Par déclaration du 10 janvier 2020, la salariée a interjeté appel de ce jugement.
Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées au greffe par voie électronique le 3 avril 2020, elle demande à la cour :
- d'infirmer le jugement rendu le 03 octobre 2019 en ce qu'il l'a :
- déboutée de l'ensemble de ses demandes,
- condamnée aux dépens.
et statuant à nouveau,
-de déclarer son licenciement sans cause réelle et sérieuse,
en conséquence,
-de condamner la SAS Lefebvre Sarrut Services venant au droit de la SAS ELS Gestion à lui verser :
- 90 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- de dire et juger que la SAS Lefebvre Sarrut Services venant au droit de la SAS ELS Gestion a exécuté le contrat de travail de manière déloyale,
en conséquence,
- de condamner la SAS Lefebvre Sarrut Services venant au droit de la SAS ELS Gestion à lui verser :
- 45 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
- de prononcer la nullité de la convention de forfait jour et à tout le moins son inapplicabilité à l'espèce,
- de dire et juger que Madame [R] [X] a effectué des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées,
en conséquence,
- de condamner la SAS Lefebvre Sarrut Services venant au droit de la SAS ELS Gestion à lui verser les sommes de :
- 9 642,60 euros, à titre de rappel de salaire sur les heures supplémentaires effectuées,
- 964 euros de congés payés afférents,
- de débouter la SAS Lefebvre Sarrut Services venant au droit de la SAS ELS Gestion de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
-d'ordonner la remise de documents de fin de contrat rectifiés selon les termes de la décision à intervenir,
-d'ordonner l'application d'intérêts au taux légal avec capitalisation par périodes annuelles sur les sommes de condamnation,
- de condamner la SAS Lefebvre Sarrut Services venant au droit de la SAS ELS Gestion aux entiers dépens d'instance, en ce compris les frais d'exécution, ainsi qu'au versement de la somme de 5 000 euros en cause d'appel au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛.
Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées au greffe par voie électronique le 1er juillet 2020, la société Lefebvre Sarrut Services demande au contraire à la cour :
- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Madame [X] de l'ensemble de ses demandes,
- reçu la Société en sa demande au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛,
- condamné Madame [X] aux dépens,
- de réformer le jugement en ce qu'il a débouté la Société de sa demande au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛,
statuant à nouveau, il est demandé à la Cour :
à titre principal :
-de dire la requérante infondée dans l'ensemble de ses demandes,
en conséquence,
- de débouter Madame [R] [X] de l'ensemble de ses demandes,
à titre subsidiaire :
- de réduire les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à de plus justes proportions,
en tout état de cause :
- de condamner Madame [R] [X] à verser à la société Lefebvre Sarrut Services la somme de 2 000 euros au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛 ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 novembre 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 12 janvier 2023 pour y être examinée.
Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour un plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure et aux conclusions susvisées pour l'exposé des moyens des parties devant la cour.
MOTIFS
I- sur l'exécution du contrat de travail,
A- sur la convention de forfait-jours,
La durée légale du travail effectif est fixée à 35 heures par semaine civile, mais le législateur a prévu la possibilité de conclure des conventions de forfait pour fixer des durées de travail notamment en jours sur l'année, l'
article L. 3121-43 du code du travail🏛 dans sa rédaction applicable, prévoyant cette possibilité notamment pour les cadres, cette organisation et ces modalités de décompte du temps de travail ayant comme conséquence d'exonérer l'entreprise des dispositions relatives aux heures supplémentaires, celles concernant le repos demeurant applicables.
La mise en place de la convention de forfait nécessite la conclusion d'une convention individuelle de forfait passée par écrit.
Aux termes des articles 5 des contrats de travail successivement signés par Mme [X] avec la société, il est stipulé une convention de forfait -jours dans les termes suivants :
'Du fait de la nature des fonctions et du niveau de responsabilité donnant une large autonomie dans l'organisation de son temps de travail, Mme [X] percevra pour l'exécution de son contrat de travail, une rémunération forfaitaire dont le montant correspondant à celui en vigueur à la signature du présent avenant.
Compte tenu de l'application de l'accord collectif relatif à l'aménagement et la réduction du temps de travail signé au sein de la Société en date du 3 juillet 2014, cette rémunération forfaitaire correspond à un nombre maximum de jours ouvrés sur l'année, sans référence horaire, égal à 212. En raison du lissage de cette rémunération sur l'année, sa rémunération mensuelle sera constante d'un mois sur l'autre, quel que soit le nombre de jours travaillés au cours d'un mois considéré.
A chaque début de mois, Mme [X] établira un relevé de ses jours travaillé et de ses jours, non travaillés au cours du mois précédent avec, dans le second cas, l'indication d'un motif d'absence.
Elle fera viser ce relevé par son responsable hiérarchique avant de le remettre à la Direction des ressources humaines où il sera conservé pendant trois ans'.
La salariée relève d'une part que ses bulletins de salaire faisaient référence à des jours de 'RTT' et que cette seule mention la plaçait de facto hors du régime spécifique du forfait, puisque les jours de « Réduction du Temps de Travail » ne sont destinés qu'à compenser une différence entre un travail à 39 heures hebdomadaires effectives avec la durée légale de travail de 35 heures hebdomadaires.
Elle relève également qu'elle n'a jamais bénéficié d'un entretien relatif à son temps de travail comme la loi l'impose et que son contrat ne prévoit aucunement les mesures destinées à s'assurer du respect des amplitudes journalières maximales de travail, de repos entre deux journées travaillées, du respect de la bonne répartition de la charge de travail pour conjuguer la vie familiale et personnelle avec le travail.
Mme [X] sollicite de ce fait le prononcé de la nullité de la convention de forfait et à tout le moins son inapplicabilité.
De l'accord sur la durée et l'aménagement du temps de travail conclu le 3 juillet 2014 au sein de la société ELS versé en pièce N° 27 par l'employeur , il résulte que la convention de forfait telle que stipulée dans les contrats de travail de la salariée s'appuient sur un accord collectif fixant à 212 jours le nombre maximal de jours travaillés, les modalités de décompte des jours travaillés au moyen d'un système autodéclaratif remis mensuellement à la direction (article 3.2.3) mettant le salarié en mesure 'd'indiquer sur le formulaire s'il n'a pas été en mesure de respecter les temps de repos minima quotidien et hebdomadaire(...)', les modalités d'organisation des jours de repos (article 32.4), le nombre de repos quotidiens et hebdomadaires (article 3.2.5) et organisant dans l'article 3.2.6 un entretien annuel et le suivi de la charge de travail.
Mme [X] sollicite la nullité de ses conventions de forfait-jour mais ne développe aucun moyen mettant la cour en mesure de considérer que l'accord collectif sur lequel elles s'adossent, tel que ci-dessus rappelé, ne répond pas aux exigences de l'
article L. 3121-64 du code du travail🏛.
La demande formée de ce chef a donc été à juste titre rejetée et le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé sur ce point.
En revanche, l'employeur ne justifie du respect d'aucune des dispositions conventionnelles ou contractuelles dès lors que ni la mise en place du système autodéclaratif par le biais de la remise d'un relevé mensuel visé par le supérieur hiérarchique ni l'organisation d'un entretien annuel sur la charge de travail ne sont justifiés, la seule référence à un entretien mensuel dans une convocation étant insuffisante sur ce point, ce d'autant que les comptes-rendus d'entretiens auxquels l'employeur renvoie (pièces N° 12 et 16), ne comportent aucune allusion sur la charge de travail de l'intéressée et ne concernent pas la problématique de son temps de travail.
La convention de forfait jours est donc privée d'effet et la salariée peut prétendre au paiement des heures supplémentaires.
B- sur les heures supplémentaires,
En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, en vertu de l'
article L. 3171-4 du Code du Travail🏛, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires.
Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances s'y rapportant.
A l'appui de sa demande, Mme [Aa] verse aux débats un tableau des heures supplémentaires qu'elle considère avoir réalisées jours par jour, d'avril 2016 à novembre 2016.
L'employeur, auquel il appartient d'assurer le contrôle des heures de travail, en critique le contenu, mais ne produit pas pour sa part ses propres éléments.
L'analyse des tableaux versés aux débats par l'appelante, rendue extrêmement complexe par une impression de ce document en recto verso sans suites sur les jours des mois concernés, conduit la cour à retenir l'accomplissement d'heures supplémentaires à hauteur de 44,89 heures et à allouer de ce chef la somme de 2 410,38 euros et 241,03 euros au titre des congés payés afférents.
Le jugement entrepris doit être infirmé de ce chef.
C- sur l'exécution déloyale du contrat de travail.
L'
article L. 1222-1 du code du travail🏛 impose aux parties à un contrat de travail de l'exécuter de bonne foi.
Par ailleurs, selon l'
article L. 4121-1 du code du travail🏛 l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent:
1) des actions de prévention des risques professionnels,
2) des actions d'information et de formation,
3) la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.
L'
article L. 4121-2 du Code du Travail🏛 détermine les principes généraux de prévention sur le fondement desquels ces mesures doivent être mises en oeuvre.
Il en résulte que constitue une faute contractuelle engageant la responsabilité de l'employeur le fait d'exposer un salarié à un danger sans avoir pris toutes les mesures prévues par les textes susvisés, alors que l'employeur doit assurer l'effectivité de l'obligation de sécurité qui lui incombe en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise.
Mme [X] considère que sa charge de travail était particulièrement anormale, soutenant qu'elle a assuré le travail de deux emplois à temps plein (ETP) de juillet à décembre 2015 et de 3,5 ETP de janvier à juillet 2016 puis de 2,5 ETP de juillet à septembre pour finir à 1,5 ETP jusqu'à fin octobre 2016, évoquant des amplitudes horaires énormes, des réunions organisées tout au long de la journée et le travail des dossiers de fond le soir ou pendant ses journées de repos.
Elle rappelle que le CHSCT , saisi de difficultés dans le service de la direction des systèmes informatiques de gestion en avril 2016 a relevé dans son rapport de juillet suivant, que son N+1 faisait preuve d'un leadership brutal et unilatéral dont elle était directement victime, ce dont elle s'est plainte auprès du CHSCT en octobre, novembre et janvier 2017 pendant même l'exécution de son préavis.
Ce N+1 avait lui même saisi la directrice des ressources humaines par courrier électronique du 9 février 2016 pour solliciter de l'aide à raison de la transformation de l'organisation du service.
La réalité de grandes difficultés tenant à une organisation du travail au sein du service informatique dont Mme [X] faisait partie résulte, au delà de la période postérieure d'octobre 2016 concernée par les signalements opérés par Mme [X] elle même auprès du CHSCT, des échanges de courriers électroniques du 20 juin 2016 avec Mme Ab (Pièce N° 63), elle même qualifiée de responsable RH, laquelle répond à Mme [X] qui lui a fait part de ses difficultés à dormir en lien avec le souhait d'une salariée de quitter un projet dit ERP : 'on va vous aider, les choses vont s'améliorer (...)'.
Elles résultent aussi des propres écrits deAcM. [U], responsable de la direction informatique dont dépendait la direction des systèmes informatiques de gestion sous la responsabilité de M. [K] lui même N+1 de Mme [Aa] responsable du pôle Business Ananalyst, qui déclare le 12 juillet 2016 'c'est un véritable projet d'amélioration qui commence.
Périmètre: retrouver une meilleure ambiance de travail au sein du SI gestion (...)'.
Cet échange fait suite à un document du 11 juillet 2016 relatant les constats faits par M. [U] qu'il qualifie lui même d'accablants (pièce N° 10 de la salariée), et dans lequel est relevée l'existence d'un leadership brutal et unilatéral, de rôle ni définis ni respectés dans l'organisation ou encore d'une salariée (justement Mme [X]), livrée à elle même.
Le compte rendu du CHSCT dans les suites d'une enquête réalisée au mois d'avril 2016 (pièce N° 70 de la salariée), confirme cet état de fait dès lors qu'il dresse un constat sévère sur les conditions de travail au sein du service informatique dont M. [K] était responsable, et préconise des mesures urgentes.
Si la situation particulière de Mme [X] n'y est pas expressément visée comme le relève l'employeur, les éléments de ce rapport la concernent nécessairement dès lors que M. [K] qui se présente comme le manager du service la cite expressément parmi les managers qu'il a sous sa responsabilité et qu'il est entendu en qualité de responsable du service dans lequel les difficultés ont été pointées.
Ainsi est-il établi que l'employeur n'avait pas respecté les obligations que lui assigne l'article L. 4121-1 précité.
Indépendamment de toute reconnaissance d'une maladie professionnelle par les instances compétentes, dont il n'est pas démontré qu'elles aient été saisies à ce stade, il convient de constater que l'absence d'organisation et de moyens adaptés à eu pour conséquences de dégrader les conditions de travail de Mme [X] qui apporte la preuve d'une prescription de somnifères en octobre 2016 (pièce N° 66de la salariée ), et du signalement de ses insomnies auprès de la responsable des ressources humaines de l'entreprise.
Au regard de l'importance du manquement, de l'ampleur et de la durée du préjudice subi tel qu'il résulte de conditions de travail dégradées révélées à compter de février 2016, il y a lieu d'allouer à Mme [X] la somme de 6 000 euros à titre de dommages-intérêts.
II- sur la rupture du contrat de travail,
A- sur le bien fondé du licenciement,
L'insuffisance professionnelle se définit comme la mauvaise exécution des tâches confiées ou des erreurs commises dans leur exécution.
L'employeur doit à l'appui de sa décision justifier de faits précis, objectifs, vérifiables et imputables au salarié qui doit donc avoir eu à sa disposition tous les moyens nécessaires pour accomplir convenablement son travail.
De l'article L 1232-1 il résulte que le licenciement pour cause personnelle doit être motivé par une cause réelle et sérieuse et en vertu de l'
article L. 1235-1 du Code du Travail🏛 le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur forme sa conviction aux vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il estime utile, le doute subsistant alors devant profiter au salarié.
Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement, n'incombe-t-elle pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.
La lettre de licenciement dont les termes fixent les limites du litige rappelle en premier lieu le positionnement de responsable de pôle de Mme [X] au sein de la Direction des services Informatiques de l'entreprise (DSI), et reproche à la salariée une insuffisance professionnelle, tenant notamment , selon les propres développements de l'employeur, (P. 13 de ses conclusions), à trois éléments, à savoir:
- son manque de pilotage de management et de coordination de l'équipe dont elle avait la charge, composée de sept business Analyst et de quatre administrateurs fonctionnels chargé d'assister les utilisateurs dans l'usage des applications,
- absence de mise en place de l'organisation décidée par le directoire en mai 2015 pour faire l'interface entre les équipes métiers et la direction des systèmes d'information,
- absence de solution mise en place concernant l'outil RCM ('Custom Relationship Management', dont il est dit qu'il a pour but d'améliorer la gestion de la relation client).
L'employeur rappelle encore dans cette lettre que toutes ces défaillances sont apparues malgré l'accompagnement important dont la salariée a bénéficié.
Les organigrammes que l'employeur verse aux débats (pièce N° 20), rapprochés des documents de présentation du service informatique du 23 juin 2014 produits par la salariée, établissent que la direction informatique dirigée par M. [U], comprenait une direction des systèmes informatiques de gestion dont le responsable était de 2015 à 2018, M. [K], lui même à la tête de cinq services dont le pôle projet dirigé in fine par Mme [M] et le pôle business Analyst dirigé par Mme [X].
La réalité d'une transformation importante de l'ensemble du service dont dépendait Mme [X] résulte du courrier électronique du 9 février 2016 adressé par le responsable hiérarchique de cette direction des systèmes informatiques de gestion à la directrice des ressources humaines du groupe, dans lequel il est sollicité, sous un objet intitulé 'accompagnement à la transformation du service', pour l'équipe et le rédacteur, un accompagnement dans la transformation qualifiée 'd'importante' que 'subit [leur] service'.
M. [K] souligne que son équipe lui a relayé une montée importante du stress au sein de leurs équipes et 'nous croyons utile d'être accompagné par la RH pour une démarche du changement efficace.
Comment pouvez vous nous aider''.
Par la suite, le CHSCT de l'établissement est intervenu le 25 avril 2016 au sein du service SI Gestion, pour entendre M. [K] en sa qualité de manager du service lequel reconnaît pour tout son service une situation de stress lié à l'ERP, rappelant que 'le service est jeune', et issu de trois autres services 'réunis en janvier 2015" , que 'tout a changé, tout est nouveau' , que la situation est difficile pour lui que 'c'est fatal mais c'est stressant, mais que c'est surtout dur pour les salariés'.
Si le CHSCT a interrogé la responsable d'un des cinq services de la direction des systèmes informatiques de gestion, il n'en résulte pas que les difficultés relevées au sein de l'ensemble de la direction n'existaient et ne se manifestaient que dans ce service, ce d'autant que le diagnostic et l'appel à l'aide qui s'en est suivi n'était pas circonscrit à une seule branche de cette direction.
Il en résulte qu'il existait au sein de la direction informatique de gestion une désorganisation patente liée à une restructuration importante des services, l'imputabilité à Mme [X] des défaillances relevées à son encontre dans l'exécution de ses missions n'étant en conséquence pas établie, le fait qu'elle ait eu à sa disposition les moyens effectifs et opérants pour mener sa tâche à bien ne résultant pas des éléments produits de part et d'autre.
Ainsi sur le manque de pilotage de management et de coordination de l'équipe dont elle avait la charge, il est constant que les mails de M. [K] l'invitant à remédier à l'absence de cohésion au sein de son équipe et formulant quelques recommandations, lui ont été adressés en octobre 2016, moins d'un mois avant l'engagement de la procédure de licenciement, le premier signalement à la salariée d'une difficulté sur ce point avec proposition de réunion pour 'avancer ensemble sur l'organisation de ton service', ne lui ayant été adressé par son responsable que le 6 juillet précédent malgré le constat de l'incertitude régnant 'depuis un certain temps' sur l'organisation et le positionnement des collaborateurs.
De plus si l'une des salariées dépendant de Mme [X] fait référence en juillet 2016, à un climat délétère mis en place et formule dans son courrier électronique (pièce N° 10 de l'employeur), l'hypothèse que ce fait est imputable à cette dernière, il doit être relevé qu'elle renvoie également sur ce point à la responsabilité d'une autre responsable cette fois du pôle projet, le tout confortant le fait que les difficultés se faisaient sentir au sein de toute la direction touchée comme il a été démontré ci-dessus par une grave désorganisation face à une restructuration profonde, stigmatisée ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, concomitamment à la conclusion du contrat de travail à durée déterminée, dès le début de l'année 2016 auprès de la direction des ressources humaines.
Cette analyse est confirmée par les échanges entre la directrice des ressources humaines et le directeur des services informatiques tels qu'ils résultent des courriers électroniques du 30 septembre 2016, dans lesquels il est renvoyé à M. [K] en sa qualité de responsable de la direction des systèmes informatiques de gestion, rien ne permettant d'imputer à Mme [X] la seule responsabilité des dysfonctionnements constatés, ce d'autant qu'elle justifie de critiques certes apparues sur le projet dit 'ERP' de la part d'une des Business analyst de son équipe, dès le mois de novembre 2015 (pièce N°16), mais sans que l'employeur démontre avoir pris les mesures d'adaptation nécessaires dès ce moment.
La salariée démontre aussi la réalité de réunions avec son équipe tenues en 2016, par les compte rendus ou les documents qu'elle a présenté à ces occasions (pièce N° 19 à 24) et d'entretiens annuels en novembre 2016.
De même, la désorganisation caractérisée de la direction informatique des systèmes de gestion ne permet pas d'imputer à Mme [X] l'absence de mise en oeuvre de l'organisation proposée par la salariée en 2015 et validée par la direction s'agissant de la désignation de 'key-users' comme interlocuteurs du pôle, alors au demeurant que l'intéressée rappelle que cette désignation avait été validée par la direction comme devant se faire sur la base du volontariat et qu'elle démontre avoir échangé ou prévu des échanges avec de tels interlocuteurs nommément désignés, et pour lesquels elle a sollicité en octobre 2016 sans réponse effective de sa part, l'aval de M. [K].
Enfin, l'insuffisance professionnelle relative au projet CRM n'est pas davantage caractérisée dès lors que les défaillances stigmatisées s'inscrivent dans la désorganisation et l'absence d'intervention sur ce point de la part de son supérieur hiérarchique avant le mois d'octobre 2016, soit quelques jours avant la mise en oeuvre de la procédure de licenciement suivant un constat d'échec relevé par des membres de l'équipe de la salariée au cours de ce même mois.
Il doit être de plus relevé que Mme [X] démontre avoir été à l'origine d'une demande de formation en management enregistrée par le service des ressources humaines alors qu'elle était encore en contrat de travail à durée déterminée et disait sans être démentie être écartée de ce fait des programmes de formation prévus sur 2016.
De même l'aide apportée par son supérieur hiérarchique pour établir la fiche analytique des fonctions d'administrateur fonctionnel peut être datée du mois de septembre 2016 (échanges de courriers électroniques Pièces 23 et 24 de l'employeur), ce fait contribuant à démontrer qu'avant cette date la salariée n'avait pas à sa disposition, malgré les signalements divers tenant aux difficultés liées à la réorganisation, reçu d'appui pour procéder à cette mission, l'absence de moyens suffisants pour remplir correctement ses missions sur la période antérieure devant également être retenue sur ce point.
A défaut d'insuffisance professionnelle caractérisée, le licenciement de Mme [X] doit être considéré comme dénué de cause réelle et sérieuse, le jugement entrepris devant être infirmé de ce chef.
B- sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
En vertu de l'
article L. 1235-5 du code du travail🏛 dans sa rédaction applicable à l'espèce, Mme [Aa], âgée de 59 ans et d'une ancienneté d'un an et dix mois au moment de la rupture de son contrat de travail, doit être indemnisée au regard du caractère abusif de son licenciement en fonction du préjudice qui en est résulté pour elle.
Sur ce point, elle justifie de son admission à l'allocation d'Aide au Retour à l'Emploi jusqu'en juin 2018.
Ces éléments conduisent à lui allouer de ce chef 35 000 euros à titre de dommages-intérêts.
III- sur les autres demandes,
Les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 ne constituant pas des dépens afférents à l'instance au sens de l'
article 695 du code de procédure civile🏛, seul le juge de l'exécution est compétent pour trancher un litige sur ce point, la demande formée à ce titre devant dès lors être rejetée.
Les sommes à caractère salarial produiront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation en conciliation, et les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêt, en application de l'
article 1343-2 nouveau du code civil🏛.
L'employeur sera tenu de présenter à la salariée un bulletin de paie récapitulatif par année civile, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi conformes aux termes de cette décision dans le délai de deux mois suivant la signification du présent arrêt,
En raison des circonstances de l'espèce, il apparaît équitable d'allouer à Mme [X] une indemnité en réparation de tout ou partie de ses frais irrépétibles dont le montant sera fixé au dispositif.