CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 158449
ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU SITE ET DE L'ENVIRONNEMENT DE VIGOULETAUZIL (ASSEV)
Lecture du 12 Mai 1997
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, 8ème et 9ème sous-sections réunies),
Sur le rapport de la 8ème sous-section, de la Section du Contentieux,
Vu l'ordonnance du 5 mai 1994, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 10 mai 1994, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée à cette cour par l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU SITE ET DE L'ENVIRONNEMENT DE VIGOULET-AUZIL dont le siège est 7, allée Camille Soula, à Vigoulet-Auzil (31320) ;
Vu la demande enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, le 30 mars 1994, présentée par l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU SITE ET DE L'ENVIRONNEMENT DE VIGOULET-AUZIL ; celle-ci demande au juge administratif d'appel : 1°) d'annuler le jugement du 1er décembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la délibération du 11 décembre 1990 du conseil municipal de Vigoulet-Auzil (Haute-Garonne) approuvant la modification du plan d'occupation des sols de la commune, d'autre part, de l'arrêté du 28 décembre 1990 du maire de la commune accordant aux laboratoires Fabre le permis de construire un immeuble à usage de laboratoire, avenue Camille Soula ; 2°) d'annuler cette délibération et cet arrêté ; . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de Mlle Mignon, Auditeur, - les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 11 décembre 1990 du conseil municipal de Vigoulet-Auzil (Haute-Garonne), approuvant une modification du plan d'occupation des sols de la commune :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en adoptant cette délibération, le conseil municipal de Vigoulet-Auzil a entendu faciliter la réalisation, sur un même site, d'un projet d'extension des installations du laboratoire pharmaceutique Fabre, déjà implanté en zone urbaine (U) et de permettre à la commune de renforcer la capacité des équipements collectifs, notamment, par la création d'un réseau d'assainissement destiné à la collecte et au traitement des effluents en provenance de ces nouvelles installations ; que le conseil a décidé, à ces fins, de créer à l'intérieur de la zone U, un nouveau secteur Uca, réservé à des constructions à usage d'activités tertiaires, dans lequel, pour ces constructions, le dépassement du coefficient d'occupation des sols pourra, dans la limite d'un coefficient de 0,45, s'appliquer à des unités foncières d'une superficie minimale de 10 000 m et donnera lieu, de la part du constructeur, au versement d'une participation, dans les conditions prévues par les articles R. 332-1 et suivants du code de l'urbanisme ; que la même délibération a prévu, de manière à favoriser le regroupement des constructions, que, si un même propriétaire dispose à l'intérieur du nouveau secteur Uca de parcelles non contigues, il pourra être autorisé à transférer l'ensemble des possibilités de constructions sur l'une d'elles ; Considérant, en premier lieu, que, si l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU SITE ET DE L'ENVIRONNEMENT DE VIGOULET-AUZIL (ASSEV) soutient que l'enquête publique organisée à l'occasion de la modification ci-dessus décrite duplan d'occupation des sols de la commune de Vigoulet-Auzil a été insuffisante et que les conclusions de cette enquête n'auraient pas été rigoureusement suivies, elle n'apporte aucune précision à l'appui de ces allégations ; que celles-ci ne peuvent, par suite, qu'être écartées ; Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 123-4 du code de l'urbanisme : "Un plan d'occupation des sols approuvé peut également être modifié par délibération du conseil municipal après enquête publique, à la condition qu'il ne soit pas porté atteinte à son économie générale et que la modification ne concerne pas les espaces boisés classés ou ne comporte pas de graves risques de nuisance" ;
Considérant que la modification apportée au plan d'occupation des sols, par la création d'un secteur Uca, d'une superficie de 31 000 m , inférieur à moins de 1 % de la superficie totale du territoire de la commune, ne porte pas atteinte à l'économie générale de ce plan, ne concerne aucun espace boisé classé et ne comporte aucun risque grave de nuisance ; que le moyen tiré de ce que cette modification ne pouvait être adoptée selon la procédure prévue par le deuxième alinéa précité de l'article L. 123-4 du code de l'urbanisme, doit, par suite, être écarté ; Considérant, en troisième lieu, que l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU SITE ET DE L'ENVIRONNEMENT DE VIGOULET-AUZIL ne peut utilement se prévaloir, à l'appui de conclusions dirigées contre une délibération portant modification du plan d'occupation des sols, des dispositions d'un règlement de lotissement antérieur, qui s'appliquerait sur une partie de la zone concernée ; Considérant, en quatrième lieu, qu'en prévoyant, dans les conditions ci-dessus mentionnés, la possibilité d'un dépassement de coefficient d'occupation des sols, dans la limite de 0,45, alors que, dans les autres secteurs de la zone U, le coefficient d'occupation des sols est compris entre 0,07 et 0,15, le conseil municipal de Vigoulet-Auzil a entendu favoriser le regroupement, sur un même site, de l'ensemble des constructions à usage d'activités tertiaires qui seraient implantées en zone urbaine ; qu'un tel choix ne procède d'aucune erreur manifeste d'appréciation, alors même qu'il est soutenu que de telles activités pouvaient être accueilles en d'autres lieux, notamment dans une zone voisine située sur le territoire de la commune de Labege, dont le développement est souhaité par le syndicat intercommunal dont fait partie la commune de Vigoulet-Auzil ; Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 332-1 du code de l'urbanisme : "Lorsque l'application des règles mentionnées aux 2°) et 3°) de l'article L. 123-1 permet la réalisation d'une construction qui dépasse la norme résultant de l'application du coefficient d'occupation des sols ou impose le respect de servitudes ou obligations impliquant un dépassement de cette norme, le constructeur est tenu de verser une participation. Toutefois, la participation n'est pas due : ... b) Dans les zones urbaines, lorsque le dépassement est justifié par des prescriptions d'urbanisme ou d'activité et que, avec l'accord de l'autorité administrative, les propriétaires de terrains voisins acceptent de transférer une quantité de leurs possibilités de construction équivalente au dépassement en cause ;..." ;
Considérant que ces dispositions ont pour seul objet de déterminer les cas et conditions dans lesquels une participation financière peut être demandée aux constructeurs en cas de dépassement du coefficient d'occupation des sols ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce qu'y contreviendraient les dispositions modificatives, déjà évoquées, du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Vigoulet-Auzil qui permettent à un même propriétaire, disposant à l'intérieur de la zone U ca, de parcelles non contigus, de transférer l'ensemble despossibilités de constructions sur l'une de ces parcelles, est inopérant ; Considérant, enfin, que la délibération attaquée, qui, ainsi qu'il est dit, a été adoptée en vue de favoriser l'extension des installations d'un laboratoire pharmaceutique déjà implanté dans la commune, répond à un but d'intérêt communal, de caractère économique et social, et n'est donc entaché d'aucun détournement de pouvoir ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 décembre 1990 du maire de Vigoulet-Auzil, accordant un permis de construire à la Société des Laboratoires Fabre : Considérant, en premier lieu, ainsi qu'il vient d'être dit, que les moyens invoqués à l'encontre de la délibération du conseil municipal de Vigoulet-Auzil du 11 décembre 1990, approuvant une modification du plan d'occupation des sols de cette commune, doivent être écartés ; que le moyen tiré à l'encontre de l'arrêté du 28 décembre 1990 du maire de Vigoulet-Auzil accordant un permis de construire à la Société des Laboratoires Fabre, de ce qu'il devrait être annulé par voie de conséquence de l'annulation de cette délibération, ne peut qu'être rejeté ; Considérant, en deuxième lieu, que le permis de construire contesté a été délivré à la société des Laboratoires Fabre, après l'entrée en vigueur de la même délibération ; que le fait que les avis rendus sur la demande de permis de construire par les directeurs départementaux de l'agriculture et de la forêt et des affaires sanitaires et sociales ont été émis avant l'adoption de cette délibération est sans influence sur la légalité de l'arrêté attaqué du 28 novembre 1990 du maire de Vigoulet-Auzil, dès lors, en tout état de cause, qu'ils n'avaient pas pour objet d'apprécier la légalité du permis de construire sollicité au regard des dispositions modifiées du plan d'occupation des sols ; Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dispose : "Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique." ; que, selon l'article R. 111-4 du même code : "Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagé, et, notamment, si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. Il peut également être refusé si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celles des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit âtre appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic..." ;
Considérant que l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU SITE ET DE L'ENVIRONNEMENT DE VIGOULET-AUZIL soutient que l'extension des installations du Laboratoire Fabre est de nature à induire une circulation accrue et créer des risques importants pour les personnes habitant à proximité ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire ait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne refusant pas d'accorder le permis sollicité sur le fondement des dispositions précitées, dès lors que le terrain d'assiette de la construction projetée est desservi par une voie d'une largeur de plus de 10 mètres ; Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 421-5 du code de l'urbanisme : "Lorsque, compte tenu de la destination de la construction projetée, des travauxportant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte de ladite construction, le permis de construire ne peut être accordé si l'autorité qui le délivre n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public lesdits travaux doivent être exécutés" ;
Considérant que le moyen tiré de ce que l'article 2 de l'arrêté attaqué du 28 décembre 1990, précisant que "en vue de connaître les conditions d'exécution et de financement des branchements aux réseaux existants (pluvial, eau potable, énergie électrique), le pétitionnaire devra se mettre en rapport avec les services compétents intéressés, avant tout commencement de travaux", serait contraire aux dispositions précitées de l'article L. 421-5 du code de l'urbanisme, est inopérant, dès lors que ledit article 2 ne concerne pas des travaux portant sur des réseaux publics ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU SITE ET DE L'ENVIRONNEMENT DE VIGOULET-AUZIL (ASSEV) n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la commune de Vigoulet-Auzil, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU SITE ET DE L'ENVIRONNEMENT DE VIGOULET-AUZIL la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner cette association à payer à la commune de Vigoulet-Auzil une somme de 1 000 F au titre des frais qu'elle a exposés, non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU SITE ET DE L'ENVIRONNEMENT DE VIGOULET-AUZIL est rejetée.
Article 2 : L'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU SITE ET DE L'ENVIRONNEMENT DE VIGOULET-AUZIL paiera à la commune de Vigoulet-Auzil une somme de 1 000 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU SITE ET DE L'ENVIRONNEMENT DE VIGOULET-AUZIL, à la commune de VigouletAuzil (Haute-Garonne) et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme.