CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 17218
M. xxxxx
Lecture du 16 Avril 1982
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Sur le rapport de la 9ème Sous-Section
Vu la requête, présentée par M. xxxxx demeurant à xxxxx, enregistrée au Secrétairat du Contentieux du Conseil d'Etat le 7 avril 1979, et tendant à ce que le Conseil d'Etat: 1°) annule le jugement du 24 janvier 1979, par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en réduction des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1970 à 1973, de la majoration exceptionnelle qui lui a été assignée ainsi que des pénalités correspondantes au titre de 1973, dans les rôles de la commune de xxxxx 2°) lui accorde la réduction, ou la décharge en ce qui concerne les pénalités, des impositions contestées;
Vu le code général des impôts;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945 et le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977.
Considérant que M. xxxxx, qui exploite une entreprise individuelle de fabrication et de négoce d'aliments du bétail, demande la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1970 à 1973, et de la cotisation supplémentaire de majoration exceptionnelle qui lui a été assignée au titre de l'année 1973, ainsi que des pénalités correspondantes, lesdites impositions découlant des redressements apportés, à la suite d'une vérification de comptabilité, aux bénéfices des exercices clos les 31 juillet de chacune des années 1970 à 1973;
Sur la régularité de la procédure d'imposition:
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le moyen tiré par M. xxxxx de ce qu'il aurait été privé, au cours de la vérification de comptabilité, des garanties prévues aux article 1649 septies E et 1649 septies F du code général des impôts a été soulevé, pour la première fois, dans un mémoire complémentaire enregistré au tribunal administratif de Rennes le 21 février 1978, hors du délai du recours contentieux; que ce moyen, fondé sur une cause juridique distincte de celles sur lesquelles reposait la demande introductive d'instance, constituait une demande nouvelle, présentée tardivement et, par suite, non recevable;
Sur le bien fondé des impositions:
En ce qui concerne la charge de la preuve:
Considérant que M. xxxxx conteste la réintégration dans ses bases d'imposition d'une créance comptabilisée en perte au titre de l'exercice clos le 31 juillet 1971, de provisions pour créances douteuses constituées au titre des exercices clos les 31 juillet 1970, 1972 et 1973, ainsi que d'amortissements et de frais de représentation inscrits en charge de l'exercice clos le 31 juillet 1973;
Considérant que, quelle qu'ait été la procédure d'imposition suivie à l'encontre du contribuable selon les années d'imposition en litige, il lui incombe, dans tous les cas, en application des dispositions du 2 de l'article 38 et des 1°, 2° et 5° de l'article 39.1 du code général des impôts, de justifier de la perte de créance alléguée, des amortissements pratiqués, des provisions constituées, de la réalité des dépenses portées en frais généraux;
En ce qui concerne la déduction de la perte:
Considérant que M. xxxxx n'a pu présenter à l'administration ou produire devant le juge des copies de correspondances réclamant le paiement de la créance de 10 000F qu'il prétend avoir détenu sur M. xxxxx, ni les réponses de ce dernier; qu'au cours des années 1967 à 1971, il n'a pas poursuivi son débiteur; qu'il n'a pas produit sa créance au règlement judiciaire de M. xxxxx;
Que, dans ces conditions, M. xxxxx ne justifiant pas d'une perte qu'il aurait subi au titre de cette créance, c'est à bon droit que la réintégration correspondante a été opérée dans les résultats de l'exercice sur lequel avait été imputée la prétendue perte;
En ce qui concerne les provisions pour créances douteuses:
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. xxxxx, contrairement aux dires de l'administration, justifie du caractère douteux de la créance xxxxx, qui a donné lieu à la constitution de provisions au titre des exercices clos les 31 juillet 1970, 1972 et 1973, de la créance, qui a donné lieu à la constitution de provisions au titre des exercices clos les 31 juillet 1972 et 1973, des créances et xxxxx, qui ont donné lieu à la constitution de provisions au titre de l'exercice clos le 31 juillet 1973; que c'est donc à tort que ces provisions ont fait l'objet de réintégrations; qu'en revanche, le requérant ne justifie pas du caractère douteux des créances xxxxx, qui ont donné lieu à la constitution de provisions au titre des exercices clos les 31 juillet 1972 et 1973, et de la créance xxxxx, qui a donné lieu à la constitution d'une provision au titre de l'exercice clos le 31 juillet 1972; que, par suite, c'est à bon droit que ces provisions ont été réintégré dans les bases d'imposition de l'entreprise de M. xxxxx, totalement en ce qui concerne la première et partiellement en ce qui concerne la seconde;
En ce qui concerne les amortissements:
Considérant qu'en ramenant de 10%, chiffre retenu par M. xxxxx au titre de l'exercice clos le 31 juillet 1973, à 5% le taux de l'amortissement de hangars, l'administration s'est, conformément aux dispositions du 2° du 1 de l'article 39 du code, référée au taux généralement admis pour ce genre de constructions d'après les usages de la nature de l'exploitation; que le requérant, en se bornant à affirmer que ces hangars, construits en tôles et en fibrociment, subiraient une corrosion accélérée du fait qu'ils abritent des récoltes de sola, ne justifie pas de ce que le taux usuel de 5% serait insuffisant;
En ce qui concerne la déduction de frais généraux:
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. xxxxx n'a pu apporter aucune justification du montant des frais de réception et de représentation qu'il a comptabilisés de manière globale et forfaitaire au titre de l'exercice clos le 31 juillet 1973; qu'il n'est dès lors, pas fondé à demander la déduction de tels frais;
Considérant, il est vrai, que, sur le fondement des dispositions de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, le requérant invoque une réponse ministérielle à un parlementaire en date du 8 juillet 1954; que, toutefois, les frais en litige ayant été comptabilisés de manière globale et forfaitaire et n'étant assortis d'aucun début de justification les conditions posées par cette réponse ministérielle à une éventuelle déduction de frais de cette nature ne sont pas réunies
Sur les pénalités:
Considérant que l'administration ne fait état, pour chacune des années d'imposition, d'aucune circonstance particulière impliquant que la bonne foi du contribuable ne pourrait pas être admise; que, dès lors, les pénalités prévues par l'article 1729 du code général des impôts ne peuvent pas être appliquées; qu'il y a cependant lieu d'y substituer des intérêts de retard;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. xxxxx est fondé à demander, dans les limites indiquées plus haut, une réduction de ses bases d'imposition, l'application des seuls intérêts de retard aux droits maintenus à sa charge, ainsi que la réformation en ce sens du jugement attaqué.
DECIDE
ARTICLE 1er: Les bases d'imposition de M. xxxxx à l'impôt sur le revenu au titre des années 1970, 1972 et 1973 et à la majoration exceptionnelle au titre de l'année 1973 seront calculées sous déduction de provisions d'un montant de 39 000 F en ce qui concerne l'exercice clos le 31 juillet 1970, 89 496 F en ce qui concerne l'exercice clos le 31 juillet 1972 et 136 186 F en ce qui concerne l'exercice clos le 31 juillet 1973.
ARTICLE 2: Il est accordé à M. xxxxx décharge de la différence entre le montant des impositions auxquelles il a été assujetti et celui qui résulte de l'article 1er ci-dessus.
ARTICLE 3: Il est accordé à M. xxxxx décharge de la différence entre les pénalités appliquées sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts et les intérêts de retard encourus compte tenu des droits maintenus à la charge du contribuable en vertu de l'article précédent.
ARTICLE 4: Le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 24 janvier 1979 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
ARTICLE 5: Le surplus des conclusions de la requête de M. xxxxx est rejeté.