CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 11 mai 2023
Cassation partielle
Mme AUROY, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 309 F-D
Pourvoi n° U 21-18.616
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 MAI 2023
Mme [P] [X], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 21-18.616 contre l'arrêt rendu le 25 juin 2019 par la cour d'appel de Chambéry (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant à M. [E] [X], domicilié [… …], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Poinseaux, conseiller, les observations de la SCP Richard, avocat de Mme [X], après débats en l'audience publique du 21 mars 2023 où étaient présents Mme Auroy, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Poinseaux, conseiller rapporteur, Mme Antoine, conseiller, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 25 juin 2019), [M] [K] veuve [X] est décédée le 8 octobre 2009, en laissant pour lui succéder ses deux enfants, [P] et [E].
2. Des difficultés sont survenues au cours du règlement de la succession.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième, quatrième et troisième moyen, pris en sa première branche
3. En application de l'
article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
4. Mme [P] [X] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes en rapport à la succession par M. [E] [X] des donations effectuées par [M] [Aa] à son profit par virements, chèques bancaires et remises d'espèces pour un montant de 23 697 euros, et, en conséquence, en recel successoral, alors « que tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; qu'il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale ; que ne sont susceptibles de recevoir la qualification de présents d'usage, dispensés de rapport, que les cadeaux faits à l'occasion de certains événements, conformément à un usage et n'excédant pas une certaine valeur ; qu'en décidant que constituaient des présents d'usage les retraits d'un montant de 2 200 euros, le 15 mai 2004 et de 1 300 euros, le 9 décembre 2003, sans constater qu'ils auraient été effectués à l'occasion d'un événement particulier et en vertu d'un usage, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'
article 843, alinéa 1er du Code civil🏛, ensemble l'
article 852 du même code🏛. »
Réponse de la Cour
Vu l'
article 852 du code civil🏛 :
5. Aux termes de ce texte, les frais de nourriture, d'entretien, d'éducation, d'apprentissage, les frais ordinaires d'équipement, ceux de noces et les présents d'usage ne doivent pas être rapportés, sauf volonté contraire du disposant. Le caractère de présent d'usage s'apprécie à la date où il est consenti et compte tenu de la fortune du disposant.
6. Pour rejeter les demandes de Mme [P] [X] tendant à la condamnation de M. [E] [X] au rapport à la succession des sommes de 2 200 euros et de 1 300 euros retirées des comptes bancaires de [M] [X] les 15 mai 2004 et 09 décembre 2003 et en recel successoral correspondant, l'arrêt retient que ces sommes étaient compatibles avec les capacités financières de la donatrice et qu'elle a ainsi pu effectuer ces versements au titre de présents d'usage, puisqu'elle vivait avec son fils, qui avait la charge de son entretien quotidien.
7. En se déterminant ainsi, sans préciser à l'occasion de quels événements [M] [X] avait fait de tels cadeaux à son fils et conformément à quels usages, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Portée et conséquences de la cassation
8. La cassation partielle prononcée n'emporte pas celle des chefs de dispositif relatifs aux dépens et à l'application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, justifiés par d'autres dispositions de l'arrêt non remises en cause.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de Mme [P] [X] tendant à la condamnation de M. [E] [X] au rapport à la succession de [M] [X] des sommes de 2 200 euros et de 1 300 euros correspondant à des retraits bancaires effectués les 15 mai 2004 et 9 décembre 2003 et en recel successoral correspondant, l'arrêt rendu le 25 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble autrement composée ;
Condamne M. [X] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille vingt-trois.