Jurisprudence : CE 7/9 SSR, 31-10-1990, n° 51223

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 51223

Association "CENTRE DES INFIRMIERES DANOISES DIPLOMEES"

Lecture du 31 Octobre 1990

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 10 juin 1983 et 10 septembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'Association "CENTRE DES INFIRMIERES DANOISES DIPLOMEES", association régie par la loi de 1901 dont le siège est 58, rue Notre-Dame des Champs à Paris (75006), représentée par son président en activité, et tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1° annule le jugement, en date du 11 avril 1983 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 1972 au 31 décembre 1976 ; 2° accorde la décharge des droits contestés,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu : - le rapport de M. Lambron, Maître des requêtes, - les observations de la S.C.P. Tiffreau, Thouin-Palat, avocat de l'Association "CENTRE DES INFIRMIERES DANOISES DIPLOMEES", - les conclusions de Mme Hagelsteen, Commissaire du gouvernement ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que par deux décisions en date, respectivement des 21 août et 31 octobre 1984 postérieures à l'introduction du pourvoi, l'administration a accordé à l'association "CENTRE DES INFIRMIERES DANOISES DIPLOMEES" des dégrèvements des droits s'élevant respectivement à 42 937,64 F et à 262 405,85 F et des indemnités de retard y afférentes ; que dans cette mesure les conclusions de la requête susvisée sont devenues sans objet ;
Sur le surplus des conclusions de la requête : Considérant, en premier lieu, qu'à la suite des renseignements recueillis par elle dans l'exercice de son droit de communication, qui pouvaient laisser présager une activité industrielle et commerciale, l'administration a diligenté le 15 décembre 1976 une vérification de comptabilité à l'endroit de l'association "CENTRE DES INFIRMIERES DANOISES DIPLOMEES" ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la notification de redressements adressée à ladite association le 20 décembre 1976, que l'administration, à l'occasion de cette vérification, a suffisamment informé l'association de la nature des renseignements recueillis auprès de tiers, ; que l'association a ainsi, été mise à même de contester la portée des informations recueillies par le service qui lui étaient opposées, ce qu'elle a d'ailleurs fait dans sa réponse à cette notification ; que l'imposition contestée n'a été mise en recouvrement que le 17 octobre 1979 ; que, dès lors, le moyen tiré par l'association requérante de ce que le service aurait décidé du caractère taxable à la taxe sur la valeur ajoutée de son activité dans des condtions incompatibles avec le principe général des droits de la défense ne saurait être accueilli ; Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces versées au dossier par l'administration que, pendant la période du 1er janvier 1972 au 31 décembre 1976, l'association "CENTRE DES INFIRMIERES DANOISES DIPLOMEES" regroupait les offres d'emploi d'établissements hospitaliers et de particuliers auxquels elle adressait, pour des interventions temporaires, des infirmières de diverses nationalités, en ayant recours à cet effet à des procédés commerciaux tels que des encarts publicitaires insérés dans l'annuaire téléphonique et la remise aux infirmières de bulletins à l'en-tête du centre à utiliser pour le décompte et le règlement des sommes dues par les établissements de soins ou les particuliers ; que les statuts de l'association requérante prévoient que : "les ressources de l'association se composent : ... 2°) des sommes perçues en contrepartie des prestations fournies par l'association" et qu'il ressort de l'arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 7 février 1973 et de la décision de la commission de première instance du contentieux de la sécurité sociale de Paris du 21 janvier 1981 produites par l'association requérante elle-même qu'effectivement les infirmières lui ristournaient une partie de leur rémunération ; que "les cahiers de reçus des infirmières" produits par l'association requérante devant le Conseil d'Etat, tenus de façon très sommaire, avec de nombreuses ratures et sans totalisation périodique des comptes, n'établissent en aucune façon que, comme elle l'allègue, sa présidente Mme Teissier se bornait, dans les cas où les établissements de soins ou les particuliers règlaient par chèque les prestations fournies par les infirmières, à encaisser lesdits chèques et à en reverser le montant exact en espèces aux intéressées ; qu'ainsi, l'exercice par l'association d'une activité d'intermédiaire à titre onéreux, de nature commerciale, est suffisamment établie ; que, par voie de conséquence, l'association ne peut se prévaloir utilement de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée prévue par l'article 261-7-1° du code général des impôts dans sa rédaction applicable en l'espèce, en faveur des opérations des euvres sans but lucratif ; Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 302 ter-2 du code général des impôts : "Sont exclues du régime du forfait : les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés" ; que l'association requérante se livrant, comme il a été dit ci-dessus, à des opérations de caractère lucratif, était passible de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 206-7 dudit code ; que, par suite, et alors même que l'administration a en définitive, au cours de l'instance devant le Conseil d'Etat, admis que le chiffre d'affaires qu'elle a réalisé dans son activité de prestations de services, était inférieur au plafond de 150 000 F prévu à l'article 302 ter du code général des impôts, la procédure de taxation d'office, selon le régime réel d'imposition, dont elle a fait l'objet en l'absence non contestée de souscription des déclarations exigées sous ce régime par l'article 287 dudit code, n'était pas entachée d'irrégularité ; Considérant, en quatrième lieu, qu'alors même qu'elle a été adressée " à titre conservatoire pour l'année 1972" la notification de redressements du 20 décembre 1976 comporte, en ce qui concerne tant le principe même de la taxation à la taxe sur la valeur ajoutée que les modalités de détermination de la base d'imposition retenue pour cette année, des indications suffisantes pour interrompre la prescription à hauteur de cette base de 355 886 F ; que l'imposition restant en litige au titre de l'année 1972 correspond à une base de 81 385 F ; que, dès lors, le moyen tiré de la prescription des droits correspondants, mis en recouvrement le 17 octobre 1979, ne saurait être accueilli ; Considérant, en cinquième lieu, que les commissions perçues par l'association sur les infirmières au cours des années 1972 à 1975 en rémunération de son activité d'intermédiaire dans le placement de ces dernières, ont été évaluées par le service d'après les mouvements du compte bancaire ouvert au nom de Mme Teissier, présidente de l'association ; qu'eu égard à l'absence, au cours des mêmes années, de comptabilité de l'association retraçant les encaissements de chèques opérés pour le compte des infirmières et les reversements d'espèces à ces dernières et au fait constant que ces opérations étaient, pour l'essentiel, effectuées par l'intermédiaire du compte personnel de la dirigeante de l'association et révélaient ainsi une confusion des patrimoines, la méthode suivie par l'administration ne peut, dans son principe, être regardée comme radicalement viciée ; que l'association requérante qui, ayant été régulièrement taxée d'office, supporte la charge de la preuve, n'apporte aucun début de justification de l'exagération des bases ainsi fixées ; que toutefois, il résulte de l'instruction que pour l'année 1976, l'administration s'est bornée à reconstituer la base d'imposition par extrapolation des mouvements des comptes bancaires de la dirigeante pour les années précédentes, sans avoir contrôlé les données précises de l'année en cause ; qu'ainsi, pour cette année, la méthode suivie pa l'administration ne peut être retenue ; que, par suite, il y a lieu de prononcer la décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels l'association "CENTRE DES INFIRMIERES DANOISES DIPLOMEES" a été assujettie au titre de l'année 1976, ainsi que des pénalités y afférentes ; Considérant, enfin que l'administration n'était pas tenue par la loi du 11 juillet 1979 de motiver les indemnités de retard prévues par l'article 1727 du code général des impôts dont elle a fait application ; que si l'association soutient que ces indemnités de retard, étaient "légalement inapplicables", elle n'a fourni à l'appui de ce moyen aucune précision de nature à permettre d'en apprécier le bien-fondé ;
Article 1er : Il n'y a lieu de statuer sur les conclusionsde la requête de l'association "CENTRE DES INFIRMIERES DANOISES DIPLOMEES" à concurrence des dégrèvements de droits d'un montant total de 305 343,49 F, et des indemnités de retard correspondantes qui lui ont été accordés par des décisions en date des 21 août et 31 octobre 1984.
Article 2 : L'association "CENTRE DES INFIRMIERES DANOISES DIPLOMEES" est déchargée des droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 1976, ainsi que des pénalités y afférentes.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de l'association "CENTRE DES INFIRMIERES DANOISES DIPLOMEES" est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'association "CENTRE DES INFIRMIERES DANOISES DIPLOMEES" et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et dubudget, chargé du budget.

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