CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 63562
René ALAUX
Lecture du 20 Mars 1989
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Vu 1°) sous le n° 63 562 la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 23 octobre 1984 et 23 février 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. René ALAUX, demeurant 4 place Victor Lachaud à Agde (34300), et tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1°) annule le jugement du 22 juin 1984 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1976 ; 2°) lui accorde la décharge de cette imposition ;
Vu 2°) sous le n° 63 563, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 23 octobre 1984 et 14 février 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. René ALAUX demeurant 4 place Victor Lachaud à Agde (34300) et tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1°) annule le jugement du 22 juin 1984 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1976 ; 2°) lui accorde la décharge de cette imposition ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu : - le rapport de M. Girault, Maître des requêtes, - les observations de Me Choucroy, avocat de M. René ALAUX, - les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de M. ALAUX enregistrées sous les n os 63 562 et 63 563 ont trait l'une et l'autre aux suppléments d'impôt sur le revenu qui ont été mis à sa charge au titre de l'année 1976 ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision ; En ce qui concerne les revenus imposés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers :
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : "Sont considérés comme revenus distribués : ... 2°) Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société à responsabilité limitée "Jacques Val" avait inscrit au passif de son bilan de l'exercice clos en 1975 une dette de 83 434 F envers Mme ALAUX, qui lui avait vendu, pour cette somme, divers matériels en 1974 et 1975 ; qu'à la clôture de l'exercice 1976, les écritures comptables de la société ne mentionnaient plus cette dette, tandis qu'une somme d'un même montant était inscrite au compte courant d'associé de M. René ALAUX, gérant de la société ; que l'administration a estimé que cette somme avait constitué pour ce dernier un revenu distribué, au sens des dispositons précitées du 2° du I de l'article 109 du code général des impôts et l'a imposée à son nom dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;
Considérant que, pour contester le bien-fondé de cette imposition, M. ALAUX soutient que l'inscription à son compte courant de la somme de 83 434 F trouvait sa contrepartie dans le don que Mme ALAUX, sa mère, lui a fait, en 1976, de la créance de même montant qu'elle détenait sur la société "Jacques Val" ; que, toutefois, ni le transport de créance ainsi allégué, qui n'a pas fait l'objet des formalités prévues par l'article 1690 du code civil, ni l'extinction corrélative de la dette de la société envers Mme ALAUX ne sont justifiés par la seule production de l'attestation tardivement établie par cette dernière en 1982 ; que M. ALAUX n'est donc pas fondé à soutenir que la somme de 83 434 F, dont il admet avoir eu la disposition, n'a pas eu le caractère d'un revenu distribué ; Considérant, il est vrai, que M. ALAUX allègue que l'imposition mise à sa charge ne peut trouver sa base légale dans les dispositions du 2° du I de l'article 109 du code général des impôts, dès lors que la distribution litigieuse n'a pas affecté les résultats imposables à l'impôt sur les sociétés de la société "Jacques Val" ; qu'il résulte toutefois de la combinaison des dispositions déjà citées du 2° du I de l'article 109 et de celles du 1° du I du même article selon lequel : "Sont considérés comme revenus distribués tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital", ainsi de celles de l'article 110 du même code, aux termes desquelles : "Pour l'application de l'article 109-I-1°, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus dans l'assiette de l'impôt sur les sociétés ...", que, lorsque, comme en l'espèce, il n'a pas été établi d'impôt sur les sociétés à la charge de la personne morale à raison de sommes qu'elle a effectivement allouées à des associés au cours de l'exercice, ces sommes entrent dans la catégorie des sommes "non prélevées sur les bénéfices" visées au 2° du I de l'article 109 ; que le moyen susanalysé de M. ALAUX doit donc être écarté ; En ce qui concerne les revenus imposés dans la catégorie des traitements et salaires : Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par l'administration à la requête n° 63 563 :
Considérant qu'aux termes de l'article 83 du code général des impôts, relatif à l'imposition des traitements et salaires : "Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordées : ... 3°) Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. - La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut ... elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu. - Toutefois, en ce qui concerne les catégories de professions qui comportent des frais dont le montant est notoirement supérieur à celui résultant de l'application des pourcentages prévus à l'alinéa précédent, un arrêté ministériel fixe le taux de la déduction dont les contribuables appartenant à ces professions peuvent bénéficier en sus de la déduction forfaitaire visée audit alinéa" ; que, d'après l'article 5 de l'annexe IV au code général des impôts, pris en application des dispositions précitées de l'article 83, les voyageurs, représentants et placiers de commerce et d'industrie (VRP) ont droit à une déduction supplémentaire de 30 % pour frais professionnels ;
Considérant que le bénéfice de cette déduction est subordonné dans le cas d'une activité accessoire, à la condition que cette dernière puisse être regardée comme constituant l'exercice d'une profession distincte justifiant, notamment, l'allocation d'une rémunération séparée ;
Considérant que M. ALAUX fait valoir qu'il aurait exercé, en 1976, pour le compte de la société à responsabilité limitée "Jacques Val", une activité accessoire de voyageur, représentant et placier et que, en dépit de sa qualité de dirigeant de cette société, il avait droit, au titre de cette activité accessoire, au bénéfice de la déduction supplémentaire prévue par l'article 5 de l'annexe IV au code général des impôts ; que, toutefois, en se bornant à faire état de ce que la société "Jacques Val", qui exploitait à la fois un fonds de commerce de vente de vêtements et d'articles textiles et une concession de représentation exclusive d'une marque de tels articles, distinguait, dans son chiffre d'affaires, les recettes provenant de chacune de ces deux activités, M. ALAUX ne justifie pas qu'il aurait perçu une rétribution séparée pour l'activité accessoire de voyageur, représentant et placier qu'il soutient avoir exercée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. ALAUX n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes en réduction ou en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti ;
Article 1er : Les requêtes n os 63 562 et 63 563 de M. ALAUX sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. ALAUX et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.