CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 14675
Communes de Nozay, Voué, Montsuzain et autres
Lecture du 04 Février 1981
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Sur le rapport de la 5ème Sous-Section
Vu la requête sommaire, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 11 octobre 1978 et le mémoire complémentaire, enregistré le 2 mars 1979, présentés pour les communes de Nozay, Voué, Montsuzain, Saint-Rémy-sous-Barbuise, Saint-Etienne-sous-Barbuise, la Chambre départementale d'agriculture de l'Aube et la Fédération départementale des Syndicats d'exploitants agricoles de l'Aube et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 9 août 1978 par lequel le Premier ministre a déclaré d'utilité publique et urgente la construction de l'autoroute A 26 entre Châlons-sur-Marne (Marne) et Troyes (Aube);
Vu l'ordonnance du 23 octobre 1958;
Vu le décret n° 59-700 du 6 juin 1959;
Vu le décret n° 76-432 du 14 mai 1976;
Vu la loi n° 76 629 du 10 juillet 1976, notamment son article 2;
Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;
Vu la loi du 30 décembre 1977.
Sur le moyen relatif à la composition du dossier d'enquête:
Considérant qu'aux termes de l'article premier 1er alinéa du décret n° 59 700 du 6 juin 1959, dans sa rédaction résultant du décret n° 76-432 du 14 mars 1976, relatif à la procédure préalable à la déclaration d'utilité publique "l'exploitant adresse au préfet, pour être soumis à l'enquête, un dossier qui comprend obligatoirement: "I- lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages: 1°) une notice explicative indiquant notamment l'objet de l'opération; 2°) le plan de situation, 3°) le plan général des travaux; 4°) les caractéristiques principales des ouvrages les plus importants; 5°) l'appréciation sommaire des dépenses"; qu'aux termes du 2ème alinéa du même article, la notice explicative indique les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de l'insertion dans l'environnement, parmi les partis envisagés, le projet soumis à enquête a été retenu";
Considérant que, les dispositions précitées n'ont pas pour objet d'obliger l'autorité expropriante à inclure dans le dossier d'enquête une étude relative aux conditions d'insertion du projet dans l'environnement; qu'en mentionnant dans son chapitre 1-7 les différents partis envisagés, dont le "contournement de Pouan les Vallées" dans le département de l'Aube, et en indiquant les raisons pour lesquelles ils n'avaient pas été choisis, la notice explicative du dossier d'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique et urgente de travaux de construction de la section Châlons sur Marne-Troyes de l'autoroute Calais - Reims - Dijon, mettait suffisamment à même les intéressés d'apprécier les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de l'insertion du projet dans l'environnement, le tracé soumis à l'enquête avait été retenu; que la notice explicative comportait les renseignements suffisants permettant d'apprécier l'utilité de l'opération projetée;
Considérant que les dispositions de l'article 2 alinéa 2 de la loi n° 76 629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature n'ont pu recevoir application que dans les conditions fixées par le décret en Conseil d'Etat prévu par le 3ème et le 4ème alinéa du même article; que le décret n° 77 1141 du 12 octobre 1977, pris pour l'application de l'article 2 de la loi du 10 juillet 1976, qui n'est entré en vigueur que le 1er janvier 1978, déclare à son article 19, que pour les procédures en cours à cette date, et dans le cas où la procédure comporte une enquête publique, ses dispositions ne sont applicables que si la décisions prescrivant l'enquête n'a pas encore été publiée; que l'arrêté préfectoral prescrivant l'enquête à la déclaration d'utilité publique et urgente de la section Châlons sur Marne-Troyes a été publié avant le 1er janvier 1978; que, dès lors, les requérantes ne sont pas fondées, pour demander l'annulation du décret attaqué, à se prévaloir de l'inobservation des dispositions ci-dessus mentionnées de la loi du 10 juillet 1976 relatives à l'insertion d'une étude d'impact dans le dossier soumis à enquête publique;
Considérant qu'au stade de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique, les documents soumis à l'enquête n'ont pas pour objet de décrire en détail les ouvrages envisagés, mais de permettre aux intéressés de connaître la nature et la localisation des travaux prévus, ainsi que les caractéristiques générales des ouvrages les plus importants; que celles-ci, au nombre desquelles figuraient l'emplacement des principaux échangeurs et raccordeurs, étaient décrites avec une précision suffisante dans la notice explicative; que la nature et la localisation des travaux prévus ressortaient suffisamment du plan général au 1/100 000ème; qu'à ce stade de la procédure, l'autorité expropriante n'avait pas à préciser le détail des éléments accessoires à l'ouvrage autoroutier;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'appréciation des dépenses, ait été entachée d'une erreur de nature à vicier la procédure; que le moyen tiré de l'absence dans l'appréciation des dépenses du coût des opérations de remembrement manque en fait; xxxxx qu'aucune disposition n'impose que le dossier fasse mention à propos de l'appréciation sommaire des dépenses du coût des différents partis envisagés;
Considérant qu'il résulte de ce qu'il précède que la procédure d'enquête publique, dont la régularité ne doit s'apprécier qu'au regard des dispositions du décret du 6 juin 1959 modifié, dès lors que la directive du Premier ministre du 14 mai 1976 n'a pas de caractère règlementaire, n'a méconnu aucune des dispositions de l'article 1er de ce décret;
Sur le moyen tiré de l'absence d'utilité publique;
Considérant que le projet de construction de la section Châlons-sur-Marne - Troyes de l'autoroute Calais-Reims - Dijon a pour objet de favoriser le développement des centres d'intérêt régional de la région Champagne-Ardennes et de mettre celle-ci en communication avec les régimes limitrophes, que ne permet pas d'obtenir, dans des conditions équivalentes, l'aménagement du réseau routier existant, compte tenu notamment des prévisions de croissance du trafic dans cette région; que ce projet, qui s'intègre dans un plan d'aménagement de liaisons xxxxx nationales et internationales, revêt un caractère d'utilité publique; que les atteintes portées à l'autonomie de certaines exploitations agricoles ne peuvent être regardées comme excessives par rapport à l'intérêt que présente l'opération; que ces inconvénients ne sont pas de nature à retirer à celle-ci son caractère d'utilité publique;
Considérant enfin que si les requérants soutiennent qu'un autre tracé aurait présenté des inconvénients moindres par rapport à celui retenu par le décret attaqué, il n'appartient pas au Conseil d'Etat statuant au contentieux, d'apprécier l'opportunité de l'implantation ainsi choisie.
DECIDE
Article 1er - La requête des communes de Nozay, Voué, Mont-Suzain, Saint-Remy sous-Barbuise et Saint-Etienne-sous-Barbuise, de la Chambre d'agriculture de l'Aube et de la Fédération départementale du Syndicat d'exploitants de l'Aube est rejetée.