CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 34027
Union des transports publics urbains et régionaux
Lecture du 02 Février 1983
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Sur le rapport de la 2ème Sous-Section
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 8 mai 1981, présentée pour l'Union des transports publics urbains et régionaux, dont le siège social est 5,7 rue d'Aumale à Paris (9ème), représentée par son président en exercice et tendant à ce que le Conseil d'Etat: - annule le décret en date du 29 octobre 1980, relatif aux modalités d'exploitation des services de transports publics d'intérêt local;
Vu la Constitution du 4 octobre 1958;
Vu la loi du 19 juin 1979;
Vu le décret du 14 novembre 1949 modifié;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;
Vu la loi du 30 décembre 1977.
Considérant que les conclusions de la requête de l'union des transports publics urbains et régionaux doivent être regardées comme tendant seulement à l'annulation d'une part, des articles 5 à 14, et d'autre part, de l'article 31 du décret du 29 octobre 1980;
Sur la légalité des articles 5 à 14:
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 19 juin 1979 relative aux transports publics d'intérêt local: "les services de transports publics d'intérêt local ne peuvent être exploités que dans les conditions suivantes: ... dans le cadre d'un contrat conclu entre l'autorité organisatrice et l'exploitant, comportant une convention et un cahier des charges. Un décret en Conseil d'Etat définit les différentes catégories de contrats et détermine les clauses administratives et financières qu'ils doivent obligatoirement comporter..."; qu'il ressort des termes mêmes de cette disposition que le législateur a donné compétence au gouvernement, agissant par décret en Conseil d'Etat, d'une part, pour énumérer limitativement les différents types de contrats qui peuvent être passés entre les autorités organisatrices de transports publics d'intérêt local et les exploitants de services de transports publics, d'autre part, pour rendre obligatoire l'insertion dans ces contrats des stipulations minimales qu'il jugerait nécessaires à la sauvegarde des objectifs poursuivis par le législateur, compte-tenu du type de contrat choisi par les parties;
Considérant qu'il suit de là que, par les articles 5 à 14 du décret du 29 octobre 1980, le gouvernement a pu légalement édicter que la gestion des services de transports publics d'intérêt local exploités dans le cadre d'un contrat ne pourrait être assurée que selon l'une les quatre modalités qu'il a énumérées et définies; qu'il a pu, aussi, par les mêmes dispositions, rendre obligatoire l'insertion dans ces contrats de clauses régissant la durée, le renouvellement et la révision de ces contrats selon la part que prend l'exploitant au financement des investissements, les obligations financières incombant à l'exploitant lorsqu'il participe à des investissements et celles qui s'appliquent aux autorités organisatrices quand l'exécution du service, assuré dans le cadre d'un contrat de gestion à prix forfaitaire ou d'un contrat de gérance, nécessite l'exécution d'une infrastructure de transport collectif; qu'il a pu, enfin, obliger les parties à insérer dans les contrats une clause subordonnant l'exécution de nouveaux engagements financiers non conformes aux obligations résultant du contrat, pris par l'autorité organisatrice, à la conclusion d'une nouvelle convention;
Considérant que ces diverses exigences n'apportent pas à la libre administration des collectivités locales et à la liberté contractuelle des limitations excédant les limites de l'habilitation conférée au gouvernement par l'article 4 de ladite loi; que dès lors le moyen tiré par l'union requérante de ce que les articles 5 à 14 du décret du 29 octobre 1980 seraient contraires aux articles 34 et 72 de la Constitution du 4 octobre 1958, qui tend nécessairement à faire apprécier par le juge administratif la conformité à la Constitution de l'article 4 de la loi du 19 juin 1979, n'est pas au nombre de ceux qui peuvent être utilement invoqués devant le juge administratif;
Considérant, en second lieu, que les articles 9 et 10 du décret attaqué ont pour objet d'obliger les parties contractantes, d'une part, à prévoir, dans les contrats de gestion aux risques et périls et les contrats de gestion avec garantie de recettes, le principe et les modalités de la contribution financière due à l'exploitant par l'autorité organisatrice en compensation des réductions tarifaires que cette dernière aurait consenties à certaines catégories d'usagers, d'autre part, à insérer dans les contrats de gestion avec garantie de recettes une clause relative au montant de la contribution de l'autorité organisatrice dans le cas où le montant des produits d'exploitation est inférieur à celui de la recette minimale garantie; que ces dispositions ne sauraient avoir pour effet de limiter à l'avance le droit éventuel à indemnité de l'exploitant au cas où l'autorité organisatrice lui imposerait, en cours de contrat, des sujétions imprévisibles lors de la signature de ce contrat; que, par suite, le moyen tiré de la violation du principe selon lequel le co-contractant a droit au maintien de l'équilibre financier du contrat manque en fait;
Considérant enfin qu'en disposant, dans l'article 14 alinéa 1, que l'autorité organisatrice peut, en cours de contrat, apporter unilatéralement des modifications à la consistance des services et à leurs modalités d'exploitation, que l'usage de cette prérogative peut entraîner une révision des clauses financières du contrat, et enfin que les modifications ainsi apportées ne doivent pas être incompatibles avec le mode de gestion choisi, les auteurs du décret attaqué se sont bornés à faire application des règles générales applicables aux contrats administratifs;
Sur la légalité de l'article 31:
Considérant qu'il résulte d'une part des dispositions combinées de l'article 1er, de l'article 2 alinéa 1, et de l'article 4 dernier alinéa de la loi du 19 juin 1979 que les communes et les départements, groupés ou non, ainsi que leurs groupements, peuvent avoir la qualité d'"autorités organisatrices" de services de transport public d'intérêt local, et que le territoire d'une commune peut être desservi par des services relevant de plusieurs "autorités organisatrices" différebtes; que, d'autre part l'article 1er renvoie à un décret le soin de fixer les conditions dans lesquelles pourront être créés des "périmètres des transports urbains" à l'intérieur desquels tous les services réguliers de transport public de voyageurs ont la qualité de "services de transport public d'intérêt local" et ne peuvent en conséquence être exploités, en vertu de l'article 4 de la loi, que par une régie instituée par une autorité organisatrice ou en vertu d'un contrat passé entre elle et l'exploitant; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que si la création d'un "périmètre des transports urbains" implique nécessairement la désignation d'une "autorité organisatrice" compétente pour tout le territoire couvert par le secteur, cette création n'interdit pas aux collectivités publiques incluses dans le périmètre ni à leur groupement de jouer le rôle d'autorités organisatrices pour les services qui les concernent plus particulièrement; qu'il appartenait au décret en Conseil d'Etat, chargé par l'article 13 de la loi de fixer, en tant que de besoin, les modalités d'application de celle-ci, de prévoir les dispositions nécessaires pour harmoniser l'action de l'autorité organisatrice coordinatrice du périmètre et celle des autorités organisatrices particulières comprises à l'intérieur de celui-ci; qu'en disposant qu'à l'intérieur d'un périmètre des transports urbains, une commune ou un groupement de communes autres que l'autorité organisatrice du secteur peuvent exploiter des services, sous réserve de conclure avec celle-ci une convention, l'article 31 du décret attaqué, loin de violer les dispositions de la loi du 19 juin 1979, en permet au contraire l'application.
DECIDE
ARTICLE 1er - La requête de l'Union des transports publics urbains et régionaux est rejetée.