République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 2
ARRÊT DU 09/02/2023
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N° de MINUTE :
N° RG 21/04012 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TYBM
Jugement (N° 19/02041)
rendu le 03 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Béthune
APPELANTE
La SAS Champeau
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Marie-Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué assistée de Me Jean-Louis Capelle, avocat au barreau de Béthune, avocat plaidant, substitué à l'audience par Me Gautier Lacherie, avocat au barreau de Béthune
INTIMÉ
Monsieur [D] [T]
né le … … … à [Localité 3]
demeurant [… …]
[… …]
représenté par Me Stéphane Robilliart, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
DÉBATS à l'audience publique du 28 novembre 2022 tenue par Catherine Courteille magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (
article 805 du code de procédure civile🏛🏛).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Anaïs Millescamps
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Catherine Courteille, président de chambre
Bruno Poupet, président de chambre
Jean-François Le Pouliquen, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 09 février 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Catherine Courteille, président et Anaïs Millescamps, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 28 novembre 2022
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Vu le jugement du tribunal judiciaire de Béthune en date du 03 juin 2021,
Vu la déclaration d'appel de la SAS Champeau du 19 juillet 2021,
Vu les conclusions de la SAS Champeau du 18 novembre 2022,
Vu les conclusions de M. [D] [T] du 25 novembre 2022,
Vu l'ordonnance de clôture du 28 novembre 2022.
EXPOSE DU LITIGE
M. [D] [T] a entrepris la réalisation d'une maison en auto-construction, il assurait la maîtrise d'œuvre et la coordination du chantier.
Selon devis en date du 30 septembre 2014, d'un montant de 27 900 euros TTC, M. [D] [T] a confié à la SAS Champeau, dans le cadre des travaux de construction de sa maison, le lot étude fabrication et fourniture de la charpente.
La charpente a été posée livrée le 27 mars 2015, les travaux ont été arrêtés mi-avril.
Par courrier recommandé avec avis de réception du 08 mai 2015, adressé à la SAS Champeau, M. [T] faisait état de malfaçons et de non-finitions affectant la charpente posée et mettait en garde l'entreprise au regard des intempéries, rappelant qu'il n'était pas en mesure de faire commencer les travaux de couverture de la charpente qui restait sous la responsabilité de la SAS Champeau.
Par courrier du 20 mai 2015, la SAS Champeau proposait un avoir de 1 080 euros TTC pour l'absence de pose des bandeaux et des sous-faces en PVC.
Par courrier du 19 juin 2015, la SAS Champeau alertait le maître d'ouvrage sur la nécessité de protéger la charpente exposée aux intempéries
Deux procès-verbaux de constat ont été dressés à la demande de M. [T] par Me [M], huissier de justice les 18 et 22 mai 2015, faisant état de différentes malfaçons.
Une expertise était organisée à l'initiative de l'assureur de M. [T] et confié à M. [N] qui concluait dans un rapport déposé le 31 juillet 2015 que le chantier n'était pas acceptable en l'état.
Les travaux n'ont pas été soldés.
Le 08 novembre 2015, M. [T] adressait un courrier à la SAS Champeau indiquant qu'aucune solution n'avait été trouvée avec l'entreprise, il déclarait refuser l'intervention d'une autre entreprise et mettait en garde contre les dégradations de la charpente qui n'était pas couverte.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 18 novembre 2015, la SAS Champeau proposait de terminer les travaux et de reprendre les non-finitions et défauts relevés paAa M. [N].
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 24 novembre 2015, M. [T] faisait interdiction à l'entreprise d'intervenir, déclarant engager une procédure judiciaire, il a réitéré ce refus par courrier du 07 décembre 2015.
Par courrier recommandé du 30 novembre 2015, la SAS Champeau constatait que devant le refus du maître de l'ouvrage elle n'avait pu intervenir et listait des défauts à reprendre et les finitions à réaliser.
Par acte d'huissier en date du 23 décembre 2015, M. [T] a fait assigner la SAS Champeau en référé aux fins d'expertise.
Par ordonnance du 02 mars 2016, M. [S] a été désigné, il a déposé un rapport le 18 juillet 2018.
Par actes d'huissier du 21 mai 2019, la SAS Champeau a fait assigner M. [D] [T] aux fins de voir prononcer la réception judiciaire de la charpente avec réserves, prononcer la résolution judiciaire du contrat de louage d'ouvrage, condamner M. [T] au paiement du solde du marché soit 8 370 euros ainsi qu'au paiement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'
article 700 du code de procédure civile🏛🏛.
Par acte du 19 juin 2019, M. [T] a également fait assigner la SAS Champeau, sollicitant la résiliation du contrat aux torts de l'entreprise et la restitution de la somme de 19 530 euros versée au titre des travaux ainsi que 48 000 euros au titre du préjudice, demandant qu'il soit ordonné à l'entreprise de procéder à la dépose de son ouvrage et subsidiairement sollicitant sa condamnation à diverses sommes au titre des travaux de reprises outre 48 000 euros en réparation du préjudice de jouissance.
Les deux instances ont été jointes.
Par jugement en date du 03 juin 2021, le tribunal judiciaire de Béthune a :
- débouté la SAS Champeau de l'ensemble de ses demandes,
- prononcé la résolution du contrat de louage d'ouvrage souscrit suivant devis du 30 septembre 2014 et avenant du 13 mai 2015, unissant la SAS Champeau à M. [D] [T] aux torts exclusifs de celle-ci,
- dit que la SAS Champeau devra procéder à ses frais au démontage et à la reprise de la charpente faisant l'objet dudit contrat de louage d'ouvrage dans un délai d'un mois à compter de la signification du jugement, sous peine d'une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard passé ce délai, et ce durant six mois, tout en se réservant la liquidation de l'astreinte,
- dit que la SAS Champeau devra restituer à M. [T] les sommes versées en exécution du contrat de louage d'ouvrage, soit 19 530 euros,
- condamné la SAS Champeau à payer à M. [T] la somme de 74 000 euros arrêtée au 30 juin 2021 au titre de son préjudice de jouissance,
- rejeté toutes demandes plus amples ou contraires,
- dit que la SAS Champeau supportera les entiers dépens de l'instance, les dépens de l'instance en référé et les frais d'expertise,
- condamné la SAS [T] à payer la somme de 7 000 euros à M. [T] au titre des frais irrépétibles,
- débouté la SAS [T] de ce chef de demande,
- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du jugement.
Par déclaration en date du 19 juillet 2021, la SAS Champeau a interjeté appel de la décision (RG n°21/0412).
Par dernières conclusions du 18 novembre 2022, la SAS Champeau demande à la cour, au visa des
articles 1792-6, 1793 du code civil🏛🏛🏛🏛, 1134, 1147 et 1184 anciens du code civil, de :
- Infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel et donc en ce qu'il a :
- débouté la société Champeau de l'ensemble de ses demandes,
- prononcé la résolution du contrat de louage d'ouvrage souscrit suivant devis du 30 septembre 2014 et avenant du 13 mai 2015, unissant la société Champeau à M. [T] aux torts exclusifs de celle-ci,
- dit que la société Champeau devra procéder à ses frais au démontage et à la reprise de la charpente faisant l'objet dudit contrat de louage d'ouvrage dans un délai d'un mois à compter de la signification du jugement, sous peine d'une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard passé ce délai, et ce durant 6 mois, tout en se réservant la liquidation de l'astreinte,
- dit que la société Champeau devra restituer à M. [T] les sommes versées en exécution du contrat litigieux de louage d'ouvrage, soit un total de 19 530 euros,
- la condamne à payer à M. [T] la somme de 74 000 euros arrêtée au 30 juin 2021 au titre de son préjudice de jouissance, et à 7 000 euros au titre des frais irrépétibles,
- dit que la société Champeau supportera les entiers dépens de l'instance, du référé et les frais d'expertise,
- la condamne à payer à Monsieur [T] la somme de 7 000 euros au titre de ses frais irrépétibles,
Statuant à nouveau,
- prononcer la réception judiciaire du lot charpente à la date du 30 avril 2015 avec les réserves suivantes :
-reprise nécessaire du traitement des bois ;
-réalisation nécessaire de travaux de réglage et de calage de la charpente ;
-réalisation nécessaire d'un contrôle et d'une reprise des connecteurs métalliques ;
-absence de réalisation des sous-faces des débords de toiture ;
- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de louage d'ouvrage liant la SAS Champeau et Monsieur [D] [T] ;
- condamner M. [D] [T] à payer à la SAS Champeau la somme de 8 370 euros au titre du solde du marché avec intérêts au taux légal à compter du 21 mai 2019 ;
- condamner M. [D] [T] à payer à la SAS Champeau la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions en date du 25 novembre 2022, M. [D] [T] demande à la cour de :
- Confirmer le jugement du Tribunal Judiciaire de Béthune du 03 juin 2021 en toutes ses dispositions et débouter par voie de conséquence la société Champeau de toutes ses demandes fins et conclusions d'appel ;
Y ajoutant,
- Condamner la société Champeau à la somme de 1 000 euros par mois à compter du 1er juillet 2021 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir ;
- Condamner la société Champeau à la somme de 2 560 euros au titre des frais d'expert de M. [Ab] et au titre des frais de constat d'huissier du 16 novembre 2021 ;
- Condamner la société Champeau aux frais et dépens de l'instance d'appel ;
- Condamner la société Champeau à payer à M. [T] la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l'
article 455 du code de procédure civile🏛🏛, il est renvoyé aux conclusions déposées, soutenues à l'audience et rappelées ci-dessus.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 novembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1-Sur la demande tendant au prononcé de la réception judiciaire
Aux termes de l'article 1792-6 du code civil « la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement. »
La réception judiciaire peut être prononcée, en l'absence de réception amiable, dès lors qu'il est établi que l'ouvrage était en état d'être reçu, même avec des réserves
Aux termes du devis accepté en date du 30 septembre 2014, la SAS Champeau a été chargée de fournir et installer une charpente sur la maison en construction.
Il résulte du rapport d'expertise judiciaire mais également des échanges de correspondance entre M. [T] et la SAS Champeau que la charpente a été livrée le 27 mars 2015, montée et installée en quinze jours, puis que le chantier a été arrêté mi-avril 2015 en raison d'un problème d'accessibilité en sous-face des débords de toiture.
Au cours du mois de mai, le maître d'ouvrage, qui assurait également les fonctions de maître d'œuvre et coordinateur du chantier a fait état de défauts affectant la charpente et a fait dresser deux procès-verbaux de constat par huissier en date des 18 et 22 mai 2015.
Il ressort clairement des échanges de correspondances, notamment les courriers en date du 18 novembre 2015 et du 30 novembre 2015 que la SAS Champeau a proposé de reprendre et achever ses ouvrages, intervention à laquelle s'est expressément refusé M. [T].
M. [T], sollicite la confirmation du jugement en se fondant sur les constats réalisés en 2015, le rapport de M. [N], mais également des constats d'huissiers réalisés le 07 septembre 2020 et le 16 novembre 2021 ces derniers relevant une persistance des défauts et une détérioration de la charpente qui n'est toujours pas protégée. Il produit également à l'appui de ses prétentions un rapport établi par M. [U] à la demande de M. [T] qui avalise les conclusions de M. [N] et contredit les conclusions du rapport de l'expert judiciaire.
Hormis les cas où la loi en dispose autrement, le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties, peu important qu'elle l'ait été en présence de celles-ci.
M. [S], expert judiciaire, s'est entouré de deux sapiteurs, le cabinet Dekra contrôleur technique, chargé de vérifier la solidité de l'ouvrage, et le cabinet FCBA, en charge de l'examen des bois et leur traitement, l'expert judiciaire a tenu plusieurs réunions sur place, a examiné les ouvrages, après avoir pris en compte les constats d'huissier en date des 18 mai 2015 et 22 mai 2015 et le rapport extra-judiciaire établi paAa M. [N].
Il résulte du rapport d'expertise judiciaire que les défauts et désordres évoqués dans les constats de l'huissier consistent selon l'expert en des non-finitions, certains « défauts » relevés ne sont pas constitutifs de désordres (notamment les jours entre planche de rive, l'absence de chevron de renfort au sommet de la charpente, les décalages importants entre de multiples pièces de charpente, la présence de pièces fixées à l'arbalétrier, une poutre en lamellé collé qui ne rejoint pas la charpente), l'expert retient certains désordres tels les fissures sur les entraits, l'absence de connexion entre deux fermes, des ancrages coupés, des défauts de calages).
L'expert conclut que les désordres relevés par lui faisaient partie des travaux que l'entreprise proposait de réaliser dans son courrier du 30 novembre 2015, s'agissant avant tout de finitions.
M. [S] a également pris en compte le rapport de M. [N] et a considéré que les défauts et désordres relevé par cet expert missionné par l'assureur de M. [T], étaient avérés,
A la suite de ses observations et après l'analyse des constats et du rapport amiable, M. [S] a classé les griefs évoqués par M. [T] en 5 catégories :
- les griefs ne constituant pas des désordres,
- les griefs constituant essentiellement des problèmes de réglage et de calage de la charpente,
- les griefs concernant les connecteurs,
- les griefs concernant la structure,
- les griefs concernant les assemblages ;
S'agissant des problèmes de réglage et de calage, M. [S] a indiqué que ces problèmes étaient résolus en fin de chantier, dans les cadre des finitions, lorsque l'ensemble de la charpente est posé stabilisé juste avant la réception des travaux.
L'expert expose que les défauts relevés sur les connecteurs se sont aggravés depuis les premiers constats.
S'agissant du désordre affectant la structure, l'expert a relevé qu'en cours d'expertise les barres de contreventement avaient été prolongées et que le désordre n'existait plus.
Quant à la dégradation de la charpente due à son exposition, il est indiqué à la suite des analyses réalisées à la demande de l'expert par le FCBA que le traitement préventif des bois a été délavé par les intempéries, nécessitant un nouveau traitement.
Enfin s'agissant des défauts concernant les assemblages, l'expert indique page 22 du rapport que les réglages ont été réalisés le 28 juillet 2016 en cours d'expertise, à la suite des préconisations du cabinet Dekra et qu'à la date du 19 juillet 2017, la charpente était jugée satisfaisante.
Le 18 juillet 2018, l'expert indiquait que la charpente était réceptionnable sous réserves des travaux suivants :
- reprise du traitement des bois,
- contrôle et reprise des connecteurs métalliques,
- réalisation des sous-faces des débords de toiture
Le coût de ces travaux a été chiffré par l'expert au regard de devis communiqués par l'entreprise à 4 332,80 euros HT pour le traitement de la charpente, et 6 080 euros HT pour le serrage des connecteurs et reprises diverses.
En conclusion, l'expert indique que la charpente pouvait être réceptionnée avec réserves en avril 2015 au moment où le chantier a été arrêté, ce qui aurait évité les dégradations de la charpente liées à l'exposition aux intempéries.
En l'espèce, contrairement à ce que soutient M. [Ac], M. [S] a analysé et tenu compte du rapport de M. [N], les deux experts ont fait les mêmes constats sur l'état de la charpente mais leurs conclusions divergent.
A la différence des experts mandatés par M. [Ac], M. [S] s'est entouré de sapiteurs qui ont analysé les ouvrages, le cabinet Dekra ayant établi des notes de calcul a conclu à la solidité, l'expert a également fait examiner la qualité des bois délavés par l'absence de protection, il a pleinement répondu à sa mission.
Les constats et expertises réalisés à la demande de M. [T] postérieurement à l'expertise judiciaire, au regard de l'absence de protection de l'ouvrage ne pouvaient que constater une dégradation de la charpente, ce qu'évoquait M. [S] dans les conclusions de son rapport.
Au vu du rapport de l'expert judiciaire il convient de prononcer la réception judiciaire de la charpente à la date du 30 avril 2015 assortie des réserves suivantes :
- réalisation des travaux de réglages et de calage de la charpente,
- réalisation nécessaire d'un contrôle et d'une reprise des connecteurs métalliques,
- absence de réalisation des sous-faces des débords des toitures.
En revanche ne sera pas retenu au titre des réserves le traitement de la charpente qui est rendu nécessaire par l'absence de protection mise en œuvre, imputable à l'entreprise et à M. [T], le traitement de la charpente ayant été délavé par les intempéries.
Le jugement est infirmé.
2- Sur les demandes en résolution et/ou en résiliation du contrat
Aux termes de l'
article 1134 ancien du code civil🏛🏛 dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à l'espèce, Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.
Elles doivent être exécutées de bonne foi.
Selon l'
article 1184 ancien du code civil🏛🏛, « la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.
Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.
La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances. »
Selon l'
article 1147 du code civil🏛🏛 dans sa version applicable à l'espèce « le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part. »
La SAS Champeau sollicite outre le prononcé de la réception judiciaire des travaux, la résiliation judiciaire du contrat, M. [T] ayant violé ses obligations contractuelles en refusant de prononcer la réception, elle ajoute que si la résiliation du contrat n'est pas prononcée, elle sera contrainte d'intervenir à nouveau sur les ouvrages pour la levée des réserves.
De son côté M. [T] sollicite la résolution du contrat en raison de son inexécution, la restitution des sommes versées et la dépose par la SAS Champeau de l'ouvrage réalisé.
Les termes de résiliation et résolution étant susceptibles de désigner des situations juridiques identiques, la circonstance que la SAS Champeau ait pu utiliser l'un ou l'autre terme dans ses écritures est sans incidence au regard de la recevabilité des demandes devant la cour.
Le contrat d'entreprise prend fin à la réception des ouvrages avec ou sans réserves, la réception constatant l'exécution des travaux, les demandes tendant soit à la résiliation, soit à la résolution du contrat dont la cause serait une inexécution du contrat, ainsi que le soutient M. [T] ou la mauvaise foi du cocontractant selon la SAS Champeau ne sauraient prospérer et les parties seront déboutées de leurs demandes de ce chef.
Le contrat ayant pris fin seule, l'obligation de lever les réserves, fondée sur la responsabilité de l'entrepreneur telle que prévue aux dispositions de l'article 1147 du code civil susvisé est engagée.
Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a prononcé la résolution du contrat aux torts de la société Champeau, ordonné la restitution des sommes versées en exécution du contrat et la dépose des ouvrages par la société Champeau.
La SAS Champeau sera déboutée de sa demande tendant à ce que soit prononcée la résiliation du contrat.
3-Sur les demandes en réparation et en paiement
M. [T] ne forme aucune demande de réparation en lien avec les réserves retenues par l'expert, sollicitant uniquement la réparation de son préjudice de jouissance qu'il chiffre à 74 000 euros arrêté au 30 juin 2021.
La SAS Champeau sollicite quant à elle le paiement du solde de son marché, soit 8370 euros.
Dès lors que la réception judiciaire des ouvrages est prononcée à la date du 30 avril 2015, il convient de considérer qu'à cette date si les travaux de construction du gros œuvre n'étaient pas achevés, rien n'empêchait le maître d'ouvrage de faire achever les travaux de couverture et de poursuivre les travaux. Alors qu'il s'est expressément opposé à plusieurs reprises à l'intervention de la SAS Champeau pour achever les ouvrages, M. [T] ne peut justifier d'un préjudice de jouissance imputable à l'entreprise, en conséquence le jugement sera infirmé et M. [T] débouté de cette demande.
En revanche, alors qu'il ne ressort pas du devis passé, ni des déclarations des parties qu'aurait été prévue une retenue de garantie au marché passé, rien ne justifie que M. [T] retienne le solde du marché, les travaux étant achevés.
La SAS Champeau produit la facture adressée le 27 août 2018 à M. [Ac] qui n'a pas été réglée, le jugement sera également infirmé et M. [T] condamné à payer à la SAS Champeau une somme de 8 370 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 21 mai 2019 date de l'assignation en paiement valant mise en demeure.
4-sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement sera infirmé de ces chefs, aucune condamnation ne pouvant être prononcée à l'encontre de la SAS Champeau.
M. [D] [T] qui succombe sera condamné aux dépens de l'instance de référé en ce compris les honoraires de l'expertise judiciaire, de première instance et d'appel.
M. [T] sera condamné à payer à la SAS Champeau une somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
Infirme le jugement
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Prononce la réception judiciaire des travaux de charpente à la date du 30 avril 2015 assortie des réserves suivantes :
- réalisation des travaux de réglages et de calage de la charpente,
- réalisation nécessaire d'un contrôle et d'une reprise des connecteurs métalliques,
- absence de réalisation des sous-faces des débords des toitures.
Déboute la SAS Champeau de sa demande tendant à la résiliation du marché,
Déboute M. [D] [T] de sa demande tendant à la résolution du marché aux torts de l'entreprise et par voie de conséquence de sa demande en restitution des sommes versées et dépose de la charpente,
Déboute M. [D] [T] de sa demande au titre du préjudice de jouissance,
Condamne M. [D] [T] à payer à la SAS Champeau la somme de 8 370 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 21 mai 2019,
Condamne M. [D] [T] à payer une somme de 4 000 euros à la SAS Champeau au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [D] [T] aux dépens de l'instance de référé, en ce compris les honoraires de l'expert, de première instance et d'appel.
Le greffier
Anaïs Millescamps
Le président
Catherine Courteille