Jurisprudence : CAA Nantes, 1ère, 21-07-2023, n° 22NT03428

CAA Nantes, 1ère, 21-07-2023, n° 22NT03428

A07361CA

Référence

CAA Nantes, 1ère, 21-07-2023, n° 22NT03428. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/98259976-caa-nantes-1ere-21072023-n-22nt03428
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Références

Cour Administrative d'Appel de Nantes

N° 22NT03428

1ère Chambre
lecture du 21 juillet 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B A a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la réduction des cotisations primitives d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre de l'année 2016 pour un montant de 547 524 euros.

Par un jugement no 2001533 du 14 septembre 2022, le tribunal administratif de Rennes⚖️ a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 novembre 2022 Mme A, représentée par Me Meleuc, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la réduction sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Elle soutient que :

- il y a lieu de faire application de la décision n° 402479 du Conseil d'État du⚖️ 11 mai 2017 dont il faut conclure que les droits de donation payés par un usufruitier augmentent la valeur d'acquisition des titres cédés par le nu-propriétaire alors même que le redevable de l'impôt de plus-value n'est pas l'usufruitier mais le nu-propriétaire ;

- il ne faut pas déduire de l'article 150-0 D du code général des impôts🏛 que seuls les frais effectivement supportés par le contribuable peuvent être pris en compte dans le calcul de sa plus-value imposable ; la lecture de cet article, corroborée par les travaux parlementaires préparatoires de l'article 94 de la loi n° 99-1172 de finances pour 2000 et la jurisprudence, ne limite pas la prise en compte des frais de mutation aux dépenses effectivement payées par le contribuable ;

- le prix effectif d'acquisition, pour le calcul de la plus-value de cession, doit s'entendre du montant de l'ensemble des contreparties effectivement mises à la charge de l'acquéreur à raison de l'acquisition, quelles que soient les modalités selon lesquelles il s'acquitte de ces obligations ; sur le plan civil, la prise en charge des frais et droits par le donateur constitue une donation indirecte rapportable à la succession ; si la donation indirecte à hauteur des droits de mutation à titre gratuit ne représente pas un coût immédiat pour le nu-propriétaire, à terme, elle peut en devenir un dans l'hypothèse du décès de l'usufruitier dans les 15 ans de la donation ; ainsi, la prise en charge des droits de donation par le donateur constitue une des contreparties à prendre en considération même si elle ne donne pas lieu à un décaissement immédiat de la part du donataire.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 avril 2023 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales🏛 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picquet,

- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par deux actes de donation du 22 décembre 2015, Mme A a reçu de ses parents la nue-propriété de 5 222 titres de la société anonyme Delourmel Automobiles, ses parents s'étant réservé l'usufruit de ces titres. Les droits dus sur ces donations ont été acquittés par les donateurs ainsi que le permettent les dispositions de l'article 1712 du code général des impôts🏛. Le 29 février 2016, Mme A a cédé conjointement avec ses parents la pleine propriété des titres en cause. Le prix de cession a été remployé dans l'investissement au capital des sociétés Aninvest et Aninvest2 avec report du démembrement sur les parts sociales émises. À la suite de cette cession, Mme A a cependant estimé que les droits et frais de donation de la nue-propriété de ces titres devaient être intégrés dans le calcul de la plus-value de cession imposable entre ses mains alors même que le montant de ces droits et frais avait été acquitté par les donateurs, en l'occurrence ses parents. Dès lors, elle a estimé que le montant de la plus-value taxable s'élevait à 1 084 937 euros au lieu des 1 933 812 euros indiqués sur sa déclaration des plus ou moins-values réalisées en 2016 et a formé, le 11 octobre 2017, une réclamation à fin de réduction de l'imposition mise à sa charge, qui a été rejetée le 27 janvier 2020. Mme A a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la réduction des cotisations primitives à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales mises à sa charge au titre de l'année 2016 pour un montant total de 547 524 euros. Par un jugement du 14 septembre 2022, le tribunal a rejeté cette demande. Mme A fait appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 150-0 A du code général des impôts🏛 : " I. 1. () les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières, de droits sociaux () sont soumis à l'impôt sur le revenu () ". Aux termes de l'article 150-0 D du même code : " 1. Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, nets des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci () ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation () ".

3. Contrairement à ce que soutient Mme A, le montant des frais de donation acquittés par ses parents lors de la donation de la nue-propriété des titres de la société Delourmel Automobiles ne peut être retenu pour le calcul de la plus-value imposable en son nom au titre de la cession suivante, dès lors que ces frais ne constituent pas des frais acquittés par le donataire, c'est-à-dire elle-même, susceptibles de venir s'ajouter à la valeur de cession, en application des dispositions de l'article 150-0 D du code général des impôts citées au point 2. Ces frais, qui n'entraînent aucune perception complémentaire concomitante, alors même qu'ils constitueraient une donation indirecte rapportable à la succession en cas de décès de l'usufruitier dans les quinze ans de la donation, ne peuvent davantage être regardés comme représentant pour le nu-propriétaire un coût immédiat devant être ajouté au prix d'acquisition. Ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les frais de donation de la nue-propriété, pris en charge par ses parents, les donateurs, devaient être inclus dans le prix effectif d'acquisition, pour le calcul de la plus-value de cession.

4. Il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa demande relative aux frais liés au litige doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B A et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente,

- M. Geffray, président-assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 juillet 2023.

La rapporteure

P. PicquetLa présidente

I. Perrot

La greffière

S. Pierodé

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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