt personnel à la cession au seul motif inopérant que la cession "leur a permis de quitter la société B diffusion", la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1309 et 1310 du code civil, ensemble l'article L. 233-3 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
10. Ayant exactement énoncé que le transfert du contrôle s'appréciait au regard du seul cessionnaire, la cour d'appel, qui n'avait pas à réaliser la recherche inopérante invoquée par la troisième branche a, par ces seuls motifs, abstraction faite de ceux surabondants critiqués par la quatrième branche, légalement justifié sa décision.
11. Pour partie inopérant, le moyen n'est pas fondé pour le surplus.
Sur ce moyen, pris en sa cinquième branche
12. M. et Mme [S] font le même grief à l'arrêt, alors « que dans le cas d'une cession de contrôle, la solidarité n'est présumée entre les cédants qu'en cas de garantie de passif et non pas si les cédants se sont engagés à restituer une partie du prix si les capitaux propres de cession sont finalement inférieurs aux capitaux propres garantis par les cédants ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé des articles 1309 et 1310 du code civil, ensemble l'article L. 233-3 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
13. Ayant retenu le caractère d'acte de commerce de l'acte de cession du 19 janvier 2017, la cour d'appel en exactement déduit que l'obligation de restitution d'une partie de l'acompte versé par le cessionnaire, qui pèse sur l'ensemble des cédants en application de la clause de prix figurant dans cet acte, est une obligation solidaire.
14. Le moyen qui postule le contraire n'est pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Condamne la société Geve, M. et Mme [Ab], Mme [C] et M. et Mme [S] aux dépens ;
En application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, rejette les demandes formées, d'une part, par la société Geve, M. et Mme [Ab] et Mme [C], d'autre part, par M. et Mme [S] et condamne les premiers à payer à la société SN agences la somme globale de 3 000 euros et à la société Cabinet Kermel la somme globale de 3 000 euros, et les seconds à payer à la société SN agences la somme globale de 3 000 euros et à la société Cabinet Kermel la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente août deux mille vingt-trois.