Jurisprudence : CE 2/7 ch.-r., 05-04-2023, n° 462770, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 2/7 ch.-r., 05-04-2023, n° 462770, mentionné aux tables du recueil Lebon

A10529NB

Identifiant européen : ECLI:FR:CECHR:2023:462770.20230405

Identifiant Legifrance : CETATEXT000047422003

Référence

CE 2/7 ch.-r., 05-04-2023, n° 462770, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/94963419-ce-27-chr-05042023-n-462770-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
Copier

Abstract

335-01-01 Il résulte de l’article 9 de l’accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d’emploi que celui-ci renvoie, sur tous les points qu’il ne traite pas, à la législation nationale, en particulier aux dispositions pertinentes du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), pour autant qu’elles ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l’accord. ...L’article L. 412-1 du CESEDA, qui subordonne de manière générale la délivrance de toute carte de séjour à la production par l'étranger d’un visa de long séjour, n’étant pas incompatibles avec l’article 3 de l’accord franco-marocain, qui ne concerne que la délivrance d’un titre de séjour pour exercer une activité salariée, un préfet peut légalement refuser la délivrance d’un titre de séjour en qualité de salarié à un ressortissant marocain au motif qu’il ne justifie pas d’un visa de long séjour.



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 462770⚖️


Séance du 08 mars 2023

Lecture du 05 avril 2023

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 7ème et 2ème chambres réunies)


Vu la procédure suivante :

M. C A B a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 8 septembre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2105053 du 2 décembre 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Par une ordonnance n° 21MA05022 du 3 février 2022, la présidente de la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a, sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative🏛, rejeté l'appel formé par M. A B contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 mars et 24 juin 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020🏛 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Elise Adevah-Poeuf, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de M. A B ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par un arrêté du 8 septembre 2021, le préfet de l'Hérault a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A B, ressortissant de nationalité marocaine, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 2 décembre 2011, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A B tendant à l'annulation de cet arrêté. M. A B se pourvoit en cassation contre l'ordonnance, prise sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, par laquelle la présidente de la 3ème chambre de la cour administrative de Marseille a rejeté l'appel qu'il avait formé contre ce jugement.

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 742-5 du code de justice administrative🏛 : " la minute de l'ordonnance est signée du seul magistrat qui l'a rendue. () ". La minute de l'ordonnance attaquée portant la signature de la présidente de la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille, qui l'a rendue, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article R. 742-5 du code de justice administrative auraient été méconnues ne peut qu'être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France pour une durée d'un an au minimum () reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an, renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. / Après trois ans de séjour régulier en France, les ressortissants marocains visés à l'alinéa précédent peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans. Il est statué sur leur demande en tenant compte des conditions d'exercice de leurs activités professionnelles et de leurs moyens d'existence. ()". Aux termes de l'article 9 du même accord : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord ". Aux termes de l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile🏛, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 16 décembre 2020 portant partie législative de ce code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1 ". Aux termes de l'article L. 435-1 du même code🏛, dans sa rédaction issue du même code : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. /Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. /Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'Etat ".

4. D'une part, si l'ordonnance attaquée cite les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sous leur numérotation antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 16 décembre 2020 portant partie législative du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable à la date de l'arrêté préfectoral litigieux, l'erreur ainsi commise est restée sans incidence sur le bien-fondé du raisonnement suivi par la présidente de la 3ème chambre de la cour administrative de Marseille et doit être regardée comme une simple erreur de plume. Par suite, le moyen tiré de ce que l'auteure de l'ordonnance aurait commis une erreur de droit et méconnu le champ d'application de la loi doit être écarté.

5. D'autre part, il résulte des stipulations de l'accord franco-marocain citées au point 3 que celui-ci renvoie, sur tous les points qu'il ne traite pas, à la législation nationale, en particulier aux dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour autant qu'elles ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'accord. Les stipulations de l'article 3 de cet accord ne traitent que de la délivrance d'un titre de séjour pour exercer une activité salariée et cet accord ne comporte aucune stipulation relative aux conditions d'entrée sur le territoire français des ressortissants marocains. Par suite, en jugeant que les dispositions précitées de l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui subordonnent de manière générale la délivrance de toute carte de séjour à la production par l'étranger d'un visa de long séjour, ne sont pas incompatibles avec les stipulations de cet accord et qu'en conséquence le préfet avait pu légalement refuser au requérant la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié au motif qu'il ne justifiait pas d'un visa de long séjour, la présidente de la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas commis d'erreur de droit.

6. En troisième lieu, en rejetant par ordonnance la requête d'appel de M. A B au motif qu'elle était manifestement dépourvue de fondement, la présidente de la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas fait un usage abusif de la faculté offerte par le neuvième alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative et n'a pas privé le requérant de son droit à un recours effectif, tel qu'il est garanti par l'article 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi de M. A B doit être rejeté.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. A B est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. C A B et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Agir sur cette sélection :

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus