CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 111884
S.A. PRODES INTERNATIONAL
Lecture du 29 Juillet 1994
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, ),
Sur le rapport de la 8ème sous-section, de la Section du Contentieux,
Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 4 décembre 1989 et 4 avril 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la S.A. PRODES INTERNATIONAL, dont le siège est 8, rue Jean-Pierre Timbaud à Paris (75011) ; la société demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt en date du 30 octobre 1989 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris en date du 5 février 1987 rejetant sa demande en décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er janvier 1977 au 31 décembre 1979, par avis de mise en recouvrement du 19 février 1980 ; 2°) de renvoyer l'affaire devant une autre cour, ou d'annuler sans renvoi l'arrêt attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 54-404 du 10 avril 1954 ; vu le décret n° 54-683 du 26 juin 1954 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. Austry, Auditeur, - les observations de Me Ricard, avocat de la S.A. PRODES INTERNATIONAL, - les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Sur la période du 1er janvier 1976 au 31 décembre 1978 :
Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : "1. Les affaires faites en France au sens des articles 258 et 259 sont passibles de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elles relèvent d'une activité industrielle ou commerciale, quels qu'en soient les buts ou les résultats" ; qu'en vertu de l'article 258 une affaire est réputée faite en France, s'agissant d'un service rendu, lorsque celui-ci est "utilisé en France" ; que l'article 3 du décret du 26 juin 1954, repris à l'article 24 de l'annexe I au code général des impôts, précise que le bénéfice des dispositions précitées de l'article 258 du même code "est subordonné à la preuve, qui doit être apportée par les redevables intéressés, que les services rendus... ont bien été utilisés hors de France... A défaut de cette preuve, les opérations dont s'agit sont considérées comme effectuées en France" ; Considérant, d'une part, que, s'il incombe normalement à l'administration, sous réserve des conséquences éventuellement attachées par des dispositions législatives à la procédure d'imposition, d'apporter la preuve de l'existence d'affaires passibles de la taxe sur la valeur ajoutée, il découle nécessairement des dispositions précitées de l'article 258 du code général des impôts, compte tenu de la nature des critères d'imposition qu'elles retiennent, qu'il appartient au redevable de fournir tous éléments permettant à l'administration, et le cas échéant au juge de l'impôt, de déterminer le lieu d'utilisation du service rendu, notamment lorsqu'il soutient que les recettes perçues par lui rémunèrent des services utilisés hors de France ; que, dès lors, en soumettant le bénéfice des dispositions de l'article 258 du code général des impôts à la justification que les services rendus soient bien utilisés hors de France, les auteurs de l'article 24 de l'annexe I au code général des impôts se sont bornés à tirer les conséquences des dispositions législatives dont il s'agit ; qu'ainsi, en se fondant sur les dispositions dudit article 24 en même temps que sur celles des articles 256 et 258 du même code pour estimer qu'il incombait à la société d'établir que les commissions perçues par elle rémunéraient des services utilisés hors de France, la cour n'a pas fait application d'un texte entaché d'illégalité ; Considérant, d'autre part, qu'en estimant qu'aucune des pièces produites par la S.A. PRODES INTERNATIONAL n'était de nature à établir que les services rendus par elle à la société Fintrading SA avaient été utilisés hors de France, la cour, qui n'a pas dénaturé les faits, s'est livrée à une appréciation souveraine qui ne peut être discutée devant le juge de cassation ;
Sur la période du 1er janvier au 31 décembre 1979 :
Considérant qu'aux termes de l'article 259 du code général des impôts applicable à compter du 1er janvier 1979 : "Les prestations de service sont imposables en Francelorsque le prestataire a en France le siège de son activité" ; que, toutefois, l'article 259 B dispose que : "Par dérogation aux dispositions de l'article 259, ... les prestations des conseillers, ingénieurs, bureaux d'études dans tous les domaines... ne sont pas imposables en France même si le prestataire est établi en France lorsque le bénéficiaire est établi hors de la Communauté économique européenne" ; qu'aux termes enfin de l'article 263 du code général des impôts : "Les prestations de services effectuées par des mandataires qui interviennent... dans les opérations dont le lieu d'imposition ne se situe pas en France sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée" ; Considérant, en premier lieu, qu'en estimant que la S.A. PRODES INTERNATIONAL n'établissait pas que les prestations qu'elle a fournies à la société Fintrading SA ont été effectuées par elle en qualité de mandataire intervenant dans des opérations dont le lieu d'imposition ne se situe pas en France, la Cour s'est livrée, sans les dénaturer, à une appréciation souveraine des faits qui échappe au contrôle du juge de cassation ; Considérant, en second lieu, que si la S.A. PRODES INTERNATIONAL se prévaut, pour la première fois devant le juge de cassation, des dispositions précitées de l'article 259 B du code général des impôts pour soutenir que les prestations fournies par elle à la société Fintrading SA, dont le siège est en Suisse, ne sont pas taxables en France, elle n'a fourni que devant le juge de cassation les éléments de fait permettant de se prononcer sur le bien fondé de ce moyen ; que, dès lors, celui-ci ne saurait être accueilli ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la S.A. PRODES INTERNATIONAL n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt en date du 3 octobre 1989 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement en date du 5 février 1987 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande en décharge des impositions litigieuses ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la S.A. PRODES INTERNATIONAL est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la S.A. PRODES INTERNATIONAL et au ministre du budget.