MOTIFS DE LA DECISION
I- SUR LA REGULARITE DU REDRESSEMENT
La société fait valoir en substance :
- la nullité de la mise en demeure du 28 août 2017, expressément reconnue par l'Urssaf dans son courrier du 17 novembre 2017, confirmée par les premiers juges, induit la nullité de la mise en demeure du 16 novembre 2017 en ce qu'aucun texte n'autorise une urssaf à annuler et remplacer une mise en demeure, en ce que la saisine de la commission de recours amiable quant à la régularité de la mise en demeure du 28 août 2017 fige la situation entre les parties
- la succession de mises en demeure aboutit à priver le formalisme prescrit par les textes de sa finalité, à violer le principe du contradictoire, à priver la saisine de la commission de recours amiable de toute efficacité.
L'Urssaf fait valoir en substance :
- il résulte de l'envoi d'une mise en demeure ne respectant pas les prescriptions des
articles L.244-2 et R.244 du code de la sécurité sociale🏛 la nullité de la procédure de recouvrement, aucunement celle du contrôle
- il est constant que la notification d'une seconde mise en demeure adressée postérieurement à l'envoi à la société de la réponse à ses observations est valide, peu important l'annulation par la commission de recours amiable de la première mise en demeure.
Sur ce,
Suivant les dispositions de l'article L.244-2 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 1er janvier 2017 au 23 décembre 2018 applicable en l'espèce, ' Toute action ou poursuite effectuée en application de l'article précédent ou des articles L. 244-6 et L. 244-8-1 est obligatoirement précédée, si elle a lieu à la requête du ministère public, d'un avertissement par lettre recommandée de l'autorité compétente de l'Etat invitant l'employeur ou le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans le mois. Si la poursuite n'a pas lieu à la requête du ministère public, ledit avertissement est remplacé par une mise en demeure adressée par lettre recommandée à l'employeur ou au travailleur indépendant.
Le contenu de l'avertissement ou de la mise en demeure mentionnés au premier alinéa doit être précis et motivé, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.'
Suivant les dispositions de l'article R.244-1 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 1erjanvier 2017 au 23 décembre 2018 applicable en l'espèce, ' L'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.
Lorsque la mise en demeure ou l'avertissement est établi en application des dispositions de l'article L. 243-7, le document mentionne au titre des différentes périodes annuelles contrôlées les montants notifiés par la lettre d'observations corrigés le cas échéant à la suite des échanges entre la personne contrôlée et l'agent chargé du contrôle. La référence et les dates de la lettre d'observations et le cas échéant du dernier courrier établi par l'agent en charge du contrôle lors des échanges mentionnés au III de l'article R. 243-59 figurent sur le document. Les montants indiqués tiennent compte des sommes déjà réglées par la personne contrôlée.'.
Il résulte de ces textes que la nullité de la mise en demeure prive de fondement l'obligation au paiement des sommes qui en font l'objet, aucunement que l'organisme de recouvrement constatant une erreur affectant la mise en demeure ne peut pas la rectifier et dresser une nouvelle mise en demeure.
En l'espèce, une première mise en demeure a été notifiée à la société le 24 août 2017 qui a été annulée et remplacée par une nouvelle mise en demeure le 28 août 2017 qui a été annulée et remplacée par une dernière mise en demeure le 16 novembre 2017.
Pour confirmer la décision déférée dans ses dispositions qui déboutent la société de sa demande en annulation des mises en demeure du 28 août 2017 et du 16 novembre 2017 et du redressement subséquent, il convient de relever :
- les mises en demeure ont été envoyées une fois le délai de trente jours imparti à la société pour faire valoir ses observations expiré et après l'envoi à la société de la réponse de l'agent en charge du contrôle
- les erreurs pour lesquelles la mise en demeure du 28 août 2017 a été annulée par l'Urssaf sont des erreurs de forme, la société qui avait bien reçu la lettre d'observations du 22 mai 2017 et le courrier du 2 août 2017 par lequel l'agent en charge du contrôle a répondu à ses observations ne pouvant pas se méprendre sur les opérations de contrôle, non susceptibles de remettre en cause les actes antérieurs et la validité du redressement et ne faisaient pas obstacle à la notification d'une nouvelle mise en demeure
- la saisine de la commission de recours amiable ne fige pas le litige, de plus fort dès lors comme en l'espèce s'agissant de celle du 28 août 2017 que la nullité de la mise en demeure ne lui était pas soumise
- il n'est pas discutable, et d'ailleurs non discuté par la société, que la mise en demeure
du 16 novembre 2017 qui mentionne qu'elle est établie pour le recouvrement des cotisations et contributions sociales dues en tant qu'employeur de personnel salarié, à la suite du contrôle ayant donné lieu à la lettre d'observations du 22 août 2017 confirmée par le courrier du 2 août 2017, soit les sommes de 163.594 euros de cotisations et 26.125 euros de majorations, permettait à la société de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation
- il résulte de l'ensemble que la mise en recouvrement des sommes objet du redressement querellé est régulière.
II -SUR LE BIEN FONDE DU REDRESSEMENT
Sur le chef de redressement Frais professionnels non justifiés-indemnités de petit déplacement ( point n°1 de la lettre d'observations )
Les opérations de contrôle ont révélé que la société verse des allocations forfaitaires de repas ou procède au remboursement de frais de restauration aux salariés portés en mission dans les locaux de l'entreprise cliente considérée, y compris depuis plus de trois mois, qu'elle exclut de l'assiette des cotisations sociales.
La société fait valoir en substance :
- les salariés portés n'ont pas de lieu de travail habituel en ce qu'ils cumulent différents temps de travail, singulièrement un temps de prospection, un temps d'exécution des prestations négociées, un temps administratif et un temps de formation sur différents sites qui induisent autant de lieux d'exercice différents
- l'article 23 de la convention collective nationale de branche des salariés en portage salarial du 22 mars 2017 le prévoit d'ailleurs expressément
- l'Urssaf ne peut pas valablement lui appliquer les dispositions de la circulaire Acoss du 6 juillet 2015 consacrée au remboursement des frais professionnels des salariés des entreprises de travail temporaire et des sociétés de service en ingéniérie informatique, les dispositions des
articles L.1254- 1 et suivants qui la régissent ayant été introduites dans le code du travail🏛 par l'ordonnance n° 20156380 du 2 avril 2015 relative au portage salarial
- la circulaire DSS n° 2005-389 du 19 août 2005 qui interprète les dispositions de l'arrêté du 20 décembre 2002 relatifs aux frais professionnels déductibles, seule applicable, prévoit expressément que l'exonération des indemnités de restauration versées aux salariés en déplacement n'est soumise à aucune condition de durée
- elle rapporte dans tous les cas la preuve que le temps de trajet entre le lieu de résidence des salariés concernés et l'entreprise cliente, rendait en pratique un retour au domicile pour le déjeuner.
L'Urssaf fait valoir en substance :
- le régime social applicable au remboursement des frais professionnels supplémentaires engagés par les salariés portés effectuant une prestation dans une entreprise cliente est régi par les dispositions applicables aux frais professionnels, indépendamment des régles d'indemnisation mises en place par les entreprises concernées
- l'exonération est ou non possible selon que l'entreprise cliente est devenue ou non le lieu de travail habituel du salarié
- l'entreprise cliente devient le lieu habituel de travail du salarié lorsque la mission excède une durée de trois mois
- les pièces produites par la société à hauteur d'appel doivent être écartées des débats faute d'avoir été soumises à l'inspecteur du recouvrement durant la phase contradictoire.
Sur ce,
Suivant les dispositions de l'
article L.242-1 du code de la sécurité sociale🏛, toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail sont soumises à cotisations, à l'exception des sommes représentatives de frais professionnels dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel.
Suivant les dispositions de l'
article 1 de l'arrêté du 20 décembre 2002🏛 relatif aux frais professionnels déductibles, lesdits frais s'entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi des travailleurs salariés ou assimilés sur justificatifs.
L'
article 2 de l'arrêté du 20 décembre 2002🏛 dans sa version applicable dispose: ' L'indemnisation des frais professionnels s'effectue :
1° Soit sous la forme du remboursement des dépenses réellement engagées par le travailleur salarié ou assimilé; l'employeur est tenu de produire les justificatifs y afférents. Ces remboursements peuvent notamment porter sur les frais prévus aux articles 6, 7 et 8 (3°, 4° et 5°);
2° Soit sur la base d'allocations forfaitaires ; l'employeur est autorisé à déduire leurs montants dans les limites fixées par le présent arrêté, sous réserve de l'utilisation effective de ces allocations forfaitaires conformément à leur objet. Cette condition est réputée remplie lorsque les allocations sont inférieures ou égales aux montants fixés par le présent arrêté aux articles 3, 4, 5, 8 et 9.'
S'agissant des indemnités de repas ou de restauration hors les locaux de l'entreprise, l'
article 3 de l'arrêté du 20 décembre 2002🏛 dans sa version applicable dispose :
'Les indemnités liées à des circonstances de fait qui entraînent des dépenses supplémentaires de nourriture sont réputées utilisées conformément à leur objet pour la fraction qui n'excède pas les montants suivants :
1° Indemnité de repas :
Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement professionnel et empêché de regagner sa résidence ou lieu habituel de travail, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 15 euros par repas ;
(...)
3° Indemnité de repas ou de restauration hors des locaux de l'entreprise :
Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement hors des locaux de l'entreprise ou sur un chantier, et lorsque les conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu habituel de travail pour le repas et qu'il n'est pas démontré que les circonstances ou les usages de la profession l'obligent à prendre ce repas au restaurant, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 7,5 euros.
(...) '.
Il en résulte que constituent des frais professionnels les dépenses supplémentaires engagées afin de s'alimenter à l'heure habituelle du déjeuner par les salariés en déplacement professionnel lorsque leurs conditions de travail leur interdisent de regagner leur résidence ou leur lieu de travail habituel pour y prendre leurs repas.
L'exonération de cotisations au titre des frais de repas nécessite ainsi que l'employeur apporte la preuve de l'existence de frais supplémentaires engagés par le salarié à l'occasion d'un déplacement professionnel de celui-ci.
Il appartient à l'employeur d'établir que les salariés au titre desquels il applique l'exonération se trouvent en situation de déplacement professionnel.
La circulaire du 19 août 2005 n° 2002-389 considère que le salarié est en déplacement professionnel lorsqu'il est empêché de regagner sa résidence ou son lieu de travail habituel et contraint de prendre ses repas hors des locaux de l'entreprise, prévoit que lorsque le salarié intervient dans une entreprise cliente l'exonération des frais de restauration est acquise pendant toute la durée de la mission, ne vise pas les salariés y ayant leur lieu de travail habituel.
Lorsque les salariés n'ont pas d'autre lieu de travail, les locaux de l'entreprise cliente dans lesquelles ils occupent des fonctions sédentaires deviennent leur lieu de travail.
En l'espèce, les contrats de travail des salariés concernés incluent une clause spécifiant ' Le salarié exercera ses fonctions au siège de l'Employeur, dans tout établissement de celui-ci, dans les locaux de l'entreprise cliente de l'Employeur, ou tout autre lieu indiqué dans l'Ordre de Mission' et les contrats de mission correspondant mentionnent l'identité de l'entreprise cliente et le lieu de mission; s'agissant d'un lieu de mission unique l'inspecteur du recouvrement a valablement considéré qu'il constitue le lieu de travail habituel du salarié.
Il n'est pas discutable que l'employeur n'a pas justifié auprès de l'inspecteur du recouvrement des circonstances de fait justifiant des remboursements opérés et/ou des versements d'indemnités, singulièrement de l'impossibilité pour les salariés concernés de rejoindre leur résidence.
La société à laquelle il incombait de justifier des circonstances de fait justifiant des réglements auxquels elle a ainsi procédé ne peut pas valablement reprocher à l'inspecteur du recouvrement de ne pas avoir consulté les dossiers des salariés retenus dans l'échantillonnage.
Les pièces versées aux débats à hauteur d'appel par la société doivent être écartées dès lors que le contrôle est clos après la période contradictoire telle que définie à l'
article R. 243-59 du code de la sécurité sociale🏛.
Le chef de redressement doit donc être validé et la décision déférée est confirmée de ce ce chef.
Sur le chef de redressement Plafond applicable: périodicité mensuelle de la paie (point n° 2 de la lettre d'observations)
L'inspecteur du recouvrement a relevé que la société avait appliqué en 2014 et en 2015 un abattement des assiettes plafonnées pour les salariés ayant effectué moins de 151,67 heures par mois ainsi qu'une double proratisation du plafond en fonction de la période d'emploi et du nombre d'heures travaillées, donnant lieu après réintégration à un redressement de 68.985 euros.
La société fait valoir en substance :
- l'
article L.242-8 du code de la sécurité sociale🏛 permet une réduction du plafond de sécurité sociale sur le seul constat que la durée de travail est inférieure à la durée légale, indépendamment du cadre juridique et/ou du libellé des contrats de travail
- en opérant le redressement litigieux, l'Urssaf procéde en réalité à une requalification des contrats de travail pour laquelle elle n'a aucune compétence et sur la base des dispositions de l'
article L. 3123-1 du code du travail🏛 qui ne relèvent pas du droit de la sécurité sociale
- il est constant qu'aucun salarié porté de la société n'a sollicité la requalification de son contrat de travail
- outre que le défaut de mentions substantielles prescrites par le code du travail crée simplement une présomption de temps plein, il résulte de l'autonomie inhérente à leur statut que les salariés portés qui négocient seuls un volume d'heures de travail organisent leur temps de travail librement
- l'étude croisée des ordres de mission, des comptes rendus d'activités remis chaque mois, des dads et des bulletins de salaire, à laquelle l'Urssaf n'a pas souhaité procédé, établit que la durée de travail des salariés portés à temps partiel n'a jamais atteint la durée légale du travail
- il convient dans tous les cas de tirer les conséquences de la présomption de travail à temps plein en procédant à la rectification des bases de calcul du crédit d'impôt sur la compétitivité et l'emploi et de la réduction Fillon, soit un trop versé de 20.738,12 euros.
L'Urssaf fait valoir en substance :
- outre que les contrats de travail des salariés portés mentionnent l'impossibilité de prévoir les horaires et que la plupart des intéressés sont soumis à une convention de forfait en jours, il ne peut pas être dérogé par voie contractuelle aux régles de droit commun du temps partiel posées par le code du travail
- les pièces dont la société se prévaut n'ont pas été produites lors du contrôle et n'établissent pas dans tous les cas en l'absence des bulletins de salaire que les salariés concernés n'étaient pas dans l'impossiblité de prévoir leur rythme de travail et qu'ils n'avaient pas à sa tenir en permanence à la disposition de l'employeur.
Sur ce,
Selon l'article L242-8 dans sa version en vigueur du 01 janvier 1991 au 10 août 2016, applicable en l'espèce, 'Pour le calcul des cotisations de sécurité sociale dues au titre des salariés employés à temps partiel, au sens de l'
article L. 212-4-2 du code du travail🏛 (devenu l'article L 3123-1 du code du travail), et qui sont déterminées compte tenu du plafond prévu à l'article L. 241-3, il est opéré un abattement d'assiette destiné à compenser la différence entre le montant des cotisations dues au titre de chacun de ces salariés et le montant des cotisations qui seraient dues pour une durée de travail identique dans le cas où chacun d'eux travaillerait à temps complet.'
Il résulte de ces dispositions que l'abattement d'assiette n'est prévu que pour les contrats de travail à temps partiel tels que définis par le code du travail, que l' inspecteur en charge du contrôle doit vérifier si la durée effective du travail des salariés concernés est bien inférieure à la durée légale du travail.
En l'espèce, les contrats des salariés à temps partiel comportent la clause Gestion du temps de travail qui mentionne ' Le salarié exercera une activité à temps partiel. Une première période de travail est convenue à compter de la date indiquée ci-dessus. Mais au-delà de cette première période, la nature de l'activité du salarié ne permet pas de fixer, sur la durée du contrat, les périodes travaillées et les périodes non travaillées, et la répartition des heures au sein de celles-ci.'.
Pour confirmer la décision déférée dans ses dispositions qui jugent que la société ne pouvait pas appliquer l'abattement prévu à l'article L.248-2 du code de la sécurité sociale, il suffira de relever que les contrats de travail des salariés portés ne prévoyant pas la durée du travail hebdomadaire, voire mensuelle, pas plus la répartition du temps de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, en violation des dispositions des
articles L. 3123-1 et L. 3123-14 du code du travail🏛, sont présumés à temps complet; que la société ne démontrant pas que les salariés concernés n'étaient pas dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme ils travaillaient et qu'ils n'avaient pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur, ne parvient pas à renverser cette présomption.
Pour confirmer la décision déférée dans ses dispositions qui déboutent la société de sa demande en rectification des bases de calcul du crédit d'impôt sur la compétitivité et l'emploi et de la réduction Fillon, la Cour relève que l'application de la proratisation de l'assiette plafonnée des salariés à temps partiel est conditionnée au seul respect de la définition du temps partiel par le code du travail, non établi au cas de l'espèce pour les raisons susmentionnées, qu'il résulte des opérations de contrôle que l'inspecteur du recouvrement n'a relevé aucune anomalie en faveur de la société dans le calcul des allègements effectués.
Sur le chef de redressement : Contribution Fnal supplémentaire: généralités ( point n°5 de la lettre d'observations )
L'agent en charge de contrôle a relevé que le décompte de ses salariés étant entaché d'une anomalie, la société n'a pas correctement cotisé au Fnal supplémentaire en appliquant l'assujetissement progressif. Il en est résulté un crédit de 12.776 euros.
La société fait valoir en substance:
- le conseil constitutionnel ayant rappelé que la contribution Fnal doit être fixée par la loi exclusivement s'agissant d'une imposition et non d'une cotisation sociale, ce qui n'était pas le cas jusqu'à la loi de finances rectificative du 29 décembre 2014 qui a modifié l'
article L.834-1 du code de la sécurité sociale🏛 à effet du 1er janvier 2015, l'Urssaf lui doit le remboursement des cotisations de base versées pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, soit la somme supplémentaire de 6465 euros
- outre que le conseil constitutionnel se contente dans le dispositif de sa décision de conclure à l'inconstitutionnalité de l'article L.834-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de la loi de finances rectificative du 29 décembre 2014, sa décison ne préjuge en rien de la conformité à la constitution de l'article dans sa rédaction antérieure
- l'Urssaf ne peut pas plus valablement se prévaloir de la décision rendue par le conseil constitutionnel le 3 octobre 2017 car fondée sur le fait que l'incompétence négative du législateur n'affecte par elle-même aucun droit ou liberté garanti(e) par la constitution.
L'Urssaf répond que les dispositions des
articles L.834-1 et R.834-7 du code de la sécurité sociale🏛 dans leur version applicable aux périodes pour lesquelles la société demande le remboursement n'ont pas été censurées par la décision du conseil constitutionnel, que la société ayant franchi le seuil de 20 salariés dès 2011 est assujettie au Fnal supplémentaire selon les calendrier suivant:
- 01/04/2012 au 31/12/2014 : dispense
- 01/01/2015 au 31/12/2015 : dégressibité 4ième année à 0,2 %
- 01/01/2016 au 31/12/2016 : dégressivité 5ième année à 0,3 %
- 01/01/2017 au 31/12/2017 : dégressivité 6ième année à 0,4%
- à compter du 1er janvier 2018, sortie du dispositif d'assujettissement progressif, le Fnal supplémentaire au taux de 0,05% est alors du sur la totalité de l'année civile.
Sur ce,
Suivant les dispositions de l'article L.834-1 du code de la sécurité sociale dans sa version issue de la
loi n° 2010- 1657 du 29 décembre 2010🏛, applicable au litige, ' Le financement de l'allocation de logement relevant du présent titre et des dépenses de gestion qui s'y rapportent est assuré par le fonds national d'aide au logement mentionné à l'
article L. 351-6 du code de la construction et de l'habitation🏛.
Pour concourir à ce financement, les employeurs sont assujettis à :
1° Une cotisation assise sur les salaires plafonnés et recouvrée selon les règles applicables en matière de sécurité sociale ;
2° Une contribution calculée par application d'un taux de 0,40 % sur la part des salaires plafonnés et d'un taux de 0,50 % sur la part des salaires dépassant le plafond, cette contribution étant recouvrée suivant les règles applicables en matière de sécurité sociale.
Les employeurs occupant moins de vingt salariés et les employeurs relevant du régime agricole au regard des lois sur la sécurité sociale ne sont pas soumis à la contribution mentionnée au 2°. Le cinquième alinéa de l'
article L. 620-10 du code du travail🏛 s'applique au calcul de l'effectif mentionné au présent article.'
Par sa décision du 18 décembre 2014 n° 2014-706 sur la loi de financement de la sécurité sociale le conseil constitutionnel a jugé s'agissant de l'article 12, examiné d'office:
' 37. Considérant que l'article 12, qui modifie l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant de la
loi du 8 août 2014🏛 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 susvisée, prévoit que les taux de la cotisation instituée par cet article sont fixés par décret ;
38. Considérant que la conformité à la Constitution d'une loi déjà promulguée peut être appréciée à l'occasion de l'examen des dispositions législatives qui la modifient, la complètent ou affectent son domaine ; qu'en l'espèce, les dispositions de l'article 12 ont pour objet de compléter les dispositions de l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale telles qu'elles résultent du 7 ° du paragraphe I de l'article 2 de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 ;
39. Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles concernant' l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures » ;
40. Considérant que la cotisation instituée par l'article L. 834-1, qui a pour assiette les rémunérations versées par les employeurs à leurs salariés, et qui est recouvrée « selon les règles applicables en matière de sécurité sociale », a pour objet de concourir au financement du fonds national d'aide au logement ; que l'article L. 351-6 du code de la construction et de l'habitation charge ce fonds de financer l'aide personnalisée au logement, la prime de déménagement et les dépenses de gestion qui s'y rapportent ainsi que les dépenses du conseil national de l'habitat ; que ce fonds finance également l'allocation de logement ainsi que les dépenses de gestion qui s'y rapportent ;
41. Considérant que la cotisation instituée par l'article L. 834-1, dont les recettes concourent au financement du fonds national d'aide au logement, n'a pas pour objet d'ouvrir des droits à des prestations et avantages servis par un régime obligatoire de sécurité sociale ; qu'il s'ensuit que cette cotisation est au nombre des impositions de toutes natures au sens de l'article 34 de la Constitution ;
' 42. Considérant, qu'en renvoyant au décret le soin de fixer les taux de cette cotisation et en ne prévoyant aucun encadrement de la détermination de ces taux, le législateur a méconnu l'étendue de sa compétence ; que, par suite, l'article 12 de la loi déférée doit être déclaré contraire à la Constitution ; qu'il en va de même de l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant du 7 ° du paragraphe I de l'article 2 de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, lequel doit être déclaré contraire à la Constitution ; qu'il résulte du A du paragraphe VI de cet article 2 que le 7 ° du paragraphe I du même article ne s'applique qu'à compter du 1er janvier 2015 ; que la déclaration d'inconstitutionnalité de ce 7 ° a pour effet de maintenir en vigueur la rédaction de l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale résultant de l'
article 209 de la loi du 29 décembre 2010🏛 de finances pour 2011 susvisée.'
Il s'en déduit que le conseil constitutionnel a entendu limiter sa censure aux seules dispositions de l'article 12 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 et du 7° du paragraphe I de l'article 2 de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 et maintenir applicables les dispositions sus énoncées de l'article L834-1 du code de la sécurité sociale, les développements de la société sur le dispositif de la décision étant dès lors inopérants.
La Cour relève encore que :
- par
décision n° 2017-657 du 3 octobre 2017, le conseil constitutionnel⚖️ en réponse à la question prioritaire de constitutionnalité transmise par le président du tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil et libellée comme suit ' Les dispositions de l'article L. 834-1 du code la sécurité sociale -dans ses versions issues des
lois n° 2007-1822 du 24 décembre 2007🏛 (article 135) et n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 (
article 209), applicables avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014🏛- ne méconnaissent-elles pas les exigences de compétence législative et le principe constitutionnel de clarté et de précision de la loi garanties par l'article 34 de la Constitution de 1958, et à ce titre ne portent-elles pas atteinte au droit à un recours effectif garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, au principe d'égalité devant les charges publiques garanti par l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et l'article 34 de la Constitution de 1958 et à la liberté d'entreprendre et au principe d'égalité devant la loi garantis par les articles 4 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et par le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ' ' a jugé, de première part que les mots ' et les employeurs relevant du régime agricole au regard des lois de sécurité sociale ' figurant à la première phrase du cinquième alinéa de l'article L.834-1 du code de la sécurité sociale, dans ses rédactions résultant de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008 et de le loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 sont contraires à la constitution, de deuxième part que la déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions fixées au paragraphe 15 de la décision, de dernière part que les deuxième à quatrième alinéas et le reste du cinquième alinéa de l'article L.834-1 du code de la sécurité sociale, dans ces mêmes rédactions, sont conformes à la constitution';
- le conseil constitutionnel a d'abord rappelé que les sociétés requérantes soutiennent qu'en s'abstenant, d'une part, de fixer le taux de la cotisation prévue au 1° des dispositions renvoyées et, d'autre part, de déterminer les modalités de recouvrement de cette cotisation ainsi que de la contribution prévue au 2° des mêmes dispositions, le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence dans des conditions affectant le droit à un recours juridictionnel effectif, la liberté d'entreprendre et le principe d'égalité devant la loi. Serait également méconnu l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi. Enfin, en exonérant de la contribution prévue au 2° les employeurs occupant moins de vingt salariés et ceux relevant du régime agricole au regard des lois sur la sécurité sociale, le législateur aurait méconnu le principe d'égalité devant les charges publiques ; puis affirmé successivement, ' En premier lieu, la méconnaissance par le législateur de l'étendue de sa compétence dans la détermination de l'assiette ou du taux d'une imposition n'affecte par elle-même aucun droit ou liberté que la Constitution garantit. Par suite, le grief tiré de la méconnaissance par le législateur de sa compétence en matière de règles concernant le taux de la cotisation prévue au 1° des dispositions contestées, dans leur deux rédactions mentionnées ci-dessus, doit être écarté; ' En second lieu, l'absence de détermination des modalités de recouvrement d'une imposition affecte le droit à un recours effectif garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Toutefois, en prévoyant que la cotisation et la contribution prévues respectivement aux 1° et 2° des dispositions contestées sont recouvrées « selon les règles applicables en matière de sécurité sociale », le législateur a entendu renvoyer aux règles de valeur législative applicables au recouvrement des cotisations dues au titre du régime de sécurité sociale dont relèvent les salariés des employeurs assujettis à ces impositions. Par suite, le grief tiré de la méconnaissance par le législateur de sa compétence en matière de détermination des règles de recouvrement de ces impositions doit être écarté'.
Il résulte de l'ensemble que les cotisations ont été appelées sur la base de dispositions conformes à la constitution, que la société doit être déboutée de sa demande à ce titre, que la société doit être déboutée de sa demande en remboursement. Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.
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En l'état des réglements effectués par la société et de la remise des majorations de retard opérée par l'Urssaf, la somme restant à verser s'établit à 12.943 euros. Le jugement déféré sera infirmé en conséquence.
III- SUR LES AUTRES DEMANDES
Le jugement déféré mérite confirmation dans ses dispositions qui condamnent la société aux dépens et à verser à l'Urssaf la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société, qui succombe devant la Cour, sera condamnée aux dépens d'appel.
L'équité commandant de ne pas laisser à l'Urssaf la charge des frais non compris dans les dépens restés à charge qu'elle a exposés à hauteur d'appel, la société sera condamnée à lui verser la somme de 2500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.