CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 16130
Société à responsabilité limitée "TRANCHANT Frères
Lecture du 24 Avril 1981
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Sur le rapport de la 7ème Sous-Section
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 1er février 1979, présentée par la société TRANCHANT Frères, société à responsabilité limitée dont le siège est à Blesmes, Chateau-Thierry (Aisne), représentée par son gérant en exercice et tendant à ce que le Conseil d'Etat: - 1°) annule le jugement du 19 décembre 1978 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté son opposition à contrainte formée à l'occasion des actes de poursuites exercées contre elle par le percepteur de Chateau-Thierry pour avoir paiement d'impôts sur les sociétés au titre des années 1971 à 1973 et d'impôts sur le revenu au titre de 1972 et 1973; - 2°) annule la contrainte et les actes de poursuites qui en procèdent;
Vu le Code général des impôts;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;
Vu la loi du 30 décembre 1977.
Considérant que le percepteur de Chateau-Thierry a dressé le 16 février 1976 à la société à responsabilité limitée "TRANCHANT Frères" un commandement pour obtenir paiement de cotisations d'impôt sur les sociétés au titre des années 1971 à 1973 et d'impôt sur le revenu au titre des années 1972 et 1973, auxquelles ladite société avait été assujettie; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté l'opposition formée par la société contre le commandement;
Considérant qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que celui-ci a été rendu en séance non publique; qu'en vertu des dispositions combinées des articles 1930 et 1945-1 du Code général des impôts, les oppositions à contrainte ne sont pas au nombre des litiges qui doivent être jugés en séance non publique; qu'ainsi ce jugement doit être annulé;
Considérant que l'affaire est en état; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par la société requérante devant le tribunal adminis tratif;
Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que la société "TRANCHANT Frères", invitée à deux reprises à constituer des "garanties propres à assurer le recouvrement des impositions contestées" de la nature de celles qui sont énumérées à l'article 1952.1 du code général des impôts, n'a pas donné suite à cette invitation; qu'ainsi, la créance du Trésor étant exigible, l'administration était en droit d'en poursuivre le recouvrement; que sont à cet égard inopérantes la circonstance, invoquée par la société, qu'elle n'aurait pas refusé de constituer des garanties, alors qu'il lui appartenait d'en proposer, ou les recommandations, dépourvues de valeur réglementaire, adressées aux percepteurs par la direction de la comptabilité publique en matière de recouvrement des impôts et dont les redevables n'ont aucun droit à se prévaloir;
Considérant, d'autre part, que les moyens tirés des irrégularités dont seraient entachés le commandement ou, de manière générale, le choix des actes de poursuites, relève de la procédure d'opposition à poursuites qui, en application du troisième alinéa de l'article 1846 du Code général des impôts, est de la compétence des tribunaux judiciaires, lesquels ont d'ailleurs été saisis; que la demande doit, dès lors, sur ce point, être rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.
DECIDE
Article 1er. - Le jugement en date du 19 décembre 1978 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.
Article 2. - La demande présentée par la société à responsabilité limitée "TRANCHANT Frères" devant le tribunal administratif d'Amiens et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.