Jurisprudence : CA Grenoble, 02-03-2023, n° 21/01657, Infirmation


C 9


N° RG 21/01657


N° Portalis DBVM-V-B7F-K2E4


N° Minute :


Copie exécutoire délivrée le :


la SCP VUILLAUME-COLAS & MECHERI


Me Pascale HAYS

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D'APPEL DE GRENOBLE


Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 02 MARS 2023


Appel d'une décision (N° RG F 20/00006)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURGOIN JALLIEU

en date du 11 mars 2021

suivant déclaration d'appel du 09 avril 2021



APPELANT :


Monsieur [V] [R]

né le … … … à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 2]


représenté par Me Sylvie VUILLAUME-COLAS substituée par Me Sonia MECHERI de la SCP VUILLAUME-COLAS & MECHERI, avocat au barreau de LYON


INTIMEE :


S.A. LA POSTE représentée par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège de la société

[Adresse 4]

[Localité 3]


représentée par Me Pascale HAYS, avocat postulant au barreau de GRENOBLE

et par Me Céline VACHERON de la SELARL ALTICIAL, avocat plaidant au barreau de SAINT-ETIENNE substituée par Me Cécile AZOULAY de la SELARL ALTICIAL, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE,



COMPOSITION DE LA COUR :


LORS DU DÉLIBÉRÉ :


M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,


DÉBATS :


A l'audience publique du 11 janvier 2023,

M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président chargé du rapport et Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère, ont entendu les parties en leurs plaidoiries, assistés de Mme Carole COLAS, Greffière, conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile🏛, les parties ne s'y étant pas opposées ;


Puis l'affaire a été mise en délibéré au 02 mars 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.


L'arrêt a été rendu le 02 mars 2023.



EXPOSE DU LITIGE':


M. [V] [R], né le … … …, a été embauché le 2 décembre 2014 par la société anonyme (SA) La Poste suivant contrat de travail à durée déterminée, en qualité de facteur polyvalent. M. [V] [R] a été affecté sur le site de [Localité 6].


Le contrat de travail à durée déterminée de M. [V] [R] s'est poursuivi par un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 8 décembre 2015.


Par courrier en date du 16 novembre 2018, la SA La Poste a notifié à M. [V] [R] un avertissement pour avoir notamment oublié une caissette de courriers lors d'une tournée du 17 septembre 2018.


En date du 12 décembre 2018, M. [V] [R] a sollicité la rupture conventionnelle de son contrat de travail auprès de la SA La Poste. Cette dernière a répondu défavorablement à cette demande.


M. [V] [R] a été placé en arrêt de travail ininterrompu pour cause de maladie à compter du 27 septembre 2018.


En date du 11 mars 2019, M. [V] [R] a bénéficié d'une visite auprès du médecin du travail qui s'est prononcé ainsi': «'Interdiction à l'activité antérieure et extérieure. Pas d'avis. Il relève de la médecine de soins. Possible inaptitude à envisager'».


M. [V] [R] a bénéficié d'une seconde visite médicale auprès du médecin du travail le 18 mars 2019. A cette date, M. [V] [R] a été déclaré inapte dans les termes suivants': «'Absence de proposition de reclassement. L'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans le Groupe La Poste'».


Par lettre en date du 8 août 2019, la SA La Poste a notifié à M. [V] [R] son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.


Estimant son licenciement nul, M. [V] [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Bourgoin-Jallieu par requête en date du 13 janvier 2020 afin de faire dire et juger que la SA La Poste avait manqué à son obligation de loyauté et de sécurité, qu'il avait été victime de harcèlement moral et que son licenciement était la conséquence de ce harcèlement et des manquements de l'employeur à ses obligations.



Par jugement en date du 11 mars 2021, le conseil de prud'hommes de Bourgoin-Jallieu a':


- dit que le licenciement pour inaptitude de M. [V] [R] est bien fondé;

Par conséquent,

- débouté M. [V] [R] de ses demandes d'indemnités au titre du préavis, des congés payés afférents, ainsi que des dommages et intérêts pour nullité, ou pour le surplus, de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- débouté M. [V] [R] du surplus de ses demandes';

- débouté la SA La Poste de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛 ;

- laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.


La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusés de réception signé le 17 mars 2021 pour M. [R] et tamponné le même jour pour la SA La Poste.



Par déclaration en date du 9 avril 2021, M. [V] [R] a interjeté appel à l'encontre dudit jugement.


Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 5 juillet 2021, M. [Aa] [R] sollicite de la cour de':


Vu les dispositions légales en vigueur,

Vu la jurisprudence de la Cour de cassation,

Vu les pièces versées au débat


Réformer le jugement de première instance en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Dire et juger que la SA La Poste a gravement manqué à son obligation de loyauté et à son obligation de sécurité

Dire et juger que le licenciement pour inaptitude de M. [V] [R] est la conséquence des agissements fautifs de l'employeur

Dire et juger que le licenciement de M. [Aa] [R] s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse

En conséquence,

Condamner la SA La Poste à verser à M. [Aa] [R] les sommes suivantes :

- 3 514.66 euros au titre de l'indemnité de préavis, outre 351.46 euros au titre des congés payés afférents

- 21 000 euros de dommages et intérêts s'agissant de la nullité du licenciement et pour le surplus, de la perte de son emploi

- 15 000 euros de dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail

Condamner la SA La Poste à verser à M. [Aa] [R] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛

Condamner la même aux entiers dépens.


Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 4 octobre 2021, la SA La Poste sollicite de la cour de':


Vu la jurisprudence de la Cour de cassation,


-Prendre acte de ce que M. [V] [R] ne reproche plus à la société avoir subi un harcèlement moral, et que la demande de nullité du licenciement est abandonnée par l'appelant dans le cadre de l'appel

- Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes :

- Dire et juger que l'employeur n'a pas manqué à son obligation de sécurité,

- Dire et juger que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement est bien-fondé,

- Constater le respect par la société de son obligation de loyauté.

En conséquence, débouter M. [V] [R] de l'intégralité de ses demandes y afférent.

Statuant de nouveau :

- Accueillir la demande reconventionnelle de l'employeur et condamner M. [V] [R] à lui verser 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛.


Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile🏛 de se reporter aux conclusions des parties susvisées.


La clôture de l'instruction a été prononcée le 24 novembre 2022.


L'affaire a été fixée pour être plaidée à l'audience du 11 janvier 2023.



EXPOSE DES MOTIFS':


Sur l'obligation de prévention et de sécurité':


L'employeur a une obligation s'agissant de la sécurité et de la santé des salariés dont il ne peut le cas échéant s'exonérer que s'il établit qu'il a pris toutes les mesures nécessaires et adaptées énoncées aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail🏛🏛 ou en cas de faute exclusive de la victime ou encore de force majeure.


L'article L.4121-1 du code du travail🏛 énonce que :

L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.


L'article L.4121-2 du code du travail🏛 prévoit que :

L'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :

1° Eviter les risques ;

2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;

3° Combattre les risques à la source ;

4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;

5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ;

6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;

7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1 ;

8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;

9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.


En l'espèce, M. [R] met en évidence que':

- le 20 septembre 2018, il a porté une mention sur le cahier du CHSCT pour se plaindre de ne pas pouvoir prendre sa pause de 45 minutes, de sorte qu'il continuait à travailler, puisqu'il n'avait ni le code ni le badge d'accès au local dédié


- il s'est vu notifier le 16 novembre 2018 un avertissement lui reprochant des faits du 28 mai 2018, qu'il considère comme prescrits puisque datant de plus de 2 mois, et des faits du 17 septembre 2018 consistant à avoir laissé une «'K7 de courrier au centre sans l'emporter en tournée'» et sans avoir prévenu son encadrant, indiquant, sans certes demander l'annulation de cette sanction disciplinaire, que l'employeur ne justifie pas du grief'; ce qui revient implicitement mais nécessairement à la contester, M. [R] avançant qu'il s'est agi d'un abus du pouvoir disciplinaire


- il a formulé une demande de rupture conventionnelle le 12 décembre 2018 ayant fait l'objet d'un refus de l'employeur, M. [R] avançant dans ses conclusions d'appel que celle-ci fait suite à la sanction disciplinaire qu'il considère comme abusive, mais la société La Poste pointant effectivement que la demande est motivée par de «'nouveaux projets professionnels'»


- dans un courrier en date du 2 mars 2019, manifestement adressé au médecin du travail, le Dr, [P], médecin traitant de M. [R], a indiqué que M. [R] rencontrait des «'difficultés et souffrance psychologique dans son travail. Il ne pourra reprendre son travail de manière définitive.'». Il est également versé aux débats un certificat en date du 05 mars 2019 du Dr [H], Psychiatre, précisant «'constater un syndrome anxio-dépressif réactionnel à un contexte professionnel délétère. Le patient verbalise nettement des idées auto et/ou hétéro-agressives. Tout retour dans son entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé.'». Si la société La Poste indique, à juste titre, que ces deux professionnels de santé ne pouvaient effectivement par faire un lien direct et certain entre la pathologie psychique qu'ils ont diagnostiquée et le milieu professionnel du salarié mais uniquement relater les dires de ce dernier, force est néanmoins de considérer que le médecin du travail a manifestement donné du crédit à leur analyse puisqu'à l'issue de la visite du 11 mars 2019, il a rendu l'avis suivant «'interdiction à l'activité antérieure et extérieure. Pas d'avis. Il relève de la médecine de soins. Possible inaptitude à envisager'» et lors de la visite du 18 mars 2019, il a déclaré le salarié inapte au poste sans préconisation de reclassement au motif que «'l'état de santé de l'agent fait obstacle à tout reclassement dans le Groupe La Poste'», au vu d'une étude de poste et des conditions de travail du 15 mars 2019 et d'un échange avec l'employeur du 18 mars 2019 au titre desquels l'employeur ne produit aucune pièce


- M. [R] met en évidence que deux autres salariés, MM. [I] et [Y], du même centre de [Localité 6], ont fait l'objet de la notification de leur licenciement pour inaptitude par courriers des 05 septembre et 08 octobre 2019 et qu'une autre salariée, Mme [J], titulaire d'un contrat d'encadrant non pérenne, s'est trouvée en arrêt maladie avec une préconisation le 14 juin 2019 du médecin du travail d'une reprise d'activité professionnelle dans un autre établissement, produisant par ailleurs des courriers et mentions sur le cahier CHSCT de ces salariés se plaignant de leurs conditions de travail au sein du centre de [Localité 6], en dénonçant à plusieurs reprises les méthodes de management de M. [X], un encadrant du centre


- un courrier non daté, un autre du 12 novembre 2019 et un dernier du 28 novembre 2019 de MM. [L] et [K], représentants du personnel, ont été adressés dans le cadre de l'exercice d'un droit d'alerte pour des faits qualifiés d'alarmants sur le site de [Localité 6] et pour reprocher à Mme [D], en sa qualité de directrice du CHSCT, le fait qu'aucune suite n'a été donnée. Il a été répondu par des courriels des 6 décembre et 20 décembre 2019 de Mme [D] aux représentants du personnel en faisant état de l'envoi de questionnaires aux salariés concernant la situation du centre de [Localité 6] et avec, comme précision dans la dernière correspondance, qu'il y avait déjà eu un certain nombre de retours.


Indépendamment même du fait de savoir si la sanction disciplinaire était ou non justifiée, aucun élément utile à l'appui des griefs formulés n'étant produit quoique l'employeur soutienne à juste titre que M. [R] n'en sollicite pas l'annulation, la société La Poste ne démontre pas avoir pris les mesures nécessaires dans le cadre de son obligation de prévention et de sécurité à l'égard de son salarié en ce qu'elle ne justifie aucunement':

- que M. [R] a pu effectivement prendre ses pauses, la mention d'un supérieur hiérarchique sur le fait que ce dernier aurait bénéficié du code et qu'il allait être étudié le fait qu'un badge puisse lui être remis, puis, le 25 septembre 2019, qu'un badge était en cours de préparation n'étant pas de nature à établir que le salarié a pu effectivement par la suite bénéficier de ses pauses, alors que la charge de la preuve incombe à l'employeur, qui ne fait en définitive qu'affirmer que le problème a été réglé


- d'avoir entrepris des investigations utiles sur les conditions de travail au centre de [Localité 6], peu important l'inaction du CHSCT dont le secrétaire était au demeurant M. [Ab], alors même qu'il n'est certes pas établi qu'elle avait été directement avertie de conditions de travail dégradées par M. [R] mais l'avait pour autant été par trois autres salariés et ensuite par les représentants du personnel, l'employeur développant en l'espèce un moyen inopérant sur le fait que M. [R] ne peut se prévaloir des plaintes formulées par les trois autres salariés alors même qu'il s'évince des pièces produites que régnait manifestement dans cette unité de travail un climat délétère généralisé au point que trois jeunes salariés, ont été, dans un laps de temps de quelques mois, déclarés inaptes définitifs à leur poste, sans possibilité de reclassement et licenciés pour ce motif. Si l'exercice du droit d'alerte des représentants du personnel est effectivement postérieur au licenciement de M. [R], il n'en demeure pas moins que l'employeur a une obligation de prévention dans le cadre de son obligation de sécurité, qu'il ne justifie manifestement pas avoir remplie à l'égard de M. [R] alors même que la société La Poste avait nécessairement connaissance de difficultés sérieuses au centre de [Localité 6] au vu des plaintes antérieures adressées par trois autres salariés et de plusieurs avis du médecin du travail constatant une inaptitude au poste de 3 salariés et la nécessité d'un changement d'établissement pour une quatrième encadrante, M. [R] affirmant, sans être contredit par des éléments utiles de l'employeur, que cela représentait la proportion significative de 10 % des effectifs


- de la communication des retours des questionnaires remis aux salariés, qui plus est, plusieurs mois, après l'apparition des difficultés dans l'unité de travail, et il n'est pas davantage explicité et encore moins justifié des mesures qui auraient pu être prises pour remédier à un climat social dégradé au sein de l'établissement de [Localité 6]. Si ces enquêtes sont certes postérieures au licenciement du salarié, les résultats et les mesures éventuellement prises étaient pour autant de nature à permettre à la juridiction d'apprécier pleinement la situation de l'unité de travail de [Localité 6] à cette époque de sorte qu'il ne peut qu'en être déduit la carence de l'employeur dans l'obligation qui est la sienne de prendre les mesures nécessaires en vue de garantir la santé et la sécurité du salarié.


Il s'ensuit qu'un manquement à l'obligation de sécurité est caractérisé.


Infirmant le jugement entrepris, il convient de condamner la SA La Poste à payer à M. [R] la somme de 8000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de prévention et de sécurité, tenant compte de la durée pendant laquelle le salarié a eu à subir les manquements de son employeur ainsi que son inaction, en dépit de multiples alertes concordantes émanant de différents acteurs sur le climat social dégradé au sein de l'établissement du [Localité 6].


Le surplus de la demande est rejeté.


Sur le licenciement':


Le licenciement fondé sur l'inaptitude du salarié provoquée par un manquement préalable de l'employeur est sans cause réelle et sérieuse.


En l'espèce, il appert que M. [R] rapporte la preuve suffisante au vu des éléments médicaux sus-analysés que son inaptitude définitive sans préconisation de reclassement résulte en tout ou partie du manquement préalable de l'employeur à son obligation de prévention et de sécurité dès lors que son état de santé psychique s'est dégradé de manière concomitante à la détérioration de ses conditions de travail, son médecin traitant et le médecin psychiatre ayant diagnostiqué un syndrome anxiodépressif réactionnel à son environnement professionnel, ces deux praticiens ne pouvant certes pas être affirmatifs sur cette relation causale dès lors qu'ils n'ont pas été témoins des conditions de travail du salarié, mais ils n'évoquent aucun antécédent psychiatrique et surtout, le médecin du travail a manifestement donné du crédit à leur diagnostic puisqu'il a dans un laps de temps très bref déclaré le salarié inapte définitif à son poste sans envisager la moindre possibilité de reclassement.


Au demeurant, la circonstance que deux autres salariés du même centre de [Localité 6] aient également été déclarés inaptes à leur poste dans un laps de temps de quelques mois et licenciés pour ce motif et qu'il ait été recommandé un changement d'établissement pour une troisième salariée ne fait que confirmer que ce sont bien les conditions de travail délétères dans cette unité de travail qui ont en tout ou partie conduit à la déclaration d'inaptitude de M. [R].


Il convient, en conséquence, d'infirmer le jugement entrepris et de déclarer sans cause réelle et sérieuse le licenciement notifié par courrier du 8 août 2019 à M. [R] par la société La Poste.


Sur les prétentions afférentes à la rupture du contrat de travail':


Premièrement, dès lors que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, peu important que M. [R] n'ait pas été en capacité d'effectuer son préavis, il a droit à l'indemnité compensatrice de préavis à hauteur de 3514,66 euros, outre 351,46 euros au titre des congés payés afférents.


Deuxièmement, au visa de l'article L 1235-3 du code du travail🏛, au jour de son licenciement injustifié, M. [Ac] avait plus de 4 ans d'ancienneté et un salaire de l'ordre de 1757 euros bruts.


Il ne justifie pour autant pas de sa situation au regard de l'emploi.


Il lui est alloué la somme de 8785 euros bruts à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause et sérieuse et il est débouté du surplus de sa demande de ce chef.


Sur les demandes accessoires':


L'équité commande de condamner la société La Poste à payer à M. [R] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛.


Le surplus des prétentions de ce chef est rejeté.


Infirmant le jugement entrepris, au visa de l'article 696 du code de procédure civile🏛, il convient de condamner la SA La Poste, partie perdante, aux dépens de première instance et d'appel.



PAR CES MOTIFS';


La cour, statuant publiquement, contradictoirement, dans les limites de l'appel et après en avoir délibéré conformément à la loi';


INFIRME le jugement entrepris en ses dispositions comprises dans le périmètre de l'appel


Statuant à nouveau,


DIT que la société La Poste a manqué à son obligation de prévention et de sécurité


DÉCLARE sans cause réelle et sérieuse le licenciement notifié par la société La Poste à M. [R] par courrier en date du 08 août 2019


CONDAMNE la société La Poste à payer à M. [Ac] les sommes suivantes':

- huit mille euros (8000 euros) nets à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de prévention et de sécurité

- huit mille sept cent quatre-vingt-cinq euros (8785 euros) bruts à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- trois mille cinq cent quatorze euros et soixante-six centimes (3514,66 euros) bruts au titre de l'indemnité de préavis

- trois cent cinquante-et-un euros et quarante-six centimes (351,46 euros) bruts au titre des congés payés afférents


DÉBOUTE M. [R] du surplus de ses prétentions au principal


RAPPELLE que le point de départ des intérêts au taux légal au titre des créances de nature salariale est le 14 janvier 2020, date de convocation devant le bureau de conciliation et à compter du présent arrêt pour les autres sommes


CONDAMNE la société La Poste à payer à M. [R] la somme de 2500 euros d'indemnité de procédure


REJETTE le surplus des prétentions des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛


CONDAMNE la société La Poste aux dépens de première instance et d'appel.


Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛.


Signé par M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président de section, et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


La Greffière Le Président

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