CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 70084
M. COLLIER
Lecture du 02 Juin 1989
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. COLLIER, demeurant 32 rue Jean Mermoz à Marseille (13008), et tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1°) annule le jugement du 26 avril 1985 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 1er juillet 1983 par lequel le directeur général des archives de France lui a infligé la sanction du déplacement d'office de son poste de directeur des services d'archives des Alpes-de-Haute-Provence à celui de conservateur d'archives au dépôt des archives d'outre-mer à Aix-en-Provence, 2°) annule pour excès de pouvoir cette décision et accorde une indemnisation de 80 000 F à titre de réparation,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 59-244 du 14 février 1959 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu : - le rapport de M. Faure, Maître des requêtes, - les conclusions de M. Tuot, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
Considérant qu'en réponse à une lettre du 10 mars 1983 que lui avait adressée le directeur départemental de l'Office national des anciens combattants en vue de l'inviter à assister à une prochaine réunion de la "commission départementale de l'information historique pour la paix", récemment créée par le ministre des anciens combattants et placée sous la présidence du préfet, M. COLLIER a envoyé le 24 mars 1983 à ce directeur, sur papier à en-tête et en sa qualité de directeur des services d'archives des Alpes de Haute-Provence, une lettre par laquelle il contestait avec la plus extrême vivacité les objectifs qui avaient conduit le ministre précité à instituer cette commission et condamnait les orientations politiques du gouvernement en matière d'archives historiques ;
Considérant qu'un fac-similé de la lettre du 10 mars 1983 et un extrait de la réponse de M. COLLIER ont été publiés dans l'hebdomadaire "Minute" paru le 16 avril 1983 ;
Considérant qu'à la suite des faits susrelatés, le ministre délégué à la culture a, par arrêté du 1er juillet 1983, sanctionné disciplinairement le requérant en le déplaçant d'office, à compter du 1er août 1983, au dépôt des archives d'outre-mer à Aix-en-Provence en qualité de conservateur d'archives ;
Considérant que tant devant les premiers juges que devant le Conseil d'Etat, le ministre soutient qu'en expédiant la lettre litigieuse, M. COLLIER s'est rendu coupable d'un grave manquement à l'obligation de réserve à laquelle sont tenus les fonctionnaires, et que cette faute, même s'il était admis que le requérant n'était pas responsable de la transmission des documents litigieux à la presse, était à elle seule de nature à justifier la sanction prise ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. COLLIER a communiqué à l'hebdomadaire susmentionné les documents qui y ont été reproduits ; Mais considérant qu'en attaquant la politique gouvernementale et en usant de termes outranciers dans une lettre qu'il a écrite en sa qualité de directeur d'un service départemental à un autre directeur de service départemental, M. COLLIER a méconnu l'obligation de réserve et commis une faute de nature à entraîner une sanction disciplinaire ; que le ministre délégué à la culture n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en infligeant à l'intéressé la mesure de déplacement d'office ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. COLLIER n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er juillet 1983 ;
Sur les conclusions à fin d'indemnité :
Considérant que les conclusions de M. COLLIER, tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité de 80 000 F en réparation du préjudice qu'il a subi du fait de la sanction précitée, sont présentées sans le ministère d'un avocat au Conseil d'Etat et sont par suite irrecevables ;
Article 1er : La requête de M. COLLIER est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. COLLIER et au ministre de la culture, de la communication, des grands travaux et du Bicentenaire.