CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 33816
Ministre du Budget
contre
Société anonyme xxxxx
Lecture du 19 Octobre 1983
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Sur le rapport de la 8ème Sous-Section
Vu le recours du ministre du budget, enregistré le 30 avril 1981 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil:
1°) à titre principal, d'une part, annule le jugement du 3 février 1981, par lequel le tribunal admanistratif de Dijon a déchargé la société anonyme xxxxx du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1974, d'autre part, remette intégralement à la charge de la société anonyme l'imposition contestée;
2°) à titre subsidiaire, d'une part, réforme le jugement du 3 février 1981, en tant que par ledit jugement le tribunal administratif de Dijon a accordé un dégrèvement correspondant à un redressement non contesté, d'autre part, remette à la charge de la société anonyme la somme de 3 990 F;
Vu le code général des impôts;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;
Vu la loi du du 30 décembre 1977.
Considérant que, pour demander l'annulation du jugement, en date du 3 février 1981, par lequel le tribunal administratif de Dijon a accordé à la société anonyme xxxxx décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1974, le ministre du budget soutient que c'est à tort que les premiers juges ont décidé que la "xxxxx" - laquelle détenait 37,5 % des parts d'un groupement d'intérêt économique, qui possédait lui-même 49 % du capital de la "société anonyme xxxxx xxxxx" - devait être regardée, au sens de l'article 145-1 du code général des impôts, comme détenant, en proportion de sa participation au groupement d'intérêt économique, une part du capital de la "xxxxx xxxxx" et devait, par suite, bénéficier du régime particulier d'imposition applicable aux produits des participations détenues par des sociétés mères;
Considérant qu'aux termes de l'article 145 du code général des impôts: "1. Le régime fiscal des sociétés mères, tel qu'il est défini aux articles 146 et 216, est applicable aux sociétés françaises par actions ou à responsabilité limitée qui détiennent, dans le capital d'autres sociétés revêtant l'une de ces formes, des participations..." qu'aux termes de l'article 216 de ce code: "I. Les produits nets des participations, ouvrant droit à l'application du régime des sociétés mères et visées à l'article 145, touchés au cours d'un exercice par une société mère, sont retranchés du bénéfice net total de celle-ci, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges"; et qu'aux termes de l'article 239 quater du même code: "I. Les groupements d'intérêt économique constitués et fonctionnant dans les conditions prévues par l'ordonnance n° 67-821 du 23 septembre 1967 n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 206-1, mais chacun de leurs membres est personnellement passible, pour la part des bénéfices correspondant à ses droits dans le groupement, soit de l'impôt sur le revenu, soit de l'impôt sur les sociétés s'il s'agit de personnes morales relevant de cet impôt...";
Considérant, d'une part, que les groupements d'intérêt économique sont, en vertu de l'ordonnance du 23 septembre 1967 qui les a institués, dotés d'une personnalité morale distincte de celle de leurs membres; qu'ainsi ils accomplissent, conformément à leur objet, dans les limites fixées par leurs statuts, et distinctement de leurs membres, des actes juridiques qui leur sont propres; que lorsque ces actes comportent la prise de participation dans des sociétés, les personnes morales qui appartiennent à un groupement d'intérêt économique ne sauraient, en se fondant sur les dispositions précitées de l'article 239 quater I du code général des impôts, qui se bornent à prescrire l'imposition entre leurs mains et à raison de leurs droits dans le groupement des bénéfices réalisés par celui-ci, soutenir que, du fait des participations acquises par le groupement d'intérêt économique dans certaines sociétés, celles-ci doivent être regardées comme leurs filiales; que, par suite, une société anonyme ou une société à responsabilité limitée, membre d'un groupement d'intérêt économique, ne peut se prévaloir des dispositions précitées des articles 145-1 et 216-I du code général des impôts pour prétendre, en invoquant la qualité de société mère qui ne saurait lui être reconnue, que soient déduits de son bénéfice imposable, à raison de ses droits dans le groupement d'intérêt économique, les produits des participations que le groupement d'intérêt économique détient dans le capital d'autres sociétés;
Considérant, d'autre part, que les groupements d'intérêt économique n'étant pas au nombre des personnes morales mentionnées à l'article 145 précité du code général des impôts, les bénéfices provenant des participations qu'ils ont éventuellement prises dans certaines sociétés ne sont pas passibles du régime fiscal applicable, en vertu dudit article, aux sociétés qu'il énumère; que, par suite, la détermination de la part desdits bénéfices revenant à chaque société membre d'un groupement d'intérêt économique, au titre des droits qu'elle-même détient dans celui-ci, échappe en tout état de cause, à l'application du régime fiscal susmentionné;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre du budget est fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a accordé à la "xxxxx xxxxx" décharge du complément d'impôt contesté.
DECIDE
Article 1er: Le jugement du tribunal administratif de Dijon, en date du 3 février 1981, est annulé.
Article 2: La cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle la "xxxxx xxxxx" a été assujettie, au titre de l'année 1974, est remise intégralement à sa charge.