Jurisprudence : CE 3/5 SSR, 28-04-1989, n° 64788

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 64788

Jouvenel

Lecture du 28 Avril 1989

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Vu la requête, enregistrée le 24 décembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Pierre JOUVENEL, demeurant allées des Faissonnats à Cestas (33610), et tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1° annule le jugement du 6 novembre 1984 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 24 décembre 1982 par lequel le maire de Montayral a fixé l'alignement de la voie communale n° 209 ; 2° annule pour excès de pouvoir cette décision,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 59-115 du 7 janvier 1959 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu : - le rapport de M. Vistel, Conseiller d'Etat, - les observations de Me Boulloche, avocat de M. Pierre JOUVENEL, - les conclusions de Mme Moreau, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, M. JOUVENEL ayant demandé l'autorisation d'édifier une clôture autour de sa propriété, située en bordure de la voie communale n° 209, le maire de Montayral a, par arrêté du 24 décembre 1982, accordé l'autorisation sollicitée, mais en indiquant que le pétitionnaire devrait se conformer à l'alignement "défini par une ligne parallèle à l'axe de la chaussée et distante de cet axe de 3 m 50" ; que M. JOUVENEL a déféré au tribunal administratif l'arrêté du 24 décembre 1982 en tant qu'il lui imposait de respecter cet alignement, qu'il estimait illégal ; que, par jugement du 6 novembre 1984, dont fait appel M. JOUVENEL, le tribunal administratif a rejeté la demande comme irrecevable au motif que les dispositions de l'arrêté du 24 décembre 1982 étaient indivisibles et que M. JOUVENEL n'était par suite pas recevable à en demander l'annulation partielle ;
Considérant que les riverains de la voie publique sont recevables à déférer au juge administratif la décision par laquelle le maire fixe l'alignement de la voie publique en bordure de leur propriété ; que, dans le cas où, comme en l'espèce, le maire procède à cette fixation à l'occasion de la délivrance d'une autorisation de clôture, le riverain est recevable à contester cette fixation sans critiquer les autres dispositions de l'arrêté ; qu'en effet les dispositions qui fixent l'alignement ont une portée qui excède la délivrance de l'autorisation en cause et ne sauraient par suite être regardées comme indivisibles de l'autorisation accordée ; que, par suite, c'est à tort que le jugement attaqué a déclaré irrecevable la demande de M. JOUVENEL tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 décembre 1982 en tant qu'il précise que l'alignement à respecter lors de l'édification de la clôture est défini par une ligne distante de 3 m 50 de l'axe de la chaussée ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. JOUVENEL ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier, que, comme l'affirme M. JOUVENEL sans être contredit par la commune de Montayral, le tableau de classement de la voirie communale qui a fixé la largeur du chemin de Mortefond à Moulinet à 5 mètres, n'a pas été précédé de l'enquête publique prescrite par l'article 2 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 et n'a pas été approuvé par le conseil municipal ainsi que l'exige également cet article ; qu'en l'absence de plan d'alignement de la voie légalement établi, les alignements ne pouvaient être fixés qu'en fonction des limites réelles de celle-ci ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des plans et des photographies produits par M. JOUVENEL, que l'alignement qui lui a été délivré a pour effet d'incorporer au sol du chemin n° 209, dont la largeur, au droit de sa propriété, est inférieure à 5 mètres, une partie des terrains appartenant au requérant ; qu'ainsi, la décision attaquée ne s'est pas bornée à constater les limites actuelles de la voie publique et que, par suite, elle est entachée d'excès de pouvoir ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 6 novembre 1984 est annulé. L'arrêté du maire de Montayral en date du 24 décembre 1982 est annulé en tant qu'il définit l'alignement du chemin n° 209 au droit de la propriété de M. JOUVENEL par une ligne distante de 3m 50 de l'axe de la chaussée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. JOUVENEL, à la commune de Montayral et au ministre de l'intérieur.

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