CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 25057
Ministre de l'Environnement et du Cadre de Vie
contre
M. Germond
Lecture du 16 Avril 1982
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Sur le rapport de la 10ème Sous-Section
Vu le recours du ministre de l'Environnement et du Cadre de Vie, enregistré au Secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 30 juin 1980 et tendant à ce que le Conseil d'Etat: 1°) annule le jugement du 4 mars 1980 en tant que par ce dernier le tribunal administratif de Nice a annulé à la demande de M. Germond l'arrêté du maire de Saint-Julien-de-Montagné du 18 novembre 1977 ordonnant à M. Germond d'interrompre ses travaux de construction; 2°) rejette le surplus de la demande présentée par M. Germond au tribunal administratif de Nice;
Vu le décret du 28 mai 1970;
Vu le code de l'urbanisme;
Vu le code des tribunaux administratifs;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;
Vu la loi du 30 décembre 1977.
Considérant que l'autorité de la chose jugée au pénal ne s'impose aux autorités et juridictions administratives qu'en ce qui concerne les constatations de fait que les juges répressifs ont retenues et qui sont le support nécessaire de leurs décisions; que, toutefois, il en va autrement lorsque la légalité d'une décision administrative est subordonnée à la condition que les faits qui servent de fondement à cette décision constituent une infraction pénale; que, dans cette hypothèse, l'autorité de la chose jugée s'étend exceptionnellement à la qualification juridique donnée aux faits par le juge pénal;
Considérant que l'arrêté du maire de Saint-Julien-de-Montagné en date du 18 novembre 1977 ordonnant à M. Germond d'interrompre les travaux de construction d'un immeuble sans permis de construire est intervenu en application des dispositions de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme aux termes duquel "Dès qu'un procès-verbal relevant une des infractions à l'article L. 480-4 a été dressé le maire peut également, si l'autorité judiciaire ne s'est pas encore prononcée, ordonner par arrêté motivé l'interruption des travaux. Copie de cet arrêté est transmise sans délai au ministère public. L'autorité judiciaire peut à tout moment... se prononcer sur la main levée ou le maintien des mesures prises pour assurer l'interruption des travaux. En tout état de cause, l'arrêté du maire cesse d'avoir effet en cas de décision de non lieu ou de relaxe"; qu'il résulte de ces dispositions que la légalité de l'arrêté du maire de Saint-Julien-de-Montagné était subordonnée à la condition que l'exécution des travaux dont l'interruption était ordonnée ait été constitutive d'une infraction pénale;
Considérant que, par un arrêt du 15 novembre 1976, passé en force de chose jugée par suite de l'absence de pourvoi en cassation, la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence a prononcé la relaxe des fins de poursuite, dirigées contre M. Germond au motif que faute de notification d'une décision expresse avant le 31 octobre 1974, M. Germond était à cette date titulaire d'un permis de construire et qu'ainsi les éléments de l'infraction à la législation du permis de construire pour laquelle il était poursuivi n'étaient pas réunis; qu'ainsi l'arrêté du maire en date du 18 novembre 1977 a méconnu l'autorité de la chose jugée qui s'attache à la décision de la Cour d'Appel et est dépourvu de base légale; que, dès lors, le ministre de l'Environnement et du Cadre de Vie n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du maire de Saint-Julien-de-Montagné.
DECIDE
ARTICLE 1er: Le recours du Ministre de l'Environnement et du cadre de Vie est rejeté.