CE 3/8 SSR, 29-03-2000, n° 199545, M. ISAS
A9417AGU
Référence
CONSEIL D'ETAT
Statuant au contentieux
Cette décision sera mentionnée dans les tables du Recueil LEBON
N° 199545
M. ISAS
M. Stefanini
Rapporteur
M. Stahl
Commissaire du Gouvernement
Séance du 8 mars 2000
Lecture du 29 mars 2000
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil dEtat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 3ème et 8ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 3ème sous-section
de la Section du contentieux
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil dEtat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que c'est à tort que, pour rejeter comme irrecevables les conclusions de M. ISAS tendant à l'annulation de la décision contenue dans la lettre en date du 2 mars 1995 du maire de Narbonne, le tribunal administratif de Montpellier a jugé que cette lettre ne pouvait, dans les termes où elle était rédigée, être regardée comme comportant une décision administrative faisant grief et susceptible en conséquence de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; que le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 11 octobre 1995 doit, dès lors, être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. ISAS devant le tribunal administratif de Montpellier ;
Considérant que les autorisations d'occupation du domaine public sont accordées à titre précaire et révocable ; que, par suite, la circonstance, à la supposer établie, que M. ISAS était titulaire, avant l'intervention de la décision attaquée, d'une autorisation d'occupation de la partie du domaine public communal correspondant à la terrasse qui jouxte l'immeuble "Le Miramar" dont il est propriétaire, est sans influence sur la légalité de la décision par laquelle le maire de Narbonne lui a demandé de démolir ses installations et de restituer au domaine public son état initial ; que, dès lors, le moyen tiré par le requérant de ce qu'il aurait été titulaire d'une autorisation d'occupation du domaine public communal ne peut qu'être écarté ;
Considérant que les décisions relatives au domaine public ne sont pas régies par le code de l'urbanisme ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 110 de ce code concernant l'harmonisation des actions des collectivités publiques en matière d'utilisation de l'espace est en tout état de cause inopérant à l'encontre d'une décision prise pour assurer la protection du domaine public ;
Considérant que si M. ISAS soutient que la décision contenue dans la lettre du 2 mars 1995 du maire du Narbonne conduit à une discrimination entre lui-même et d'autres propriétaires occupant le domaine public communal dans les mêmes conditions que lui, de telles circonstances, à les supposer établies, sont sans influence sur la légalité de la décision attaquée ;
Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. ISAS n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision contenue dans la lettre en date du 2 mars 1995 par laquelle le maire de Narbonne l'a mis en demeure de démolir des installations édifiées sur le domaine public communal ;
Sur l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner M. ISAS à payer à la commune de Narbonne la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que les mêmes dispositions font obstacle à ce que la commune de Narbonne, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à M. ISAS la somme qu'il demande au titre des frais de même nature qu'il a exposés ;
Article 1er : L'arrêt en date du 16 juillet 1998 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé.
Article 2 : Le jugement en date du 11 octobre 1995 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.
Article 3 : La demande présentée par M. ISAS devant le tribunal administratif de Montpellier et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Narbonne tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Louis ISAS, à la commune de Narbonne et au ministre de l'intérieur.
Loi, 91-647, 10-07-1991 Ordonnance, 45-1708, 31-07-1945 Décret, 53-934, 30-09-1953 Loi, 87-1127, 31-12-1987 Dossier soumis aux juges du fond Autorisation délivrée Mise en demeure Partie du domaine public Domaine public d'une commune Intérêt d'une bonne administration d'une justice Démolition des installations Détournement de pouvoir