CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 182852
Mlle OUFKIR-GONTHIER M. GONTHIER
Lecture du 20 Mai 1998
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, 10ème sous-section),
Vu la requête enregistrée le 7 octobre 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Lalla Hadiba OUFKIR-GONTHIER, demeurant 6 cité des Fonctionnaires -Oules Lahmar, Errachidia (Maroc) et M. Georges GONTHIER, demeurant Mas du Bon Vin à Lunel Viel (34000) ; Mlle OUFKIR-GONTHIER et M. GONTHIER demandent au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 13 septembre 1996 par laquelle le consul général de France à Fès (Maroc) a refusé de délivrer un visa d'entrée en France à Mlle OUFKIRGONTHIER ; . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de Mme Dayan, Conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Combrexelle, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, en premier lieu, que le ministre des affaires étrangères soutient que pour refuser, par décision du 13 septembre 1996, à Mlle OUFKIR-GONTHIER, le visa d'entrée sur le territoire français que celle-ci avait demandé pour rejoindre son père adoptif, M. GONTHIER et son frère Moulay Oufkir, le consul général de France à Fès s'est fondé sur le fait que la requérante ne justifiait pas de ressources suffisantes en France, et sur la faiblesse de celles de son père adoptif M. GONTHIER, qui subvient également aux besoins de son frère, dont il est également le père adoptif ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. GONTHIER, retraité et disposant d'un revenu mensuel modeste, ne pouvait subvenir aux besoins de Mlle OUFKIR-GONTHIER d'autant que son fils adoptif était encore à sa charge à la date de la décision attaquée ; Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1 Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2 Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la s–reté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des droits et des libertés d'autrui" ;
Considérant que si l'adoption simple de Mlle OUFKIR-GONTHIER par M. GONTHIER, ressortissant français, a été prononcée par un jugement définitif du Tribunal de grande instance de Montpellier en date du 11 janvier 1996, la décision attaquée refusant un visa de long séjour à Mlle OUFKIR-GONTHIER n'a pas porté audroit de celle-ci de mener une vie familiale normale, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ce refus lui a été opoosé et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation, compte tenu notamment de la circonstance que Mlle OUFKIR-GONTHIER était âgée de 28 ans à la date de la décision attaquée ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que Mlle OUFKIR-GONTHIER et M. GONTHIER ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le Consul général de Fès a refusé, par la décision attaquée, le visa d'entrée en France à Mlle OUFKIR-GONTHIER ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991, font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à verser à Mlle OUFKIR-GONTHIER et à M. GONTHIER la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mlle OUFKIR-GONTHIER et de M. GONTHIER est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Lalla Hadiba OUFKIRGONTHIER, à M. Georges GONTHIER et au ministre des affaires étrangères.